« N’attribue pas à malice… »

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Quand le système bancaire s’est effondré, l’argent qui manquait, on est allé le chercher dans la poche du contribuable. C’est très vilain mais ce n’est pas passé inaperçu : le fonctionnement implicite du système financier est apparu en surface, au vu de tous. Cela n’avait pas été prévu : l’« oligarchie », pour utiliser le terme qu’affectionne Simon Johnson, l’ancien économiste en chef du Fonds Monétaire International, aurait sans aucun doute préféré davantage de discrétion.

Quand je dis « sans aucun doute », certains sont d’un avis contraire, qui pensent que tout cela était prémédité : de l’effondrement au rétablissement sans vergogne. Je ne le pense pas, et vous allez voir pourquoi.

L’un de vous me communique un extrait d’une conversation récente :

Mr. X. responsable du top management de la Rabobank (à propos de l’obligation de brochures informatives en cas de vente de produits financiers) : « Les gens n’y comprennent rien, et de toute façon, ils ne les lisent pas, donc forcément ils ne savent pas à quels risques il s’exposent. Tout ceci est de leur faute, les vendeurs de ces produits respectent leurs obligations »

Le responsable à la Commission Européenne : « Mr X, vous avez déjà essayé de lire une de ces brochures ? Le problème n’est-il pas plutôt lié au fait que vous ne savez pas vous-même ce que vous mettez dans ces produits et que vous êtes incapables de les évaluer et donc de dire clairement au client ce qu’il encourt ? »

Le responsable à la Commission Européenne sait de quoi il parle : il semble très bien connaître le milieu financier. Sa remarque m’a rappelé une expérience personnelle, à l’époque où je travaillais pour la banque commerciale Wells Fargo à San Francisco. Le département marketing interrogeait les clients pour connaître les désidérata des clients en matière de crédit à la consommation, puis il nous communiquait à nous, au département pricing, le résultat de ses investigations comme une « décision ayant été prise » (ultérieurement, la procédure fut moins expéditive et un comité « nouveaux produits » fut créé, dont je faisais partie). J’ai ainsi hérité d’un projet à l’ambition délirante : un prêt convertible à tout moment en ligne de crédit et inversement.

Pour le mettre au point, j’ai créé un modèle à facteurs de risque à six variables, qui calculait soit la rentabilité – le taux étant fixé, soit le taux – pour une rentabilité déterminée, de SmartFit (c’était le nom du produit) pour la formule prêt et pour la formule ligne de crédit, ainsi que les taux de conversion d’une formule dans l’autre, et ceci en fonction du profil du consommateur et du type de logement envisagé. Après que SmartFit ait été lancé, j’ai un jour évoqué lors d’une réunion, le « produit que j’avais conçu ». Quelqu’un du département marketing s’est alors offusqué : « Mais c’est nous qui avons conçu ce produit ! » Un cousin de Mr. X de la Rabobank, sans doute.

Souvenons-nous toujours du vieil adage : « N’attribue pas à malice, ce que crétinerie explique aussi bien ! »

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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115 réponses à “« N’attribue pas à malice… »”

  1. Avatar de captainsky
    captainsky

    A propos de cretinerie, il y a dix ans, Jeremy Rifkin – qui n’est pas un imbecile – publiait son livre intitule « la fin du travail ». La France qui subissait alors un tres fort chomage lie a la creation de l’euro concedee par les allemands contre leur reunification avala cette idee de fin du travail et imposa les fameuses 35 heures qui devaient desorganiser toute la production y compris dans des services publics importantants tels que les hopitaux et provoquer ensuite une belle vague de delocalisations [grace aux 35 heures on fabrique 1 million de vehicules en moins chaque annee en France]

    Dix ans plus tard on semble revenir a la meme situation ou le chomage va atteindre les 3 millions et ou les memes recettes nefates pourraient etre mises en oeuvre.

    Le probleme de la France est bien connu, la moitie du pays est hors systeme capitaliste avec les emplois publics et para publics, le taux d’emploi est un des plus bas au monde, et avec l’explosion de la dette publique on se demande vraiment ce qu’il peut advenir d’un pays pareil qui ne produit plus, importe de plus en plus et comme on peut le lire souvent dans certains commentaires laisses dans ce blog continue a croire aux recettes magiques et aux grands soirs ideologiques.

    Quel avenir pour la France? C’est la question que je pose.

