Ce texte est un « article presslib’ » (*)
Quand le système bancaire s’est effondré, l’argent qui manquait, on est allé le chercher dans la poche du contribuable. C’est très vilain mais ce n’est pas passé inaperçu : le fonctionnement implicite du système financier est apparu en surface, au vu de tous. Cela n’avait pas été prévu : l’« oligarchie », pour utiliser le terme qu’affectionne Simon Johnson, l’ancien économiste en chef du Fonds Monétaire International, aurait sans aucun doute préféré davantage de discrétion.
Quand je dis « sans aucun doute », certains sont d’un avis contraire, qui pensent que tout cela était prémédité : de l’effondrement au rétablissement sans vergogne. Je ne le pense pas, et vous allez voir pourquoi.
L’un de vous me communique un extrait d’une conversation récente :
Mr. X. responsable du top management de la Rabobank (à propos de l’obligation de brochures informatives en cas de vente de produits financiers) : « Les gens n’y comprennent rien, et de toute façon, ils ne les lisent pas, donc forcément ils ne savent pas à quels risques il s’exposent. Tout ceci est de leur faute, les vendeurs de ces produits respectent leurs obligations »
Le responsable à la Commission Européenne : « Mr X, vous avez déjà essayé de lire une de ces brochures ? Le problème n’est-il pas plutôt lié au fait que vous ne savez pas vous-même ce que vous mettez dans ces produits et que vous êtes incapables de les évaluer et donc de dire clairement au client ce qu’il encourt ? »
Le responsable à la Commission Européenne sait de quoi il parle : il semble très bien connaître le milieu financier. Sa remarque m’a rappelé une expérience personnelle, à l’époque où je travaillais pour la banque commerciale Wells Fargo à San Francisco. Le département marketing interrogeait les clients pour connaître les désidérata des clients en matière de crédit à la consommation, puis il nous communiquait à nous, au département pricing, le résultat de ses investigations comme une « décision ayant été prise » (ultérieurement, la procédure fut moins expéditive et un comité « nouveaux produits » fut créé, dont je faisais partie). J’ai ainsi hérité d’un projet à l’ambition délirante : un prêt convertible à tout moment en ligne de crédit et inversement.
Pour le mettre au point, j’ai créé un modèle à facteurs de risque à six variables, qui calculait soit la rentabilité – le taux étant fixé, soit le taux – pour une rentabilité déterminée, de SmartFit (c’était le nom du produit) pour la formule prêt et pour la formule ligne de crédit, ainsi que les taux de conversion d’une formule dans l’autre, et ceci en fonction du profil du consommateur et du type de logement envisagé. Après que SmartFit ait été lancé, j’ai un jour évoqué lors d’une réunion, le « produit que j’avais conçu ». Quelqu’un du département marketing s’est alors offusqué : « Mais c’est nous qui avons conçu ce produit ! » Un cousin de Mr. X de la Rabobank, sans doute.
Souvenons-nous toujours du vieil adage : « N’attribue pas à malice, ce que crétinerie explique aussi bien ! »
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
115 réponses à “« N’attribue pas à malice… »”
@ Tartar
il ne s’agit plus simplement de convaincre les dirigeants. Si c’était le cas, tant mieux, mais, comme dit l’adage, aide-toi et le Ciel t’aidera. La constitution pour l’économie, comme son nom l’indique, est un acte politique. C’est donc à nous tous de faire pression sur les politiques par tous les moyens non létaux qui sont à notre disposition pour faire pencher la balance du bon coté, en l’expliquant, en diffusant le plus largement possible l’idée.
IL ne s’agit pas d’une directive européenne ni d’une résolution de l’ONU, même si cela pourrait passer par ce biais, mais d’un acte constituant, ce qui a une tout autre portée et suppose le mouvement de forces politiques non conventionnelles puissantes. C’est donc à nous citoyens de base de jouer, les grands partis sont toujours à la traîne ce n’est que lorsque le mouvement deviendra irrésistible qu’il prendront le train en marche.
