La dimensionnalité de la monnaie (Introduction)

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

J’ai connu l’« apologue de la Dame de Condé » à partir d’un commentaire de La monnaie, c’est de la sueur (et du soleil) condensés, posté par A-J Holbecq le 16 juin 2008. J’ignore où lui-même l’a trouvé (il nous le précisera sans doute). Je le reprends car j’y vois une excellente introduction à un nouvel éclairage qu’il me semble essentiel d’introduire quand il s’agit de la monnaie : celle qu’essaie de capturer maladroitement la notion d’agrégat monétaire M1, M2, M3. Je commence donc par rappeler cet apologue en recopiant ce qu’A-J Holbecq nous en dit, y compris son commentaire quant à la morale de l’histoire.

Nous sommes à Condé-sur-Gartempe. Son hôtel de la Gare est réputé pour ses ortolans et sa discrétion…! Un vendredi après-midi débarque une jeune femme, d’apparence convenable, bien qu’un peu trop fardée. Elle réserve une chambre pour la nuit et, comme elle n’a pas de bagage, elle laisse en acompte un billet de 100 euros, tout neuf. Puis elle s’en va visiter la vieille ville. Le pâtissier qui a vu la scène dit au patron : « Ça fait six semaines que vous me devez 100 euros pour la pièce montée que j’ai livrée à l’occasion de la communion de votre fille. » Le patron lui donne le billet de bonne grâce. Comme cette scène a été vue par d’autres, elle se reproduit cinq nouvelles fois, car le pâtissier devait aussi 100 euros au minotier… qui en devait autant au garagiste… lui-même débiteur de cette somme au boucher… qui avait à régler 100 euros au représentant de la maison Erlida… lequel devait à son tour acquitter sa chambre à l’hôtel de la Gare pour 100 euros. Il redonne donc le billet au patron de l’hôtel. Notre Dame revient de promenade. Elle annonce, qu’ayant fait une rencontre, elle annule sa réservation. Ce qui arrange bien l’hôtelier qui, entre temps, a eu une demande d’un de ses vieux clients. L’hôtelier lui rend donc son billet qu’elle brûle aussitôt. « Il était faux », dit-elle en souriant.

Moralité de cette histoire :

– Le PIB du village a augmenté puisque les commerçants, ayant été payés, ont pu inclure leurs ventes dans leur comptabilité…

– Ce faux billet a été capable de catalyser autant d’échanges parce qu’un billet est de la monnaie fiduciaire (du latin fiducia : confiance). C’est exclusivement une « valeur de confiance » entre les membres d’une communauté. Dans un autre pays il n’aurait pas été accepté. Un billet faux perd « sa valeur » seulement au moment où il se révèle faux et n’est plus accepté par celui qui le reçoit. C’est celui qui le détient en dernier qui assume la perte. Dans cette histoire il n’y a pas eu de perte sauf pour la Dame de Condé qui savait de toute façon qu’il était faux.

– La Dame de Condé, en réservant sa chambre, a accru de 100 euros la masse monétaire du village, ce qui a permis à six personnes d’éteindre réciproquement leur dette pour un montant total de 600 euros. La « qualité » de la monnaie utilisée, bonne ou mauvaise, est indifférente, mais la quantité de monnaie en circulation dans une zone est importante.

Dans son commentaire, A-J Holbecq écrit à juste titre que « La « qualité » de la monnaie utilisée, bonne ou mauvaise, est indifférente » à la morale de l’histoire, ce qui est vrai et fait aussi qu’on se demande pourquoi celui qui l’a inventée a tenu à ajouter ce détail sans réelle pertinence. Il a dû se dire, je suppose, que la bizarrerie de l’effacement en moins de temps qu’il ne faut pour le dire d’un montant si élevé de dettes au sein d’une petite communauté à l’aide d’un seul billet de 100 €, apparaîtrait encore plus étonnant si ce billet s’avérait a posteriori avoir été faux et donc n’ayant en réalité rien valu du tout. Il y a là un raccourci certainement excusable mais inacceptable : un faux billet cesse de valoir quoi que ce soit aussitôt qu’il a été reconnu comme tel, ce qui interrompt sa circulation, mais tant que sa « dénonciation » n’a pas eu lieu, rien ne le distingue d’un vrai billet et il lui est strictement équivalent. Quand la Dame de Condé révèle que le billet de 100 € était contrefait et le brûle pour convaincre un public sans doute encore incrédule qu’elle ne ment pas, l’affaire est en fait déjà réglée : il lui a permis de réserver une chambre d’hôtel pour se dédire ensuite – usage on ne peut plus utile d’un billet de banque ! On pourrait alors s’interroger : pourquoi n’a-t-elle pas continué à l’investir dans des activités encore plus profitables ?

Ce qui intrigue dans l’histoire, ce n’est donc pas qu’une petite communauté ait pu prendre pour vrai un billet qui était faux, ce qui est banal et ne permet de tirer aucune leçon, mais c’est qu’un unique billet (vrai ou faux) ait pu avoir un tel effet : transformer un village criblé de dettes en un autre libéré de toutes obligations d’un citoyen envers un autre.

