Billet invité.
Ces temps de crise sont souvent propices à l’émergence d’idées nouvelles, et offrent souvent les conditions nécessaires aux changements en rapport.
Le document qui suit propose une telle idée, dont le fondement n’est pas technique, mais infiniment pragmatique. Elle pourrait révolutionner l’univers des transports.
L’analyse des données les plus fondamentales (disponibilité des ressources s’amoindrissant, perspectives de croissance automobile insoutenables, techniques alternatives impuissantes en l’état, aliénation des comportements), permet de dégager une idée force : dans un monde ou l’être humain fait de plus en plus sentir le poids de ses actions, la décroissance doit passer par certains facteurs physiques avant tout. En matière de transport, la variable d’ajustement est la vitesse. Il convient en période d’urgence de la réduire drastiquement.
La proposition de réduire la vitesse maximale autorisée sur route à 60km/h de façon « universelle » pourra choquer ou faire rire. A la réflexion il n’en reste pas moins qu’elle constitue une solution à très court terme à de nombreux problèmes (énergétiques, environnementaux, économiques, industriels…).
Ses conséquences vertueuses dépassent de très loin le simple cadre des transports (on peut citer l’urbanisme, la relocalisation économique, la re-socialisation des espaces, la réduction de la fracture technologique, etc…).
A moyen terme, il faut bien avoir à l’esprit que le monde entier gagnera à appliquer une mesure globale de limitation drastique de la vitesse. Il va même de soi que cela pourrait constituer une transition moins brutale vers la société « sans voiture » qui pourrait nous être imposée à terme par la diminution des ressources, ou vers une société à énergie solaire, ou ce que vous voudrez d’énergétiquement et écologiquement soutenable.
Cette mesure ne constituerait pas une atteinte au progrès, dont la notion forcément relative varie énormément selon les angles d’analyse (en cela, la moindre pollution, la préservation des ressources, la relocalisation de l’économie et la diminution des accidents représenteraient aussi un progrès remarquable).
Il est également probable qu’individuellement, une majorité de citoyens ne soit pas préparée à une telle mesure. Mais les jeunes générations semblent malgré tout se faire à l’idée d’un monde moins fondé sur la toute puissance de l’automobile individuelle, puisqu’elles favorisent de plus en plus l’achat de petits véhicules simples, la location d’automobile et les transports en commun. Collectivement, faisons-nous confiance : nous saurons plus facilement nous adapter à un monde moins rapide qu’à l’effondrement brutal d’une société principalement fondée sur le pétrole.
Il faut enfin considérer avec gravité qu’historiquement, chaque période de grandes pénuries et de marasme économique a engendré guerre, génocides et fascisme.
Nous vivons un instant peut-être historique : le passage d’une société du « toujours plus et plus vite » à une autre du « moins et mieux ». Voici donc venu le moment de nous résoudre à modifier certains de nos standards, quitte à faire quelques – grandes – concessions sur ce que nous considérons – sans doute à tort – comme des éléments indispensables au bien être. « The American Way of Life is not negotiable », disait Georges Bush père lors de la conférence de Rio en 1992, et nous autres de nous indigner. C’est sans doute le moment de prouver que cette indignation n’était pas qu’une posture, et il va de soi que la plus grande partie de la réussite de cette entreprise dépendra de notre faculté à adapter ainsi nos comportements.
TRANSPORTS : L’IMPUISSANCE EST POUR DEMAIN
SOMMAIRE
AVANT PROPOS CANDIDE
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LES SOLUTIONS TECHNIQUES
Idée reçue 1 : il y a bien assez de pétrole pour tous et pour des décennies encore
Idée reçue 2 : remplaçons les produits pétroliers par les agrocarburants
Idée reçue 3 : passons à la propulsion électrique
Idée reçue 4 : vive la voiture hybride
Idée reçue 5 : l’air comprimé comme vecteur énergétique
Idée reçue 6 : la solution est la voiture à hydrogène
Idée reçue 7 : améliorons simplement le rendement des véhicules « standards »
Idée reçue 8 : « ils » vont bien inventer/trouver quelque chose au moment voulu
Les autres solutions techniques
Conclusion de la première partie
DEUXIEME PARTIE : LES SOLUTIONS COMPORTEMENTALES
La solution de l’autolimitation et les changements d’outils
Conclusion de la deuxième partie
TROISIEME PARTIE : LIMITER LA VITESSE DE MANIERE DRASTIQUE
Avantage 1 : limiter la consommation d’énergie, tout en permettant l’émergence de nouvelles techniques
Avantage 2 : limiter l’impact des gaz à effet de serre
Avantage 3 : favoriser les comportements les plus sobres
Avantage 4 : permettre l’instauration d’une taxe carbone
Avantage 5 : relocaliser et restructurer l’économie
Avantage 6 : Donner la possibilité aux citoyen d’être acteurs du changement
Avantage 7 : faire sortir du marasme une industrie automobile en panne, et au-delà une économie en récession
Avantage 8 : diminuer le coût social et financier des accidents de la route
CONCLUSION
REFERENCES
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AVANT-PROPOS CANDIDE
Au commencement de l’Histoire il y avait l’Homme, qui ne pouvait compter que sur ses propres forces. Après sans doute bien des tentatives et des échecs, Il parvint à dompter l’Animal, lequel lui fournît un surcroît de force dans son travail. La vie devint ainsi plus facile par certains aspects. D’ères en époques, l’Homme constata que mettre ses congénères au travail pour ses besoins personnels accroissait encore sa capacité d’agir. Ainsi certains individus se croyaient-ils puissants, ainsi se pensaient-ils libres. Mais l’Homme comprit un jour, au cours d’un cheminement difficile qui conduisait vers une société plus juste, que cela avait une conséquence désastreuse pour nombre de ses frères, qui d’esclaves devinrent alors citoyens. Par coïncidence (?) il réussit dans le même temps à remplacer la force musculaire par la force mécanique. Durant deux siècles, il se montra d’une ingéniosité prodigieuse, inventa toutes sortes de machines, se déplaça d’un bout à l’autre de sa planète, profitant de l’équivalent en puissance de plusieurs dizaines d’esclaves mis de la sorte à son service [1]
Cette fois, il était vraiment libre, se disait-il. Hélas, en plus de certains de ses semblables, c’est sa propre planète qu’il exploitait dès lors sans vergogne pour alimenter les besoins toujours croissants de ses inventions. Cette Terre, devant le pouvoir fabuleux de son hôte, commença à donner des signes de fatigue inquiétants. Il devint bientôt évident qu’elle ne serait plus à même d’assurer sa mission. l’Homme regardait cela mais, ivre de sa propre réussite et confiant en son destin, ne voulait pas y croire. Pourquoi et comment se départir, au moins temporairement, d’une partie de ce pouvoir ? Il ne voyait pas encore que sa soif inextinguible de puissance l’entraînait vers la déchéance et le chaos. De maître, il allait devenir esclave, faute de savoir contrôler ses ambitions.