Autant dire que si cette constitution était adoptée cela signifierait qu’il y a eu en amont tout un travail car il est bien évident, comme vous le remarquez, que les dirigeants ne l’adopteront pas spontanément. C’est une idée nouvelle, elle doit donc d’abord faire son chemin. Ne me demandez pas combien de temps. Je n’en sais rien. Mais qui ne tente rien n’a rien. Si sa mise ne oeuvre nous paraît improbable raison de plus de nous y tenir ; il n’est pas d’idée nouvelle qui soit originellement et universellement évidente. La politique est toujours un pari sur l’avenir. Ce n’est pas une technique de gestion, mais l’élaboration de solutions nouvelles pour des situations nouvelles.
@ Ton vieux copain Michel
je suis entièrement d’accord avec votre remarque.
C’est précisément parce ce que toutes ces technologies numériques et autres sont devenues des prolongements de nos personnes — des artefacts, au même titre que l’écriture par exemple, qui reconfigurent notre condition humaine et ses possibilités –, qu’il faut réfléchir à leur meilleure conception et à leur répercussions sociales pour que nous ne soyons pas instrumentalisés par elles, mais qu »au contraire elles soient pour nous des instruments au service de l’émancipation.
Aujourd’hui nous ne le voyons que trop bien ces technologies sont très vite rendues obsolètes, limitant notre appropriation sociale de celles-ci. Leur conception et leur utilisation est loin d’être socialement optimale, elle est surtout profitable.
C’est ainsi toute la réflexion d’un Bernard Stigler et son équipe autour d’ Ars industrialis que de proposer des pistes de réflexion sur ce thème, notamment en distinguant les technologies qui constituent les milieux techniques associés et celles qui créent des milieux techniques dissociés, lesquels sont largement utilisés et promues par le marketing et la publicité. Tout ce tient.
@Ton vieux copain Michel
« Renoncer à ces produits, ce serait comme séparer des jumeaux siamois. »
Je ne crois pas qu’un renoncement au consumérisme implique un abandon des nouvelles technologies, bien au contraire.
Les avancées scientifiques ont pour problème congénital d’être récupérées, confisquées dans l’oeuf par une caste de spéculateurs, qui n’envisagent une nouvelle technologie qu’en termes de profit sur le dos du public.
Les grands programmes lancés dans les Universités, les labos, sont le fruit d’une sélection atroce fondée sur cet unique critère spéculatif. Combien de projets n’ont jamais été menés à bien, alors qu’ils auraient été révolutionnaires pour notre mode de vie ?
Dans le domaine automobile, de doctes experts expliquent périodiquement que la voiture mue par une pile à combustible ne risque pas de voir le jour de sitôt, car, entre autres, « vous rendez-vous compte, il faudrait remplacer l’intégralité du système de distribution mondial de carburant ! »
Ah bon ? Et quand il s’est agi d’installer un réseau ex nihilo pour le pétrole, au début du XXème siècle, on ne s’est pas posé ce genre de questions !
Ce que ces experts omettent de préciser, c’est que les compagnies pétrolières qui, au passage, comme par hasard, détiennent les brevets les plus viables sur la pile à combustible (pardonnez-moi, je n’ai plus les références web sous la main), veulent nous essorer au maximum avec le pétrole avant de passer à un autre type d’énergie.
Pour ce qui est de la symbiose mode de vie « traditionnel »/nouvelles technologies, j’ai été charmé par ce que j’ai vu en…Islande. Oui, d’accord, je vous sens ricaner, mais l’installation de la fibre optique sur quelques milliers de km n’a pas causé la faillite d’un pays !
Bref, en 2006, j’y étais, et la population rurale maniait avec une égale dextérité la langue islandaise comme l’anglaise, le tracteur comme le web. C’EST POSSIBLE.
Il faut se défaire de cette saleté de Matrice où l’on est enfermés, qui amalgame progrès médical et scientifique avec la logique du profit.
@ Ton vieux copain Michel et Pierre-Yves D.
Je ne sais pas. Il y a quelques années, pour des raisons un peu délicates à expliquer, je me suis retrouvé en quelques semaines, et pour plusieurs années, dépouillé de mon ordinateur et de ma ligne de téléphone, ainsi que de mon mobile. Pendant quelques temps je n’avais même pas la possibilité d’écouter de la musique (télé et radio ne me manquent pas, je vis très bien sans). J’ai retrouvé le plaisir d’écrire à la main, de réfléchir à quelles possibilités les objets simples que j’avais autour de moi pouvaient m’être utiles à faire ce que je voulais faire. J’ai pu constater quelle était la richesse de pouvoir accéder facilement aux bibliothèques publiques, c’est véritablement les restos du cœur du savoir. Souvent avec peu d’outils et quelques contraintes on est plus créatifs qu’avec tout à disposition et carte blanche.