  2. Avatar de Moi
    Moi

    On sous-estime énormément le niveau de crétinerie lorsque l’on parle des « hautes strates » de la société. En réalité, il y a sans doute autant de crétins que chez les plus pauvres. Autant que j’aie pû le vérifier (mais il est vrai que je n’ai pas beaucoup fréquenté la jet-set), la courbe de gauss est d’application partout: une minorité de crétins parfaits, une minorité de génies, quelques un peu largués, quelques un peu au-dessus du lot, et enfin une grosse masse de gens qui se limitent à faire ce que leur rôle leur dicte.
    C’est sur l’habitus que se fait la différence entre strates, pas sur l’intelligence. A noter pour l’anecdote que j’ai déjà trouvé parfaitement crétin certain prof d’économie que j’ai eu l’occasion de fréquenter dans l’intimité, son QI était sans doute au-dessus de la moyenne mais limité à son domaine d’application. Il m’a été donné aussi de fréquenter l’un ou l’autre ouvrier sans éducation mais doué d’une finesse intellectuelle et d’une ironie à me laisser pantois (l’un d’eux, avec qui je suis toujours en contact, ayant repris des études est devenu cadre à présent). Comme quoi…

  3. Avatar de Moi
    Moi

    @captainsky : « le chomage va atteindre les 3 millions »

    Et selon vous Jeremy Rifkin s’est trompé en prédisant la fin du travail? 🙂

  4. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    Ceux qui ont cru que les rois de la finance étaient des super-héros aux QI surdéveloppés qui ont « manigancé » en secret pour nous mener sciemment où nous en sommes doivent, à l’instar des jeunes filles qui font le deuil du papa-héros à la lumière crue de l’adolescence, les considérer pour ceux qu’ils sont : des gens comme les autres en ce qu’ils font comme tout un chacun tout un tas de choses qu’ils ne comprennent pas! Ayant rapporté l’anecdote de la Rabobank à Paul, j’ajoute que la petite assemblée ce jour-là a observé après la remarque assénée au manager un de ces silences qui en dit long… Certains observateurs ont du se dire tout bas, en mémoire des épiques batailles navales de leur enfance : « Touché, coulé » 🙂

    Dans le nord de la France, on dit qu’il y a les « faiseux » et les « diseus ». Le staff du marketing de Wells Fargo faisait indéniablement parti de cette seconde catégorie : grands diseus, petits faiseux.

    Plus généralement, cette anecdote illustre une des grandes batailles feutrées qui a eu lieu au cœur des entreprises dans les années 80-90 : les marketeurs contre les ingénieurs, les premiers ayant pris très nettement le dessus sur les seconds dans la conception du produit fini. On est confronté chaque jour je crois aux conséquences de cette « victoire » (des produits très bien markétés, qui sont obligés de créer des besoins pour justifier leur existence), mais on ne mesure peut-être pas encore la portée sociologique de ce bouleversement de l’échelle de valorisation des compétences. Je n’irais pas jusqu’à parler de nivellement par le bas… mais tout de même, une société qui valorise la capacité à se payer de bons mots (ma définition du marketing) au détriment de l’innovation technologique et de l’ingénierie est une société qui après « être suffisamment entrée dans l’histoire » adopte un comportement collectif qui confine à la sortie de piste. Ceux qui retrouveront la boîte noire souriront franchement en observant ceux et ce que nous avons porté aux nues.

  5. Avatar de Moi
    Moi

    @Julien Alexandre: ce que vous dites me fait penser à un film que j’ai aimé : « Ridicule » de Patrice Leconte. Un petit noble de province arrive à la cour de Versailles pour trouver les fonds nécessaires à l’assèchement d’un marais mais n’y trouve que gens intéressés par les bons mots. Nous y sommes.

  6. Avatar de logique
    logique

    Il n’est pas necessaire d’avoir un énorme QI pour monter une arnaque. Il suffit de bien cibler les pigeons.

