Billet invité.
LE DROIT DE PROPRIETE EST-IL ENCORE LE MEME POUR TOUT LE MONDE ?
La revue Mc Kinsey, a publié dans son dernier numéro un article intitulé « State capitalism and the crisis » qui trouve normal que les États mettent leurs mains dans les poches des contribuables pour sauver les banques et les entreprises, mais s’inquiète que ces mêmes États pourraient y prendre gout et en profiter perfidement pour effectuer un retour durable dans la gestion des entreprises au lieu de s’éclipser poliment une fois les profits revenus.
Il n’y a rien de bien nouveau ni de surprenant dans cette affirmation pourtant assez obscène qui consiste à utiliser la collectivité pour protéger des intérêts particuliers au nom d’une vision dévoyée et de nature presque délictuelle de l’intérêt collectif, mais, compte tenu de l’ampleur des enjeux, il est sans doute temps de réfléchir un peu aux moyens de mettre fin à cet état d’esprit.
Déposer son bilan est en passe de devenir un mode de gestion comme un autre au point, paraît-il, que l’on commence à en enseigner les subtilités dans les meilleures écoles de gestion. Cette évolution signifie en clair que l’on peut prendre tous les risques que l’on veut sans avoir à en subir les conséquences négatives ; les créateurs de l’entreprise apportent leurs idées, leur temps, et un peu d’argent frais, les managers en lèvent beaucoup plus avec des leviers qui atteignent ou dépassent 100 en promettant la lune, les banquiers prêtent et titrisent la dette, l’entreprise la souscrit, et en cas de difficulté, la dette est épongée par les investisseurs, souvent institutionnels, donc gestionnaires de l’épargne du public. Les seuls qui ont vraiment perdu sont les créateurs, les investisseurs des tours de financement publics et les acheteurs des dettes, car les managers peuvent toujours racheter les actifs à quelques cents du $ avec le soutien de financiers, – parfois les mêmes -, et repartir pour un tour.
Chacun sait désormais que les banquiers ayant été jugés indispensables à la bonne marche du monde par les politiques qui leur ont livré les clés de nos cités, leurs erreurs doivent être réglées au prix fort par la collectivité au nom de l’intérêt général ; on sait moins que celles des entreprises le sont aussi, de fait. Dans un cas comme dans l’autre, les bonus perçus par les cadres dirigeants sont en grande partie à l’origine de cette situation paradoxale. Il les incite en effet à prendre un maximum de risques car ils ne peuvent avoir que des retombées positives. Leur perte maximum possible est ne de pas percevoir de plus values sur leurs stocks options en cas de dépôt bilan. La belle affaire. Quant on perçoit plusieurs dizaines de fois le salaire minimum des manants à titre de salaire et de bonus en espèces, ce n’est certainement pas une incitation à la prudence, ni au respect des intérêts des gens que les hasards de la vie et des diplômes ont placé sous vos ordres.
Il serait peut-être temps de supprimer les procédures de mise en redressement judiciaire de type « chapter 11 », et d’interdire que les mêmes joueurs ne puissent directement ou indirectement racheter les actifs de leur ancienne société dans la procédure de liquidation de type « chapter 7 » qui deviendrait la seule issue possible à un dépôt de bilan. Ce serait une façon un peu rude, mais sans doute salutaire, de signifier aux responsables des banques et des entreprises qu’ils ne sont plus propriétaires de droit divin, mais simples mandataires de propriétaires de droit commun qui peuvent, comme tout le monde, perdre leur propriété. Une telle mesure permettrait ainsi d’ouvrir un débat que très peu de gens abordent. La propriété est, nous dit-on, la pierre angulaire du libéralisme économique. Soit. Mais comment se fait-il alors que les tenants de ce libéralisme n’aient aucun scrupule à puiser dans la poche des contribuables pour remettre à flots et récupérer leur propriété quand celle ci est compromise par leur propre mauvaise gestion ? La logique voudrait que dans ce cas la propriété revienne à ceux qui payent. Il ne s’agit pas de nationalisation rampante, mais simplement de l’application des règles communes à un type particulier de transaction.
Et l’on pourrait profiter de l’ouverture de ce débat sur la propriété pour aborder le problème de la propriété intellectuelle, qui est essentiel dans un monde que tous les experts s’accordent à reconnaître comme devant être de plus en plus celui du savoir. Il semblerait sans doute curieux à un observateur venu d’ailleurs que les sociétés privées aient accès aux résultats de la recherche publique sans contrepartie réelle pour la collectivité ; quand une collectivité publique entretient un groupe de chercheurs, on peut en effet se demander s’il est « équitable » que les résultats de cette recherche soient privatisés au bénéfice de sociétés qui, par vocation, cherchent ensuite à les valoriser au meilleur coût, ce qui implique dans presque tous les cas que les citoyens de la collectivité qui a assuré le risque du financement bénéficient peu ou pas des retombées en terme d’emploi et d’activité économique induite.