INTRODUCTION
Nous voici donc à l’heure où les grandes puissances commencent à constater avec hébétude les conséquences de la folie dans laquelle nous a plongé la quête d’une puissance illimitée. La crise économique actuelle n’est qu’un corollaire navrant des inconséquences de nos comportements boulimiques. Nombreux sont ceux qui prennent conscience aujourd’hui que toute exploitation non raisonnée conduit tôt ou tard à la déroute, à la misère, à l’esclavage, à la mort.
Il est un exemple illustrant parfaitement ce récit : les transports routiers motorisés. Ils représentent tout à la fois le symbole d’une certaine puissance, d’une forme de liberté et de rêve pour tous, tout en étant responsables de plus de 40% de la consommation pétrolière mondiale selon l’observatoire de l’énergie (alors que les transports totaux en représentent 60% [2]), et de plus de 17% des émission de CO2 (secteur en très forte croissance [3]).
En France, les transports motorisés utilisent 56% du pétrole consommé [4], et sont responsables de 27% des émissions de gaz à effet de serre dues à l’activité humaine [5].
Selon l’Agence Internationale de l’Énergie, le maintien des politiques énergétiques actuelles se traduira à l’horizon 2050 par une augmentation de la demande en pétrole de 70% (tandis que les émissions mondiales de CO2 augmenteront de 130 %). Cette tendance lourde est principalement liée au transports [6].
Dans ce contexte, les réserves prouvées ne devraient alors être capables, selon les pétroliers eux-mêmes, de fournir matière à carburer que pour les 35 années à venir. Et encore, en supposant que nous en restions à notre niveau actuel de consommation ! Le moment crucial, économiquement et symboliquement parlant, sera en réalité représenté par l’instant où la demande excédera l’offre, et où l’offre sera de plus en plus difficile à assurer à un coût acceptable. Or, cet instant est proche.
La crise énergétique est pour très bientôt. Elle touche même déjà certains pays, avec son cortège de conséquences allant de la hausse des prix des biens essentiels à la naissance des conflits les plus violents. Elle devrait vraisemblablement s’accompagner des conséquences d’une autre crise d’envergure planétaire, climatique cette fois, engendrée par les mêmes causes. Malgré l’imminence de ces deux crises, toutes deux fortement liées aux transports, il faut bien avouer que nous ne bougeons guère, bercés par les effets d’annonces de constructeurs présentant des modèles « propres et économiques » , d’ingénieurs promettant des avancées techniques définitives, « d’experts » ne voyant aucun problème de ressource ou de pollution, ou de politiques se réclamant de la paradoxale et par certains côtés absurde, « croissance verte »…
Pourtant, envisagés à l’aune d’une population mondiale qui devrait atteindre d’après l’ONU 9 milliards d’habitants à l’horizon 2050, et dont une majeure partie souhaite vivre « à l’occidentale », ces effets d’annonces trop entendus se révèlent n’être que de simples idées reçues : des slogans formulés par la cupidité des uns, servant d’alibi à l’immobilisme des autres.
Un passage en revue de ces idées permettra de mieux comprendre les tenants et aboutissants de la consommation énergétique liée aux transports routiers, et ouvrira des perspectives sur les solutions réellement envisageables, tout en donnant à réfléchir sur l’ampleur du défi qui nous attend.
Nous postulerons en dernier ressort que si des alternatives techniques, comportementales et organisationnelles s’imposent absolument, elles ne peuvent être mises en place que dans un cadre légal fondamentalement modifié.
Nous avons volontairement choisi d’analyser la situation sous l’angle des ressources énergétiques. Très parlant, il permet en outre d’appréhender la situation relative aux émissions de gaz à effet de serre.
PREMIERE PARTIE : LES SOLUTIONS TECHNIQUES
Idée reçue 1 : il y a bien assez de pétrole pour tous et pour des décennies encore
Une façon pertinente d’appréhender le futur consiste à considérer le nombre de véhicules particuliers dans le monde et le rapporter au nombre d’habitant par pays. Nous comptions en 2007 un peu plus d’ 1.030.000.000 automobiles dans le monde, et il s’en vend à cette échelle environ 70.000.000 annuellement (ce qui correspond à une augmentation de plus de 130 unités par minutes en 2008 [7]). Or, si en Europe le ratio est d’environ 600 voitures pour 1000 habitants (davantage encore aux Etats Unis), en Chine il est d’à peine 28, ce qui représente déjà 40.000.000 de véhicules [8]. Pensons-nous vraiment qu’une Chine en plein développement technique s’en tiendra là (on y prévoit déjà 150.000.000 de véhicules à l’horizon 2020) ? Non bien sûr, et certains rapports prévoient ainsi un doublement du nombre d’automobiles sur la planète à l’horizon 2030 [9].
Compte tenu des prévisions concernant l’usage des transports dans les pays émergents (lesquels tentent de s’inscrire, quoi de plus évident, dans notre sillon) et dans un contexte de croissance économique généralisée, la consommation mondiale d’hydrocarbures risque d’exploser. L’on peut dès à présent s’attendre à brève échéance (20-30 ans) à une disponibilité réduite des carburants et à une hausse importante de leurs coûts.