  7. Avatar de AAA+
    AAA+

    J’ai assité à de nombreuses présentations de lancement de produits financiers « nouveaux ». Tous ces produits se voulaient issu des desiderata du « marché »! Les services marketing raccourcissaient le discours technique des services d’ingeniérie, en un message vendeur, et les services d’ingéniérie se contentaient d’absoudre les services marketing de leur indécrottable crétinerie. Beaucoup de ces produits nouveaux, (mais il faut dire services!), n’ont pas survécu à l’humeur versatile du marché, ou plus exactement n’ont pas rencontré le succés espéré, (par l’établissement financier bien sûr), j’ajouterai fort heureusement, on le peut pas faire toutes les bêtises…
    L’inventivité des milieux de la finance n’a pas de limites. L’état d’esprit qui y règne est plus celui du jeu, (dans la peau du vainqueur bien sûr), que de la recherche de l’utilité pour le plus grand nombre.
    Alors faut il s’étonner de la rouerie des uns et des autres ? Faut-il s’étonner que les plaquettes, (dont on ne lit que les belles promesses), soient « imprécises » ?
    J’ai quitté la banque parce que c’était « chiant » à mourir. A cette époque les banquiers faisaient encore le métier de banquier. Certes, certains établissement s’essayaient à autre chose; Le voyage, l’immobilier, le vêtement…etc, je vous l’ai dit l’imagination n’a pas de limites. Mais dans la grande majorité, les banques ne faisaient que compter ou prêter de l’argent.
    Créer des prêts remboursables sur 30 ou 50 ans, qu’on peut transmettre à ses héritiers, est-ce vraiment se faire l’interprète des desiderata du marché, sous entendu des emprunteurs ? Le dire ou le croire c’est se moquer du monde ou emporter les palmes de la crétinerie.
    Pour ce qui concerne les autres produits plus sophistiqués, les dérivés en passant par les fonds à promesses…c’est du pareil au même.

  8. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    [grace aux 35 heures on fabrique 1 million de vehicules en moins chaque annee en France]

    « N’attribue pas à malice, ce que crétinerie explique aussi bien ! »

    Juste pour vous dire mon pauvre captainsky que votre affirmation si elle est digne du forum Boursorama ou du blog de la deflation, mérite ici une plus ample démonstration.

    A ma connaissance les délocalisations n’ont rien à voir avec la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail.

    Sachez que les français produisent autant de richesses en 35h que leurs homologues anglais en 38 ou 40…

    Sachant par ailleurs qu’en 40 ans l’évolution de la productivité a abouti à la même création de richesse par un actif, là où il en fallait auparavant 3…On comprend que la réduction du temps de travail eût pu paraître une solution au chômage (de masse ?).

    Bref, avant de poster ce genre d’ineptie renseignez-vous un minimum sur le sujet plutôt que de nous balancer des phrases toutes faites directement issues de mauvais discours d’obscurs élus UMP de province…(C’est vraiment pour être sympa avec Henri Guénot).

    La propagande, le non-sens, le renoncement à toute réflexion on se les tape tous les jours dans les médias…ici, nous tentons d’élaborer une véritable réflexion, basée sur des arguments, bref de la pensée en mouvement…

    Je ne parle pas de vérité mais simplement d’exercice intellectuel de base.

    Quant à l’avenir de la France…

    Vous n’avez pas lu le message précédent de Paul ?

    Il sera celui que vous construirez.

  9. Avatar de blackhole
    blackhole

    Plus on monte dans la hiérarchie plus on se retrouve avec des personnes compétentes sur la forme mais de moins en moins compétentes sur le fond
    Je pense que cela est vrai dans tous les métiers et tous les domaines. Aujourd’hui, c’est l’emballage qui compte pas le contenu.
    Aujourd’hui c’est le marketing au pouvoir et plus les ingénieurs.
    Il ne faut pas s’étonner d’avoir des gouvernants ignares

  10. Avatar de AAA+
    AAA+

    Les chiffres de la production automobile Francaise dans le monde et en France…

    http://www.ccfa.fr/IMG/pdf/FP3.pdf

    Les chiffres font bien apparaître 1 million de véhicules produits en France en moins de 2000 à 2009…Il semblerait que Renault a largement délocalisé sa production.
    Dire que c’est la faute aux 35 heures…Citroën a conservé sa production en France, Peugeot aussi pour l’essentiel ! Les 35h ne sont pas les seules explications aux délocalisations.
    Cela me fait penser à une statistique qui montrait que 50% des hommes atteints d’un cancer portaient un chapeau. De là à en déduire que le port du chapeau favorise le cancer…

  11. Avatar de JJJ
    JJJ

    @ Paul

    J’ai conçu, dans mon jeune temps, des « produits » pour plusieurs compagnies d’assurance. C’était très intéressant (pour moi, à tout le moins…). Mais après le passage du marketing, je ne reconnaissais plus mes enfants…

    @ Tous

    Voilà bien longtemps que les postes de direction sont squattés par des esprits formatés à leur fonction, qui n’est, en effet, pas nécessairement corrélée à leur QI (pour rester poli). Mais ce n’est pas si facile d’échapper au poids des poncifs… qui nous arrangent. Au vu des commentaires qui fleurissent sur ce blog à propos du « changement climatique », je ne saurais trop recommander une visite ici. Le rédacteur est un authentique scientifique qui démonte, avec des arguments solides et des références qui ne le sont pas moins, la propagande faire autour du CO2 et l’effet de serre. C’est passionnant.