Cette privatisation à prix et à conditions d’ami est certainement un des vrais problèmes de la recherche publique. Il est affligeant de voir de brillants chercheurs contester à juste titre, – entre autres au nom de la contestation d’une croissance devenue socialement irresponsable -, la recherche telle qu’on la pratique aujourd’hui sans poser comme préalable que les résultats de la recherche publique devraient être une propriété collective, accessible librement à tous. La question de l’orientation et du contrôle de la recherche serait en grande partie résolue si l’on retenait ce principe simple, qui ne serait jamais qu’une adaptation du droit de la propriété intellectuelle à l’évolution de nos sociétés.
76 réponses à “Le droit à la propriété est-il encore le même pour tout le monde ?, par Jean-Paul Vignal”
@Grimdor
>@ Serge Demoulin
>“Tout a fait d’accord, il y a un manque d’information civique à ce propos.
>Beaucoup, jeunes et moins jeunes n’ont même aucune conscience de l’acte
>illicite du piratage de la musique sur Internet.
Parce que l’information dispensée par les médias est volontairement trompeuse.
On leur dit « copier est interdit »
Sans leur dire « copier VERS autrui est interdit »
Mais copier depuis autrui est autorisé!
Vous pouvez aller dans une médiathèque et enregistrer votre morceau favori!
C’est légal!
Vous pouvez écouter et enregistrer les 10 000 radios accessibles depuis le Web!
Sur les 10 000 vous trouverez bien le morceau qui vous plaira!
Et avec un logiciel performant, vous pouvez enregistrer jusqu’à 100 stations en simultané.
Les films qui vous intéressent passent a la télé, enregistrez les, c’est légal!
Mais si le film n’est pas encore passé a la télé ou diffusé sur un DVD, alors, il est interdit
de le copier. Attendez qu’il soit diffusé.
>En suivant leur logique on verra bientôt des personnes venir squatter
>votre appartement au nom du “droit au logement”
La comparaison n’a pas de sens, si je copie un morceau de musique,
l’ancien détenteur en reste détenteur, il est donc impropre de dire qu’il y a vol.
Il y a vol si le volé n’a plus l’objet volé, mais s’il l’a encore, c’est qu’il n’y a pas eu « vol ».
Maintenant, réfléchir sur l’utilité sociale de protéger les revenus des droits pour quelqu’un comme Johnny Halliday qui pratique l’évasion fiscale en se domiciliant hors de france pour ne pas payer les 2 millions d’euros qui seraient revenus a la collectivité, je comprends que certains ne soient pas d’accord pour payer leur morceau de musique.
Et je leur dit : faites comme johnny, restez dans la légalité et enregistrez le morceau depuis une radio!.
Vous n’aurez rien a payer en toute légalité!
Ce débat, sur l’application des lois du « marché », d’une façon neutre et sans intervention est similaire au débats, un peu hypocrite, concernant les droits de l’homme ou la démocratie.
Les pays riches (pour la plupart occidentaux) utilisent souvent des arguments ou des idéaux commun à l’humanité pour leur propre profit.
Il n’y a qu’à voir le nombre de guerre, sous couvert de renversement de dictature (de la part des USA) ou des « accords » permettant aux agriculteurs des pays « riches » d’être subventionnés grassement par les états ou l’Europe.
C’est souvent la fameuse règle du « Faites ce que je dis, pas ce que je fais » qui prévaut (pour les plus faibles).
@++
@Serge Demoulin : je vous signale que c’est les vendeurs de musique qui l’ont numérisée pour faire encore plus de profits, sans se rendre compte du danger du piratage… si je mets mes livres sur le trottoir nuit et jour sans surveillance pour les vendre et on me les photocopie au lieu de me les acheter, je ne dirai pas que c’est à cause d’un manque civique des passants… vous, vous avez une serrure dans votre appart, j’imagine; les vendeurs de musique n’ont qu’à être plus futés que les pirates, personne les empêche d’en inventer une inviolable… sans parler du problème moral de toute cette histoire, si bien résumé par Jacques Betaret… en Espagne on dit: Quien roba a un ladrón, cien años de perdón (qui vole un voleur, cent ans de pardon)
@ innocent
Le champ de ce qui est brevetable (reconnu comme tel) s’est considérablement étendu, vous en seriez surpris !
@Serge Dumoulin & Grimdor
L’interdiction de copie des oeuvres artistiques numérisées n’a de sens que si in fine (par une meilleure garantie de rétribution pour l’artiste) elle induit une production artistique plus riche.
Or ça ne me semble pas aussi évident que cela. Est-ce que la meilleure musique et les meilleurs films sont ceux qui rapportent le plus d’argent? Le problème vient bien plus selon moi que tout cet argent et le « star system » que cela crée (à mille lieues de ce qu’est l’art).
D’ailleurs, la plupart des artistes qui ne gagnent pas beaucoup d’argent sont en général content que leur oeuvre soit copiée: ça les fait connaître.