En effet, selon les pétroliers eux-même, le « peak oil » [10] est probablement dépassé depuis 2006 [11], ou très près de survenir (2020 selon l’entreprise Total). Appelé aussi « pic de Hubbert », le peak-oil correspond au sommet de la courbe de croissance de l’extraction mondiale des hydrocarbures, c’est à dire la date à partir de laquelle la production ne peut que décroître, quels que soient les moyens mis en oeuvre. À cela s’ajoute le fait que nous consommons actuellement 4 fois plus de pétrole que nous n’en découvrons [12].
Le problème est difficile à appréhender pour les non initiés, le concept de réserve pétrolière étant très élastique [13]. De plus, les définitions varient selon les pays. Comme le précise Jean-Marc Jancovici sur son site manicore.org, cette définition est « physico-technico-économique », en ce sens que la seule présence de pétrole ne suffit pas à constituer une réserve : encore faut-il qu’il soit extractible, à un coût raisonnable. Quoi qu’il en soit, la connaissance des ressources n’a guère changé depuis 1975, seules les notions de réserves probables, possibles et prouvées ont évolué [14].
Malgré tout, certains contestent le risque de pénurie avant un demi-siècle [15] autant que le risque de hausse des coûts dus à cette pénurie. Ils sont de moins en moins nombreux et leur argumentation s’essouffle, alors que de plus en plus de professionnels indépendants tirent la sonnette d’alarme, tout en dénonçant les interprétations fallacieuses et les données tronquées qui abusent les décideurs politiques eux-mêmes.
Bien entendu il y aura toujours du pétrole sur Terre. Mais arrivera le jour où il faudra davantage d’énergie pour l’extraire que l’énergie qu’il représenterait potentiellement. À moins que les difficultés d’extraction ne grèvent son coût de façon démesurée (cas des schistes bitumineux de l’Alaska et du Canada -Alberta- dont le bilan d’exploitation est en outre épouvantable sur le plan écologique et humain). Ce sera la fin d’une époque d’abondance, et en conséquence la fin de l’utilisation massive de l’or noir dans les transports.
L’ère du pétrole bon marché pour tous touche à sa fin.
Idée reçue 2 : remplaçons les produits pétroliers par les agrocarburants
Quelques chiffres clé : Affecter 10% des surfaces agricoles mondiales à des agrocarburants permettrait une production nette équivalente à 4% de la consommation actuelle de produits pétroliers, pouvant monter jusqu’à 10% selon les scénarii les plus favorables. Un exemple parmi d’autres : le territoire agricole français ne suffirait pas à faire rouler la moitié du parc automobile national dans les conditions actuelles [16].
Certains pays comme le Brésil, il est vrai, semblent s’en sortir. Mais à un coût environnemental intolérable (déforestation massive et changement des climats locaux, monoculture intensive, pollution des sols et des eaux par les engrais et pesticides).
Par ailleurs, l’on a déjà pu constater que la conversion massive des surfaces agricoles « alimentaires » en surfaces agricoles « énergétiques » avait systématiquement des répercussions très défavorables sur le prix des céréales destinées à la consommation.
De plus, les filières conduisant à la production d’éthanol ou d’huile végétale sont elles-mêmes fortement énergivores (notamment en raison des contraintes liées à l’agriculture intensive), d’où des rendements souvent peu intéressants en plus d’un écobilan parfois désastreux, surtout concernant l’éthanol (impact sur les réserves aquifères, pollutions diverses).
Le passage aux agrocarburants de deuxième génération (matière végétale non alimentaire) ne sera pas une solution évidente, dans la mesure où nous retrouverons, organisés autrement, les mêmes problèmes de substitution d’espaces agricoles « alimentaires » en espaces agricoles « énergétiques », de pollution, d’alimentation en eau et de déforestation.
Si des projets alternatifs existent, comme la culture de végétaux en plein désert [17] ou d’algues à proximité des centrales et usines rejetant du CO2 [18] , ils resteront à la fois marginaux et insuffisants dans le cadre d’une alimentation massive du marché des carburants.
Enfin, si l’on considère que le rendement des moteurs thermiques est faible (moins de 10% en ville, 35% au mieux sur route à vitesse stabilisée) : la solution des agrocarburants consisterait vraiment à faire partir plus des trois quarts de nos récoltes en fumée…
Les agrocarburants représentent donc une mauvaise idée, surtout pour les transports de masse énergivores d’aujourd’hui. Ils pourraient notamment être utilement réservés aux exploitants agricoles, qui y trouveraient une certaine autonomie.
Idée reçue 3 : passons à la propulsion électrique
Du point de vue des ressources énergétiques, on ne fait que décaler le problème si l’on produit l’électricité nécessaire aux transports de masse via les hydrocarbures. Si l’on décide de produire cette électricité via l’énergie nucléaire, cela posera nombre des problèmes presque insolubles, allant de la ressource disponible aux contraintes industrielles énormes en passant par la gestion des déchets et les aléas géostratégiques [19]. Et les énergies renouvelables n’offrent pas, d’un point de vue technique, de perspectives satisfaisantes à court et moyen terme.
A titre d’exemple, uniquement en France, il faudrait construire 50% de centrales nucléaires supplémentaires (soit 29 réacteurs classiques ou 22 de type EPR), ou couvrir de panneaux solaires la moitié des toits (5000km2), ou planter au minimum 250000 éoliennes (!) pour alimenter un parc de plus de 30 000 000 de véhicules [20]. Ce qui dans les deux derniers cas ne résoudrait en rien le problème de stockage de cette énergie.
De plus, les améliorations techniques envisageables du point de vue de l’ingénieur sont difficilement généralisables à moyen terme, et sont à mettre systématiquement en regard d’un doublement probable du nombre de véhicules à l’horizon 2030. Cet angle d’approche permet de comprendre les immenses difficultés qu’il y aurait à utiliser massivement certains métaux rares et précieux comme le Lithium, dont les réserves sont insuffisantes et représentent des sources de conflits potentiels [21].
Enfin, séduisant parce que durable et à haut rendement, le moteur électrique est peu adapté au transport particulier si nous lui demandons des performances en tout point équivalentes aux moteurs thermiques selon les standards de mobilité actuels (vitesse/autonomie/stockage/approvisionnement). En définitive, on arrive au même constat que précédemment : il sera nécessaire de révolutionner les normes et standards de la mobilité individuelle.
