Pour une approche apocalyptique de la crise, par Christophe Perrin

Billet invité. Pierre-Yves D. a écrit hier (pardonnons-lui le ton révérencieux) : « Paul Jorion ne manque pas de citer les réflexions et travaux de ses pairs, quand bien même il ne partage pas tous leurs points de vue. Nous nous en étonnons presque, pourtant cela ne devrait-il pas être la règle ? Peut-on, aujourd’hui, prétendre être un intellectuel si l’on n’est pas capable de dialoguer avec ses pairs, et ce au vu et au su de tous, c’est-à-dire avec les citoyens, dont on fait des partenaires et non pas seulement des réceptacles d’une connaissance infuse ? » Pierre-Yves D. a saisi en tout cas, l’amour chez moi de l’antithèse, quand je défends la thèse, et l’amour de la thèse quand je défends (beaucoup plus souvent, il est vrai), l’antithèse.

POUR UNE APPROCHE APOCALYPTIQUE DE LA CRISE

La rapidité avec laquelle la crise financière et économique s’intensifie et prend de l’ampleur, et sa visibilité portée par la présentation médiatique tant des faits que des analyses, quasiment en temps réel, tendent à masquer le caractère premier du bouleversement que nous connaissons. S’il est indéniable que son déclenchement est lié aux déséquilibres économiques et financiers, ceux-ci n’en sont qu’une expression très visible. Les racines de la crise sont plus profondes ; plus que des modes d’activité, la crise relève des fondements de ces modes d’activité : notre perception du réel.

Nous sommes les témoins et les acteurs d’une crise civilisationnelle, une crise qui met avant tout en cause le paradigme hégémonique de notre civilisation : la rationalité comme unique grille de lecture de la réalité et comme unique moyen d’action autorisé quelle que soit la sphère d’activité. La prépondérance de l’économie dans la civilisation capitaliste mondialisée favorise les tendances à limiter le questionnement aux questions économiques. Cette focalisation est compréhensible, tant la mise en cause de nos fondements de civilisation peut sembler effrayante. C’est bien le sol qui se dérobe sous nos pieds. L’accepter c’est faire preuve de courage mais aussi d’humilité ; ces vertus ont malheureusement déserté notre monde post-moderne.

Certes, les dommages qui se donnent à voir, qu’ils soient humains, sociaux ou écologiques, ont pour cause évidente l’activité économique telle qu’elle est pensée et organisée rationnellement, et que l’on désigne communément par le vocable de marché. Certes, en soi, la rationalité ne peut se réduire à la rationalité économique. Mais il est indéniable que l’une comme l’autre partagent le même projet de domination et de soumission du réel à leur axiomatique respective. Or même si elles diffèrent du point de vue des fins, la première, au nom du bien de tous, prétend émanciper l’Homme et le conduire vers un horizon de progrès et de liberté, la seconde vise à maximiser l’activité de production et de consommation aux fins de réaliser les profits les plus grands et le bonheur du plus grand nombre possible de libres individus ; l’une comme l’autre se prétendent l’unique voie par laquelle l’humanité peut cheminer. Elles partagent ce paradoxe qui associe à la liberté une dimension indéniablement totalitaire.

La rationalité, comme la rationalité économique, permettent l’hétérogénéité à leurs marges, en ce sens elle sont tolérantes. Mais ce qu’elles tolèrent est sans danger, désarmé, rendu exotique par une opération de déconstruction conduite grâce à l’outil rationnel par excellence, l’esprit critique au service de leurs fins respectives.

Dans le domaine de l’économie, la mise en œuvre du concept de partage par exemple n’est pas interdite, elle est même parfois encouragée, mais seulement dans le but d’adoucir, aux marges, les inégalités les plus tragiques produites par le système de concurrence généralisée régissant le marché. Le partage comme concept exotique peut aussi servir de ressource aux acteurs du marché soucieux de la moralité de leur image : les pires prédateurs transnationaux rivalisent en matière de philanthropie via leur fondation respective. Le concept est donc toléré, mais récusé par les tenants de la pensée économique rationnelle quant à sa pertinence comme paradigme central créateur d’un ordre économique viable dans un monde peuplé d’individus. Ils n’ont d’ailleurs pas tort car si en effet le monde n’est peuplé que d’individus, le partage ne peut faire sens que de manière limitée.

Ce processus de délégitimation n’est pas propre à l’économie, les apôtres du marché n’en sont pas plus les inventeurs que les initiateurs. Les penseurs comme les acteurs du marché mondialisé n’ont pas fait œuvre de création pour arriver à leurs fins. Les esprits étaient déjà convertis tout comme les outils étaient disponibles. Le processus de délégitimation participe en effet de la rationalité dès son origine. Sans projet d’émancipation de l’Homme passant par la déconstruction de tous les liens qui s’y opposent, énoncés comme illusions aliénantes, le marché transparent, libre de toute entrave et non faussé, c’est-à-dire investi des seuls intérêts individuels, n’aurait pu voir le jour, d’abord comme projet, puis comme réalisation humaine, et enfin en tant qu’étalon à partir duquel toute chose doit être évaluée. Sans l’invention de l’individu en quête de progrès, sans ce petit être solitaire et avide s’identifiant à la chose pensante, doté de tous les pouvoirs sur la chose étendue, l’économie monde telle que nous la connaissons n’aurait jamais vu le jour.

Mais le fait que l’analyse sur la crise se focalise sur l’économie, portée, comme nous l’énoncions en introduction, par la priorité qui lui est donnée par les médias, ne peut s’expliquer par ce seul fait de communication. La prépondérance de la rationalité économique ne tient pas à quelques caprices de journalistes ou de faiseurs d’opinion. Nous émettons l’hypothèse que cette prépondérance est un fait qui s’explique par la colonisation de la rationalité par la rationalité économique. La seconde s’étant substituée partout à la première, ce qui veut dire que parler de l’une ou de l’autre aujourd’hui, c’est parler de la même chose, de rationalité économique. Nous sommes en quelques sortes pris au piège d’un golem que nous avons nous même façonné. Imaginer les voies susceptibles de nous conduire hors de ce piège nécessite de comprendre Pourquoi et comment cela s’est produit ?