Les artistes doivent être rémunérés, mais je ne suis pas sûr que la meilleure manière soit via la vente de fichiers numériques à 1€ pièce et dont la coût de production variable est 0€. Avec un tel système, inévitablement, on a des artistes qui gagnent beaucoup trop et d’autres qui gagnent beaucoup trop peu.
Je préférerais quelque chose du genre:
– on alloue un budget « culture » pour l’année en cours (au niveau municipal/régional/national)
– les artistes présentent des projets (y compris les salaires qu’ils veulent)
– une sélection est organisée (un genre de referendum, une personne=une voix et surtout pas un euro=une voix)
– les projets sélectionnés sont subventionnés, réalisés et disponibles « gratuitement » pour tout le monde.
Pourquoi pas?
Ou encore : l’occasion fait le larron…vieux proverbe Terrien – )’_°(
Si ça protège quelque chose, c’est surtout le lard qui se fait sur le dos des…artistes, ou appelez-les comme vous voulez…
Paul tu pourrais récupérer mes posts (satané filtre)?
Pourquoi pensez-vous que beaucoup de personnes se retournent vers les années 60,70,80 pour trouver de la bonne musique?
Aujourd’hui, il n’y a plus que la star system qui compte. Pour le dire clairement 90% de la musique qui passe à la radio c’est de la merde…
Avant, des les années 60, 70 et même parfois 80 les groupes étaient de vrais musiciens. Certains étaient même des génies (Hendrix, Pink Floyd, Yes, Genesis, Led Zep, Deep Purple, …compléter vous-même, question de goût).
Aujourd’hui, on a des studios qui corrigent les fausses notes…pour vous faire acheter de la musique créée par ordinateur…
@ Francisco/Chris
Ce billet d’humeur a été rédigé un peu vite et n’est sans doute pas assez clair. Mais je ne crois pas avoir écrit que les chercheurs ne devaient pas être récompensés quand ils « trouvaient ». Ce n’etait pas le propos. Mon propos etait de montrer que la propriété d’un bien dont la production a été financée par la collectivité, est cédé dans des conditions qui me semblent inéquitables et irrespectueux du droit de la propriété à des intérêts privés. Pour ce qui concerne la rémunération des chercheurs, je regrette que l’argent soit devenu la mesure de toute chose, y compris dans le domaine de la création artistique et intellectuelle, car je crois que cette marchandisation est la raison profonde de la crise actuelle. Mais bon, admettons qu’il le soit au moins à titre provisoire. Il me semble qu’il faut raisonner par analogie ; un ouvrier de l’automobile ne reçoit pas de prime quand il fabrique une voiture qui fonctionne. Il risque simplement de perdre son emploi si elle ne le fait pas. Ayant été moi-même chercheur il y a quelques années, je conçois qu’un chercheur n’est pas un ouvrier manuel, et j’admets qu’il puisse être raisonnablement rémunéré quand il trouve quelque chose jugé très utile par ses pairs et ses contemporains, – bien qu’il me semble que ce soit une incitation dangereuse à breveter, et donc à privatiser et à marchandiser, tout et n’importe quoi pour le plus grand plaisir des avocats que vous ne paraissez pourtant pas aimer-, et ne perde pas son emploi quand il ne trouve rien. Mais je crois qu’il serait anormal qu’il soit propriétaire des concepts qu’il est payé pour trouver, et, dans le cas de la recherche publique, je pense que la collectivité devrait en rester propriétaire et pouvoir en donner la licence d’exploitation à ceux de ces membres qui souhaitent l’exploiter. Linux est un bel exemple de propriété collective et de libre accès qui ne détériore ni la qualité, ni l’évolution, ni même l’exploitation économique et commerciale d’une bonne idée.
JP Vignal
@tous
Merci a tous pour vos réactions à cet article rédigé trop vite à chaud. Ce qui me semble important, c’est que le libéralisme officiel, celui des multinationales, de l’OMC et des divers G ne respecte plus deux de ses plus importants fondements :
– le marché n’en est plus un que de nom ; il n’est ni transparent, ni fluide, et ses prix ne sont que vaguement déterminés par les variations de l’offre et de la demande. De plus, le libre échange n’est qu’un outil de politique étrangère qui sert à justifier que l’on peut vendre tout ce que l’on veut à qui l’on veut et où l’on veut pour servir ses intérêts collectifs ou privés, qui s’efface bien vite derrière un protectionnisme plus ou moins sauvage dès qu’il menace ces intérêts, comme on peut le voir en ce moment avec le « buy American » du Congrès américain
– le droit de propriété ne s’applique pratiquement plus à la collectivité en tant que telle, dont les membres doivent payer deux fois l’usage de la plupart des outils et services autrefois collectifs et aujourd’hui de plus en plus privatisés : une fois pour porter le risque de construction de l’outil, une seconde fois, au cout complet, pourquoi se gêner, pour l’utiliser. En France, les autoroutes fournissent un tres bel exemple. Mais nous sommes tous responsables et complices: personne, par exemple, n’a jamais demandé que l’essence achetée sur les voies de circulation à péage soit exemptée de la taxe destinée en principe à financer la construction et l’entretien du réseau routier.….