Idée reçue 4 : vive la voiture hybride
Les voitures hybrides tirent la totalité de leur énergie du pétrole. Mais grâce à l’accouplement entre moteur thermique et moteurs/générateurs électriques, optimisent le rendement du premier de façon il est vrai très intéressante.
Cependant, jusqu’à présent, les voitures hybrides ont seulement permis une légère baisse de la consommation comparativement à leurs homologues thermiques (la très connue Toyota Prius consomme ainsi entre 4 et 5 litres aux cent), ce qui est très insuffisant eu égard aux économies dont les véhicules de demain devront faire preuve. Et si nous prenons en compte leur éco-bilan (fabrication/recyclages de l’ensemble batterie-moteur), nous constatons qu’il n’est pas des plus brillants… Les nouvelles générations d’automobiles hybrides seront à moyen terme à peine plus performantes, et leur technologie et leur coût rendront leur accès difficile à une majorité d’utilisateurs, réduisant vraiment leur intérêt au niveau mondial pour les deux prochaines décennies. Invention séduisante, pur produit marketing ou vitrine technologique coûteuse, le constat est le même : ne convient pas pour une utilisation massive et à court terme, selon les standards de la mobilité actuelle.
Idée reçue 5 : l’air comprimé comme vecteur énergétique
L’intérêt du principe réside principalement dans le fait que l’air comprimé est un vecteur d’énergie non polluant et stockable assez facilement. Cela étant , on retrouve en gros les mêmes problèmes qu’avec le moteur électrique (le besoin de fournir d’une façon ou d’une autre, et proprement, l’énergie primaire nécessaire à la compression de l’air, pour un usage mondial généralisé), avec un rendement moins bon dû à la perte énergétique lors des cycles compression/détente, un ratio poids/puissance assez peu intéressant [22], mais un aspect de moindre dépendance au flux d’énergie primaire (si l’on décide de coupler avec l’électricité d’origine éolienne ou solaire par exemple).
A réserver aux petits trajets à faible vitesse.
Idée reçue 6 : la solution est la voiture à hydrogène
Que ce soit par le biais d’une pile à combustible ou via un moteur à explosion, la filière hydrogène est séduisante sur le papier, notamment en raison d’émissions polluantes quasi nulles au pot d’échappement. Mais l’hydrogène ne se trouvant pas à l’état natif sur notre planète (il ne peut être considéré comme une source d’énergie), son utilisation pour les transports de masse consiste une nouvelle fois à décaler le problème : sa production demande une énergie comparable à l’énergie produite par les carburants fossiles utilisés dans les moteurs, et même davantage eu égards aux problèmes de rendements des filières, énergie qui pour l’instant serait fournie majoritairement par les produits pétroliers, que les sources d’énergies renouvelables ne sauraient remplacer. En outre, le stockage de l’hydrogène et son transport sont également très difficiles à maîtriser, très coûteux et énergivores (un comble).
Et enfin, sauf à révolutionner les lois connues de la physique, les voitures autoproduisant de l’hydrogène à partir d’eau sont plutôt assimilables à des vitrines marketing [23].
Idée reçue 7 : améliorons simplement le rendement des véhicules « standards »
L’idée en apparence la plus simple. En effet, à performance de transport égale (vitesse, accélération, autonomie, sécurité), on peut théoriquement arriver à diviser par deux la consommation de carburant d’un véhicule standard. La Logan Eco 2 de Renault est à ce titre un bon exemple, même si elle se révèle finalement moins sobre qu’une VW Lupo d’il y a… 10 ans ! Il faut cependant considérer que le moteur à explosion de nos voitures aura toujours un rendement médiocre (aux alentours de 35 % dans les meilleurs cas), même si certains fabricants proposent néanmoins des innovation techniques séduisantes ou très « exotiques », susceptibles de rendre les moteurs un peu plus économes [24].
Supposons alors que les constructeurs décident aujourd’hui même de ne plus proposer que des modèles consommant 3 ou 4 litres au cent en moyenne. Une reconversion du parc mondial prendrait environ 15 ans. Rappelons alors qu’à l’horizon 2030, ce parc aura, sauf crise mondiale ou prise de conscience aiguë, probablement plus que doublé… Tant de prouesses pour un retour à la case départ, retour d’autant plus navrant qu’à cette période-là il restera pour une dizaine d’année de pétrole, rappelons-le. Vous avez dit… Shadocks ?
Idée reçue 8 : « ils » vont bien inventer/trouver quelque chose au moment voulu
Cela ne peut avoir valeur d’argument, car il n’existe aucune garantie à cela : L’histoire de l’humanité montre en effet que la notion de progrès technique n’évolue absolument pas de façon linéaire : il y a de fortes avancées, et des coups d’arrêt majeurs, lesquels ont malheureusement déjà causé la disparition de civilisations incapables de s’adapter. Se reposer ainsi sur la possibilité d’une découverte in extremis relève surtout de la croyance : nous autres humains aimons croire, c’est dans notre nature. Nous croyons ainsi également que nous pouvons radicalement modifier les effets sans changer radicalement les causes.
Les autres solutions techniques
Les solutions techniques évoquées plus haut montrent toutes, quelque soit leur ingéniosité, une grande insuffisance à relever le défi qui nous est proposé.
D’un point de vue physique, cela s’explique aisément. Sachant que les principaux facteurs de consommation énergétique d’une voiture sont la résistance à l’air, à l’inertie et au roulement (voir aussi l’exemple simplifié développé ci-après), l’essentiel des améliorations automobiles ne peut s’effectuer qu’en modifiant trois paramètres principaux : la surface frontale et l’aérodynamisme, la masse, et la vitesse [25]. Un certain nombre de véhicules ont déjà ainsi été conçu [26]. Analysons-les : nous constatons aisément qu’en jouant sur les deux premiers paramètres, les inventeurs ont obtenu des engins légers, étroits, tenant généralement plus de la soucoupe ou du cigare que de la voiture standard, et capables d’économies de carburant substantielles aux vitesses autorisées aujourd’hui, comme la Loremo consommant en moyenne un peu plus d’1,5l de diesel au 100 km [27]. Mais les contraintes liées à la vitesse (tenue de route, autonomie, sécurité passive) interdisent de descendre en deça d’une certaine masse, facteur majorant la consommation énergétique notamment en conduite urbaine.