  12. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    @AAA+,

    Les délocalisations sont essentiellement dûes à l’ouverture des marchés censés être en concurrence libre et non-faussée…Il faut ici attacher de l’importance à l’adjectif employé….censé.

    Car la réalité des marchés ce sont des inégalités immenses entre les différents pays en concurrence…

    Un ouvrier français payé au SMIC, avec un système de protection sociale élevé (congé payés, sécurité sociale, contrat de travail protecteur, indemnité de licenciements etc.) ne fait effectivement pas le poids face à un polonais payé au lance-pierre et privé de nombreux droits.

    Je ne parle même pas des ouvriers chinois…

    Cela concerne le versant concurrence en rapport avec le coût de production du poste « travailleur ».

    A un autre niveau, il faut aussi aborder le « problème » du retour sur investissement c’est-à-dire la rapacité des actionnaires qui au prétexte fallacieux de la prise de risque exigent toujours plus de dividendes…

    Or, comme le coût de production le plus « ajustable » est constitué par les salaires, délocaliser permet à de nombreuses entreprises d’assurer à leurs actionnaires les dividendes exigés.

    Notre ami captainsky étant un boursicouteur, il lui est plus facile de vilipender les 35 h, que de réfléchir plus loin que le bout de son portefeuille d’actions…

  13. Avatar de Dissonance
    Dissonance

    Ce billet et le commentaire de J. Alexandre notamment me paraissent en droite ligne des réflexions sur l’éducation que j’ai déjà exposées ici: En produisant des cohortes de « singes savants » qui ne comprennent rien du fond des méthodes qu’elles utilisent, on se tire une balle dans le pied à moyen ou long terme: Ce n’est pas parce qu’on sait mémoriser un maximum de choses (Faits ou méthodes, peu importe) qu’on garantisse de quelque manière que ce soit la compréhension des concepts rattachés.

    L’informatique courante est l’illustration par excellence: Un ordinateur non programmé initialement ne « sait » rien faire. Une fois une méthode de calcul insérée en mémoire, il traite les informations qu’il reçoit au moyen de la méthode en question. Ni plus, ni moins. Il ne sait pas inventer de méthode par lui même, et ne sait pas traiter les informations non envisagées par la méthode. Si on a programmé l’ordinateur pour compter des choux et qu’on tente subitement de lui faire faire de la soupe, il sera tout simplement incapable de le faire. De même si on tente de lui faire compter des ananas. L’ordinateur est un idiot obéissant.

    Par ailleurs, en France par exemple, nous fonctionnons sur un modèle éducatif à deux variables:

    – Un taux de réussite aux examens (qui au fil des années tend à s’étendre à de plus en plus de diplômes, toujours plus hauts)

    – Un classement des élèves et étudiants en fonction du résultat.

    La première variable introduit la relativité de la seconde:

    1/ Prenez 100 personnes, dont aucune ne maîtrise correctement un concept donné le jour d’un examen (Au hasard, le baccalauréat – 80% de réussite attendu).

    On classe par ordre de compréhension ces 100 personnes. Les 80 premières sont reçues.

    Ce qui ne varie pas: Ces 80 là n’ont pas BIEN compris le concept en question, elles l’ont seulement MIEUX compris que leurs 20 infortunés condisciples.

    2/ Dans un autre groupe de 100, tous ont très bien compris ce même concept. Mais encore une fois, certains mieux que d’autres. Le verdict final tombe: les 20 derniers du classement sont recalés.

    Replacez les 80 du groupe initial dans un nouveau groupe de 100, qu’on obtient grâce aux 20 recalés du groupe 2, refaites leur passer le même examen, et le classement se trouve décalé. Le 61ème du groupe 1 se retrouve 81ème de cette promotion. Et se fait recaler.