Le principal élément de réponse doit être tiré de l’échec de la rationalité en tant que projet visant à émanciper l’homme tout en le conduisant en Eden grâce au Progrès. La rationalité dans ses dimensions anthropo-psycho-politique et scientifique a échoué. L’émancipation individuelle, lumineuse et positive sous bien des aspects, possède aussi sa part de ténèbres. Elle a été, elle est toujours d’ailleurs, une formidable machine de guerre servant à éradiquer le lien sous toutes ses formes. Elle s’en est même fait un ennemi personnel. Le lien de par sa nature n’est pas quantifiable, on ne peut mesurer sa progression. Crime de lèse majesté, il récuse la pertinence du dispositif du laboratoire. La rationalité devait donc se construire contre lui, et si possible l’abattre partout où elle le rencontrait. Pour caractériser ce pouvoir destructeur de la rationalité, le concept de « colonialité du pouvoir » forgé par Henrique DUSSEL, théoricien de la théologie de la libération, nous semble parfaitement convenir. DUSSEL et MARX avant lui, ont saisi l’importance de 1492 comme événement fondateur permettant le déploiement du projet rationnel par le pillage et l’accumulation primitive du capital, mais aussi par l’extermination radicale des cultures indiennes participant à la construction de l’identité de l’individu démiurge européen.

Et pourtant le lien résiste, et joue parfois quelques tours à ceux qui le traquent. La crise épistémologique des sciences, crise du lien par excellence entre les disciplines scientifiques, n’est pas le moindre de ses tours. Qu’importe cette persistance, la machine à déconstruire trouve toujours de nouveaux terrains d’action. Ainsi, la quintessence de l’avant-garde déconstructionniste entend nous faire comprendre par sa théorie du queer que la polarité des sexes qui nous lie à l’univers polarisé ne relève en fait que d’une économie culturelle de rôles parmi lesquels il nous est loisible de choisir, et grâce à la technique de modifier notre corps en conséquence.

En déconstruisant les liens de toute nature, la rationalité a produit une humanité faible dans le sens où celle-ci a perdu le sens de sa défense par le lien au collectif et par celui qui la lie à l’écoumène. La perte de ce sens est certes inégalement partagée aujourd’hui, mais il est parfois total, comme chez ces citoyens américains qui vivent dans la même rue, à qui « l’on » saisit les habitations, et qui réagissent en acceptant intellectuellement ce qu’ils subissent par une analyse de la conjoncture économique justifiant le système. Il ne nous semble pas injustifié de penser que la faiblesse corporelle et psychique des individus, nécessitant une technologie médicale de réparation des corps et une ingénierie de remise aux normes psychiques toujours en expansion, puisse en grande partie découler de ce processus de déliaison. L’utopie de l’émancipation débouche sur un être, parfois plein de savoirs abstraits, le plus souvent déboussolé, triste et malade.

Or, le substitut rationnel aux liens, le contrat social construit sur la seule volonté, ne pouvait faire sens dans la durée qu’à la condition que l’émancipation ne cesse de rendre l’Homme plus libre et conscient, plus engagé volontairement dans son actualisation. Sorti du corps des hommes et placé devant eux, donc fragilisé par ce processus d’extériorisation, le contrat nécessitait que les hommes ne cessent de toujours se mieux porter pour le nourrir. Nous voyons ce qu’il en est advenu.

Le projet politique démocratique né sur le socle de la rationalité s’est fracassé sur la faiblesse de l’Homme, mais aussi sur le manque de vigueur du lien qu’il proposait. Par la force des choses, ou plutôt par leur faiblesse, le personnel politique issu essentiellement des classes bourgeoises, plus désemparé qu’adepte du complot, a intégré de manière inconsciente l’échec du projet émancipateur dans sa dimension politique. Ce personnel politique a alors été conduit pour conserver sa légitimité à intensifier ses connexions avec les sphères d’activités économiques, toujours porteuses du projet rationnel sur le plan des réalisations matérielles justifiables par la mesure quantitative, ainsi que de l’idée de progrès.

L’abandon du projet politique émancipateur initial et le transfert de sa part de l’utopie rationnelle vers l’activité économique ne sont pas sans conséquences.

D’abord, il induit une dégradation évidente de la rationalité du fait de la disparition de l’un de ses principaux objectifs, et de fait, de l’un de ses acteurs héroïques, l’Homme en tant qu’horizon des hommes. N’étant plus acteur mais ne pouvant disparaître totalement l’Homme s’est momifié et a été satellisé à distance du monde de l’action ; de la position d’acteur de l’histoire, il est devenu outil publicitaire et juridique, mobilisable à volonté par les autres agents du projet rationnel. Les Droits de l’Homme, déconnectés du substrat vivant, représentent en effet une formidable ressource pour imposer tant les recherches scientifiques équivoques que l’ouverture des marchés ou la multiplication de structures politico-bureaucratiques.

Ensuite et surtout, du fait de l’effacement précédemment énoncé, cet abandon a provoqué un déséquilibre dans les rapports entre les autres groupes d’agents héroïques de la rationalité – les scientifiques, les politiques et les entrepreneurs – au profit de ces derniers. Le transfert de la part humaine de l’utopie rationnelle aux acteurs économiques a modifié les rapports de forces à leur profit et leur a donné toute latitude pour redéfinir le projet rationnel a partir de leurs propres objectifs. Et de fait, afin de survivre et ne pas être évacué de la scène rationnelle, le personnel politique a recomposé son discours en adoptant le discours et les objectifs des modernes entrepreneurs. La question de la légitimité populaire, difficilement contrôlable voir anti-rationnelle dans ses manifestations, se réglant par la professionnalisation de la fonction politique. Là encore, nulle trace de complot. Les protagonistes sont en fait moins acteurs que sujets maistriens subissant une dynamique de moins en moins contrôlée, mise en action dès la genèse du projet rationnel. Il est assez ironique de constater que la gauche gouvernementale française, travaillée par une sorte de remords moral inconscient réalise son « coming out » et déclare sa flamme au marché tardivement, au moment où ce dernier entre en crise terminale. Les derniers convertis sont souvent les plus virulents, leur hébétude aurait quelque chose de tragi-comique si l’heure n’était pas si grave.

Reste un acteur héroïque dont nous avons jusqu’à présent peu parlé pour une raison de clarté de discours. Sur ce point, nous tenons à préciser que le processus historique que nous décrivons n’est pas un processus divisible en phases bien ordonnées. Les forces dynamiques que la rationalité détermine se mêlent et se séparent, s’alignent les unes par rapport aux autres ou s’affrontent, mais toutes réunies poursuivent le même objectif final, la transparence ultime par déconstruction de toute réalité, ou dit autrement la fin de l’écoumène, notre monde habité. Mais revenons à nos derniers héros, les énonciateurs des tables de la Loi.