Essayons d’analyser l’apologue. Puisqu’il existe un hôtel et que l’hôtelier accepte les 100 € de la dame, on peut supposer que la petite communauté a dépassé le stade du troc et que de la monnaie y existe sous la forme de billets et de pièces. Le montant exact ne nous importe pas, appelons le A. Au moment où la dame offre son billet à l’hôtelier l’argent disponible dans le village passe de A à A + 100 €. C’est là le montant de la masse monétaire fiduciaire qui y est présente à partir du moment où la dame paie ses arrhes jusqu’au moment où elle annule sa réservation et où la masse retombe à A. La fausseté du billet, comme je l’ai dit, n’était connue que d’elle et était du coup sans impact : il n’est pas permis d’affirmer que la masse d’argent liquide ne fut jamais « en réalité » que de A : on ne parle en effet pas ici d’un produit tel que l’uranium, dont le fait qu’il soit faux empêche son action postulée, la fission, d’avoir lieu dans le réacteur : il s’agit de monnaie supposée vraie tant qu’il n’a pas été prouvé qu’elle soit fausse et qui s’acquitte fidèlement de sa tâche jusque-là.

Alors que s’est-il passé ? On nous dit que le billet de 100 € déposé comme arrhes à l’Hôtel de la Gare à permis en quelques heures d’éteindre des dettes pour un montant de 600 € et le mécanisme nous en est connu : il existait une chaîne de dettes partant de l’hôtelier et lui revenant en fin de circuit et le billet de 100 € a permis de proche en proche l’annulation de toutes les dettes existantes. Ce que j’essaie d’extraire de l’apologue est indépendant du fait de savoir si la situation qu’il décrit a la moindre de chance de se rencontrer dans la réalité : la réponse est non, mais cela n’a aucune importance, il s’agit clairement d’une expérience mentale et de rien de plus.

Pour ce qui est de l’argent, nous avons compris le circuit qu’il accomplit : le billet de 100 € passa de créancier remboursé en créancier remboursé, jusqu’à avoir opéré le circuit complet. Il demeura intact et sa valeur fut elle stable. Il en va de même pour la masse A telle qu’elle existait avant que la dame ne franchisse le seuil de l’hôtel de la Gare. C’est ce que j’ai appelé en d’autres circonstances le « principe de conservation des quantités » : en matière de finances, rien ne se crée, rien ne se perd. Si ce principe n’était pas universellement respecté, la finance n’aurait jamais pu exister. Il existe sans doute des individus qui enfreignent ce principe mais leur comportement est pris très au sérieux par la société, elle les traite sévèrement : pris, ils risquent la prison. Le « principe de conservation des quantités » en matière de finances n’est donc pas une norme que je postule à des fins théoriques : il s’agit d’une règle ayant valeur légale.

J’ai expliqué il y a quelques jours quelle est la meilleure manière de conceptualiser une reconnaissance de dette. J’ai dit qu’il s’agit de la trace de deux transactions : l’une, passée, étant intervenue au moment Ti, impliquant le transfert de la somme Si de l’agent X à l’agent Y, l’autre, à venir, censée intervenir au moment Ti+n, impliquant le transfert en retour de la même somme Si, cette fois de Y vers X, accompagné du transfert de Y vers X d’un « cadeau » en argent, proportionnel à la durée Ti+n – Ti, appelé « intérêts ». Une reconnaissance de dette est donc essentiellement l’annonce de transactions à venir, justifiées par une transaction passée. La transaction passée est, comme son nom l’indique, passée, c’est-à-dire qu’il s’agit d’un donné irréversible : elle a eu lieu, un point c’est tout. Les transactions à venir n’ont pas encore eu lieu et sont donc contingentes : il existe un risque qu’elles n’aient jamais lieu, autrement dit, la chance qu’elles se réalisent n’est pas de 100 %. Ce qui ne veut pas dire pour autant que les sommes qui ne seraient pas remboursées se soient évanouies dans la nature, contredisant le « principe de conservation des quantités », elles auront seulement trouvé leur voie vers d’autres poches que celle stipulée par la reconnaissance de dette.

Donc, lorsqu’on dit qu’il existait dans le village des reconnaissances de dette pour un montant total de 600 €, ce que l’on exprime ainsi, c’est qu’il existait des annonces de transactions à venir pour un montant total de 600 €, et celles-ci se situant dans le futur non pas nécessaire mais contingent, elles pourront avoir lieu ou pas. Le billet ayant circulé, la seconde transaction mentionnée par les reconnaissances de dette existantes, celle à venir, a eu lieu dans chacun des cas. L’annonce implicite s’est réalisée, et la reconnaissance de dette s’est éteinte. Le montant des reconnaissances est passé de 600 € à 0 €, ce qui est une autre manière de dire qu’il n’en existe plus.

Il s’est donc passé bien passé quelque chose de significatif dans le village, que les sommes d’argent disponibles à chaque instant ne révèlent pas : l’argent disponible se montait en effet à A avant que la Dame de Condé ne franchisse la porte de l’Hôtel de la Gare et il est retombé à ce niveau lorsqu’elle repassa le seuil dans l’autre direction.