Pour sortir de la « crise », les contribuables «rachètent » avec leurs impôts présents et futurs les banques et les sociétés déconfites par leur propre avarice, mais les Héraults du libéralisme s’offusquent aux cris de « nationalisation » dès que les gouvernements qui procèdent à ces rachats au nom de la collectivité estiment qu’il serait logique qu’ils donnent le même droit de propriété à la collectivité qu’à une entité privée qui ferait la même opération. Le droit à la propriété est-il encore le même pour tout le monde ?
JP Vignal
@Mathieu
Dans le fond nous sommes d’accord. J’en reviens à mon premier post concernant la propriété intellectuelle. Les diffuseurs d’artistes ont toujours eu soucis du piratage car il n’est pas si contemporain que cela. D’où d’ailleurs les redevances payées lors d’achats d’espaces de stockage. La technologie évoluant sans cesse ces diffuseurs sont voués à disparaître car désormais la musique et les films par exemple tendent à ne plus être diffusés par la matière et donc ne sont plus contrôlable. Ces intermédiaires avaient une réelle utilité auparavant étant de moins en moins justifiée actuellement, mais comment se résigner à laisser passer se profit colossal sur le dos des artistes? Pourtant en dématérialisant il est évident que cela pourrait être avantageux sur de nombreux points tel que l’écologie par exemple. Si la propriété intellectuelle se voit plus libre, elle n’est pas forcément vouée à ne plus exister bien au contraire et il me semble que ce Blog illustre parfaitement une alternative permettant entre autre à Paul Jorion de vivre même si ce n’est que modestement pour le moment.
Une licence globale pourrait être une bonne initiative me semble t il et bien moins radicale. Bon, le fait de trop généraliser entraîne systématiquement des dérives et des incohérences mais cela peut fonctionner. Je crois en la solidarité et au fait que la culture se doive d’être un droit d’état donc financé par l’état c’est à dire nous même. Il faut bien garder en mémoire que sur un cd seulement 1% à 5% sont touchés par l’auteur, le reste c’est du gras des coûts de fabrication et de la T.V.A. Mais bon on en revient toujours aux intermédiaires qui n’ont aucun intérêt à ce que le système se libéralise, et pour cela rien de tel que la bonne vieille pression de l’amende, c’est à dire la dissuasion par la peur.
@Jean paul
Ces deux mises au point reflétent bien une intégrité remarquable,
et ,par les temps qui courent….!!!
On apprécie d’autant plus.
Le débat actuel sur les droits d’auteurs est d’une importance cruciale. Il montre que les instances dirigeantes cherchent à privatiser non la culture, mais les processus qui permettent à celle-ci de se construire, d’émerger, de diffuser.
Le débat qui s’installe autour de la politique des brevets de l’Union Européenne est, à mon avis, d’une nature identique.
La thèse que je défends est que le brevet ne favorise que très rarement, sinon jamais, la création ou l’innovation. Encore moins la juste rétribution des inventeurs. Il favorise par contre la prédation, l’accumulation de capital et constitue une barrière symbolique extraordinairement prégnante qui interdit l’idée même de circulation de la connaissance.
Le brevet moteur de la création ?
Le brevet permettrait grâce aux exclusivités d’usage qu’il garantit, de drainer, au profit de l’inventeur, des royalties considérables. Seul l’espoir de gains importants motiverait alors l’inventeur/créateur. Version revisitée du « point d’argent, point de Suisse » : chaque être humain n’étant qu’un mercenaire en puissance.
L’appât du gain est une composante négligeable de la motivation du chercheur pour les raisons suivantes :
10% des plus grandes entreprises déposent 90% des brevets.
L’ensemble de la recherche dans ces entreprises est effectuée par des salariés chercheurs.
Ces salariés sont, dans 99% des cas, tenus de renoncer contractuellement à la totalité des retombées financières de leurs inventions.
Lors de mes rencontres professionnelles avec de nombreux chercheurs/inventeurs, des centaines peut-être, jamais le sujet de la confiscation des royalties n’est évoqué. Seuls les conditions matérielles de la recherche, le choix des orientations, la nécessaire obtention de bons salaires, la reconnaissance du travail effectué sont parfois abordés.
La dynamique du dépôt de brevets n’étant pas affectée par une politique qui prive l’inventeur salarié d’une partie des royalties dont il est à l’origine, nous pouvons en déduire que la vigueur de la création est indépendante du profit que peut en retirer celui qui est à la source de l’invention.
Le brevet instrument de la prédation du bien commun
Deux exemples qui me viennent immédiatement à l’esprit. Où comment la recherche fondamentale va de façon indiscutable être à l’origine de profits considérables, sans que pour autant ni son rôle ni plus fondamentalement ses budgets ne s’accroissent. Plus essentiel encore le brevet entretien la confusion sur les origines. Comme si l’on prenait la carte pour le territoire.
