Ce texte est un « article presslib’ » (*)
La négation exige de notre interlocuteur un certain travail : nous lui demandons de se représenter une chose mais comme son contraire. Qu’il y ait là un travail se ressent encore davantage avec la double négation qui finit par rétablir le sens premier : « Vous n’êtes pas sans savoir ». L’affect associé au travail des deux opérations s’annulant nous fait comprendre que notre attention est attirée sur le point mentionné avec une certaine insistance. À l’un d’entre vous m’accusant de duplicité (de dire une chose pour faire croire son contraire), j’avais acquiescé mais à l’aide d’une quadruple négation dont je savais pertinemment qu’elle serait quasi-impossible à débrouiller.
L’ironie dit une chose pour signifier son contraire. En raison-même du travail exigé de l’interlocuteur, elle n’est pas toujours comprise, elle peut-être même déjouée par celui qui feint ne pas la noter, elle « tombe alors à plat » comme l’on dit.
C’est par la mimique que nous faisons entendre dans l’ironie qu’il faut comprendre le contraire de ce qui est dit littéralement : par le « sourire ironique » ou le clin d’œil. L’anglais, qui aime jouer sur le mi-dire, connaît le « tongue in cheek » : la langue créant une protubérance dans la joue, pour dire : « A prendre avec un grain de sel ! »
L’ironie avait donc vécu jusqu’ici sous le menace de tomber à plat mais sa fragilité est désormais une chose du passé grâce à l’émotikon (émotika au pluriel ?) qui nous a offert, entre autres innovations, le point d’ironie : [ ;-)]
J’avais écrit il y a quelques temps un billet intitulé : « La situation s’améliore aux États–Unis ! » et grand fut mon désappointement quand je découvris un commentateur m’affirmant que, sur la foi des informations que j’apportais, les choses n’allaient pas aussi bien que je l’affirmais par mon titre. Du coup, j’appelai mon message suivant sur le même thème : « La reprise aux États–Unis (non, je plaisante) » pour éviter tout malentendu. Réflexion faite, j’aurais tout aussi bien pu appeler mon billet initial « La situation s’améliore aux États–Unis ! 😉 » pour éviter tout malentendu et tout désappointement éventuel pour moi.
Fort de la leçon durement apprise, je recours désormais à la nouvelle pratique sans risque :
@ septique
« ce que j’essaie d’accomplir pour la monnaie est du même ordre que ce que Freud réalisa pour la psychologie. »
Pas prétentieux, non…
J’avais d’abord pensé à César passant le Rubicon ou Napoléon au soir d’Austerlitz, puis à Einstein recourant à un espace de Minkowski, mais comme ça n’avait aucun rapport avec ce que je disais, je me suis rabattu sur Freud… 😉
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
14 réponses à “;-)”
😀
🙂
(ha je n’avais pas vu le commentaire d’Igor :-D)
Ah le sens de l’ironie et de la dérision Belge …
Celà étant dit, j’aimerai quand même faire un peu de provocation, et si les choses n’étaient-elles pas en train de s’améliorer. Les marché financiers (actions) anticipent toujours de 6 mois les reprises de l’économie (avec il est vrai des faux départs quelque fois).
Donc pourquoi une forte reprise suivie d’une crise encore plus forte dans quelques années?
Après tout il y a bcp de psychologie dans les mvts violents des bulles et des krachs.
Bien à vous,
Michel
En dan U….
http://www.youtube.com/watch?v=kzppy5eWMpM
Très pédagogue, Mr Jorion.
Il est vrai que l’ironie est souvent dans le ton. Ce qui explique qu’on utilise la béquille du 😉 lors de conversations sur Internet.
A dire vrai le procédé perd un peu de son charme de la sorte, mais il faut bien vivre avec son temps.
Puisque vous le demandez, on vous accordera donc le bénéfice du doute ;o)
mdr (mort de rire)
l’effort de Monsieur Jorion pour tenir ce blog incontournable
la critique facile du lecteur à l’affût
le »parisianisme » facile
et la susceptibilité du maître des lieux
lol (laughing out loud, lots of laughs)
Mouais
Dieu est mort, Marx est mort et moi-même je ne me sens pas très bien…
:-p
Vous auriez du dire, pour lever toute ambiguité:
« ce que j’essaie d’accomplir pour la monnaie est du même ordre que ce que Freud réalisa pour la psychologie, sauf que cela n’aura rien de sexuel et que la FED prendra la place de la mère puisque la mienne est trop froide pour s’y baigner » 😉
le point d’ironie sur wikipedia: http://fr.wikipedia.org/wiki/Point_d'ironie mais on a beau envoyer un message s’il n’y a personne au bout du fil…
Les « smileys »…à double tranchant, je dirais. J’en ai souvent utilisés pour faire passer quelques moqueries bien lourdes, sur lesquelles j’étais sincère…
Un commentateur, ici, il y a quelque temps, avait mis le doigt sur le fait que l’écrit nous prive de tous les autres signaux visuels, ou autres, disponibles dans une « vraie » conversation.
Du coup, les sources de malentendus sont décuplées !
Cela dit, les Belges, qui n’ont aucun humour, sont donc très mauvais sur l’ironie.
_-_-_ ( ¨_¨ ) ( ‘__’ ) d°_°b >° ) <° ) ( °
( ‘ _o’ ( *__°) I°___°I ()*_!_*() ( – ____-) °o_° ) O( ‘ _o_’ )O
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