Certains – dont je ne suis pas – considèrent une reconnaissance de dette comme l’une des manifestations possibles de la monnaie. Pour eux, la monnaie présente dans le village avant la venue de la Dame se montait à A + 600 € et s’est réduite à A à son départ, en raison de l’action qu’on pourrait appeler « catalytique » du billet de 100 € de la Dame sur l’économie du village.

De mon point de vue, une reconnaissance de dette n’est pas de la monnaie, le terme tendant à suggérer qu’il y aurait une identité de nature entre la marchandise privilégiée dans la fonction d’échange qu’est l’argent et une « trace de transactions » contenant l’annonce de deux transactions à venir qu’est une reconnaissance de dette. Les deux phénomènes sont à mon sens incomparables, une reconnaissance de dette étant un objet d’une toute autre nature que les pièces et billets constituant l’argent « liquide » que l’on assimile spontanément à « la monnaie ». Bien sûr une reconnaissance de dette a un prix (reflétant son « degré de liquidité » et son risque de crédit) et peut être traitée comme une marchandise, au même titre que l’argent, mais chacun s’accordera à dire que toute chose à laquelle est associée un prix n’est pas pour autant une monnaie, sans quoi presque tout dans ce bas-monde serait de la monnaie.

Du point de vue du « principe de conservation des quantités », rien ne s’est passé sans doute, mais il faut reconnaître que, comme l’affirment ceux qui assimilent reconnaissance de dette à monnaie, il s’est bien passé quelque chose. Mais comment en rendre compte ?

La réponse que je vais apporter consiste à introduire le concept de dimensionnalité de la monnaie, une notion qui éclairera, comme on le verra, la question des agrégats monétaires et ce qu’ils représentent en réalité.

(… à suivre)

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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133 réponses à “La dimensionnalité de la monnaie (Introduction)”

  1. Avatar de A.
    A.

    Paul,

    Vous dites qu’une reconnaisance de dette n’est pas de la monnaie. Pourtant, il est possible qu’elle ait provoqué une création monétaire. En reprenant l’un des exemples que vous donnez, on peut imaginer que chaque créditeur ait du avancer des fonds pour que réaliser l’objet du contrat pour lequel la reconnaissance de dette a été consentie.

    La reconnaissance de dette qui est une obligation et non à proprement parler de la monnaie a pu provoquer ainsi une création monétaire (par le biais du crédit à une banque par exemple). La monnaie créee par la circulation du billet de cent n’est donc pas de la monnaie « nette ». Une partie du profit dégagé par chaque créancier de cette histoire a servi à rembourser une part de l’argent prêté pour lui permettre de financer sa production.
    Ainsi, dans les 600 résultant du billet qui a fait l’objet d’un échange, une partie a été avancée à t et le reste à l’issue de toutes les transactions. La partie avancée a été remboursée si bien que cette avance n’existe plus (remboursement à la banque).

  2. Avatar de Alain A
    Alain A

    Paul
    Je vais essayer de jouer à l’avocat du diable…
    Sans contester votre théorème de « la conservation des quantités », ceux qui pensent que les reconnaissances de dettes sont de la quasi monnaie ne détiennent-ils pas aussi une part de vérité puisque ces 6 reconnaissances de dette ont eu le pouvoir de créer une pièce montée (qui fut mangée), de faire moudre du grain, de réparer une voiture, de…, de louer une chambre d’hôtel.
    La confiance que se sont donné ces 6 personnes en acceptant les dettes des autres a permis un échange de travaux, ce que permet aussi, d’une autre manière, la monnaieAves la « vraie » monnaie la confiance n’est plus accordée au voisin et ami (?) mais au gouverneur de la banque centrale. Confiance chaude (et risquée) versus confiance froide, systémique et quand même moins risquée (sauf rares exceptions à l’Argentine).
    Désolé, mais j’en arrive encore à la conclusion que les polémiques qui irriguent le blog depuis des années sont liées à des différences d’acceptation de ce qui peut être un moyen de paiement ou ne peut pas en être. Monnaie = confiance impersonnelle ; reconnaissance de dette= confiance personnalisée… ? Fides, fides, quand tu nous tiens…

  3. Avatar de Étienne Chouard

    Paul,

    Personne ne dit que toute dette est assimilable à de la monnaie.

    Ce sont les dettes des banques (et encore : seulement les dettes librement transmissibles, cad les provisions des DAV) qui sont de la monnaie (le critère étant qu’elles sont acceptées par tous pour solder les échanges).

    La dame de Condé et son billet pourraient être remplacés –sans rien changer aux mécanismes libératoires– par une banque privée et un crédit créant une provision de DAV – c’est-à-dire une (fausse) monnaie nouvelle et temporaire – (la même somme de (fausse) monnaie scripturale circulant ensuite et servant à solder les différents échanges par virements successifs) ; la fin du circuit se réaliserait par le remboursement du crédit à la banque par l’hôtelier et par la disparition de la (fausse) monnaie correspondante.

    Non ?