Le monde des scientifiques n’est pas homogène. Quelques uns sont d’éminents chercheurs, libres, capables d’intuitions fulgurantes, et perpétuant l’esprit d’aventure des origines du projet rationnel, ils se font rares. La plupart des scientifiques sont aujourd’hui de médiocres tâcherons dont les pratiques taylorisées visent à produire de « l’innovation » rapidement commercialisable. C’est actuellement chez les bidouilleurs de gènes que cette médiocrité est la plus frappante. S’ils diffèrent dans leurs pratiques, la quasi majorité d’entre eux a toujours veillé à dénoncer les interrogations sur le projet rationnel. Toute approche globale du réel non réductible et inassimilable par les techniques de laboratoire, toute validation culturelle de la prééminence du lien, les trouvent sur leur chemin, sujettes d’abord à leurs ricanements puis au passage à la moulinette de la déconstruction.

Les scientifiques ne sont finalement que très peu intervenus directement dans le jeux des acteurs rationnels tant que la promesse d’émancipation offrait aux hommes un horizon. L’échec de cette promesse a conduit quelqu’uns d’entre eux a sortir de leur silence aristocratique sur les affaires des hommes et à s’émouvoir. Mais trop peu nombreux à le faire, se tenant à distance des réalités mondaines et peu structurés contrairement aux politiques et aux entrepreneurs, leur parole manqua de puissance. Quoiqu’il en soit, le travail de déconstruction n’attendait pas, et finalement même réduit à l’état de fiction irréalisable, l’instrumentation politique de l’émancipation présentait l’avantage de désamorcer toute intervention populaire et irrationnelle dans la détermination des nouveaux champs de recherches. C’est bien connu, la science est en marche et rien ne doit ralentir son mouvement.

Les modifications de rapports de pouvoir au détriment des politiques et au profit des entrepreneurs évoquées précédemment ont indéniablement été perçues comme un potentiel d’opportunités par nombre de scientifiques. La capacité des entrepreneurs à mobiliser des moyens considérables, en mettant en œuvre des procédures de décision très courtes, et dans un premier temps sans imposer de conditionnalités excessives, contrairement aux politiques, s’est traduite dans le chef des hommes de science en la possibilité de pouvoir mener tous les travaux possibles et imaginables mais aussi celle de connaître enfin l’aisance matérielle. Mais comme pour les politiques, l’acceptation de cette sujétion ne pouvait pour les hommes de science, de manière automatique, ne pas se traduire par une dégradation de la qualité de leur pouvoir. De fait, ils abandonnaient une part de la colonialité de ce dernier aux entrepreneurs, qui ne tardèrent pas au regard de leurs objectifs s’inscrivant dans un temps court, et même de plus en plus court au regard des nécessités imposées par l’accélération des opérations des marchés, à réclamer des retours sur investissement sonnants et trébuchants. Assumant le leadership quant à la mise en œuvre du pouvoir rationnel, les entrepreneurs se doivent d’énoncer les fins et les modalités de son exercice. Si celles-ci permettent l’expression de ce qu’il y a de pire chez les hommes, et si ce pire, de la cupidité à l’insensibilité en passant par l’exercice multiforme de la violence, s’exprime particulièrement dans les intentions et les actes des entrepreneurs, cela tient en partie à la faiblesse de la qualité humaine de ces entrepreneurs, mais surtout au fait que rien ne vient contraindre l’exercice hégémonique de la colonialité du pouvoir qu’ils assument seuls à présent.

Pour revenir à l’énonciation des fins et des modalités de la rationalité par les entrepreneurs, nous en avons un parfait exemple dans l’actuel projet de réforme de la recherche française qui vise à faire de l’évaluation des retours sur investissements l’alpha et l’oméga de l’activité scientifique. Cela ne posera pas problème aux légions de tâcherons qui servent avec zèle Monsanto, Areva ou Véolia. Les quelques autres qui pensent, doivent saisir rétrospectivement la nature du piège qui les a capturés et qu’ils ont contribué à construire en toute liberté.

Mais ce problème ne leur appartient pas, car de fait, nous sommes aujourd’hui tous piégés, et il est certain que ce dans quoi l’écoumène est enchâssé, la planète, n’attendra pas longtemps avant de nous signifier le prix des conséquences de nos illusions. LE problème peut être discuté, mais discuter ne suffit pas pour qu’émerge une solution. Avant toute chose, LE problème ne relève pas de la discussion mais de la conversion. S’il nous apparaît évident que la perception et la compréhension du lien sont au cœur de cette conversion, il nous semble également évident que des paradigmes tels que le sang ou le religieux réactualisés ne sont porteurs d’aucune réponse répondant aux défis de ces temps apocalyptiques.

Par la force de l’esprit critique nos yeux se sont ouverts, sommes-nous en mesure de déterminer les voies de sa re-qualification afin de le rendre spirituel, c’est-à-dire de créer un nouveau rapport entre les hommes, mais aussi entre les hommes et le monde, afin de nous permettre de retrouver le pouvoir commun que nous avons perdu ?

Certes la maison brûle, et dès à présent, dans l’urgence, il faut lutter de toutes nos forces pour que l’incendie soit contenu avec les outils immédiatement mobilisables dont nous disposons. Mais il indéniable que ces outils ont participé à la construction du champ de ruines. S’obstiner à ne penser qu’à partir de ces seuls outils pour construire un monde plus juste, c’est agir comme Ubu le héros de Jarry, qui, se posant la question : « Mais comment ruiner aussi les ruines ?  » Répond : « Je n’y vois d’autres solutions que d’en faire de beaux édifices ordonnés par raison. »

Christophe Perrin
Montpellier, avril 2009

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109 réponses à “Pour une approche apocalyptique de la crise, par Christophe Perrin”

