Billet invité.
LE TOURNANT OÙ L’ON NOUS ATTEND DÉJÀ
Les anciens qui savaient pratiquer le Tao
n’allaient pas éclairer le peuple ;
mais ils voulaient le laisser dans l’ignorance.
Si le peuple est difficile à gouverner
c’est parce que ses connaissances
se sont accrues.Gouverner un pays au moyen de la connaissance,
voilà sa ruine.
Gouverner un pays sans l’aide la connaissance,
voilà son bonheurLao-Tseu, LXV
Ed. la Pléiade, p.68
En France, à cette nation à vocation universelle, le parti socialiste n’offre pas d’alternative. Il est trop tard pour la renaissance d’une gauche capable de mener la barque et passer la barre de la double crise de l’économie et de l’environnement. La gauche sera donc suiveuse. Si la traversée des crises vient à produire de l’émancipation et de la justice, les socialistes n’y seront pour pas grand-chose ! Pendant ce temps, la croissance verte et solidaire « enfonce » les décroissants et les altermondialistes sur leur propre terrain : IBM sponsorise la diffusion des « Talks de John Gerzema: The post-crisis consumer » afin de nous vanter la sobriété éthique du consumériste d’après crise. Il ne nous resterait donc que l’extrême gauche pour « prendre l’argent des riches » et régler les problèmes.
Ce renversement quasi instantané de l’idéologie mérite un peu d’attention, la droite mène le train, cette guerre-ci est déjà perdue, préparons la suivante. Ce spectaculaire (au sens de Guy Debord) retournement de veste fait oublier que nous sommes aujourd’hui devant l’alternative changer ou périr parce que la pensée écologique a été piétinée pendant plus d’un demi-siècle autant par le capital que par les sociaux-démocrates. Nous voici pourtant, presque cominatoirement mis dans l’obligation de changer du tout au tout, et il n’est plus question de réfléchir sur le processus historique ayant conduit à cette bifurcation. La nécessité de ce « scénario d’oubli » est aisée à comprendre, mais il faut d’abord réexaminer la bifurcation précédente. Il restera – mais c’est un autre sujet – à expliquer l’aisance avec laquelle le capitalisme phagocyte les 6 R de la décroissance !
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S’il eut été maintenu jusqu’à aujourd’hui, le niveau de compréhension induit auprès du public par L’argent de Zola eut suffi à rendre impossible l’actuelle hégémonie mortifère du capitalisme financier. Au siècle dernier, le capitalisme entreprit de réduire nos capacités à comprendre le fonctionnement social et ainsi d’affaiblir nos possibilités d’agir sur lui. Pour la tranquillité des dominants, la perception des rapports de forces devait être noyée par la construction d’une représentation faussée des rapports sociaux, en s’appuyant d’abord sur une théorie erronée du marché, elle-même accompagnée de la généralisation de simulacres marchands. Sur le plan politique, à l’Est, le spectacle de « l’avenir radieux » fut centralisé par les bureaucraties totalitaires du « capitalisme » d’État. À l’Ouest, le spectacle diffus des médias amenait les salariés à jouer le jeu consumériste des capitalistes libéraux. La marchandise étendit son règne partout sur chaque lieu et à chaque seconde de la vie : elle médiatise aujourd’hui l’ensemble des rapports sociaux. Ajoutons que la mise en place de la société de consommation fut épaulée par la social-démocratie et portée par un groupe social tirant les avantages de son rôle de courroie de transmission. La médiatisation eut en outre l’avantage de discréditer la raison en substituant la logique affective de l’échange d’image au raisonnement discursif. La fusion aujourd’hui achevée des spectaculaires diffus et centralisés dans le spectaculaire intégré (CNN, Lagardère, Berlusconi …), prépare à la « consommation frugale » aussi bien qu’à celle de Coca-Cola. Nos cerveaux englués, tout comme ceux des économistes, des politiques et même celui des journalistes du 20H, gobent n’importe quoi, ne comprennent rien au fonctionnement de l’argent, jouent au tir à pipe sur les parachutes dorés et se laissent proprement arnaquer par les agissements foireux d’une bande de banquiers véreux !