    Étienne.
    _______________

    « La plupart des législateurs ont été des hommes bornés, que le hasard a mis à la tête des autres, et qui n’ont presque consulté que leurs préjugés et leurs fantaisies. »

    Montesquieu, Lettres Persanes, lettre CXXIX.

    Remarque : le « législateur », à l’époque, est l’auteur de la Constitution (pas celui des lois ordinaires).
    _______________

  4. Avatar de Mikael EON
    Mikael EON

    Si le pâtissier avait endossé au bénéfice du garagiste la reconnaissance de dette de l’hôtelier à son égard, et que cette reconnaissance ait été endossée au bénéfice du suivant and so on, l’affaire se serait aussi bien réglée. Ma reconnaissance de dette eut fait office de monnaie (ce qu’elle était non?). Les écritures ont changé de poste au bilan, il n’y a pas eu de produit supplémentaire. Une bouteille d’Armagnac « hors d’âge »de 100€ eut rempli le même office. Belle monnaie, bien liquide.
    C’est la valeur accordée au moyen de payement, et la confiance dans son authenticité, pièce non rognée, endos d’une reconnaissance de dette, billet qu’on croît authentique, schmalaba…qui compte…….

  5. Avatar de captainsky
    captainsky

    Et si la monnaie est convertible en matière première, le pétrole par exemple?

    http://www.nymex.com/lsco_fut_csf.aspx?product=CL

  6. Avatar de tigue
    tigue

    @Alain,
    Ce qui préexistait historiquement a la monnaie fiduciaire, c était l’ echange de biens. Un bien servant de « monnaie d’ echange » contre un autre bien.
    Toute chose ou service pouvait servir de « monnaie d’ echange ».
    La mauvaise monnaie chasse la bonne, qui est thésaurisée.
    Quels attributs, quelles dimensions de l’ ancienne monnaie, on été oubliées a l’ adoption de la nouvelle ?
    Ne pourrait on pas ainsi retrouver l’ essence de ce qu est la monnaie ? Ses rapports avec la puissance ?
    Y a t il des analogies entre le « crédit » accordé a un puissant notable de la société médiévale, et le « crédit » accordé par les
    banques aux fonds d’ investissements, le taux très bas leur permettant un endettement massif source de capacité d’ appropriation de pans entiers de l’ industrie, c est a dire source de puissance ?
    Le crédit personnalisé, est la nouvelle monnaie, la fonction « d’ appropriation pour moi » (et de privation-pénurie pour les autres), supplante aujourd hui la fonction de réserve de valeur de la monnaie.
    Notre attention est excessivement concentrée sur une dimension actuellement neutralisée de la monnaie (la fonction de réserve de valeur, est comme une composante nulle d’ un vecteur non nul).

  7. Avatar de WB

    la morale de cette histoire, c’est que ça va bientôt faire un an que je vous lis…le temps passe vite.

  8. Avatar de Dissonance
    Dissonance

    Que se passe-t-il lorsqu’on introduit un créancier dans la ronde?

    Introduisons deux éléments nouveaux pour commencer: Le billet circulant de la Dame de Condé est vrai, et est issu des caisses du créancier. Imaginons ensuite que pour produire la pièce montée, le pâtissier ait du contracter un emprunt auprès du créancier. Celui-ci se retrouve avec une reconnaissance de dette supplémentaire de 100. Le minotier quant-à lui, à du lui aussi contracter un prêt de 100 pour acheter le stock de blé permettant de faire la farine. Le créancier a désormais investi 300. Et ainsi de suite, le garagiste (100), le boucher (100), le représentant (100). Il se trouve que le tavernier, lui aussi, avait fait un emprunt de 100 au créancier pour payer le ménage de ses chambres.

    Le créancier se retrouve avec un débit de 700, qu’il compte bien recouvrir. La ronde s’exécute comme dans l’histoire originale, à un détail près: Lorsque le billet de 100 revient au tavernier, celui-ci décide de solder ses comptes avec le créancier, et lui remet le billet. Il n’en reste pas moins que ce dernier dispose encore de 500 à recouvrir.

    Heureusement pour tout ce petit monde, le créancier n’est pas bien cupide. Il n’exige pas d’intérêt. Reste qu’à la fin de cette histoire, le seul homme heureux du village est le tavernier, qui a effacé toutes ses dettes. Comme tous les villageois, il avait une dette en cours de 200 au début de l’histoire. La ronde a permis à chacun de se défaire d’une créance de 100, sauf le tavernier, qui a « transféré » pour ainsi dire sa dette à sa cliente. Pour le créancier, toute cette ronde n’a strictement rien apporté. Avant l’arrivée de la Dame, il était débité de 600. Il en est toujours au même point à l’issue de l’histoire. La Dame pour sa part est la moins bien lotie puisqu’elle fini l’histoire avec une dette, là ou tous les autres en ont remboursé.

  9. Avatar de Dissonance
    Dissonance

    Erratum:

    « Il n’en reste pas moins que ce dernier dispose encore de 600 à recouvrir. »

  10. Avatar de Jean-Louis
    Jean-Louis

    De son vivant, Michel Tavernier, qui connaissait l’Oeuvre de Silvio Gesell et avait fondé l’AISE, association internationale pour le soutien à l’ Ecosophie, nous avait cité cette histoire, il y a plus de 10 ans.
    Merci pour le développement.