  1. Avatar de Didier
    Didier

    Wow,

    Monsieur Jorion, je vous prie de transmettre mes félicitations à Monsieur Perrin. C’est la première fois, que je vois une critique de la rationalité exprimant les limites de cette dernière. Elle me fait penser au idées de Gödel sur l’indécidabilité et l’incomplétude. C’est aussi la première fois, que je vois le lien entre la rationalité au sens cartésien du terme et la rationalité économique. J’accepte complètement son idée selon laquelle la rationalité économique a complètement phagocyté la rationalité, que je nomme cartésienne. Cette opération a complètement détruit le lien entre les hommes. Il ne reste plus que des rapports économiques rationnels. C’est un fait que des relations basées uniquement sur l’argent sont rationnelles. Ce qui est mort dans l’opération donne la crise actuelle, la pollution, le changement climatique, le gaspillage des ressources naturelles, la violence d’une guerre de tous contre tous et j’en oublie pas forcément des moindres. Le passage à la science est un peu plus délicat mais tient parfaitement la route. La rationalité m’est essentiellement déductive. Elle permet d’explorer tous les recoins d’un problème ou d’une question. Elle permet d’ordonner un tas énorme d’informations pour en donner un tout utilisable par un humain. Ce sont de très gros avantages. La rencontre avec autre chose et le lien qui s’établit ensuite sort de toute rationalité au sens précité. Ces rencontres et ces liens donnent les moyens de « sortir de la boïte » où nous sommes piégés. Monsieur Perrin a identifié et énoncé brillamment ce problème.
    Nous sommes piégés. Nous sommes piégés dans nos têtes et sommes incapables ou très difficilement capables de sortir de cette boîte. C’est pourquoi je crois Monsieur Perrin quand il déclare que nos politiques font ce qu’ils peuvent et qu’ils n’ont aucune mauvaise volonté. Ils doivent décider et le font avec les outils et les idées dont ils disposent. Le drame est que ces outils sont inadéquats. Rester au niveau économique est un aller simple au pire. Monsieur Johnson avec son coup d’état silencieux illustre cette limite, cet échec assuré.
    Je suis disposé à vous aider, Vous et Monsieur Perrin, dans cette bagarre. La maison brûle. Je suis brûlé, pas encore mort, donc n’attendez pas de miracles ou même de choses remarquables de ma part. Elles sont au-delà de mes moyens ou de mes forces. Mais sur ce coup là, sans espoir de faire la différence (ce n’est pas obligatoire), je suis avec vous.
    Transmettez mes félicitations à Monsieur Perrin.

  2. Avatar de Franck
    Franck

    @ Cristophe Perrin

     » S’il nous apparaît évident que la perception et la compréhension du lien sont au cœur de cette conversion, il nous semble également évident que des paradigmes tels que le sang ou le religieux réactualisés ne sont porteurs d’aucune réponse répondant aux défis de ces temps apocalyptiques. »

    Je ne sais pas, je m’interroge, il est vrai que beaucoup de personnes partagent vos propos c’est l’idée reçue.

    Vous savez le religieux n’a pas toujours était désolant, étudiez la vie des Saints et vous y découvrirez alors que la religion ce n’est pas toujours le sang, l’inquisition, benoit XVI, etc. enfin bref tout ce qui la fait si mal voir des hommes de nos jours…

    Si seulement la seule force de l’esprit critique pouvait mieux nous le faire comprendre, nos yeux seraient alors sans doute plus ouverts.

    1. Avatar de André
      André

      Le problème est que, dans la perspective de Christophe Perrin – dont il faut au minimum saluer la cohérence argumentative – le religieux s’est arrogé à différentes époques, de la même manière que les entrepreneurs contemporains s’arrogent celui de la rationalité, le monopole de la « spiritualité ». Et ce avec les piêtres résultats que l’on sait en termes de rôle des structures de pouvoir d’obédience religieuse dans le monde d’aujourd’hui.

      Quant au « sang », à quoi pensez-vous : la famille ? la caste ? l’ethnie ? la nation ? Au vu de ce à quoi ont donné lieu d’une part 400 ans de Modernité, d’autre part l’histoire du 19 ème et du 20 ème siècle européens mondialisés et mondialisateurs, on peut pour le moins comprendre le diagnostic à peu près sans appel de Christian Perrin sur cette question… A moins que les récentes évolutions socio-politiques dans la Bolivie du président Evo Moralès ne nous annoncent des voies inédites à ce sujet ?

  3. Avatar de Cécile
    Cécile

    « rationel, rationalité », éthymologie: ration ratio rat , ex: la rationalité du gros monsieur rouge dans le petit Prince, déf: rationel tout pour moi, rien pour les autres

  4. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    La rationalité est ici opposée au lien, mais ce n’est pas, il me semble, pour promouvoir le lien, c’est plutôt pour mettre en cause la rationalité. Le radical « ratio » est cité 43 fois…

    Je pourrais partager beaucoup des constats amers qui sont faits sur l’évolution de notre monde, et reconnaître avec l’auteur toutes les machines à broyer l’homme qui ont été récemment fabriquées. Mais cet auteur ne nous dit pas que ces machines sont perverses, idiotes ou mal conçues, il accuse les engrenages avec lesquels ces machines sont construites : la rationalité.

    La rationalité ne s’oppose pas au lien, mais à l’irrationalité. Rien de ce qui s’écrit sur ce blog n’est basé sur l’irrationnel, est-il besoin de le souligner? Et, -doit-on le dire?- c’est bien la raison qui est seule en mesure d’explorer ses propres limites. Le théorème de Gödel est un théorème de logique.

    Le principal élément de réponse doit être tiré de l’échec de la rationalité en tant que projet visant à émanciper l’homme tout en le conduisant en Eden grâce au Progrès. La rationalité dans ses dimensions anthropo-psycho-politique et scientifique a échoué.

    Ce texte exprime, avec plus de richesse et de pertinence que d’ordinaire, un mouvement de plus en plus vivace (à mon sens, hélas!) de remise en cause du projet des lumières, basé sur la constatation des errements actuels des techno-sciences, et de leur mise sous la tutelle du marché.

    Le constat est juste, mais je ne partage en aucun cas les conclusions. La science n’est pas la technique. Leur accouplement, inévitable de par le développement de la complexité des outils de recherche, doit rester ordonné : la science d’abord, la technique à son service et au service des hommes, sous le contrôle de la volonté, c’est à dire du politique.

    Dites que le politique doit revenir au centre de tout, et nous serons d’accord. Mettre en question la rationalité, c’est vraiment jeter le bébé avec l’eau du bain…

  5. Avatar de Didier
    Didier

    Monsieur Peltier,
    Je retire de votre texte l’impression que vous admettez à votre corps défendant les limites de la raison. Vous citez Gödel dans ce sens. Monsieur Perrin ne jette pas la raison. Son texte est rationnel. Il rejette l’usage exclusif de la raison, qui bloque, piège et empêche toute sortie du système actuel. Le projet des lumières est devenu, aujourd’hui, la rationalité économique. Son « succès » est patent. Ce succès s’oppose au lien. Ce succès vide le politique de tout sens, de toute valeur. Ma vision de l’action des politiques oscille entre l’horreur et la pitié. La maison brûle. Ils sont paralysés.
    Vous proposez de revenir au primat du politique. Pour que ce dernier marche, il est impératif d’avoir un lien entre nous. Je vous défie d’en énoncer un qui tienne la route et qui est rationnel dans le sens cartésien du terme. Vous serez obligé d’énoncer un axiome du genre « Je pense donc je suis ». Cet axiome devra inclure les relations humaines, le lien, la rencontre avec l’autre. Faites – le et vous stopperez ce que vous nommez « un mouvement de plus en plus vivace ». Accessoirement, vous nous donnerez la direction de la sortie de l’histoire, qui m’occupe ici.