Puis, peu à peu, au fil des années, j’ai retrouvé l’outil numérique (d’abord un « vieux » pc sans connexion) et j’apprécie bcp me remettre à jour. Ce qui fait que je ne pratique les blogs, comme celui-ci, que depuis quelques mois…
Tout ça pour dire qu’on peut se passer de biens des choses sans souffrir plus que cela. Il serait possible d’apprendre à les partager aussi…
Question sevrage, je trouve que le manque de contacts humains (et sans l’irréalité qu’apporte la distance infranchissable de l’écran) est bien plus pénible.
Je ne voudrais pas non plus dire qu’on vivait mieux avant l’invention de l’électricité, mais qu’il ne faudrait pas exagérer notre dépendance… c’est surtout une croyance diffusée grâce au marketing et pub… non?
Je vous entends bien.
Le « marketing » de la constitution de l’économie devrait donc passer par le net.
Par nous.
Il serait bon d’en écrire une version très compacte et claire précisant ce qu’elle supprime comme errements et ce qu’elle autorise désormais.
Compacte pour moi c’est comme le « préambule de la constitution », —-quelques lignes de texte—- à distribuer par chacun d’entre nous sur tous les blogs et fora que nous fréquentons .
Restera aux patrons de Pauljorion.com à héberger le pavé officiel vers lequel pointeront nos interventions sur les sites nombreux parlant un tant soit peu d’économie.
Igor Mihilt
vous êtes ma conscience romantique. Vous dites un peu tout haut ce qu’il m’arrive de ressentir aussi.
Ou plutôt, il existe en moi une réelle tension entre d’un coté un désir que tout aille moins vite (moins zap zap du coup !)
pour mieux goûter à la vie, car je suis inquiet des évolutions en cours où la technologie joue un rôle majeur pour nous asservir à des besoins superfétatoires, et d’un autre coté qui me dit que si je ne prend pas la mesure de la situation réelle de notre monde contemporain, autrement dit si je ne fais rien pour faire en sorte que le développement technologique ne soit pas destructeur de la sensibilité et au service de l’aliénation sociale, je risque de me retrouver dans une situation pire que celle où je me trouverais en me repliant sur mon quant à soi, tout de dédain pour la marche forcée du technologique.
L’idéal serait pour moi que le nouveau monde possible accueille les nouvelles inventions mais que ces dernières ne nous rendent pas nécessairement captifs de leur usage. Or nous savons qu’aujourd’hui sans une connexion à Internet, un téléphone portable, pour l’immense majorité d’entre nous il est difficile d’avoir une vie sociale. Si pouvons nous priver de ces outils le temps des vacances mais il nous est difficile de nous en priver durablement sauf à vivre des vies d’ermite ou de SDF.
Voilà la raison pour laquelle il me semble raisonnable d’essayer de penser, configurer dans un sens le plus humain possible les nouvelles technologies, sans quoi ce sont elles et la société qui lui sera inhérente, qui penseront pour nous.
Ceci dit il n’y a aucune nécessité absolue à ce que l’humanité dispose d’automobiles ou de télévisions.
D’autres inventions pourraient être faites, lesquelles pourraient en toute hypothèse revêtir la même importance que les deux que j’ai citées. Bref la technique, la technologie ne sont pas des domaines à part, mais déterminent nos sociétés, de même que l’organisation sociale spécifique de notre monde contemporain prédispose à l’émergence de telle ou telle technique.
Enfin n’oublions pas qu’il existe des sociétés humaines qui survivent, vivent en quelques endroits du monde sans même l’écriture, et tous les artefacts qui nous sont familiers, ce qui ne signifie d’ailleurs pas qu’elles sont moins sophistiquées. Seulement leur sophistication se définie autrement.
@ Tartar
Surtout pas le marketing. Une constitution n’est pas une solution clé en main que l’on impose par la propagande.