  11. Avatar de Crapaud Rouge
    Crapaud Rouge

    L’histoire raconte qu’un seul billet de 100 € (faux de surcroît) a effacé 600 € de dettes, et ça semble magique. Mais c’est oublier qu’il y avait 6 créanciers qui totalisaient 600 € de crédit. Si les villageois avaient fait un bilan, ils auraient constaté, AVANT le passage de la dame, que leurs dettes/crédits s’annulaient mutuellement. La circulation du billet a joué le rôle d’un calcul réparti sur des données elles-même réparties, alors que le bilan auraient exigé la centralisation préalable de ces données. Ma petite remarque n’est pas anodine : dans la réalité, il y a beaucoup d’informations réparties, (en particulier le prix des choses qui s’échangent), mais relativement peu d’informations centralisées. Si l’on considère que les secondes représentent les premières, la marge de déformation est importante.

  12. Avatar de iGor milhit

    ces débats sur la monnaie me dépassent de beaucoup, c’est un peu dommage pour moi, un peu seulement, parce que j’apprends grâce à eux. néanmoins voilà ce que la lecture de ce matin m’a évoqué:
    si qqun voulait me rembourser qqch en me disant qu’un autre lui doit le même montant et donc qu’il faut que je m’adresse à lui, je me méfierais… juste pour dire que la confiance dans les reconnaissances de dette est un tantinet périlleuse. d’ailleurs il en faut de la pression morale et judiciaire pour que les reconnaissances de dettes puissent être utilisées comme réserve de valeur. ce qui fait penser à ce rêve auquel certain s’accrochent que les actifs toxiques reprennent un jour des couleurs. donc pour que les reconnaissances de dette soient une réserve de valeur, parfois il faut carrément l’intervention massive de l’Etat, jusqu’à la « facilité quantitative » ou planche à billet.
    franchement, d’un point de vue presque poétique, sans bien tout comprendre, j’aime bien l’idée finck, la monnaie périssable, je trouve qu’elle apporte un peu de justice dans ce bas monde.

    et puis un truc en passant: je me suis étonné de l’exemple utilisé pour montrer que si dans l’histoire racontée le caractère vrai ou faux du billet importe peu contrairement à d’autres choses : pourquoi l’uranium? c’est vrai qu’on parle bcp de nucléaire et l’uranium peut être enrichi ou appauvri et qu’il fait forcément penser aux « toxic waste »… (tiens, même la radioactivité « fond », à un rythme un peu lent il est vrai – je parle de la demi-vie)

    bonne journée…

  13. Avatar de Paul Jorion

    @ A

    Vous dites qu’une reconnaissance de dette n’est pas de la monnaie. Pourtant, il est possible qu’elle ait provoqué une création monétaire.

    Il me semble que ce que vous voulez dire, ce n’est pas « création monétaire », c’est « création de richesse ». L’argent qui sera remboursé a pu être utilisé par son emprunteur comme « avance », grâce à laquelle il a pu créer une plus-value : le prix total de ce qui se retrouve à l’arrivée est plus grand que celui des éléments réunis au départ. C’est d’ailleurs grâce à cette plus-value qu’il pourra verser des intérêts et même conserver un profit pour lui-même.

    Si l’argent mentionné dans la reconnaissance de dette a été utilisé comme « avance », il y a bien eu « création de richesse »… mais pas « création monétaire ». À moins que vous n’appeliez « monnaie », toute « richesse », c’est-à-dire, comme je le dis, tout ce qui a un prix, autrement dit, potentiellement tout.

  14. Avatar de Paul Jorion

    @ Alain A.

    Oui, une reconnaissance de dette peut être traitée comme une marchandise : il peut exister un marché (« marché secondaire ») où on échange des reconnaissances de dette à un prix qui reflète le risque que la dette ne sera pas honorée.

    Mais il existe de la même manière (à Chicago) un marché où des contrats portant sur des carcasses de porc sont achetés et vendus. Cela ne fait ni de ces carcasses de porc ni de ces contrats de la « monnaie », ces contrats sont une marchandise.

    Dit plus explicitement : le fait qu’un contrat porte sur une somme d’argent ne fait pas de ce contrat une monnaie : la seule monnaie impliquée est celle utilisée dans l’achat de ce contrat. X a promis à Y de lui payer 100 € le 1er août, la reconnaissance de dette est cessible et je l’achète à Y pour 97 €. C’est une marchandise que j’ai payée 97 €. Le 1er août je me présente à la porte de X. Soit il est là et me verse 100 €, me laissant un bénéfice de 3 €, soit il a disparu sans laisser d’adresse et j’ai perdu 97 €.

    La monnaie dans cette histoire, ce sont les 100 € reçus par X de Y, les 97 € reçus par Y de moi, et au bout du compte, les 100 € que je reçois de X, me laissant un bénéfice de 3 €, ou avec lesquels X s’est enfui. Aucune monnaie ne s’est créée : des transactions ont eu lieu autour d’un contrat portant sur une somme d’argent, c’est tout.