Yves Meyer, mathématicien vivant et bien vivant, est à l’origine de la théorie des ondelettes. Pas une seule image satellite aujourd’hui qui ne soit redevable de cette invention permettant une compression considérable des données transmises.
Yves Meyer, à ma connaissance, ne roule pas carrosse. Le voudrait-il d’ailleurs que sa production n’est pas brevetable. Par contre les applications directement issues de ses travaux le seront. La communauté devra d’une façon ou d’une autre payer un bien qu’elle a financé.
Alain Aspect, est physicien fondamentaliste vivant et bien vivant. Une partie de son travail est utilisée dans les recherches actuelles sur la transmission sécurisée de l’information et sur le traitement quantique de l’information. Marchés qui se chiffreront en milliards de dollars. Comme pour Yves Meyer, sa production n’est pas brevetable. Les applications issues de ses travaux le seront.
D’autres points doivent être encore abordés pour mieux comprendre le rôle social et économique du brevet : l’objet sur lequel il porte, la politique de divulgation, la forme de sa rédaction, la durée de protection, le rôle des Offices …
Pour ma part, je considère le brevet, dans l’immense majorité des cas, comme un instrument au service d’une idéologie. C’est un des garants symbolique de l’ordre économique en place.
Qui voudrait nous faire croire d’ailleurs qu’en ces périodes de fusions/acquisitions toutes plus génératrices de désordres les unes que les autres, au moment où l’espace public est pillé au profit d’une minorité, que le brevet n’a d’autres fonction que celle qui est communément assignée aux chiens de garde.
J’opine, j’opine ….
Une étude parue dans le The Columbia Science and Technology Law Review a comparé l’efficience (en terme d’innovation) des modèles « tout breveté » , « tout libre », et mixte.
Sur la base d’un jeu de simulation, il est apparu que le modèle qui favorise le plus l’innovation est bien le modèle libre.
http://www.readwriteweb.com/archives/study_says_patents_hinder_innovation.php
@Claude Animo
Je suis assez en face avec votre point de vue sans pour autant connaître les subtilités qui régissent les brevets.
Dans ma carrière de modeste salarié j’ai souvent conçu, développé, mis en oeuvre des solutions originales, pérennes et qui généraient des gains significatifs. Ces solutions ont été parfois portées autre part ou même copiées.
Dans notre communauté on avait coutume de dire qu’il s’agissait d’échanges réciproques qui nous enrichissaient tous & faisaient avancer le chmilbilic. Ses propres idées ou concepts naissent d’ailleurs souvent de l’observation des réalisations d’autres concepteurs. On bossait pour la gloire ou plutôt le plaisir du travail efficace & bien fait.
Ce n’était pas le cas de certains indépendants plus finauds ou rapetouts qui non contents de vendre leurs réalisations demandaient en sus une quotte part sur les gains réalisés.
Conclusion : le salarié fait progresser son entreprise au même titre que les dirigeants.
l y a une différence cardinale entre la propriété intellectuelle et la propriété foncière. Cette différence divise d’ailleurs les libertariens (disons les ultra-libéraux pour faire simple).
Pour les uns l’institution de la propriété (privée, et on ne discute pas de ses modalités) ne se justifie qu’en tant qu’elle constitue un dispositif technique pour régler un problème de distribution des droits sur des biens rares. Vous et Moi ne pouvons pas occuper votre baignoire en même temps (noter que dans une société communiste le problème reste posé…) En revanche là où le problème ne se pose pas l’institution de la propriété n’est pas nécessaire et partant constitue une usurpation: une infinité de personne peut parfaitement écouter le même morceau de musique en boucle en même temps (et même plus elles sont nombreuses, et plus le partage est rapide)! Disons qu’il s’agit là du courant défendu par la branche tuckerienne du mouvement libertarien (au XIXe il ne s’appelait pas comme ça)
Pour les autres, la propriété privée constitue non pas un problème technique mais un droit naturel inaliénable. Partant, la question de savoir si oui ou non la création est exploitable par une infinité de personnes en même temps n’est pas pertinente. Du reste, même dans ce cadre, il vous restera à prouver que du fait que je l’ai acheté je ne puisse pas également librement le mettre en partage (j’en fais ce que je veux je l’ai acheté). Autrement dit il va falloir batailler ferme, même si c’est sans doute faisable, pour imposer (après tout vous ne rendez pas des comptes au maçon quand vous louez l’appartement dont vous êtes propriétaire).
La question est donc, au fond, celle de la justification ultime de la propriété privée. Et partant il s’en faut de beaucoup que le partage de fichiers puisse être considéré comme un vol. C’est peut-être justement l’inverse, le vol! Il ne suffit pas qu’une loi ou une campagne de com. affirme « ceci est du vol » pour que ce soit le cas. A ce compte là l’Assemblée peut bien imposer que « la terre ne tourne pas autour du soleil » ou que « ce qui est bleu est désormais vert ».