Pour améliorer encore la sobriété des véhicules, il nous faut agir également sur le paramètre vitesse (à l’instar des prototypes s’affrontant lors de concours de sobriété [28], les derniers en date ayant remporté la palme avec plus de 3500 km avec un seul litre d’essence, et plus de 5300 km avec un litre d’hydrogène… à 30km/h de moyenne !). En effet, d’un point de vue physique, il faut considérer que la puissance nécessaire pour propulser et maintenir un véhicule à une allure donnée est principalement une fonction quadratique de la vitesse, en raison de la résistance de l’air.
Cela étant, on constate que ces diverses améliorations techniques se font au détriment de la polyvalence (critère de choix essentiel pour les utilisateurs).
Nous pouvons donc tirer de ces exemples les enseignements suivants :
– les rares véhicules très sobres susceptibles de s’inclure dans le trafic actuel sont et seront très exclusifs en terme de design et de performances, ce qui réduit et réduira leur polyvalence et leur intérêt, et donc in fine leur utilité dans la quête d’une réduction drastique de la consommation mondiale d’énergie. Et si leur sobriété est correcte à régime stabilisé, elle l’est moins dans le cadre d’un usage courant.
– les véhicules très sobres et polyvalents ne peuvent pas se déplacer aux vitesses en vigueur actuellement
– les véhicules ultra sobres ne peuvent pas se déplacer aux vitesses actuelles, et ne sont pas polyvalents
Petit exemple simplifié : un véhicule standard se déplaçant sur une route plate sans vent à une vitesse V (en m/s) sur une distance D (en m).
La force aérodynamique (Fa) que ce véhicule doit contrer dépend de sa vitesse (V en m/s), de sa surface (S en m2 ) elle-même pondérée par le fameux coefficient de pénétration dans l’air (Cx), et de la masse volumique de l’air (Ï, environ 1,3kg/m3), selon la formule : Fa = ½ Ï S Cx V2
La force de résistance au roulement (Fr) que ce véhicule doit contrer est causée principalement par les déformations incessantes des pneus. Elle dépend de la masse du véhicule (m) de l’accélération de la pesanteur (g en m/s/s) et d’un coefficient de pondération k dépendant de la vitesse (k = 0,01 + 1 x 10 -5 V2), selon la formule : Fr = m g k [28]
Caractéristique de notre véhicule : m = 1000kg, S = 2,6, Cx = 0,29
L’énergie (E) que devra dépenser le véhicule est le produit des forces à vaincre par la distance parcourue, soit :
E = (Fa+Fr) D = ½ Ï S Cx V2 D + m g k D
Sur une distance de 1 km (1000m) à 100 km/h (environ 28m/s), l’énergie dépensée E100 sera égale à :
E100 = 0,5 x 1,3 x 2,6 x 0,29 x 282 x 1000 + 1100 x 9,81 x 0,01784 x1000 = 576 749,84 Joules, soit environ 160,21 Wh
Sur la même distance, mais à 50 km/h (14m/s), l’énergie dépensée E50 sera égale à :
E50 = 0,5 x 1,3 x 2,6 x 0,29 x 142 x 1000 + 1100 x 9,81 x 0,01196 x1000 = 225 119,96 Joules, soit environ 62,53 Wh (à peine plus qu’une smart [29]
Nous obtenons donc entre ces deux consommations un ratio de 2,56. Dans la réalité, cette comparaison manque de précision : d’une part, les voitures actuelles sont construites pour connaître leur meilleur rendement (cependant faible : 35% max) à un régime moteur correspondant à des vitesses de l’ordre de 90-110 km/h (ce qui minorerait le ratio), et d’autre part, des véhicules construits pour rouler à 60-70 km/h auraient un rendement adapté, une taille plus réduite (d’où une moindre prise au vent) et un poids largement inférieur.
Un véhicule spécifiquement conçu pour rouler à 50km/h consommerait une énergie E’50 plutôt en rapport avec l’équation suivante :
E’50 = 0,5 x 1,3 x 1,8 x 0,34 x 142 x 1000 + 500 x 9,81 x 0,007 x1000 = 112303,8 Joules, soit environ 31,2 Wh
Soit un ratio de plus de 5, ce qui commence à être très intéressant (mais à comparer avec la consommation des véhicules de l’extrême déjà cités, avec leur consommation de 1Wh/km !).
Puisqu’ 1l de carburant fournit environ 10 kWh (un peu moins pour l’essence, un peu plus pour le diesel), et que le rendement d’un moteur à essence est au mieux de 35% environ, 1l de carburant fournit environ 3,5 kWh d’énergie utile. On en déduit qu’un véhicule « low speed » de type petite citadine imaginé plus haut et se déplaçant sur le plat à 50km heure consommerait moins d’1l/100 km à vitesse stabilisée.
A cet exemple il faut ajouter que la part essentielle de la consommation énergétique est dépensée (et généralement perdue ensuite au freinage pour tout moteur thermique) lors des phases d’accélération. La Puissance (P) nécessaire pour propulser un véhicule de masse (m) selon une accélération (Ï’) à une vitesse (V) s’écrit : P(t) = m x Ï’ x V(t). On en déduit qu’une accélération constante sur une distance (D), consomme une énergie (E) égale à :
E = m x Ï’ x D.
Il est donc évident que plus un véhicule léger prévu pour rouler à faible vitesse (et donc selon de faibles accélérations sur de courtes distances), consommera une énergie bien moindre durant cette phase. Un raisonnement identique peut être tenu pour l’étude des déplacements selon un dénivelé positif.
Conclusion de la première partie
Que déduire de cette rapide analyse à propos de ce que l’on pourrait appeler « les solutions techniques imparfaites » ? Si certaines sont intéressantes, notamment combinées entre elles, aucune n’est généralisable, seule ou associée à d’autres, de façon a faire diminuer la consommation énergétique mondiale et la pollution, dans le cadre de standards de mobilité inchangés, et dans le contexte d’un accroissement du nombre de véhicules et de ressources s’épuisant rapidement.