  15. Avatar de Crapaud Rouge
    Crapaud Rouge

    « une reconnaissance de dette n’est pas de la monnaie » : à graver dans le marbre !!! Il en résulte, si j’ai bien compris, que la valeur scientifique des « agrégats monétaires » est plus que douteuse.

    Mais il en résulte autre chose, me semble-t-il, à savoir: ce n’est pas la monnaie elle-même qui aurait une « dimensionalité », mais la dette, car celle-ci est une relation temporelle entre N acteurs comme le montre l’édifiante histoire du billet. A l’instant T, chaque acteur est en possession d’une certaine quantité de monnaie, mais indépendamment les uns des autres, ce qui ne confère aucune « structure » (aucune propriété supplémentaire). Que la circulation de la monnaie en révèle une, n’implique pas qu’elle soit de son fait. Au demeurant, rien ne condamnait le billet de la dame à revenir dans la poche du tavernier, cad à parcourir toute la structure.

    Le truc rigolo, c’est que si monnaie et dette ne sont pas de « même dimension », au sens mathématique bien sûr, alors, les ajouter pour en faire des « agrégats », est d’une absurdité totale qui fera bien rire les futurs élèves en économie.

  16. Avatar de Paul Jorion

    @ Mikael EON

    L’illustration par la bouteille d’Armagnac montre bien qu’il ne s’agit pas de monnaie : toute marchandise aurait fait l’affaire. Le différend repose alors sur la question suivante : « Peut-on considérer toute marchandise comme une monnaie (du fait qu’elle a un prix, c’est-à-dire qu’elle peut être échangée contre de l’argent) ? »

    Je réponds non : « La masse monétaire n’est pas la somme du prix de toutes les choses qui ont un prix ». On pourrait imaginer un M14 par exemple qui ait cette définition : « somme du prix de toutes les choses qui ont un prix », mais quel intérêt ?

  17. Avatar de Candide
    Candide

    Le différend repose alors sur la question suivante : « Peut-on considérer toute marchandise comme une monnaie (du fait qu’elle a un prix, c’est-à-dire qu’elle peut être échangée contre de l’argent) ? »

    Pour répondre à cette question et simplifier le problème, ne peut-on faire intervenir la notion de « cours légal » ?

    Fascinant cette « dimensionnalité »… L’approche mathématique est prometteuse. Monnaie et reconnaissances de dette comme les deux faces d’une même chose ? (D’une pièce de monnaie, bien sûr. 😉 ) Ou bien comme le négatif d’une photographie ? On parle justement d’« argentique » pour la photo traditionnelle… 😉

  18. Avatar de Dissonance
    Dissonance

    @Crapeau Rouge:

    « Le truc rigolo, c’est que si monnaie et dette ne sont pas de “même dimension”, au sens mathématique bien sûr, alors, les ajouter pour en faire des “agrégats”, est d’une absurdité totale qui fera bien rire les futurs élèves en économie. »

    Au sens physique également. Illustration:

    Addition de mètres et de mètres carré, ou encore addition des distances et des vitesses… Ça n’a effectivement pas le moindre sens. En revanche, dans ces disciplines on peut obtenir des valeurs significatives en multipliant des éléments de dimensions différentes, ce qui introduit une nouvelle dimension. On parle alors d’unité dérivée.

  19. Avatar de Crapaud Rouge
    Crapaud Rouge

    « J’ai expliqué il y a quelques jours quelle est la meilleure manière de conceptualiser une reconnaissance de dette. » : mais cette conceptualisation est incomplète, car on ne peut se contenter de voir dans l’intérêt un simple « cadeau ». Voilà bien une « représentation mentale » à bannir. Ailleurs, on parle de « loyer » de l’argent dont l’intérêt serait le prix. Cela suppose que la quantité de monnaie disponible pour le crédit est limitée, de sorte que l’emprunteur accepte de payer pour s’en réserver une fraction. On raconte aussi que cet intérêt récompenserait le risque pris par le prêteur : mais comme rien n’oblige le prêteur à prendre ce risque, et comme il n’est pas très malin de sa part d’augmenter ledit risque en le surchargeant l’emprunteur d’un intérêt, ça ne me semble pas très pertinent comme explication. Alors, qu’en est-il au juste ?

  20. Avatar de JJJ
    JJJ

    La (vieille) parabole de la Dame de Condé donne une belle illustration de la création-destruction de monnaie au travers du crédit (que se sont mutuellement consenti les intéressés). Mais les conclusions qu’en tire A-J H. sont critiquables :
    – Le PIB n’a pas augmenté parce que les commerçants ont été payés ; il avait déjà augmenté lors de la prestation, constatée dans la comptabilité de chacun ;
    – Le faux billet n’a pas « catalysé les échanges », mais permis de solder, par compensation, les dettes qui résultaient d’échanges antérieurs, ce que les intéressés auraient pu faire d’eux-mêmes sans la médiation du billet en cause, s’ils avaient été informés des créances-dettes mutuelles ;
    – La masse monétaire est restée inchangée puisque le billet a été retiré de la circulation au bout du cycle, et de surcroît matériellement détruit car il était faux. C’est exactement ce qui se serait produit (la destruction) si l’ensemble de ces dettes avait été réglé au moyen d’un crédit consenti à l’hôtelier par son banquier, et remboursé au bout du circuit.