Cette alliance réformiste masquait le développement de l’économie comme mode de domination, et non comme mode de satisfaction des besoins « élémentaires », condition de l’émancipation des individus pour correspondre au projet des lumières. Ainsi, parce qu’elle était contraire à « l’épanouissement humain » par le productivisme, l’écologie fut longtemps vilipendée par la gauche au nom de l’emploi et du pouvoir d’achat. Pour les productivistes capitalistes aussi bien que bureaucratiques, la question essentielle est de maintenir l’asservissement des salariés lorsque le développement de la production leur permettrait d’envisager de rendre la satisfaction des besoins indépendante de la logique interne d’accroissement illimitée du « capital ». Cette question est de nouveau terriblement d’actualité ! Le mouvement de la décroissance considère qu’il suffirait de retoucher l’organisation sociale pour atteindre à la satisfaction des besoins sans qu’il soit nécessaire d’en vouloir toujours plus. Triste ironie du moment, ceux qui depuis cinquante ans ont supporté d’être piétinés pour combattre l’hégémonie de la croissance comme fausse conscience de la raison économique se trouvent complètement dépassés par le surgissement d’investisseurs novateurs et activistes d’une croissance verte aux accents solidaires. Aujourd’hui, les sympathiques « bluettes » de la décroissance nous seraient aisément accessibles parce que la réévaluation de nos « véritables » besoins ferait s’évaporer les possibilités d’emprise du capital sur nos vies quotidiennes. En réponse aux adeptes de la simplicité volontaire, les sociaux-démocrates bon teint tentent de dévoiler l’obscurantisme de la pensée décroissante en avançant que celle-ci trahirait les valeurs éternelles de la gauche, à savoir : la science, le progrès … Curieusement la gauche n’a pourtant rien à proposer sinon la possibilité d’une croissance soutenable étayée cette fois par de vrais choix rationnels. Le plus drôle dans cette histoire est que le capitalisme s’est déjà mis au vert et que votre banquier de proximité fait déjà dans la relocalisation !
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L’histoire avance, gonflée cette fois d’une crue démographique sans précédent alors que notre morale impose de ne pas laisser dans la misère deux tiers de nos semblables. Les néo-croissancistes façon Claude Allègre envisagent de généraliser notre niveau de vie à la planète, le foisonnement de l’inventivité scientifique et technique résoudra tout, à l’inverse, les tenants de la sobriété façon Yann Arthus Bertrand visent à l’adaptation éthique des modes de vie occidentaux aux limitations planétaires. La « vérité de leur opposition » est qu’ils tendent symétriquement à mettre en place les conditions d’une éventuelle survie de la bourgeoisie à l’occidentale.
La bourgeoisie à l’occidentale n’est pas nécessairement un mal (n’en déplaise au Tao : la raison et les lumières pour tous, c’est bien !). Seule une très petite minorité de la classe possédante occidentale voudra s’expatrier en Chine, en Inde pour y « suivre l’argent » et se faire homme lige de nouveaux tycoon ou de nouvelles féodalités. Les autres voudront conserver, sur place, leurs propriétés et leur statut dans la hiérarchie. Pour y parvenir, la bourgeoisie sédentaire devra affronter la masse toujours grandissante des sans emploi. Afin de calmer la foule des désoccupés, des « sans projet », la bourgeoisie sédentaire devra inventer de nouvelles formes de redistribution dont elle gardera le contrôle. Le jeu n’est pas perdu, la classe bourgeoise peut faire alliance avec la redoutable bureaucratie de l’aide sociale rodée depuis quarante ans au jeu qui consiste « à gagner sa vie » à faire semblant de s’occuper du malheur des autres. De cela, personne ne parle, mais tout le monde s’inquiète de tirer son épingle hors du jeu qui s’annonce : serrons-nous tous la ceinture, chacun au cran qui convient à son rang !