    Je vais plus loin que J. Alexandre dans son analyse: Les ingénieurs idiots existent aussi. Ceux ayant eu la chance (ou le nez creux) de se trouver dans « la bonne promotion », dans « la bonne école ». Ce n’est pas tant une question de catégorie socio-professionnelle que des conditions de sélection du système éducatif. A ce titre, j’avoue mon ignorance: Comment sélectionne-t-on les « élites » dans d’autres pays (aux Etats Unis par exemple)?

  14. Avatar de Vincent Porel
    Vincent Porel

    Préméditation retenue.

    Au niveau « micro » je ne pense pas, mais au niveau macroéconomique, la simple cessation de publication de M3 est un témoin suffisant, les autorités monétaires savait pertinemment ce qu’il se passait et pourtant ils n’ont rien fait si ce n’est éteindre le voyant.

    Le simple ratio Datte/PIB est condamné a explosé (il doit être de 400% à l’heure actuel), toute tentative d’épargne, d’impôt etc. bref les paradoxes d’écoles (pour une fois ou les théories ont « raisons ») ne ferait qu’accélérer l’explosion… et la faillite des USA.

    Au niveau microéconomique, les acteurs peuvent ne pas en avoir conscience mais au niveau macro je ne le conçois pas sinon ils n’auraient pas éteint les voyants. Je suis donc convaincu que les autorités monétaires savaient dés 2006 que leurs pays couraient à la faillite.

    Pour la petite histoire, j’ai travaillé 1 an en contrôle de ce que l’on appellerait aujourd’hui produit toxique (il s’agissait de produit structurés). A cette époque tout le monde avait les yeux braqués sur la volatilité stochastique, un genre de théorie des cordes du financier tant tous les modèles peuvent coller et ne pas coller pourvu que l’on « calibre ».

    Nous voyions les risques mais nous ne les contrôlions pas (à titre d’exemple, pour se couvrir d’un certain risque il aurait fallu racheter 30% d’un laboratoire pharmaceutique anglais côté au FTSEE).

    Bref, je suis tombé un jour sur un courtier indépendant qui vouait me vendre un produit dont j’avais moi-même été « contrôleur » , après l’avoir écouté, j’ai passé 30mn a lui expliquer tous les « mensonges » qu’ils m’avait dit, je veux croire à son insu tant la fonction de pay off était « illisible ».

  15. Avatar de Stubborn
    Stubborn

    «Quel avenir pour la France? C’est la question que je pose.»

    Moi la question que je me pose, ce serait plutôt : quel avenir pour la Terre ?
    Enfin, chacun son nombril.

    Ceci étant, bonne nouvelle, plus je fréquente ce blog, plus je me trouve optimiste.
    Peut-être parce qu’en comparaison de certains commentateurs découragés à force de dégoût, je reste foncièrement persuadée que quelque chose de bien, d’important, de nouveau, d’essentiel pour l’homme, sa destinée et sa descendance, est en train de germer au milieu du marasme entamé…

    Mais surtout parce que je découvre des économistes non portés disparus qui réfléchissent, se donnent la peine, confrontent des idées solides, sérieuses et denses, et que cela me parait non seulement réjouissant pour le geste, mais infiniment plus important que toute action présente, bruyante et infondée. Certes la matière est lente, mais gageons que ce qui s’énonce et se pense ici finira par trouver son chemin et porter ses fruits un jour. Et puisque la physique quantique nous enseigne que «Tout peut arriver, il suffit d’attendre.», pourquoi, pour une fois, ne pas attendre le meilleur !?

    Non vraiment, excepté l’agacement prodigieux que me cause l’observation selon laquelle «Moins Paul Jorion dort, mieux il écrit, le bougre !», je trouve ce blog non seulement consolant, mais au milieu de l’endormissement général et du ralenti de l’effondrement, lumineusement rassurant.