Bien sûr, quelle que soit la solution adoptée, ceci n’a rien à voir avec un hypothétique droit à un accès égal à ce que d’aucun appellent pompeusement la « culture »…
Que l’on soit partisan de l’un ou de l’autre modèle on reste dans l’ignorance la plus profonde tant qu’on est « absolument sur de soi » sur des questions aussi épineuses. La seule question au fond est celle de la rémunération des « artistes ». Mais leurs modes de rémunération sont trop différents (ne serait-ce qu’entre le comédien et l’acteur par exemple les différences structurelles sont décisives) pour qu’ils puissent tous être traités de la même façon. Sous cet angle « industrie du divertissement » et « bien culturel » sont des etiquettes fourre-tout dépourvus de pertinence analytique.
« Le droit à la propriété est-il encore le même pour tout le monde ? »
Là j’innove. Je ne lis ni le billet ni les commentaires. Le titre me suffit, faute de se suffire à lui-même. Le droit à la propriété est-il encore le même pour tout le monde ? Deux cas de figure se présentent soit l’on parle de tout le monde dans une société, soit on parle du monde entier, terrien et terrestre à la fois. Et encore, dans chacun des cas définis ci-dessus, deux cas se présentent : un, je me dis que la question est légitime, et deux je me dis que non, à savoir qu’il ne s’agit pas d’un droit mais d’un besoin.
Et de conclure en disant que la question est mal formulée, sans toutefois tenter d’enlever quoi que ce soit à la pertinence de son intention (je ne sais pas si ça ce dit, faisons comme-ci).
@serge demoulin
sauf pour les dollards allez savoir pourquoi?…
Prêter un disque à son voisin… et se retrouver en Sibérie (ah non, au Waziristan…) Dire qu’il m’est arrivé de graver des disques et de les éparpiller ici ou là…
Quelqu’un se souvient de l’article du Canard Enchaîné révélant que la Fnac vendait des contrefaçons violant les droits d’auteurs? C’est autre choses que de partager quelques fichiers numériques…
Sinon je vous conseille l’écoute du fameux (bientôt réédité) « Diminishing Returns » du non moins fameux Dj Shadow… 😉 (qui doit bien se trouver sur un quelconque P2P…) Mais où donc est-il allé cherché ce titre?
@Serge Demoulin
Et bien ça dépend, si l’on prend du Chopin, du Bach, du Mozart, du Vivaldi et j’en passe, ça fait des décennies que ces derniers existent, ils ont eu largement le temps d’être dupliqué et surdupliqué, et ce n’est pas pour autant qu’ils n’ont plus de valeur. Bien au contraire le duplicata permet à ces grandes œuvres de traverser le temps. Tout ça pour dire que la quantité ne garantie pas forcément la valeur mais la qualité si, et c’est en cela qu’ils perdurent dans le temps. Ajoutons à cela que quand on achète du Bach il y a peu de chance que les rémunérations aillent au détenteur initial, auquel cas j’aimerais bien voir l’état de sa tombe (peut être cela revient il à la descendance et encore j’ai quelques doutes).
Pour en revenir à votre parallèle Serge, que je trouve très intéressant, je dirais plutôt qu’il s’agirait de créer de la valeur virtuelle sur un compte bancaire. Et effectivement on voit clairement aujourd’hui ce que cela implique quand le tout n’est pas régulé. Aujourd’hui les billets (les moyens d’échanges physique) se voient piquer la place par la carte bancaire, il en est de même dans la distribution de disques. Il est impossible de faire machine arrière car cela reviendrait à renier le progrès technique, et ce n’est pas en utilisant un système hyper répressif que l’on fera avancer les choses. En effet, de mon point de vue cela revient juste à ne pas accepter certains aspects du progrès car trop néfaste pour les industries du disque. Il existe forcément de nouvelles alternatives et la gratuité ne semble évidemment pas solutionner le problème pour les auteurs.
@Serge Demoulin
Vous dites « ce qui est rare est cher. A partir du moment ou un produit est dupliqué à l’infini et conserve la qualité de l’original et est distribué sans contrôle et sans limite il perd totalement de sa valeur. »
Le problème voyez-vous, c’est que c’est la nature même de l’internet de copier et de dupliquer (en tout cas, pour pas mal de protocoles).
Lorsque vous consultez cette page web, elle est copiée sur votre ordinateur. Si vous consultez un flux vidéo ou audio en streaming, les données sont envoyées vers votre PC, et stockées, même temporairement.
La solution au problème, tel que vous l’envisagez, ne serait-elle pas d’interdire l’Internet ?
@Antoine: « La question est donc, au fond, celle de la justification ultime de la propriété privée. »
Mais non Antoine, n’abandonnez pas, je vous lis avec intérêt même si je ne comprends pas toujours toutes les implications de ce que vous dites.