Tandis que chômeurs et chômeuses se font piéger dans les sociétés de repassage et les trappes du RSA, tandis que les Claude Allègre et Arthus Bertrand offrent le spectacle d’une opposition d’opérette sur l’idée du monde à venir, les capitaux jouent la vraie pièce. Le capitalisme (re)verdit avec l’inventivité du chacun-pour-soi et sans véritable plan d’ensemble. Toutefois, cette effervescence produit la réserve des solutions dans laquelle nous pourrons sélectionner ce qui marchera dans telle ou telle situation. Ainsi, devant le risque de crever de chaud, ou de disparaître avec le dernier ballet des seigneurs de guerre néo-féodaux, la classe possédante a la vocation de se transformer en la seule classe révolutionnaire disponible : c’est elle qui convertira les mentalités prédatrices vers plus de solidarité et de coopération. Mais pourra-t-elle assumer la mauvaise conscience d’une restauration et de la généralisation d’une néo-domesticité salariée destinée à calmer les colères qu’engendre la misère ? Il n’y aura plus et pour longtemps du travail émancipateur pour tous ! À part d’échapper à la gestion bureaucratique de la fin du monde par prédation et inversion violente de la couleur des cases sur l’échiquier, que pouvons-nous espérer ? Au terme d’un pénible accouchement, la classe inédite de ceux qui ont encore quelque chose à léguer, propriété, savoir ou décence est de ce fait en position de donner. En déclarant nécessaire l’alliance boroméenne entre liberté, égalité et fraternité, elle pourrait se « sur-vivre » en se transformant et transmettre ainsi notre héritage culturel par un projet non prédateur. Une constitution pour l’économie aiderait à préparer l’issue heureuse de cet accouchement « in extremis ».
67 réponses à “Le tournant où l’on nous attend déjà, par Jean-Luce Morlie”
Les hommes du soi-disant pouvoir l’obtiennent du souverain , ils ne l’ont pas. Le « souverain » est le peuple . Les constitutions politiques organisent les modes et circuits de délégations périodiques du pouvoir au profit de ceux qui le sollicitent pour le légitimer.
De la même façon , le » capitaliste » n’a pas de capital , il l’emprunte au « souverain » . La constitution économique doit organiser les modes et circuits de « prêts » provenant du « souverain ».
Le paradigme à renverser se joue dans cette équivalence à développer puisque c’est de ce principe que sont nées les constitutions « politiques ». Une constitution économique doit partir de ce renversement simple : de qui procède le capital ?
Paul Jorion l’articulait clairement ces derniers temps.
(Agora)
Altruisme:
«Le XX° siècle nous l’a rappelé avec toute la violence possible: l’altérité ne saurait être une donnée immédiate de notre conscience éthico-politique. À l’heure de l’interculturalité, […], il est grand temps de construire une nouvelle façon de penser l’altérité. Deux équipes interdisciplinaires de chercheurs, l’une française et l’autre polonaise, ont essayé de traiter de cette délicate question, chacun selon sa discipline.» Elles ont publié un livre sous la direction de Joanna Nowicki et Czeslaw Porebski, L’Invention de l’Autre, Paris, Sandre, 2008. Cherchant à fonder le concept d’altérité, Barbara Skarga écrit: «Comme l’a dit, il y a longtemps, Leibniz, le moi est une monade qui s’ouvre et se referme. La monade a un caractère dialectique, elle nie son enfermement et l’abandonne pour diriger son regard vers les autres, mais, une fois parmi les autres, elle nie le sens de son être dans le monde qui lui est étranger et désire revenir à elle-même. Tant le premier que le second pas peuvent être difficiles. L’un comme l’autre exigent des décisions souvent malaisées. Mais il est possible aussi que ces pas soient indépendants des décisions individuelles, puisque ce sont les circonstances, les événements, l’histoire qui, parfois, condamnent la monade à l’isolement ou à l’être entre les autres» («Fondements», op. cit., p. 16)
N’est-il pas venu à l’esprit de l’auteur de ces lignes:
« La bourgeoisie à l’occidentale n’est pas nécessairement un mal (n’en déplaise au Tao : la raison et les lumières pour tous, c’est bien!). »
Que si bourgeoisie il y avait, sa classe antagoniste lui coexiste? et le système économique capitaliste sous-jacent aussi.
La lumière ( ou les, j’aimerai comprendre ce pluriel) venue de l’Oxydent semble crépusculaire. A la vitesse de décomposition de l’hégémonie étasuno-européenne, Il ne sera plus loisible à l’intelligence oxydentale de faire émerger ses paradigmes pour régenter le monde qui naît de ses décombres.
BHO va renoncer à envoyer les 40 000 nouveaux soldats en Afghanistan, coût annuel d’un soldat supplémentaire : 500 000 dollars, et le Japon prie les USA de ne plus le considérer comme une simple base navale de contrôle du Pacifique et les prie d’évacuer l’île d’Okinawa.