Par ailleurs, leur relative impuissance à concurrencer les technologies éprouvées des véhicules standards sur leur terrain n’incitent guère à leur développement massif via les constructeurs automobiles, ni à leur plébiscite par les utilisateurs. On incrimine assez facilement les lobbies divers d’être responsables de ce manque de réactivité, mais cette explication, pour valable qu’elle soit, est sans doute plus marginale qu’on ne le pense : retenons plutôt qu’en l’état actuel des connaissance, les solutions techniques sont insuffisantes pour optimiser massivement le rendement des automobiles selon une utilisation « traditionnelle ».
L’analyse des différents paramètres influençant la consommation d’énergie est donc claire : au niveau technique, pour diminuer la consommation de façon réellement significative au niveau mondial, dans le cadre des connaissances actuelles, tout en utilisant des véhicules polyvalents, il nous faudra renoncer au poids et à la vitesse de nos automobiles, pour y substituer d’autres critères de performance (sobriété, simplicité, ingéniosité).
Nous allons voir à présent comment ce renoncement pourra en outre influencer radicalement et de façon vertueuse les facteurs comportementaux déterminant la consommation énergétique liée aux transports.
DEUXIEME PARTIE : LES SOLUTIONS COMPORTEMENTALES
Résumons :
1) L’humanité est à l’aube de deux crises majeures : l’une énergétique, et l’autre climatique.
2) Pour couronner le tout, sa population augmente (ce qui pose sans doute un problème), une population qui ne demande qu’à consommer en général et à se déplacer en particulier.
3) Elle n’a pas de solution technique pour continuer à se déplacer massivement selon des standards considérés subjectivement comme les plus élevés (vitesse et confort).
Rendons-nous à l’évidence : les alternatives salutaires, valables énergétiquement et écologiquement s’appuient toutes sur l’adage : « la seule énergie propre est celle que nous ne consommons pas ».
La solution de l’autolimitation et les changements d’outils
Voici un catalogue non exhaustif de bonnes vieilles recettes généralement reconnues comme efficaces [31] :
– Abandonner la voiture (on peut affirmer sans crainte de se tromper que moins il y aura de véhicules et d’automobilistes sur Terre, mieux la planète et l’humanité se porteront).
– Louer son véhicule au besoin.
– Rouler moins.
– Covoiturer (au besoin avec des outils logistiques modernes [32] ), solution connaissant des débuts prometteurs notamment dans les grandes et moyennes entreprises
– Partager [33].
– Organiser le travail et les lieux d’activité différemment.
– Consommer moins et mieux.
– Consommer local.
– Utiliser systématiquement le vélo, la marche à pied et les transports en commun dès lors que cela est possible (à propos de ces derniers, une autre idée reçue consiste à croire que tout pourrait être résolu selon cette voie [34]).
Cependant, aucune population ne change massivement de comportement avant d’y être conduite par les faits ou incitée par les réglementations. Du côté de ces dernières, retenons les incitations fiscales comme la très efficace « Taxe carbone » [35] (dont on ne pourra pas faire l’économie à l’avenir), qui conduisent rapidement à une diminution de la consommation pétrolière, (nous avons pu constater quelle était l’influence d’une hausse brutale du prix du baril sur le secteur des transports début 2008). Malheureusement, ces dispositifs pourraient également, associés à l’augmentation inéluctable bien qu’erratique du coût moyen du pétrole, générer rapidement un coût social proche de l’insupportable pour une partie importante de la population, celle qui n’aura pas les moyens techniques ou logistiques de s’adapter.
Si l’ensemble de ces mesures génère de nombreuse tensions, c’est parce qu’il existe des raisons autres que financières qui conduisent les sociétés occidentales à ne pouvoir vivre, pour l’instant, hors du « tout voiture ». Raisons qui constituent autant de frein à l’essor des comportements « vertueux ».
Des raisons « structurelles » tout d’abord : les pays occidentaux, voués aux transports motorisés, possèdent des infrastructures dédiées essentiellement aux véhicules personnels rapides, et des modalités d’activités en rapport. In fine tout s’organise à presque tous les niveaux selon ce type de mobilité particulier. Pour en résumer les conséquences selon un point de vue différent, notre modèle, dédié au transport personnel « rapide », ralentit considérablement l’éclosion de systèmes « lents ».
De plus, il existe une donne géographique des lieux de vie et d’activités, construite pendant des décennies sur des critères de grande mobilité personnelle : pour une certaine population, rurale ou néorurale par exemple, la voiture reste – encore – le meilleur, voire le seul, moyen de se déplacer.
Des raisons « de concurrence » ensuite : la force de travail énorme, les possibilités d’action et de gain très importantes, permises par les techniques les plus puissantes et les plus énergivores, limitent considérablement l’intérêt immédiat de techniques certes plus sobres mais infiniment moins puissantes (allez donc convaincre un VRP d’enfourcher un vélo pour faire son boulot si son concurrent reste en voiture !). En mettant sous perfusion ces techniques puissantes (en les autorisant, en les favorisant, en les subventionnant), avec la volonté de retarder l’échéance fatidique, on génère non seulement des tensions et des injustices, mais surtout on empêche le développement de techniques alternatives, qui nous l’avons vu ne sauraient être massivement concurrentielles dans un cadre et un contexte inchangés.
Enfin, last but not least, des raisons liés à l’inertie de gestes du quotidien fortement ancrés (rappelons-nous que 50% des trajets effectués en France font moins de 3 km !). Beaucoup de professionnels de l’environnement oublient ici deux notions primordiales : d’une part le geste est tout autant lié à l’outil que l’inverse (relisons Jacques Ellul [36] ), et d’autre part la nature profonde d’homo sapiens est profondément mimétique et mue par le désir. Une exemplarité des outils et des individus utilisant ces outils, le tout représentant ainsi un nouvel archétype et de nouveaux modèles de référence, s’impose donc.