Je vais être hors sujet et un peu ras des pâquerettes, mais en lisant récemment Nozick, ce qui me fascine c’est qu’au-delà de la justification ultime de la propriété privée, ils (les libertariens, et Nozick en particulier) ont déjà du mal à convaincre de la validité de leur propriété privée. Je veux dire par là que voir tous ces américains parler de propriété privée et de procédure juste pour transmettre ce droit alors même qu’ils usurpent (selon leur propre théorie) le territoire des amérindiens, ça m’empêche de les prendre au sérieux. A vrai dire, toute propriété privée contemporaine et du moins sous nos latitudes naît probablement d’un vol originel (ce qui personnellement ne me gêne pas outre mesure, mais je me moque de la justification métaphysique de la propriété privée, pour moi le droit dérivant d’un rapport de forces).
Je voulais avoir votre avis sur la question et si ma position est déplacée, j’aimerais connaître les arguments qu’on lui oppose (car je suppose qu’on leur a déjà fait cette critique, non?).
Nous sommes face a faux probleme puisque l’acces internet est payant non??? Entrer sur le net n’est pas aussi gratuit que d’entrer dans une librairie. Donc le vrai problème des auteurs c’est la repartition des richesses pas le telechargement me semble t il.
@Serge Demoulin: « A partir du moment ou un produit est dupliqué à l’infini et conserve la qualité de l’original et est distribué sans contrôle et sans limite il perd totalement de sa valeur. »
C’est pas gentil pour la Bible, le Coran et la parole divine en général, ça. 🙂
A Serge Demoulin
Le support perd sans doute de la valeur mais cela n’enlève rien à la valeur de ce qui est dessus, et cela entraîne une réflexion sur la valeur que vous donnez à la chose (le support) et à celle que vous donnez à ce que ce support véhicule.
Il y a de toute évidence un mélange entre la création et la fabrication. La réelle création de richesse est faite par la création. Le fait de fabriquer n’ »ajoute » rien à la richesse et ne fait que la maintenir (ce qui peut déjà être beaucoup (la preuve on ne sait plus aller sur la lune à cet instant)). La valeur de la création est finalement donnée et reproduire une produit n’ajoute rien ni n’enlève à la création. L’affiche de la Joconde ne vaut quasiment rien mais cela n’enlève rien à l’original (pas au sens matériel). On fait croire au plus grand nombre qu’il crée de la richesse quand il fabrique mais il n’en est rien. Il ne fait que maintenir au mieux ! Allez expliquer à monsieur tout le monde qu’il ne créera rien de sa vie ce qui est le cas dans notre immense majorité, et que même ses propres enfants c’est de la reproduction ! Aujourd’hui c’est même pour monsieur tout le monde de la destruction de ressources et de la pollution la seule « création » qu’il fera. Le fait d’être payé est juste du à sa propre justification sociale qu’il fait plus ou moins comme les autres qui eux mêmes trouvent que cela est « socialement admissible et justifié » mais c’est tout !
Pour ce qui est de la propriété intellectuelle, nous avons un nouveau ministre en France qui nous a fait un beau discours sur comment protéger l’écrivain du XIXème siècle (mort celui là)! Aujourd’hui dans l’immense majorité des cas la propriété intellectuelle est simplement accaparée par l’entreprise. L’écrivain était re-payé si on rééditait son livre. L’ingénieur ou le chercheur dans une entreprise sera simplement salarié puis viré mais ne touchera pas ses droits par contre l’entreprise aura le droit de détenir ces droits et cela aujourd’hui c’est ce qui est validé. C’est bien une appropriation des droits intellectuels des uns par les autres ainsi que leur rentes qu’ils produisent ou produiront par les plus riches que l’on est en train de légaliser.
@ moi
quand j ai écrit « j abandonne » c’état parce que j avais essayé 4 ou 5 fois d’écrire ce message, et qu ‘il avait été mdéré à chaque fois (même en changeant le mot que je pensais litigieux).
Nozick est un cas à part. Pour y avoir consacré quelques années de ma vie, n’hésitez pas si vous avez des questions. C’est un auteur difficile et souvent mal compris mais profondément stimulant.
Nozick reconnaît le « principe de compensation », qui doit « corriger » la distribution injuste (non conforme à la « théorie de l’habilitation ») des titres au moment ou nous parlons vous et moi.
Certains, dont Parijs, prétendent que la prise en compte concrète de ce principe, à elle seule, rend inopérante la « théorie de l’habilitation » dans son ensemble. Personnellement, je crois que Parijs confond ici la partie idéale de la théorie avec la partie qui s’occupe des modalités de sa mise en pratique (ici Nozick reprend Rawls). Je crois aussi que Parijs, – comme TOUS les commentateurs non libertariens- n’a pas vu que le problème de Nozick n’est pas la théorie de la justice mais la théorie du gouvernement civil. Et tous les contresens majeurs que j’ai pu observer tiennent en ceci que l’on a systématiquement retenu de Nozick que ce qui à l’intérieur d’elle pouvait être rapporté à l’oeuvre séminale de Rawls. En fait la seule oeuvre séminale pour Nozick c’est celle des libertariens qui l’ont précédé: Tucker et Spooner (juriste anarchiste qui l’est devenu de plus en plus avec l’âge, ce qui est assez rare pur être souligné).