De plus en plus de transactions commerciales BRIC-Turquie- Iran se feront sans passer par le dollar.
Le séisme est financier certes, et il recristallise la géopolitique selon de nouvelles lignes de forces.
Pour l’heure, nous avons des généraux syriens empereurs à Rome, pas encore Augustin fils de Monique de Taghaste, pas encore la Cité de Dieu…
Le Mouvement politique des objecteurs de croissance a été fondé le 18 octobre 2009 à Bruxelles.
Manifeste pour l’objection de croissance
NB: Comme son nom l’indique, le Mouvement politique des objecteurs de croissance est un mouvement, pas un parti. Les partis politiques focalisent leur énergie et leurs activités sur le combat électoral. Notre Mouvement envisage la politique au sens premier du terme : il s’agit d’initier et de bâtir collectivement un projet de société qui nous convienne et qui soit viable, et de contribuer activement à le mettre en œuvre. Pour ce faire, notre mouvement développe des actions diverses (information à venir). La participation au scrutin n’est qu’une modalité d’action parmi d’autres, qui peut être envisagée avec prudence et éventuellement empruntée si certaines conditions déterminées par l’Assemblée générale du mouvement sont rencontrée et si l’assemblée générale le décide.
Veuillez lire mon post-scriptum dans le message adressé ci-dessous à JLM. Rien qu’à cause du terme « décroissance » employé mal à propos (on pourrait avantageusement parler de « croissance qualitative »), le mouvement dont vous faites état se tire une balle dans le pied d’emblée. Commencez par vous entretenir avec des ouvriers à la sortie des quelques usines qui vous restent en Belgique, et vous m’en direz des nouvelles!
La certitude est le panache de l’idiotie!
Exemple: le marché libre et non faussé.
L’intelligence est doute!
Exemple: le marché libre et non faussé!?
Libre reste à le démontrer, non faussé… Heu! comment dire, tout simplement faux.
Autrement dit, le problème n’est pas « le marché libre et non faussé », mais l’esprit même de l’intelligence humaine qui à confondu la lois de la sélection naturelle avec la lois de je possède.
Et donc d’un esprit, je pense donc je suis à je possède donc je suis.
Voili, voila, voilou. ;°(
Bien à vous
@ Jean-Luce Morlie
Si j’ai bien compris, la bourgeoisie serait au moins potentiellement la classe « révolutionnaire » d’aujourd’hui… parce qu’il n’y en a plus d’autre suffisamment « consciente de soi » : le prolétariat s’est dissous dans une sorte de bouillon d’inculture d’individus aliénés, intoxiqués et bernés, nourris d’images plus que de pain – comme si son avilissement n’était pas déjà nourri d’images et de fantasmes dans le passé ! Rappelez-vous les superstitions d’antan –, les bureaucrates qui le dirigeaient jadis ont trahi en le plongeant dans des bains de sang, et ainsi de suite. Comme les appareils sociaux-démocrates sont tout aussi dépréciés, dites-vous, du fait de leur complicité productiviste avec les capitalistes rapaces, alors qu’ils auraient dû percevoir au moment opportun l’inévitabilité du changement climatique et de la décroissance, il ne nous reste effectivement plus rien à espérer, sinon en un très hypothétique rétablissement pragmatique de la bourgeoisie dans une sorte de sagesse induite par l’évidence inexorable du fait environnemental. C’est donc d’elle, grâce à ce que je suis bien forcé d’appeler l’onction d’un quelconque Saint Esprit et à l’aide d’entrepreneurs verdissants ambitieux, que viendrait à nouveau la lumière pouvant nous sauver du cataclysme qui s’annonce!
Votre constat est encombré de présupposés qui me semblent limiter singulièrement sa portée : vous identifiez l’appareil des partis sociaux-démocrates à leur base au moment précis où celle-ci leur fait de plus en plus cruellement défaut, allant exprimer dans les urnes son désaccord avec ses soi-disant leaders et son profond désarroi, en France comme en Allemagne et dans quelques autres pays ; vous posez comme alternatives Yann Arthus Bertrand et Claude Allègre comme si tous deux étaient les porte-parole de visions du monde contradictoires alors qu’ils ne sont représentatifs ni de l’environnementalisme ni de la bourgeoisie productiviste (à tout prendre, je soupçonne fort le premier d’être plus proche des hommes prédateurs que le second : qui a financé ses « œuvres » ?).