Ce qui fait sa force c’est qu’elle est l’expression d’une nouvelle volonté citoyenne qui la fait sienne parce qu’elle y voit
une réponse adéquate à une situation devenue intenable et invivable. Quand la constitution sera adoptée cela voudra dire que la solution au problème de la crise était déjà en marche. La constitution ne fera qu’entériner la nouvelle donne.
Bien entendu elle aura ensuite toute son efficacité propre, en tant qu’élément de référence et en tant que dispositif juridique.
Elle sera aussi là pour rappeler à tous ceux qui la verraient d’un mauvais oeil, que telle est la nouvelle règle que la société des humains s’est donnée. Il s’agit en somme d’un nouveau « contrat social ». On peut aussi la voir, comme le fait Paul, idée que je partage également, comme un nouveau stade dans l’évolution de la démocratie. Ce que je dis là est évidemment une vue idéaliste des choses. Dans la pratique elle pourrait s’imposer par des détours inattendus, ou même ne pas voir le jour du tout sans pour autant que l’idée n’ait été vaine dès lors qu’elle irait porter ses fruits ailleurs pour un résultat également positif.
aussi n’ayons nullement peur de « penser, configurer dans un sens plus humain », que ce constat que nous sommes « accros » ne nous effraye pas au point de nous figer, ne nous laissons pas asservir si facilement.
la théorie qui part du principe de l’homo economicus rationnel, dit qu’il faut s’en remettre au marché et demande à la pub de nous encourager à nous laisser aller, tout en tenant le discours de la responsabilité, sans oublier que le marché est une loi naturelle, TINA…
et une vision de l’humain plus structuraliste, moins sûre du sujet, pourrait justement amener à ne pas vouloir devenir une chose pensée par l’outil technologique et se défendre en pensant, et cela justement parce que cette perception de l’humain permet d’envisager que les outils nous façonnent… je suis convaincu qu’un certain anti humanisme est plus humain qu’un humanisme creux et écervelé….
voilà, c’était ma petite minute pseudophilo, mes excuses…
Je ne vois que 2 moyens qui ont permis par le passé la naissance de constitutions:
– la révolution
– la peur d’une révolution
Dans tous les cas, ça impliquait qu’une part importante de la population ait compris que les règles du jeu devaient changer.
La situation actuelle n’est pas encore suffisament dramatique pour que les peuples se rassemblent en masse et exigent de tels changements.
Si les banques faisaient faillites et que les petits épargnants étaient spoliés, la un mouvement massif pourrait naitre.
Mais les banques seront sauvées, car la planche à billet suffit pour le faire. Et donc nous serons tous ruinés par l’inflation ensuite, mais ça se fera tout doucement, donc de manière indolore (comme pour la fameuse grenouille plongée dans de l’eau portée petit à petit à ébullition).
Quoi qu’il en soit, je constate un nombre toujours plus important de projets qui vont dans ce sens. Changer la constitution française, changer nos modes de vie, changer le fonctionnement de la monnaie, changer nos manières de travailler. Je trouve tous les jours de nouveaux sites qui parlent de ça. L’idée est vraiment « dans l’air » qu’il est possible d’inventer de nouveaux modèles. Mais pour l’instant ça n’est encore que trop embryonnaire pour être repris par des partis importants (comme ils ont repris l’écologie quand c’est devenu incontournable), donc il reste encore un long chemin a parcourir.
Mais le dernier article de contreinfo me donne pourtant un grand espoir: http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2688
Bientot on va découvrir que les 35 heures ce n’était pas une erreur économique mais que la france était juste un peu trop en avance sur son temps 🙂
@ Arconus
Les 35 heures ont été une grosse erreur, qui a eu comme effet secondaire de plomber toute idée de réduction du temps de travail. Il fallait passer directement à 32 heures !