Autrement dit les problèmes que cerne Parijs à ce niveau ne se posent que dans la mesure où on n’a pas déjà accepté la conception nozickienne du « gouvernement ». C’est un peu comme les critiques adressées à la « monnaie fondante », qui reposent sur des considérations/représentations qui seraient pourtant rendues caduques dans le contexte de fonctionnement normal d’une monnaie « fondante ».
Pour ce qui est du problème de l’acquisition originelle (de l’appropriation des ressources naturelles), qui est LE défi de la pensée libertarienne (comme l’a cette fois bien vu Parijs), Nozick, à rebours des autres libertariens (anarcho-capitalistes ou pas), soutient la position de Locke: la « clause provisionnelle ». J’en profite pour ajouter que ceci lui a été beaucoup reproché, et que Nozick à bien des égards est considéré comme un « paria » à l’intérieur du courant anarcho-capitaliste. Pour cette raison -et d’autres- les commentateurs ont fait de Nozick un « néo-lockéen »: c’est une erreur car la raison pour laquelle il soutient la proviso lockéenne est en opposition frontale avec les arguments que Locke donnait lui-même (pour autant que ce dernier soit « transparent » sur la question). En fait il est TOUJOURS en opposition avec Locke.
Pour ce qui est de l’auteur lui-même, je crois qu’il faut retenir deux choses importantes:
1- C est un sale gosse, qui adore apporter des arguments quasi décisifs en faveur d’opinions que les gens détestent, ce qui lui a valu une certaine forme d’exclusion sociale. Après la publication d Etat, Anarchie et Utopie (il avait 25 ans je crois), qui est en fait un recueil de 3 textes séparés et juxtaposés, écrits dans des contextes différents, il connut une certaine forme d’exclusion sociale. Aucun de ses amis « bien pensants » ne lui adressant plus la parole. C’était un type courageux.
2- Il emprunte tout à ses 2 maitres (comme il le reconnait lui-même dans Etat, Anarchie et Utopie), Tucker et Spooner, dont il réussit une synthèse assez extraordinaire, synthèse qui en fait un penseur de premier ordre qu’il est injuste de confiner à l’intérieur de ce courant de pensée libertarien. Il invente tout simplement un nouveau type d’organisation politique qui prétend concurrencer la démocratie, nécessairement adossée à quelque chose qui ressemble à un Etat-Nation, comme meilleur type de gouvernement.
Etat Anarchie et Utopie est aussi à dessein, mais en creux, la critique la plus dure du courant libertarien (au delà de ses critiques de Locke, de Rand, de H. Georges, et de Hayek ). L’exposé du livre n’est rien d’autre que l’exposition des problèmes qui se posent dès lors qu’on accepte les prémisses libertariennes. Et donc des efforts et des doutes de Nozick quant à la possibilité de les résoudre (et de son enthousiasme, parfois, quand il pense y parvenir).
La plupart des auteurs font une « photographie », un « instantané » quand ils écrivent un livre. Ils arrêtent le défilement du film à un moment « t », de manière à ce que l’ensemble ne puisse être pris en vue que de la façon la plus avantageuse. Nozick ne dissimule pas ses doutes et n’arrête pas le film.
Jusqu’ou peut-on aller si l’on prend au sérieux le consentement comme seule source légitime d’obligation légale? Comment fixer, à partir du primat du consentement, ce sur quoi les individus sont ou ne sont pas abilité à donner leur consentement, et qui dessinera en creux la forme de la seule organisation politique légitime?
Quel tissu de normes peut-on justifier et concrètement mettre en application à partir de ça? Nozick prouve magistralement par exemple, qu’un libertarien cohérent avec lui-même, est forcé de distinguer le régime des peines de celui des droits procéduraux de la défense, par exemple. Et que si on peut déduire de cette prémisse quelque chose d’acceptable dans le second cas, on ne peut rien en tirer du tout dans le premier. De là l’idée que dans un « Etat minimal », certaines dispositions des codes sont « au choix » alors que d’autres sont non-négociables. Pour résumer, la prise au sérieux de cette prémisse « simple » a pour conséquence une construction politique d’un genre nouveau, extrêmement complexe.
Nozick est un challenge. C’est d’un cours donné conjointement avec Nozick sur la moralité du capitalisme je crois qu’est née la thèse de Walzer: il fallait rien de moins que la théorie de l’égalité complexe pour tenir le pavé à Etat, Anarchie et Utopie (j espère que je ne dis pas une grosse bêtise faudrait que je vérifie ça). On ne peut pas lister les aperçus géniaux et/ou enthousiasmant qu’il a donné sur telle ou telle question particulière. Le concept de « contrainte connexe » par exemple me semble doté de propriétés assez remarquables et concrètement exploitables. En fait le problème est qu’il est systématiquement caricaturé, pour des raisons idéologiques. C’est le « paria » de la critique bien pensante (il faut dire que la présentation qu’en donnent ceux qui le défendent mérite souvent ce traitement).
Paul , ca ne marche toujours pas…