  16. Avatar de H.F.D.
    H.F.D.

    Lorsque j’étais en fac de math, je me suis rendu compte que pour réussir les examens, il n’était absolument pas nécessaire de comprendre ce que l’on faisait mais uniquement de savoir s’il fallait résoudre l’exercice comme l’exercice 2 de la page 26, ou comme l’exercice 8 de la page 42. C’est ce que faisait brillamment la major de l’amphi, qui ne prenait pas la peine de noter les démonstrations, et qui surtout ne se posait jamais de question sur le bien fondé de ce qu’elle ingurgitait. J’imagine que lorsque l’on fait polytechnique ou équivalent, les meilleurs étudiants utilisent cette technique pour réussir dans leurs études. Et après, et bien ils utilisent la crise de 1929 ou de 1991 pour résoudre la crise actuelle. Y arriveront-ils? Utilisent-ils le bon exercice pour résoudre la crise actuelle? Pour ma part, je n’en mettrais pas la main au feu, mais ce dont je suis à peu près sûr, c’est qu’au vue de leurs formations, ils font ce qu’ils ont toujours fait, et si l’exemple qu’ils utilisent pour résoudre le problème n’est pas pertinent, ils ne s’en rendront compte que lorsqu’ils obtiendront les résultats. Pour l’instant ils sont persuadés d’avoir brillamment réussit l’épreuve et s’auto congratulent à tout va. Pour la note finale, en verra, mais on risque d’être déçus. Pas eux, ils ne se rendront même pas compte qu’ils se sont plantés et nous serviront quelque bouc émissaire sur un plateau pour garder la tête haute et continuer de plus belle. Pour l’instant ils nous servent Madof dont le seul tort par rapport à eux est de n’avoir pas pu imprimer des dollars afin d’acheter les nouvelles souscriptions destinées à payer les intérêts des anciennes. Mais si un jour le dollar ne vaut plus assez pour continuer à acheter les bons du trésor ne trouvant pas preneur, alors, Madof sera considéré comme un nain.

  17. Avatar de Dissonance
    Dissonance

    @blackhole

    « Plus on monte dans la hiérarchie plus on se retrouve avec des personnes compétentes sur la forme mais de moins en moins compétentes sur le fond. »

    Tout est là: http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Principe_de_Peter 🙂

  18. Avatar de Dissonance
    Dissonance

    @H.F.D.

    http://www.pauljorion.com/blog/?p=2486#comment-21644

    l’Avant-dernier paragraphe notamment vous semblera sans doute familier. 🙂

  19. Avatar de JJJ
    JJJ

    Mais oui, ghostdog, ne vous fâchez pas. Et soyez compatissante à l’égard de captainsky qui voit fondre son portefeuille en dépit de votre productivité 🙂

  20. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    Le problème n’est pas tant que les marketeux soient idiots mais qu’il existe des départements marketing et que ceux-ci soient à l’origine des décisions qui sont prises dans les entreprises. La question devient alors : dans quel système économique n’aurions-nous plus besoin de service marketing ? Le marketing est bien le coeur de l’idéologie capitaliste contemporaine, elle n’en est pas un accessoire, mais la pièce maîtresse. Il ne s’agit donc pas de faire du marketing intelligent, mais de ne plus en faire du tout !!
    Les marketeux sont effectivment des crétins dans le sens où ils ont une vision appauvrie de la société et des individus qui la composent. Toutes les dimensions de nos vies y sont réduites à des niches de profit — les marchés — à conquérir. Le marketing d’une certaine manière s’oppose à la démocratie, car il fait de chaque citoyen un consommateur et non pas un sujet inventeur de sa vie, y compris à travers ses activités productives, lesquelles aujourd’hui n’apportent qu’un pouvoir d’achat et non pas la possibilité de trouver quelque bonheur à simplement créer, oeuvrer, servir à des projets qui ont un sens aussi bien individuel que collectif.

    Le marketing n’a pas d’autre origine que la dissociation qui s’opère dans le modèle industriel actuel entre fonction de production et consommation. Il implique donc une prolétarisation généralisée. Je rappelle que pour Marx le prolétaire n’est pas exclusivement l’ouvrier, mais est la condition de tout salarié aliéné dans son travail, en tant qu’il n’y a qu’un rôle purement fonctionnel au service du capital. On en revient toujours au même point : tant que capital demeure le principe directeur du système économique il est illusoire de vouloir améliorer l’existant. Tout comme on ne peut moraliser le capitalisme, il est tout aussi hasardeux de vouloir moraliser le marketing.

  21. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    Précision : le but de mon commentaire n’était pas de décréter la supériorité intellectuelle de l’ingénieur sur le marketeur. Nous sommes d’accord qu’il est aisé de trouver des crétins dans ces 2 CSP. Le but était davantage de pointer l’inanité du marketing contemporain, et adressait donc plutôt la question de la valeur fonctionnelle que celle de la valeur des hommes. D’autres pointent néanmoins à juste titre me semble-t-il la corrélation qui s’opère alors entre éducation, valeur fonctionnelle des métiers et jugeote de ceux qui y aspirent ou s’y retrouvent par un biais ou un autre.