  6. Avatar de Cécile
    Cécile

    « morphing » .., je suis celui qui est,.., être ou ne pas être: voilà la question,.., je pense donc je suis,.., quel est se je qui pense ?,.., je est un autre,.., je est un jeu d’atomes, enjeu et jeu des désirs qui sont en nous, hors de nous,..

    soit : l’ « éclatement joyeux des référenciels dans un nuage de particules »

    question : on s’éclate ou on s’éclate ?

  7. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    Notre monde, notre société, est à sa manière idéologiquement profondément totalitaire. A la promesse d’un monde meilleur (déclaré inatteignable) a succédé celle d’un monde rassurant, après en avoir accentué et rendu permanent le caractère et la description anxiogènes. Pourvu de ses protecteurs. Sans s’interdire d’inquiétantes incursions répressives, dont nous avons conscience que le champ progresse et nous enserre, telle une promesse qui ne concerne que les autres, les déviants, et nous impose donc de rester dans le rang.

    Sans doute, avons-nous atteint un stade où la combinaison de ces deux enfermements, à la faveur de la crise actuelle, suscite de manière grandissante un rejet, une protestation, une révolte plus ou moins contenue, qui risque de n’aboutir qu’au perfectionnement et à l’affinement de leurs dispositifs, si ils ne parviennent pas à les desserrer.

    L’approche apocalyptique de la crise renvoie à l’apocalypse de son dénouement. Pas nécessairement au sens de la violence (de l’accouchement de l’histoire), mais de celui de la refondation, qui suppose de faire table rase (les paroles ne sont pas de moi). C’est là que les choses se compliquent. C’est quoi, un monde meilleur ? Comment pourrait-il fonctionner ?

    L’un des moteurs de la situation est l’affirmation du rejet, qui monte. Avec à l’opposé celle d’une exigence collective, vivre autrement, sachant pourquoi mais sans trop savoir comment. Suscitant la découverte un peu étonnée que le repli sur soi et son entourage, au nom des solutions individuelles seules possibles, n’était pas la seule option.

    Il est toujours dessiné en filigrane, dans une société donnée, les contours flous de celle qui peut lui succéder, sans que cela soit garanti. Les révéler est une œuvre collective, que personne ne commande et que personne, surtout pas, ne dirige. Reste à ce qu’elle trouve suffisamment de force pour balayer les obstacles qu’elle rencontre, afin de s’affirmer. Pour y parvenir, il ne faut pas seulement détruire (d’autres s’en chargent), mais bâtir. Les deux se font simultanément, c’est en cela que l’on parle alors de transitions. L’art de concevoir celles-ci étant un enfer pavé de bonnes intentions.

    Au jeu de l’apocalypse, rien n’est gagné, tout n’est pas nécessairement perdu. Où se trouve le petit bout de la raison, qu’il ne faudrait tout de même pas lâcher au prétexte d’effectuer une conversion ? Dans l’abandon de fausses rationalités qui sont autant des prisons, et ne cessent de dresser des obstacles au projet l’émancipation. Celui-ci est de l’ordre du désir inassouvi et réprimé, plus que du spirituel, enfoui et qu’il est possible de déterrer. Il y a malaise dans la civilisation, comme a dit le barbichu binoclard de Vienne, qui, lorsque l’on lui racontait des histoires, savait les interpréter.

  8. Avatar de Didier
    Didier

    Monsieur Leclerc,

    J’aime votre optimisme. J’aime votre foi dans l’idée, que le nouveau monde existe en filigrane. J’aime votre idée selon laquelle ce nouveau monde appraîtra et qu’il n’appartiendra à personne, c’est à dire à tous. J’aime aussi votre idée de garder la raison. C’est un outil magnifique, précieux.

    Cet outil a ses limites. Ici, du point de vue de la raison, nous devons réinventer les axiomes de base de nos relations entre nous. Cette opération n’est pas une déduction et je ne crois pas non plus que cela soit une inférence. La raison est battue. C’est ici que je donne beaucoup de valeur au mot conversion.

    Il est lourdement connoté religieusement. Il est chargé d’incertitudes cruelles. Je le dirais même apocalyptique. Le sens que vous donnez à ce mot est tout à fait remarquable et vrai. Si je peux aider à établir, révéler ou autre chose, ce monde qui arrive, je le ferai.

  9. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    @ Didier

    Athée par construction, je m’en tiens à la raison, mais je vous accorde volontiers qu’elle n’est pas contradictoire avec l’imagination. Je suis un partisan farouche de l’intuition déductive. Dieu reconnaîtra les siens !

  10. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Didier
    Les limites de la raison, c’est implicite dans la raison elle-même, ce n’est nullement « à mon corps défendant » que je dois l’admettre…

    Le projet des lumières est devenu, aujourd’hui, la rationalité économique.

    Vous semblez tenir pour acquis que l’état actuel de l’économie, c’est le pur produit de la rationalité. Que non!!! L’état actuel de l’économie, c’est le produit de forces politiques agissantes, qui ont pu s’imposer par l’insuffisance de la compréhension rationnelle de ce qui était en cause. Et, à mon avis, ce n’est certainement pas en renonçant à la raison que l’on pourra contrebalancer ces forces tenaces!

    Votre propos conforte en fait, je vous demande d’y réfléchir, ce qui était appelé, il y a encore quelques mois, « la pensée unique » : Il n’y a pas d’alternative, ce monde est le seul rationnellement possible, c’est le produit de « lois de l’économie », etc… Si l’on admet cela, tout en rejetant viscéralement la société qui en résulte, en effet, il n’y a plus qu’à rejeter les prémisses implicites, donc le projet des lumières.

    Vous vous trompez de cible. Les « lois de l’économie » sont des lois écrites par les hommes, et elles relèvent du politique. Celles qu’on nous a vendues jusqu’à maintenant sont un tissu de perversités visant à conforter les intérêts de quelques uns, et nullement le résultat du triomphe de la rationalité.

  11. Avatar de Jean Louis Bars
    Jean Louis Bars

    Ces échanges sains ( enfin ! ) mériteraient ,au moins , une réflexion de la part de quelques intellectuels intégres.
    Et, pour ma part , ignare (un peu moins depuis mes passages quotidiens sur le blog avec ses options sages,sereines et non « marchandisées » ) ,j’estime –soyons un peu déraisonnable (les « autres » en ayant perdu le sens même)–que ces écrits,à un moment crucial de la gigantesque mutation (si chère à J-Cl . Guillebaud) auraient largement leur place au patrimoine de l’UNESCO !
    Merci à Tous et la primeur à Paul Jorion ,à Leclerc et Tous ,aussi valeureux les uns que les autres.