Les 35 heures sont surement une erreur et surtout pas en pas assez ou en trop mais ne correspondent pas à la réalité d’un groupe naturel ou la répartition se fait suivant une courbe de Gauss. Naturellement nous ne dormons pas le même temps, nous ne nous occupons pas le même temps, nous ne nous prélassons pas le même temps. Certains se retrouveront donc à dormir au bureau ou à tirer au flanc en faisant de la présence en fait innefficace d’autres se retrouveront sans tâches à effectuer et à s’ennuyer plutôt que d’être productif ou créatif et souvent les mêmes mais à différents période de leur vie. Mais évidemment il est difficile dans nos sociétés d’arriver et d’aller voir un patron et de lui dire je vais travailler tant d’heures avec la capacité d’effectuer telle tâche et cela ce négociera à tel prix. Je l’ai fais personnellement mais socialement et économiquement c’est plutôt assez infernal parce que hors norme. Je trouve normal de travailler à 3 heures du matin si j’en ai envie et de faire la sieste à 16 heures. Je ne mets plus qu’anecdotiquement un réveil matin et il m’arrive de travailler de 0 à 16 heures par jour suivant mon engagement sur un résultat et non sur une présence. L’efficacité et la liberté que cela représente en est infiniment plus grande et suite à de nombreuse comparaison quand je travaillais avec des collègues qui faisait la même chose que moi mais sa valorisation est aujourd’hui assez difficile et personne ne supporte généralement quelqu’un qui arrive trois heures après vous , termine deux heures avant et qui fait quatre fois votre travail. Il se fera détester, jalouser,rejeter et ne pourra même plus travailler au sein d’une entreprise où il finira par être inefficace parce que sans tâches là où pourtant on rabâchera à tous et continuellement, que s’ils sont plus efficaces ils auront une chance d’être promu. Ce sera un discours valable tant que les gens pourront y croire mais surtout ne vous retrouver pas dans cette situation où pour le management vous remettrez en cause l’efficacité de la carotte et du bâton car au mieux vous ne pourrez plus travailler alors que vous êtes le plus productif et au pire je ne sais pas mais il m’a fallu fuir.
Personnelement j’ai toujours penser que les personnes les plus productives étaient les plus rapide à effectuer une tâche ce qui semble tout de même logique. Donc oui au 35, 32 heures avec des gens qui arriveront à faire ce travail grâce à leur compétence et qu’on arrête de penser que la personne la plus compétente est celui qui mets 70 heures par semaine pour ne PAS y arriver et laisser ceux qui en ont la capacité le faire dans la durée normale.
Un slogan nié par les écoles de marketing:
« Le marketing CREE le besoin »
@Jean Louis Bars : je vous présente mes excuses pour vous avoir traité de troll. J’étais de méchante humeur et de plus je crois vous avoir mal compris. 🙂
Au fait, on a su finalement qui était le papa de SmartFit ?
Vous notiez : « Une constitution pour l’économie serait un pas en avant considérable s’agissant d’abandonner l’économisme et l’idéologie du marché autorégulé. Ce serait la reconnaissance officielle que l’économie laissée à elle-même est un obstacle à la démocratie, que la démocratie dans sa forme actuelle a atteint ses limites. »
Je comprends mais je n’adhère pas à la logique : je suis d’accord avec vous pour dire que la démocratie dans sa forme actuelle a atteint ses limites, mais je ne suis pas sûr que l’économie laissée à elle-même soit nécessairement un obstacle à la démocratie. L’économie est par nature laissée à elle-même. Vous et moi faisons partie de sa nature, et vous souhaitez amener l’économie à « abandonner l’économisme et l’idéologie du marché autorégulé ». Si vous y parvenez l’économie évoluera mais sera toujours elle-même. Elle se sera adaptée.
C’est cette différence d’appréciation qui me dérange. Je le répète, d’outil de nos sociétés, l’économie est devenue leur activité principale. Avec ses défauts et dangers. Je pense que le nombre de personnes qui se lassent de cette activité ne cesse de croitre. Vous devez donc avoir conscience que la mise en place d’une constitution, que vous soutenez, a de fortes chances d’accélérer la croissance du nombre de mécontents, et ce de manière exponentielle : démotivation par le haut. Pourquoi pas, la société de consommation n’y survivrait pas…
Que pensez-vous donc, vu sous cet angle, qu’il puisse arriver à nos sociétés si nous n’avons pas de plan D sous la main au moment sus-décrit ?
Merci
Pardon, mon précédent message s’adresse à Pierre-Yves D.
@ Moi dit.
Humeurs…Hummm!!!!!
Ire……?
/
Il y a de quoi vraiment. Pour ma part ,je livre largement cette adresse du site à des collégues d’un syndicat professionnel (aux salles d’attente fournies en lectures…dont celles sur les 4X4 ,les voiliers,chiens de chasse..et …?Placements financiers)……Vu ?