    Je trouve le prolongement de cette réflexion dans la conclusion du commentaire de Pierre-Yves D. développé ci-dessus auquel je souscris : le marketing étant au coeur de l’idéologie capitaliste, il ne s’agît pas de faire du marketing responsable mais de ne plus en faire du tout. C’est important, et c’est pour cela que je le souligne, car c’est une porte d’entrée puissamment intuitive, y compris pour les décideurs qui doivent eux aussi faire face à l’incongruité de solutions proposées qui correspondent de moins en moins à leur desiderata.

    A titre d’exemple, lu dans le Financial Times hier, une étude menée par l’IBM Institue for Business Value auprès d’investisseurs sur les produits financiers proposés par leurs fournisseurs que je vous résume ci-dessous.

    Confrontés à l’affirmation suivante « Providers offer products that serve their firms’ best interests » (les fournisseurs proposent des produits qui servent au mieux leurs propres intérêts) :

    – plus de 60 % des clients (Amériques, Europe, Moyen-Orient, Afrique et Asie réunis) sont d’accord.
    – plus de 50% des fournisseurs américains et environ 40% pour les autres continents sont également d’accord.

    – environ 30% des clients pensent que les fournisseurs sont neutres, contre 40 % des fournisseurs qui se déclarent neutres.

    – Seulement 5% des clients ne sont pas d’accord avec cette affirmation, contre environ 20% des fournisseurs

    Je cite une partie de l’article :

    The most important area to adress {is} meeting clients’ needs. A majority of the investors surveyed said providers offer products that serve their own interests rather than those of clients. Quite a few providers agree with that assessment. Also, most providers were unaware of the products and services moste valued by clients. Providers thought best-in-class offerings and one-stop-shops would become more important over the next five years, while clients prioritised unbiased advice and service excellence.
    « The industry is in denial. It is going through a process of self-reflection, but the culture is still, the bigger the better »

    Si même les investisseurs s’y mettent… 🙂

  22. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    @Pierre-Yves,

    cela faisait longtemps que vous n’aviez pas posté…ravie de vous lire à nouveau !

    @JJJ

    Aucune compassion de ma part pour les actionnaires petits ou gros…ils peuvent crever la g… ouverte…’béciles ! :°)

  23. Avatar de syl
    syl

    moi ce que je préfère chez les marketeurs c’est l’hypocrisie fantastique de
    « s’ils ont voulu -acheter- s’endetter- signer le contrat-.. c’est leur responsabilité individuelle ces pauvres c… »

    ça n’est pas parce qu’on a dépensé des millions pour leur faire croire que leur vie ne serait réussie que lorsqu’ils auraient un(e) nouvel (le) voiture-maison-télé-canapé-pelouse-… »your family deserves it « 

  24. Avatar de Le Fan
    Le Fan

    vous vous trompez de cible,les marketeux sont la pour faire vendre et vu l’importance de la consommation dans l’économie il est  » normal » qu’ils aient le premier rôle.,

    La capacité des scientifique à créer des biens utiles et donc commerciable sans campagne marketing étant inférieur a la capacité des marketeux à nous vendre de la bibeloque on comprend aisément le renversement des rapports de force au sein de l’entreprise.

  25. Avatar de EOMENOS
    EOMENOS

    Je vais, comme d’hab,.me faire beaucoup d’amis.

    Oui, la plupart des gens sont ignares dans la matière ou chacun de nous est spécialiste.
    Oui, même au délà, beaucoup de gens sont parfaitement naïfs et stupides. C’est un plaisir de les rouler, de les flouer.
    Dans la vie, y a les baiseurs et les baisés.

    Tout cela est vrai, hélàs. Et trop de gens par feignasserie se refusent à l’effort intellectuel même lorsqu’ils en sont parfaitement capables.
    Toutes ma vie active j’ai du composer avec le conseil aux riches imbéciles indécrottables et aux aisés feignants ou tellement dépassés par leurs horaires monstrueux qu’ils avaient décidé, sur ma bonne gueule, de me faire confiance.

    Tant les uns que les autres j’ai mis un point d’honneur à les servir du mieux que je pouvait.
    J’ai rencontré dans les agences bancaires beaucoup de sans grade qui valaient beaucoup mieux que leur hiérarchie.

    Si j’avais suivi les conseils des imbéciles criminels qui m’étaient présentés comme spécialtes du priviate banking par le siège
    central d’une très importante banque, mes placements auraient depuis 2006 été 2 fois en faillite.