S’il est PEUT-ÊTRE vrai que l’avenir réservé à nos enfants ne sera ni de droite ni de gauche, le salut ne pourra en tout cas venir que d’individus raisonnables en rupture de ban avec les pratiques de leur classe ou de leur pays d’origine. Ce sont les leaders de demain, s’ils ont la chance de pouvoir s’exprimer (ce qui n’est pas le cas partout dans le monde). Dans ce contexte, fasse le ciel que les politiques d’éducation démocratiques menées jusqu’ici parmi nous aient les résultats escomptés ! Je parie pour ma part que les Lumières ne sont pas éteintes. L’alternative serait la dictature de quelques-uns, avec les conséquences sanglantes que l’ont peut imaginer au regard de ce que nous avons déjà connu – au siècle dernier, notamment.
P.S. Et qu’on cesse de parler de décroissance ! Allez sur une tribune exprimer votre point de vue devant des ouvriers au chômage et des agriculteurs chassés de leur terre, et vous verrez comment ils vous accueillent. Un commentateur a parlé d’altercroissance. Ce me paraît être le terme qui convient, à condition qu’on lui donne la substance qu’il mérite, et qui doit être savamment explicitée.
Au sujet de la « révolution », une remarque que j’ai déjà faite, mais que je peux développer un peu plus:
Un mathématicien vous expliquera qu’il s’agit d’une transformation dans laquelle le point initial et le point final sont confondus.
Ramené au champs politique, la révolution ne produit que le transfert des privilèges d’une caste vers une autre, mais elle ne les abolit pas. La bourgeoisie, et plus récemment l’oligarchie, ont ainsi succédé à l’aristocratie tandis que la plèbe continuait de se partager les miettes de leur festin.
Évidemment, les maîtres de ce jeu de dupes ont tôt fait d’expliquer que depuis 1789 (pour le cas français), les miettes ont grossi dans des proportions sans précédent… Certes, c’est totalement exact, mais pendant ce temps, le cœur du banquet prenait pour sa part des proportions gargantuesques.
N.B. (sans grand rapport, quoi que…): Avez-vous remarqué que la définition du mot hiérarchie et celle du mot démocratie s’accordent très, mais alors très mal entre elles? Pour être tout à fait exact, elles sont rigoureusement antagonistes. Dès lors, il n’est pas surprenant qu’il y ait un tel fossé entre le monde économique (fondamentalement hiérarchique) et le monde social (d’inspiration démocratique au moins en occident).
Ainsi, cela ne semble choquer personne que dans l’entreprise, Mr A, le chef de Mr B (niveau n + p dans la hiérarchie), ait (quasiment) tout pouvoir sur lui – dans les limites légales, encore que… – , mais que par ailleurs, d’un point de vue politique (au sens premier), ces deux personnes soient réputées rigoureusement égales en droits… L’entreprise serait-elle finalement la principale niche anti-démocratique?
oui, la démocratie s’arrête tout net à la porte des entreprises.
Avec l’industrie de la finance — l’argent –, les titres de propriété qui lui sont associés, le système hiérarchique est un des ressorts fondamentaux du capitalisme.
Cela saute aux yeux quand on analyse froidement la nature du capitalisme mais cette donnée est tellement bien intégrée par tous les esprits que personne ne songe, ou presque à y voir un scandale permanent ! Après tout chacun contribue à la création des richesses, y compris les chômeurs qui lorsqu’ils ne travaillent pas réfléchissent peut-être à l’état d’une société, de l’économie ou font du bénévolat, ou même encore par leur « oisiveté » ne produisent pas d’externalités négatives.
Il serait donc logique que chaque travailleur, et au delà chaque être humain, ait son mot à dire, un pouvoir de décision quant à ce qui est produit, comment on le produit et dans quel but. En économie aussi il faut : un homme, une voix ! Cela changerait des assemblées des actionnaires qui décident du sort des travailleurs et les comptent pour quantité négligeable, ouvrent et ferment les usines, les bureaux au gré des mauvais coups du capitalisme-casino.