Ces amis dont je ne partage pas le 10e de leur fortune (fonctionnaires retraités puis installés en libéral) sauront ici de quel côté se ranger.
J’ai par ailleurs peine à suivre Etienne Chouard alors que l’Idée sur une constitution me semble séduire assez largement./
La Bile « noire » s’est vidée ? …Dieu soit loué.!
@ Moi dit
Oui,je le pense aussi(n’être pas ,ici,un troll) ,en toute bonne foi.
J’essaie d’être aussi intégre que possible sans avoir d’arrière-pensée.
Et au sujet des amis dont j’évoque la « fortune » :
Pas de mélanges : ce sont des Hommes et des Femmes au travail ,même i ce travail génére des revenus hautement confortables.
Leur souci : où placer son argent au vu de la généralisation des « Madoff »,laquell ne leur échappe pas.
Seulement,eux,que je connais parfaitement,pour l’immense majorité,ont un esprit altruiste et non cupide.
Pour ma part,j’ai choisi de poursuivre et de terminer fonctionnaire : je ne suis donc pas « riche » et je pense être ,vraiment,plus heureux que la majorité des susnommés.
Bonjour,
L’article soulève plusieurs points :
Le Marketing des produits financiers => L’objectif est de créer des produits qui soient le plus incompréhensibles possibles tout en restant dans les bornes de la loi. Plus le public vise est un public fragile, plus cela est vrai. Plus on peut vendre « a distance » sans avoir de face a face avec les clients, plus les modeles deviennent « scalable » et plus les employes sont deconnectes des consequences de leur travail.
La facon dont fonctionne, de maniere generale les entreprises => La finance nous apprend a « ne pas mettre tous les oeufs dans le meme panier », dans les entreprises, on diversifie le risque en spécialisant les gens. Chacun devient ainsi plus facilement remplacable.
Cette crise a été délibérément provoquée pour pouvoir engranger le fric des subprimes, car du fric a été empoché tout en haut de la pyramide. Avant cette crise une nouvelle bulle était en formation (il en faut toujours une sinon on en revient au potager et aux semis à la main), cette bulle est la bulle écologique : il n’y en effet aucune preuve scientifique du réchauffement climatique (à part un ours filmé par Al Gore ). Il y a en revanche déjà plusieurs industries en état de marche qui n’attendaient que le feu vert des donneurs d’ordres et en premier lieu des états, des Etats Unis en particulier. C’est fait : Obama a annoncé la croissance verte, on ne parle plus que de ça. Cela ne peut pas faire de mal direz vous. Si : aux gogos qui vont s’endetter pour acheter du solaire, de l’éolien (villes), qui vont rendre leurs immeubles « durables ». Cette bulle n’explosera pas quand l’atmosphère sera plus pure mais quand la proportion de pigeons aura atteint un seuil de saturation (quand on sera obligé de vendre des panneaux solaires à 150000 dollars à des grand-mères portoricaines sans ressources). A ce moment_là seulement on fera à nouveau exploser la bulle pour pouvoir empocher les bénéfs (bon moyen pour faire exploser la bulle : dire que l’atmosphère est propre ou plomber une banque…). Pendant ce temps il est vrai, les clampins du bas de l’échelle auront eu de quoi s’occuper et gagner un smic, c’est tout ce qu’ils demandent. Je crois que j’ai réussi à réconcilier marketing et ingénieurs.
@ Fab
J’aurais dû être plus explicite. Quand j’évoquais l’économie laissée à elle-même je faisais référence, à la suite de Paul, à une certaine forme d’économie, en l’occurrence une économie dérégulée rendue possible par tout un dispositif (constitutionnel, juridique, politique,) qui en laissant un espace ouvert au jeu sans limites de la circulation et de l’appropriation du capital, crée les conditions de la lutte de tous contre tous. Certains d’entre-nous essayons de lutter contre cet état de fait en ne jouant pas à fond les règles du jeu, mais il n’en demeure pas moins que globalement ce sont ces règles qui mènent le monde et que nous les subissons, ce qui limite nos capacités de transformation du monde et de nos vie.