Conclusion de la deuxième partie
Les conseils les plus salubres et les dispositifs fiscaux les plus recommandables resteront fatalement en suspens tant que les outils, les règles et le cadre lui-même ne seront pas modifiés, de même que les changements de comportements pourtant indispensables.
On retrouve donc, et de façon étonnante, les besoins évoqués à la fin de la première partie consacrée aux solutions techniques : le besoin de modifier le cadre de l’action et les règles du jeu.
A ce moment de la démonstration, la prise de conscience de l’immensité de la tâche qui nous attend peut décourager ceux qui se sentent impliqués (les autres attendant au propre comme au figuré que le ciel leur tombe sur la tête). C’est surtout la complexité générée par les différents niveaux de responsabilité interconnectés qui effraye.
Et pourtant, une mesure simple pourrait fournir ce cadre évoqué précédemment, nécessaire à la répartition des tâches entre tous les acteurs, pour un bénéfice gigantesque aux niveaux énergétique, écologique et social.
TROISIEME PARTIE : LIMITER LA VITESSE DE MANIERE DRASTIQUE
Nous avons constaté l’inefficacité des solutions techniques proposées dans la perspective d’une continuité des standards actuels de la mobilité (vitesse et confort).
Nous avons vu que ces mêmes standards empêchent structurellement un changement significatif des offres industrielles d’une part, et une évolution majeure des comportements d’autre part.
S’attaquer à ces standards semble donc bien LA seule voie susceptible, éventuellement accompagnée d’une taxe carbone, de briser les freins liés à la permanence des infrastructures, à l’inégalité des forces techniques en présence et à l’inertie des comportements. Ce serait de même la seule voie permettant une transition à court terme entre le schéma actuel (qui conduit vraisemblablement à la catastrophe), et un schéma de grande sobriété fondé sur les comportements respectueux de l’Homme envers son environnement.
Comment mener cette attaque ? Simplement en considérant que la croissance de la puissance de déplacement des terriens n’est pas gravée dans le marbre de l’évolution, et que la vitesse ne saurait être considérée dans l’absolu comme le gage du modernisme le plus abouti.
Une fois cette révolution intérieure effectuée, la solution vient naturellement à la lumière des considérations techniques et comportementales évoquées plus haut: il suffit de rouler moins vite. Beaucoup moins vite.
Une « simple » mesure serait le fondement constitutionnel de ce nouveau paradigme : limiter drastiquement la vitesse sur routes et autoroutes à 60 km/h maximum, et 35km/h en ville, partout dans le monde (la France pourrait être dans cette perpective un pays précurseur).
Invitons ceux qui lèvent les bras au ciel à ce stade de l’exposé à relire posément chaque chapitre, et à méditer sur l’adage « penser globalement, agir localement ».
De façon plus constructive, examinons les avantages d’une telle mesure :
Avantage 1 : limiter la consommation d’énergie, tout en permettant l’émergence de nouvelles techniques
Nous l’avons vu plus haut, une diminution drastique de la vitesse à 30 km/h permet la création de véhicules futuristes – quoique totalement inadaptés aux usages les plus courants – pouvant consommer jusqu’à 300 ou 400 fois moins d’essence que la moyenne des voitures actuelles. A des vitesses de l’ordre de 50 à 70 km/h, et pour une utilisation standard, les calculs montrent qu’il serait vraisemblable de tabler sur des automobiles consommant 10 à 20 fois moins qu’aujourd’hui, selon leur usage.
En effet, la réduction drastique de la vitesse maximale autorisée induit la création d’un cercle vertueux au niveau de la puissance des moteurs (électriques, thermiques ou chimiques), de la masse des véhicules, et par voie de conséquence de la consommation d’énergie et de la pollution
Dans ce cadre, quelques solutions techniques variées existent bel et bien, pouvant s’appuyer sur différentes sources et vecteurs énergétiques (relire les paragraphes dédiés aux idées reçues), et il semble dès lors possible de fabriquer des véhicules correspondant à de nouvelles normes de vitesses autorisées, ne consommant pas plus de l’équivalent d’1/2l de carburant aux 100 km.
Avantage 2 : limiter l’impact des gaz à effet de serre
Bien entendu, quelques soient les techniques motoristes, consommer moins d’énergie conduit à émettre moins de gaz à effet de serre, et à limiter d’autres types de pollution afférentes.
Avantage 3 : favoriser les comportements les plus sobres
Il va de soi qu’une telle mesure conduirait les voyageurs à se déplacer autrement. Le véhicule individuel motorisé deviendrait uniquement une option parmi d’autres, peut-être même un objet de location et non plus de propriété. Cette conséquence serait très bénéfique pour des pays dit « émergents » comme la Chine et l’Inde, de même que pour sociétés « occidentales », où elle engendrerait un trafic urbain différent, moins dense et moins rapide, permettant notamment un fort développement des véhicules à propulsion musculaire.
Avantage 4 : permettre l’instauration d’une taxe carbone
Comme nous l’avons évoqué, le taxe carbone est un outil très efficace récompensant les comportements les plus sobres, mais pouvant s’avérer très inégalitaire dans certains contextes, aussi bien entre les individus qu’entre les entreprises et les activités économiques internationales. Diminuer volontairement la toute puissance des transports par le biais de la vitesse permet dès lors d’instaurer une taxe à la fois équitable et nécessaire.
Avantage 5 : relocaliser et restructurer l’économie
De même que le pouvoir d’aller loin et vite a historiquement permis un déplacement des zones d’activités, le fait de réduire ce pouvoir engendrera une adaptation de nos sociétés à la nouvelle donne. Songeons seulement qu’en un siècle, le temps de trajet domicile-travail est resté constant [37]. Du côté des pays dits « émergents », cela aurait en outre l’immense mérite de ne pas favoriser la déstructuration le tissu économique et social existant.
Nous pourrions même en faire un véritable projet de société, en favorisant différentes initiatives qui en découleraient, en soutenant les plus ennuyés par une telle décisions, en promouvant des secteurs d’activités en relation (transports en commun, télétravail…).
La planification d’une telle opération et la refonte structurelle qui en découlerait pourrait créer des dizaines de milliers d’emplois dans de nombreux secteurs, tant privés que publics.