    Ce qui est intéressant dans cette histoire, c’est que le « vrai crédit » et la « fausse monnaie » produisent exactement les mêmes effets (si l’on néglige les intérêts, bien entendu). Mais si l’hôtelier avait délivré une prestation à la Dame, l’histoire aurait été moins intéressante pour lui…

  21. Avatar de Mikael EON
    Mikael EON

    L’Armagnac était là seulement pour évoquer la liquidité.
    Le fabliau illustre l’importance de la liquidité.
    Sans circulation de monnaie pas de mise à zéro des compteurs.
    Une chambre de compensation des « reconnaissances de dette » aurait aussi bien remis les pendules à l’heure.
    Ces reconnaissances de dette sont toutefois libellées en euros, pas en cauris.
    Comment les cauris fonctionnaient ils comme monnaie? Comment définissait on le cours du cauri?n’était-il pas variable en fonction de l’éloignement géographique des lieux de récolte?

  22. Avatar de Paul Jorion

    @ Crapaud Rouge

    Le truc rigolo, c’est que si monnaie et dette ne sont pas de « même dimension », au sens mathématique bien sûr, alors, les ajouter pour en faire des « agrégats », est d’une absurdité totale qui fera bien rire les futurs élèves en économie.

    Vous êtes en train d’écrire mon prochain billet… En publiant mon billet La dimensionalité de la monnaie en deux parties, je savais courir ce risque !

  23. Avatar de a113
    a113

    @ PJ.

     » Au moment où la dame offre son billet à l’hôtelier l’argent disponible dans le village passe de A à A + 100 €.  »

    non , je ne pense pas ,la quantité d’argent reste de 100 euros …..

    il faudrait mettre au point un outil permettant de considérer la circulation de ces 100 euros comme une valeur++++

    on analyse de façon statique (quantité d’argent) un phénoméne dynamique , pourtant les outils mathématiques existent depuis longtemps pour quantifier un flux ,son intensité , sa vitesse , les variations de ses accélérations…etc
    donc , il doit ètre possible d’utiliser les possibilités du calcul différentiel pour rendre compte de ces phénomênes

  24. Avatar de blackhole
    blackhole

    Le temps c’est de l’argent.
    Faux
    L’argent c’est du temps.
    L’argent sert à acheter le temps.
    Le temps des autres.

  25. Avatar de EOMENOS
    EOMENOS

    Beaucoup, beaucoup de choses intéressantes dans ce qui précède mais aussi un énorme problème : aucune méthodologie scientifique. Le champ d’études est celui des sciences sociales et humaines, mais tout de même un peu de rigueur est nécessaire.

    L’histoire de la dame de Condé, repose sur toute une série de pré-supposés ou pré- définis et c’est à droit que Crapaud rouge relève que la compensation était possible dès avant la mise en circulation du billet. L’information comme toujours en matière financière est donc un élément fondamental.

    En ce qui concerne la notion de monnaie, la vérité, comme bien souvent, est sans doute à mi-chemin entre ceux qui affirment que toute chose ayant un prix peu se voir reconnaître ce statut et ceux qui ne sont pas d’accord.
    En effet, pour la communauté des amateurs de gnole, la bouteille d’Igor, pourra sans doute servir de monnaie, en revanche, les
    membres de la ligue des buveurs d’eau n’y trouvera pas son compte.
    Nous voici donc au coeur d’un des aspects de la monnaie, sa reconnaissance par un ensemble d’individus comme valeur digne d’intérêt/de confiance pour les échanges.
    Plus la communauté de ceux qui acceptent la valeur d’échange est grande, plus la monnaie devient un instrument incontournable d’échanges et devient LE support de ceux-ci.
    L’histoire démontre que les communautés d’échanges se sont sans cesse élargies prenant support sur les tribus, puis les états et aujourd’hui sur les fédérations d’états, le plus puissant de ces supports ayant naturellement tendance à imposer sa valeur
    d’échange, sa monnaie. Comme ce n’est pas toujours possible on a alors inventé des valeurs relatives aux monnaies entr’elles,
    les parités (elles même fondées sur une série de paramètres).