Ainsi l’économie ensauvagée (je préfère l’appeler ainsi plutôt que sauvage, terme qui peut faire penser à un certain évolutionnisme) est un obstacle à la démocratie : elle prive le citoyen de la possibilité d’exercer une action réelle sur le monde car tout projet, toute décision, passe sous les fourches caudines de critères étroitement économiques, qui, inlassablement, formatent toute production humaine dans le moule appauvrissant de la culture du résultat, dont les critères sont des ratios qui renvoient tous en définitive à une productivité du capital. La démocratie n’est pas seulement le pouvoir du peuple par le peuple.Toute démocratie renvoie à la puissance, autrement dit à ce qui est de l’ordre du possible. Or dans un monde réduit aux dimensions de l’économie, celle que nous connaissons, la portée de nos actions est limitée. Celle des actions possibles dans le cadre du marché est illimitée — du moins jusqu’à ce que cette crise survienne – mais celles qui font de nous des individus à part entière à même de développer nos sensibilités et nos intelligences de façon singulière, et ce sans nuire à autrui, est dans le cadre capitaliste réduite à une peau de chagrin. Bref, dans la démocratie actuelle, là où on nous dit que nous avons une action politique, nous servons en réalité l’économie, et seulement de façon subsidiaire des objectifs sociaux qui doivent se mouler sur les exigences d’un type d’économie que d’aucuns voudraient nous faire passer pour naturelle et nécessaire alors que son ‘état de nature’ est en réalité tout à fait contingent.
J’en suis bien d’accord, l’objectif est bien de tourner le dos à la société de consommation et à l’économisme, ce qui revient au même.
Autrement dit l’économie qui ne serait plus laissée à elle-même serait une économie qui serait enchâssée dans le social avec tout celui-pourrait comporter de complémentarités, d’individuation, autant de choses qui aujourd’hui sont bridées ou alors réservées à des individus socialement privilégiés car économiquement favorisés parce que l’argent leur permet d’acheter du temps libre, et encore ce temps dont ils disposent il l’emploient le plus souvent à servir leurs intérêts économiques.
Paul ne va peut-être pas aussi loin, car il pense dans l’optique de la transition, mais l’idée affleure dans certains de ses billets qu’il s’agit bien de faire muter le capitalisme, voire le quitter à plus ou moins long terme, sans d’ailleurs pour autant renouer avec le capitalisme d’état, solution qui a déjà échouée et n’est pas porteuse d’un projet émancipateur, puisque l’individuel y est absorbé dans le collectif. L’avenir passe par la difficile articulation de l’individuel au collectif. Une constitution pour l’économie est un pas en ce sens dans la mesure où elle nous libère de la norme économiciste collective. Cela pourra sembler paradoxal, mais l’individu ne sera jamais mieux servi que dans un monde où l’économie aura des limites. IL va sans dire que les tenants du libéralisme économique n’ont pas du tout la même conception de l’individu que celle que je défends ici.
@ Pierre-Yves D.
Merci pour ce beau texte!
Je suis d’accord avec la vision de Pierre-Yves D. mais je suis très sceptique sur la stratégie qu’il préconise pour la mettre en œuvre. J’ai tendance à me méfier quand on veut placer la barre trop haut. Le critique du consumérisme est légitime mais je crois qu’on ne fait pas le bonheur des gens malgré eux. Ce week-end 700.000 Français vont se rendre à la Foire de Paris. On constate avec un certain dépit que la fièvre consumériste est encore plus prononcée par temps de crise, alors que celle-ci aurait dû théoriquement nous inciter à nous poser des questions quant au modèle de société dans laquelle nous vivons. En d’autres termes, j’estime que la prise de conscience que nous allons droit dans le mur ne peut se faire que progressivement et en douceur. Pour cela, les gens doivent être en mesure de faire leurs arbitrages. J’ai lu un livre récemment qui s’intitule « Nudge », ce qui signifie coup de pouce, donner un coup de pouce. Cet ouvrage avance la thèse selon laquelle nous sommes tous, individuellement et collectivement, confrontés à des choix complexes. Certaines décisions (quant à notre avenir, notre sécurité, notre retraite, notre santé etc) sont meilleures que d’autres et donc, tout en respectant la liberté de chacun, ce livre propose de construire des architectures de choix laissant aux gens la liberté de choix tout en les incitant en douce à prendre les décisions les plus raisonnables. Un système donnant-donnant comme la bourse du carbone (cap-and-trade), offrant des compensations et des incitants financiers aux entreprises qui réduisent leurs émissions de carbone, va dans ce sens. Krugman, qui en parle cette semaine dans son édito, indique que ce programme vise aussi à changer les mentalités en créant un nouveau paradigme : celle d’un monde où les émissions de carbone, dont le taux est désormais fixé pour l’ensemble des entreprises, deviennent des ressources rares que l’on peut acheter sur un marché, mais au prix fort.