  12. Avatar de Cécile
    Cécile

    à François Leclerc
    (fins de l’oeuvre et notion d’inachèvement,
    pour une histoire -sans histoires- , à jamais inachevée, toujours à naître

    « Eveiller « l’inachevé » plein de terreur
    Qui dort si mal en nous,
    De son mauvais sommeil. »
    (Valery, Cahiers,)

    «Lever des lièvres: voila comment pourrait se dire notre technique de progression. Mais non pas pour les « achever » : au contraire pour les laisser courir, pour qu’ils poursuivent leur course, pour qu’ils aillent se cacher ailleurs, et qu’il reste toujours quelque chose à chercher
    .
    Le choix d’une notion telle celle qui nous occupe, « l’inachèvement », implique une stratégie particulière : car il ne s’agit pas d’une notion simple, unique, fixée. Il s’agit bien plutôt d’une notion à bords flous, d’un concept qui traverse les champs.

    Fragment, disent les poètes. Forme ouverte. Que l’on ne s’étonne pas que les discours se croisent. Le sujet dicte la forme. L’objet incertain qu’est « l’inachevé » laisse un peu sur sa faim, car il est insatiable.

    Thème, si l’on veut, mais thème qui n’est pas seulement littéraire, qui permet de circuler entre les genres et les époques.
    Thème probablement inépuisable, qui touche, qui dépasse les catégories de l’esthétique étroitement entendue, pour faire se superposer symboles et histoire, technique et savoir, psychologie de la création et pragmatique de la réception, en tenant compte du parcours social qu’il y a dans le travail de l’artiste, et dans celui de l’œuvre.

    Pas question de penser que les choix esthétiques qui se montrent forcément dans ce cours ont fonction de préceptes.
    Pas de devise telle « N’achevez pas ! » : mais plutôt la suspension d’évidence qui doit mener à l’expérience de « l’inachèvement ».

    « Inachèvement et sens »
    « L’inachèvement » fais-t-il sens ?
    Pas un sens unique, pas une signification monologique,
    pas un universel qui traverserait l’histoire dans une orientation unique.
    « L’inachèvement » est lié très essentiellement à une structure anthropologique, et plus précisément au fait du travail, dans son rôle général mais plus encore dans ce travail singulier qu’est le processus créatif.

    Un sens ? »

    (extrait de cours, fac St Charles, Arts plastiques, Paris I )
    séminaire, atelier de synthèse,
    « Les fins de l’oeuvre » :

  13. Avatar de TARTAR
    TARTAR

    Les mondialistes au pouvoir ont bien agi avec rationalité.
    Il est rationnel (voire raisonnable) de s’approprier le bien d’autrui par la force.
    Aucun lien entre l’éthique et la raison.

    Par exemple il a été raisonnable (puisque çà a marché pour forcer la main des europhiles) de passer en force de l’écu à l’euro avant toute recherche de mise en harmonie des fiscalités européennes….

    De la même façon les DTS forceront probablement l’histoire de la constitution mondiale…
    L’euro était bien un « modèle » de préintégration.

    Complot?

  14. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    L’inachèvement est donné par construction, ou alors il faut s’impliquer dans « la fin de l’histoire », concept aussi intellectuellement redoutable que celui de la dimension de l’univers, mais à l’envers. Le sens de l’inachèvement n’interdit pas le commencement le travail.

  15. Avatar de Cécile
    Cécile

    à TARTAR
    « la raison du plus fort est toujours la meilleure  »
    soit que cela soit vrai
    mais cela n’empêche pas que cela n’est pas juste
    cf fable Lafontaine, Le loup et l’agneau

  16. Avatar de TARTAR
    TARTAR

    @ Cecile
    Mais le plus fort est parfois bête.
    Il lui arrive de perdre à la fin.

    Mais
    Comme le dit François il n’y a pas de fin.

    Nous sommes mortels pour …justement ne pas voir qu’il n’y a pas de fin…

    Alors au boulot!

  17. Avatar de bernard
    bernard

    Tout à fait d’accord avec la néessité de revenir au politique.

    Celui qui, en l’élaborant, ne fait qu’interroger la légitimité de la loi.

    Or, c’est bien là où réside la perversité du système légal actuel, c’est que cette interrogation a pratiquement disparu, et c’est l’évolution de la loi qui devient perverse (je ne suis pas suffisamment naïf pour retenir les hypothèses de son « idiotie » ou de sa « mauvaise conception »), car, aux mains d’une minorité , elle réduit cette légitimité au maintien et au renforcement des « avantages comparatifs » qu’elle leur octroie.

    D’où d’ailleurs, la véritable raison de la crise de la presse écrite ou des télévisions généralistes ou informatives, les lecteurs étant de plus en plus nombreux à s’apercevoir que les débats politiques qu’elle autorise sont strictement limités au cadre « publicitaire » ou de « communication officielle », et donc perdent tout intérêt réel.

    Cette perversité repose sur deux piliers:

    -celui, fondamental, qui bafoue la rationalité politique: c’est l’imposture démocratique qui a masqué dans les pays occidentaux le concept du parti unique (inacceptable aux yeux des élites démocratiques, que nous sommes censés être devenus, et donc autorisés à donner des leçons au monde entier) par celui du « consensus bipartisan » (terme que j’emprunte à Howard ZINN) grâce à la (fausse) alternance démocratique qu’il autorise.

    -celui, purement technique, de l’ »avantage comparatif » fondamental, l’intérêt, pris au sens monétaire, qui instrumentalise les gens en exploitants (le créancier) et exploités (l’emprunteur) et supprime de facto l’aide désintéressée du champ économique, qu’elle soit individuelle ou exercée par les collectivités.

    La remise en question du second est, pour moi, obligatoire dans la résolution de la « crise » financière que nous vivons, et est une condition nécessaire à la réforme démocratique du premier pilier.

    Il ne semble pas, en France au moins, que l’on en prenne le chemin, au vu de la désignation des patrons comme boucs émissaires à la crise (comme s’il s’agissait d’une population homogène!), alors qu’apparemment personne ne s’intéresse au bénéficiaire de cet avantage comparatif, l’ACTIONNAIRE (personnage mal identifié, entre les vocabulaires sympathiques d’épargnant ou d’investisseur, ou au contraire repoussoir de spéculateur).

    Il est vrai que nous sommes tous des actionnaires potentiels, donc à priori du bon côté du manche…!