    La finance est pourrie par la tête. Je comprends parfaitement pourquoi un ex-président CA Fortis à engagé des gardes du corps
    On a beau pondre des codes d’éthique il faut commencer par être soit même compétent, honnête et HUMBLE.

  26. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    syl

    Bien d’accord avec vous, les marketeurs sont dans l’hypocrisie, le déni total de la réalité quand ils reprochent à leurs clients leurs choix, car la suite logique du marketing est nécessairement la publicité, laquelle a précisément pour fonction de séduire les publics qui sont préalablement profilés par les marketeurs. La psychologie désigne ce genre de discours sous le vocable « double bind », autrement dit l’injonction contradictoire, de la même espèce que le fameux : « il est interdit d’interdire ». Condensés en une formule le discours et la pratique effectifs du marketeur-publicitaire donnerait : « n’achetez surtout pas ce produit qu’il serait vraiment bon pour vous que vous achetiez ». C’est tellement vrai que récemment on voit apparaître un nouveau type de publicité ouvertement cynique. Dans l’une d’elle était même repris le slogan soixantuitard « il est interdit d’interdire. » Que ce genre de publicité apparaisse sur nos murs en dit long sur l’état de déliquessence de « l’esprit » du capitalisme.

    Le marketing et son pendant constituent bien une idéologie, car il s’agit d’une rhétorique socio-économique, qui fait mine de seulement proposer des produits mais en réalité les impose de mille façons, c’est à dire par la publicité spécifique à tel ou tel produit, mais aussi par les messages innombrables véhiculés par le système dans son ensemble quand les industries de la culture et du divertissement font la promotion du mode de vie consumériste.

  27. Avatar de iGor milhit

    d’un côté la théorie économique classique qui présuppose un homo economicus calculateur parfaitement rationnel
    de l’autre, l’effort considérable fait pour troubler le jugement (publicité), pour court-circuiter l’idée même d’une quelconque réflexion, et le tout basé sur la connaissance de l’inconscient…
    c’est d’ailleurs M. Pierre-Yves D. qui expliquait (je ne sais plus où et quand…) que depuis pas mal de temps le capitalisme exploite non plus seulement la libido, mais les pulsions…
    double bind en effet

    a-t-on jamais envisagé les dégâts de la publicité sur la santé psychique?

  28. Avatar de Alain A
    Alain A

    @ Pierre-Yves
    Quand on a compris que le marketing et la pub ne sont là que pour vous formater et faire de vous un consommateur captif, on peut s’amuser beaucoup à être rebelle. Je fréquente de plus en plus de personnes qui notent les pubs envahissantes et n’achètent plus jamais ces marques là (et en plus de se faire plaisir, ils y gagnent car le consommateur paie inévitablement la coûteuse pub sur le produit). Plus largement, une vie décalée, indifférente aux sirènes de la « consommation ostentatoire de la classe de loisir », semble apporter temps libre et joie de vivre.
    @Ghosdog
    Quand j’ai lu le billet de Captainsky je me suis demandé qui allait lui rentrer dedans. Vous vous y êtes collée. Le dog en vous mord toujours aussi durement, j’espère que lvotre part « ghost » est plus sereine. D’ailleurs, si tous les boursicoteurs suivent la courbe descendante des avoirs de leur maîtres et modèles (le top 10, 50 ou 100 des grandes fortunes), soyez heureuse : cela ne doit pas rigoler tous les jours chez les nantis.

  29. Avatar de captainsky
    captainsky

    Ah ces phraseurs de francais….

    Heureusement qu’en France on est plus productif qu’ailleurs vu le peu de gens qui travaillent….
    L’Allemagne [ex RFA] est l’exportateur mondial numero 1 pour une population similaire a celle de la France et elle se permet de prelever chaque annee 10 points de moins que la France. Si vous voulez comparer la moitie de la France a l’ex RDA, c’est avec plaisir….

  30. Avatar de clive
    clive

    « N’attribue pas à malice, ce que crétinerie explique aussi bien ! »
    certes
    mais la crétinerie et/ou l’incompétence peut tout expliquer
    essayez, ça marche
    celui qui vous passe devant dans la file d’attente est-t-il un crétin ? ou un malin qui prend des airs de crétin ?
    le monde de la finance serait donc un concentré de bétise dénué de malice ?
    je serais plutôt pour des explications multiples, crétinerie, incompétence, addiction, cupidité, indifférence, égoïsme….ET malice.
    mais c’est pas mon milieu
    je peux me tromper

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