http://www.nytimes.com/2009/05/01/opinion/01krugman.html
http://www.nudges.org/
@ simple sans tête
Il est exact que pour pour les nantis le temps c’est de l’argent puisque notre société actuelle est bâtie sur ce triste principe.
Mais pour ceux qui sont moins nantis ce temps qui est de l’argent pour les uns représente pour eux du temps libre auquel ils ne peuvent avoir accès. De mon point de vue le temps libre des nantis est aussi aliéné que celui des pauvres, mais il n’en demeure pas moins vrai que ce « temps libre », un peu comme dans la ferme des animaux d’Orwell est du temps plus libre que celui dont disposent les pauvres quand ils ont leur propre temps libre.
Ceci se démontre aisément. Les riches, ou du moins les individus aisés, ont d’abord une durée de vie plus élevée que la moyenne. Leur vie est souvent trépidante, stressée, mais tout ceci leur apporte des satisfactions évidentes, l’exercice d’un pouvoir, économique ou intellectuel.
Et si la fatigue est trop grande ils achètent un séjour dans un endroit paisible et reposant, voire s’adonnent à une activité artistique, un hobbie par lequel ils se créent parfois l’illusion de vivre une vie hautement spirituelle. Leur cadre de vie habituel est bien entendu également confortable ce qui leur procure un environnement privilégié propice au vagabondage intellectuel, indispensable même pour être efficace dans leur travail.
Je schématise bien entendu, il y a des degrés divers dans cette possibilité qu’ont certaines personnes de vivre leur vie avec ce degré de liberté.
C’est effet une question de classification : la liberté que vivent les « nantis » n’est pas une liberté absolue, mais est relative
à une certaine conception de la justice sociale. Le plus aliéné des pauvres qui lutte contre sa condition et voudrait transformer le monde est d’un certain point de vue philosophique, plus libre que le riche qui ne doute de rien et se croit libre parce qu’il est puissant. L’exercice de la puissance n’est pas la liberté vraie, celle du questionnement comme vous le dites bien, mais son inégale répartition parmi les hommes de la Cité conditionne la possibilité de « la vie bonne », pour reprendre un concept clé du philosophe Aristote, et qui me semble toujours d’actualité. La vie bonne n’est pas simplement affaire de représentation, mais est conditionnée par une structure économique, un système spécifique. Le chômeur accablé par sa condition, l’ouvrier, l’employé, malheureux au travail ne l’est pas parce qu’il ne se questionne pas, mais parce que ce questionnement — quand il peut avoir lieu — n’a le plus souvent pas les prolongements qu’il voudrait, précisément parce que sa condition sociale ne lui donne pas toutes les possibilités pour penser sa condition et en sortir, concrètement. A l’inverse, le nanti a toutes les ressources économiques et temporelles pour réfléchir à sa condition, mais le plus souvent il ne les emploie pas à cet effet, préférant conserver une position sociale confortable.
Il importe donc de changer les règles du jeu de notre monde économico-social, de sorte que tout un chacun verrait certains avantages à ce que le « système » ne fût plus basé sur l’exploitation des uns par les autres.
PYD,
Je tiens également à vous remercier pour ce bel exposé.
Que pensez-vous de l’importance de l’économie dans la stabilité sociale si on la considère comme la principale occupation (réelle, physique, temporelle, cérébrale…) d’une bonne part de l’humanité ?
Personnellement je ne vois pas comment cette occupation pourrait continuer à focaliser l’attention, la conscience de beaucoup, si on en venait à couper l’élan ascensionniste que l’économie induit en s’appuyant sur ce qui nous reste de…je ne trouve pas le mot…allez, faute de mieux, bestial. Ouf ! Je ne relis pas, de peur de ne pas comprendre…Ou pire peut-être, de comprendre.
Bien à vous.