    Comme Rockfeller à qui on demandait à qui l’on demandait à quelle somme il estimerait raisonnable de limiter sa fortune: « juste un peu plus… »

  18. Avatar de Jean Louis Bars
    Jean Louis Bars

    J’aime la démarche que propose Victor Frankl,( Psychothérapeute décédé en 1997) :
    Devant le vide existentiel constaté chez l’Homme , source de moult névroses,il préconise la recherche du Sens à la Vie pour chacun de ses « Patients »….
    Et comme nous sommes tous névrosés ….et en quête d’absolu (de l’Amour ) inatteignable….rejoignons nous,si possible, dans cette démarche ardue mais passionnante car universelle.

  19. Avatar de iGor milhit

    Ce n’est peut-être pas la rationalité qui est en cause, mais une certaine idée de la liberté. Tout ne saurait être possible, bien que le domaine des possibles dépasse et de loin mes capacités imaginatives. Une fois que j’abandonne des rêves illusoires, je découvre que des rêves plus lucides existent et sont pour le moins très enthousiasmants! Une fois que je, parce que dès que je me mets à penser pour les autres… la matraque du flic n’est pas loin.
    Avec moins on peut faire plus, avec plus on est souvent amené à faire moins. En deux pas la rationalité perd sa rationalité, et la liberté ne veut plus rien dire. C’est un très vieux lieu commun, mais il ne saurait y avoir de liberté sans un constat éclairé des contraintes, y compris les zones d’ombres. Et il me semble que les outils on les a. Mais le courage, ça c’est autre chose.
    Notre société délirante n’est pas très rationnelle, même si elle cherche à le faire croire. Trop souvent on veut rapprocher rationnel de légitime, une légitimité extérieure qui pourrait s’imposer, une sorte de dieu quoi. L’idée d’homo economicus est un effort de faire croire à la rationalité, et qui n’est pas rationnelle du tout.

  20. Avatar de Moi
    Moi

    Un paranoïaque utilise parfaitement la raison dans ses déductions et n’en est pas moins fou. C’est ainsi que je vois le monde de l’économie, des fous utilisant parfaitement la raison dans leurs déductions. Je ne pense pas que la raison soit ici à remettre en cause.

  21. Avatar de Eugène
    Eugène

    @ Christophe Perrin,

    Ce que la crise révèle (apocalypse)? la faillite morale bien sûr. Et morale exclue progressivement du logiciel occidental via le dualisme cartésien corps-esprit permettant de repousser l’emprise du religieux ds l’élaboration des sciences. Sous quelle forme la réintroduire? J’expose les grandes lignes d’une piste non religieuse dans mon commentaire-réponse à Pierre-yves D le 8/04 à 11:04 sur le fil « L’ere des kolossal coups de pouce » du 6/02.

    Cette approche suppose une modification du concept de rationnalité: voir l’ouvrage de Jean-Claude Schotte « La raison éclatée » du fait que ce qui nous constitue comme humain tient, pathologies à l’appui pour montrer la pertinence de la séparation, en quatre raisonnalités distinctes autonomisables au plan théorique, faisant revoir même et au passage jusqu’au concept de Science.

    On ne peut donc plus invoquer LA RAISON d’être tétramorphe, ce qui du même coup brouille les possibilités de compréhension suivant celle sur laquelle chacun va prioriser son argumentation.

  22. Avatar de logique
    logique

    Perso, je n’ais absolument rien compris a l’article. Je ne comprends pas la relation entre apocalypse, crise et rationnalité économique. Mais je pense que Mrs Perrin a eu ses raison pour l’écrire.

    1) l’économie n’est pas rationel, la pensé n’est pas rationel, et la phillo non plus. Seul les mathématiques sont rationel au sens de la possibilité de déduire des solution sans avoir a les demontrer par l’experience(les axiome eayant deja été demontré)

    Donc ont peut peut être se demandé pourquoi l’économie nous a emmener vers cette irrationalité. Surement parce que la raison est empirique et que l’expérience a pris le pas sur la logique qui elle est rationel(sans mathématique).

    Donc nos banquiers avaient des raisons de refiler du credit a tout va, leur raison etant l’augmentation des gains. Si les décisions avait été rationel, c’est a dire que le poid des credit trouvait une contrepartie rationel d’avoir. Nous en serions pas là. Hors se n’est pas la rationalité qui est en cause mais bien l’empirisme de la raison. La raison se construit sur l’expérience et dans le cas des paris, l’expérience de prendre des risques irréaliste(irrationel).

    Pour conclure, je pense que ces la raisons humaines qui est en cause et non la rationnalite. Si la raison n’est pas rationel, elle ne peut être logique, mathématique et déductrice. Hors c’es bien a cette perte de rationalité que le système économique est confronté. La raison a pris le dessus sur la rationalité. Et vue qu’il nous ont refait la même chose qu’en 29, je pense qu’il ont a la fois perdu la raison et la rationalité. Car la raison etant empirique il aurait pu au moins se repeller de l’expérience passé. Hors même cale il n’en ont pas été capable. Mais c’est là qu’il faut se poser la bonne question n’avait il pas leur raison personnel d’en arriver jusque là,sachant qu’empiriquement il ne pouvait pas ne pas savoir vers ou cela les ménneraient.

    Donc c’est le manque de rationalité qui est en cause et non la rationalité.

  23. Avatar de Auguste
    Auguste

    à François Leclerc [10:09]

    je m’en tiens à la raison, mais je vous accorde volontiers qu’elle n’est pas contradictoire avec l’imagination. Je suis un partisan farouche de l’intuition déductive. Dieu (…)

    De mon point de vue, vous n’arriverez pas à grand chose avec cette croyance.
    Quatre+1 formes d’imagination sont contradictoires avec la raison, qui, elle,
    en a quatre autres … formes … très différentes.
    à Yves de Bressy @ Sainte-Adresse, normand [10:19]
    LeHavre, StWandrille, Jumièges, Rouen, … vous connaissez
    La Place du Vieux Marché …
    Le procès « rationnel » qui dura du 21 février au 23 mai 1431
    Reference: wikipedia
    Jeanne d’Arc (une bâtarde de noble ?) n’échappa pas
    au natiofurtif de l’époque : l’évêque de Beauvais, Mgr Cauchon
    wikipedia
    un « FranceCulture de l’époque » au service d’un plus haut-gradé dans l’Ordre offshore
    le cardinal de Winchester …
    … un topBankster anglo-saxon de l’époque ?