  26. Avatar de a113
    a113

    je ne crois pas m’ètre bien exprimé….

    il faut que l’approche quantitative des “choses de l’économie” sorte d’une approche massivement “arithmètique” (les 4 opérations fondamentales)
    c’est vrai qu’étant totalement inculte en ce qui concerne l’économie , je vous vois additionner , soustraire , multiplier,diviser , sans sentir où peut surgir un approche “révolutionnaire” des échanges humains , dont nous avons grandement besoin, eu égard à la faillite patente du systême de référence dit “capitaliste” , faute à plonger dans le déclin.

    je ne suis pas sùr qu’une “technique” économique puisse y répondre , mais si un projet politique alternatif s’impose enfin , il faudra bien lui associer des “méthodes” économiques…

  27. Avatar de Crapaud Rouge
    Crapaud Rouge

    « une absurdité totale qui fera bien rire les futurs élèves en économie. » : cette absurdité sera oubliée, tout comme on a oublié que les physiciens ont mis plus d’un siècle à se convaincre que l’énergie était proportionnelle, non à la vitesse, ce qui est le cas de la quantité de mouvement, mais au carré de la vitesse. Il paraît que le consensus à ce sujet a été officiellement établi au début du XXième, quelques années avant qu’Einstein ne pointe son nez. Mais on a oublié aussi que les opérations arithmétiques avec le zéro étaient à leurs débuts enseignées… à l’université ! Je dis tout ça pour rappeler mon dada, à savoir que les vérités les plus fondamentales sont aussi les plus simples et les plus difficiles à découvrir. Les économistes actuels n’en finissent pas de produire des modèles mathématiques ultra-sophistiqués, mais, dans le fond, ils n’inventent ni ne découvrent rien de neuf. Aussi suis-je ravi que certains d’entre eux cherchent plus en profondeur.

  28. Avatar de ybabel
    ybabel

    « Ce que j’essaie d’extraire de l’apologue est indépendant du fait de savoir si la situation qu’il décrit a la moindre de chance de se rencontrer dans la réalité : la réponse est non, mais cela n’a aucune importance, il s’agit clairement d’une expérience mentale et de rien de plus. »

    Peut-être pas sous cette forme aussi simpliste ou tout le monde doit la même somme, mais ces « boucles de dettes » existent bel et bien dans la réalité. D’ailleurs, c’est bien l’apport principal de la monnaie vis à vis du troc : c’est une astuce pour éliminer ces boucles. C’est un « garbage collector » pour reprendre un terme informatique. Il y a exactement la même problématique dans les logiciels des « objets » qui ont des « dettes » (ça se nomme des références, ou des pointeurs) entre eux, parce qu’ils s’attendent a des transactions futures entre eux. Mais parfois, tout un groupe d’objets n’ont plus de raison d’être mais survivent uniquement parce qu’ils ont une boucle de dette qui fait qu’ils ne sont pas éliminés (un objet est éliminé quand aucun autre objet n’a besoin de lui en principe), sauf si un algorithme détecte ces boucles (cf théorie des graphes).

    Aujourd’hui, grâce a ce genre d’algorithme, on pourrait revenir à un système de troc (il faudrait que chaque individu référence ce qu’il entend troquer sur un site web global et que l’ordinateur calcule les « cycles »).

    Un exemple (très simpliste) :
    A veut échanger 3 carottes contre 3 patates
    B veut échanger 3 patates contre 3 concombres
    C veut échanger 3 concombres contre 3 carottes.

    Il y a 2 manières de résoudre ce problème : la monnaie qui circule. Un ordinateur qui regarde globalement la situation et repère qu’il y a une « boucle » et prévient les 3 personnes qu’elles peuvent s’échanger leurs biens.

    Évidement, les ordinateurs n’existaient pas à l’époque ou la monnaie à été créée.

    Tout ça pour dire que dans la réalité, même si les sommes ne sont pas équivalentes et qu’il y a des promesses d’échanges futures, ces « boucles » existent. C’est un peu le cœur du problème économique en fait.

  29. Avatar de Crapaud Rouge
    Crapaud Rouge

    C’est pas pour ramener un autre de mes dadas, la thermodynamique, mais il me semble que la notion de transaction, pendant d’une interaction entre particules, devrait conduire à un modèle apparenté à ceux de la physique statistique. Par exemple, la durée pendant laquelle une dette existe, entre deux transactions, (ou deux traites), me fait penser au parcours libre d’une particule entre deux interactions avec d’autres particules. Et comme une dette peut être vendue à n’importe quel créancier, rien n’oblige, dans le cas général, que la seconde transaction advienne avec le même agent que la première : ça complète la comparaison avec des interactions aléatoires entre particules. Cela dit, comparaison n’est pas raison… Je suis seulement avide de savoir si l’économie va enfin trouver sa loi fondamentale, car celle qui est actuellement donnée pour telle, dite de l’offre et de la demande, est une farce ridicule (me semble-t-il).

  30. Avatar de Jimmy
    Jimmy

    Je vous félicite Mr. Jorion ainsi que tous les intervenants de ce blog d’avoir persévéré et d’avoir mis le doigt sur l’intimité de la monnaie.
    Personnellement j’ai seulement les capacités et le recul nécéssaire à la compréhension de ce que vous avancez mais je suis impressioné par votre conceptualisation nouvelle.

    J’entrevois dans vos analyse (dites-moi si je me trompe), que notre société a choisi un mauvais modèle pour associer les notions de « monnaie », « dette », « interêt », « temps », « risque » et « marchandise ». Finalement, c’est la notion d’ « échange » résultant des notions précédentes qui serait à revoir…Et en particulier, le fait qu’une transaction est immédiate et définitive par la loi.

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