    Pour la CDC, LeClownBlanc prendra plaisir à grimper la falaise de Ste Adresse,
    … admirer le port initié par François 1er …
    … etendu en son temps par Henry Deschesnes
    son fils Jean, pensionnaire à Rouen, était mon cothurne en 1963-64

    à Jean Louis Bars @ <…ville ? (ou « mini-région »)….>
    Un piste parmi d’autres :
    Je réinvente ma vie de Jeffrey E. Young, psychothérapeute à New-York.
    Ed. de l’Homme isbn 2-7619-1798-7

  24. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    @ Auguste

    Précisément, ce n’est pas une croyance, tout juste une planche de salut… Le doute plutôt que la foi, vous voyez ?

  25. Avatar de LeClownBlanc
    LeClownBlanc

    Le monde a t-il beaucoup changé ?

    Liens de parenté

    entre Guillaume d’Estouville, qui devint cardinal de Winchester
    … et les Plantagenêts.

    Edition électronique réalisée à partir du texte de Jules Michelet, Oeuvres complètes de J. Michelet.
    Histoire Moyen Age. Tome V. Paris: Ernest Flammarion, Éditeur, 1893, 421 pages.
    Bibliothèque Nationale de France. M. Jean-Marc Simonet, professeur retraité de l’enseignement, Université de Paris XI-Orsay.

    Chapitre IV. Le cardinal de Winchester. – Procès et mort de Jeanne d’Arc (1429-1431)

    Querelles et faiblesse de Bedford et de Glocester ;
    règne du cardinal évêque de Winchester, qui amène une armée à Paris
    La Pucelle échoue devant Paris
    1430 (23 mai.) Elle est prise devant Compiègne, et remise aux Bourguignons ;
    situation politique du duc de Bourgogne ; mœurs de sa cour ; (10 janvier) institution de la Toison d’or
    Winchester fait réclamer la Pucelle par l’inquisition, par l’Université et par l’évêque de Beauvais
    (Déc.) Il amène Henri VI à Paris
    1431. (Janvier) et fait commencer le procès de la Pucelle à Rouen
    (21 fév-mars.) Interrogations préalables
    Résistance de la Pucelle à l’autorité ecclésiastique
    Illégalités, violences ; consultations des légistes, de l’Université, des évêques, du chapitre de Rouen
    (Avril.) Épreuves et tentations de la Pucelle pendant la Semaine Sainte
    Elle tombe malade ; elle est admonestée, prêchée ; (2 mai) elle signe une rétractation
    Fureur et brutalité des Anglais
    (30 mai.) Elle est condamnée ; sa dernière tentation ; sa mort
    La Pucelle finit le moyen âge et commence « l’age moderne

    LIVRE XI

    Chapitre Ier. Henri VI et Charles VII.
    Discordes de l’Angleterre, réconciliation des princes français. – État de la France (1431-1440)

    Winchester fait sacrer le jeune Henri VI à Paris et à Londres
    Querelles des Anglais entre eux, de Winchester et de Glocester
    Querelles des Anglais et du duc de Bourgogne
    Réconciliation du duc de Bourgogne et de René d’Anjou
    1435. – du duc de Bourgogne et de Charles VII ; traité d’Arras
    1436. Les Anglais quittent Paris
    État de la France
    1438. L’Église ; Pragmatique de Bourges
    La noblesse devenue anti-chevaleresque, anti-religieuse ; mœurs atroces

  26. Avatar de johannes finckh

    @tous!
    Non, notre monnaie traditionnelle n’est pas une construction rationnelle!
    Elle est objet d’échange ET réserve de valeur à la fois!
    Et ces deux fonctions ne sont pas rationnellement compatibles!
    Par conséquent, c’est l’une ou l’autre qui s’impose en excluant l’autre.
    Actuellement, c’est la fonction réserve de valeur » qui s’impose et qui retire à la monnaie son efficacité – rationnelle!- dans les échanges.
    Comme disent DSK et Obama, le système est gelé, les milliards injectés en haut restent bloqués (irrationnellement?) dans les circuits financiers dans une position d’attente, d’où la crise économique profonde et insoluble avec les techniques mises en oeuvre!
    Construisons une monnaie rationnelle, uniqement échangeante en excluant de la monnaie la fonction « réserve d valeur », et l’économie repartira tranquillement!
    Cette monnaie anticrise s’appelle: monnaie fondante inventée par Silvio Gesell.
    Cette évolution est le prix à payer pour fonder l’économie « en raison ».
    Cela n’empêchera pas les hommes d’être hommes, cela n’empêche pas que certains trichent, pillent, s’approprient par la force les choses, mais cela empêchera que les biens « mal » acquis se transforment, en plus, en rente capitaliste qui est, totalement irrationnelle et fonctionne selon une logique folle, cancéreuse, de la croissance exponentielle!
    La monnie fondante es naturellement redistributive!

  27. Avatar de Ybabel
    Ybabel

    1492 oui, c’est bien la date à retenir. On pourrait aussi retenir celle de Guttemberg, qui en l’occurrence, colle mieux au sujet de la rationalité, mais 1492, est plus adapté, j’explique pourquoi juste après.

    Par contre, les fondements même de ce discours posent problème dans la mesure ou l’outil utilisé pour dénoncer le rationnel et justement un discours rationnel, construit, logique ! lol

    Ce très beau texte résume à lui seul l’impasse dans laquelle nous sommes (je dirais plutôt nous voulons rester). La vraie question est : par quoi allons remplacer, ou plutôt avec quoi allons nous équilibrer notre rationalité ?

    Une réponse possible : la pensée magique des indiens d’amériques. Et la boucle est bouclée puisque 1492 est aussi la date de la quasi-disparition de cette pensée.
    Il y a d’autres solutions envisageables. La conscience de l’homme est vaste, il y a de la place pour d’autres « pensées ». La logique n’est pas forcément le seul moteur de la décision, et donc par conséquence de l’action. Elle ne l’a jamais été, et ne le sera jamais, mais il est vrai que l’hégémonie de la logique touche aujourd’hui à ses limites.
    A ce propos, on pourrait identifier la première dérive comme étant l’astrologie, qui se veut, quelque part, un succédané « logique » de la pensée magique.

  28. Avatar de logique
    logique

    Moi je ne voie pas de différence entre doute et foi, car souvent l’un est l’autre sont irrationel puisqu’il sont régit par la raison et la confiance que l’on mais en celle ci. Douter implique que notre raisonnement rationel fait defult, avoir la foi c’est pareil. Il n’y a aucune rationalité dans le doute et la foi. La foi implique une croyance et doute c’est pareil ont croit que l’on est pas sur. Croire ne peut pas être rationel.

  29. Avatar de johannes finckh

    ne désespérons pas de la raison!

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