Avantage 6 : Donner la possibilité aux citoyen d’être acteurs du changement
Imaginons : n’y aurait-il pas une source d’enthousiasme pour tout un chacun à participer concrètement à la refonte d’une société ? Nos contemporains souffrent énormément des conséquences d’une certaine dictature de l’efficacité industrielle. Avec une telle mesure, remettant en cause les modes de vie et la philosophie de l’existence, il y a fort à parier qu’une majeure partie de citoyen aura le sentiment (et le pouvoir, enfin) d’avoir prise sur son développement (nouvel urbanisme, nouveaux modes de production…).
Avantage 7 : faire sortir du marasme une industrie automobile en panne, et au-delà une économie en récession
Qui dit nouvelles règles dit nouveaux standards, d’où nouveaux véhicules. Obliger les fabricants existants ou à venir, à proposer ensemble (condition essentielle) des alternatives, sur des critères où le progrès ne serait plus assimilé à la vitesse ou au confort, mais à la sobriété et au moindre poids, pourrait se révéler très bénéfique pour ce secteur d’industrie employant en France un salarié sur dix et qui, soyons lucides, se cherche vainement depuis quelques années, tandis que ses insuffisances stratégiques et structurelles engloutissent les aides de l’état en attendant le prochain choc pétrolier ou la prochaine crise de surproduction.
Paradoxalement, n’y aurait-il pas un risque à donner un second souffle à l’industrie automobile via une mesure portant sur la nécessaire décroissance de la consommation d’énergie et des matières premières? Si bien sûr. A cela plusieurs réponses : adapter le seuil de vitesse autorisé (moins on peut aller vite individuellement, moins on roule, plus on privilégie les transports en commun et la propulsion musculaire). Ensuite, un cahier des charges fixé par les scientifiques et les institutions pourra aider à « diriger »les fabricants vers la recherche du plus léger et du moins gourmand. Enfin, puisque les nouveaux véhicules seront sans doute plus rustiques et plus « technologiques » à la fois, moins chers à l’achat et à l’entretien (ce qui correspond à une demande croissante de la part des utilisateurs occidentaux, et à une demande tout court des utilisateurs des pays en voie de développement), le faible coût au km pourra être compensé au besoin par une taxe carbone flottante, permettant de réguler la mobilité sans étrangler complètement le consommateur.
Parenthèse : il va de soi qu’il resterait des véhicules puissants et massifs (utilitaires divers), mais cela serait marginal (10 à 15 % du parc tout de même), et surtout des véhicules spécifiques pourraient être loués au coup par coup.
Avantage 8 : diminuer le coût social et financier des accidents de la route
Une conséquence qui se passe de commentaire.
Au chapitre des inconvénients, on peut en citer de nombreux (chacun les trouvera facilement), mais aucun qui soit réellement rédhibitoire eu égard aux enjeux. Citons en vrac :
– Temps de trajets rallongés (mais finalement pas tant que ça pour la très grande majorité d’entre eux, dans la mesure où le trafic serait fluidifié).
– Certains trajets difficiles à réaliser « comme avant » (ici, il faut considérer que de toute façon, à brève échéance et en continuant sur notre lancée, le résultat sera pire).
– Cohabitation temporaire de 2 types de véhicules dans les pays déjà bien équipés, les uns plus lourds que les autres, et certains nécessairement plus rapides (comme ceux des secours).
– Réaction des lobbies (constructeurs d’automobiles dont le prestige est fondé sur la puissance, motards…).
– Nécessité de refondre les codes, lois et homologations diverses.
CONCLUSION
A moyen terme, il faut bien avoir à l’esprit que le monde entier gagnera à appliquer une mesure globale de limitation drastique de la vitesse. Il va même de soi que cela pourrait constituer une transition moins brutale vers la société « sans voiture » qui pourrait nous être imposée à terme par la diminution des ressources, ou vers une société à énergie solaire, ou ce que vous voudrez d’énergétiquement et écologiquement soutenable.
Cette mesure ne constituerait pas une atteinte au progrès, dont la notion forcément relative varie énormément selon les angles d’analyse (en cela, la moindre pollution, la préservation des ressources, la relocalisation de l’économie et la diminution des accidents représenteraient aussi un progrès remarquable).
Il est également probable qu’individuellement, une majorité de citoyens ne soit pas préparée à une telle mesure. Mais les jeunes générations semblent malgré tout se faire à l’idée d’un monde moins fondé sur la toute puissance de l’automobile individuelle, puisqu’elles favorisent de plus en plus l’achat de petits véhicules simples, la location d’automobile et les transports en commun. Collectivement, faisons-nous confiance : nous saurons plus facilement nous adapter à un monde moins rapide qu’à l’effondrement brutal d’une société principalement fondée sur le pétrole.
Il faut enfin considérer avec gravité qu’historiquement, chaque période de grandes pénuries et de marasme économique a engendré guerre, génocides et fascisme.
Nous vivons un instant peut-être historique : le passage d’une société du « toujours plus et plus vite » à une autre du « moins et mieux ». Voici donc venu le moment de nous résoudre à modifier certains de nos standards, quitte à faire quelques – grandes – concessions sur ce que nous considérons – sans doute à tort – comme des éléments indispensables au bien être. « The American way of life is not negotiable », disait Georges Bush père lors de la conférence de Rio en 1992, et nous autres de nous indigner. C’est sans doute le moment de prouver que cette indignation n’était pas qu’une posture, et il va de soi que la plus grande partie de la réussite de cette entreprise dépendra de notre faculté à adapter ainsi nos comportements.
REFERENCES
[1] http://www.webenergie.ch/actions/energy_assessment/backups/1152099687_1/index_c.htm
[2] http://www.iea.org/textbase/nppdf/free/2007/key_stats_2007.pdf
[3] http://www.manicore.com/documentation/serre/GES.html
[4] http://www.industrie.gouv.fr/energie/comprendre/q-r-pet-eco.htm
[5] CITEPA inventaire CCNUCC décembre 2005[archive].
[6] http://www.industrie.gouv.fr/energie/statisti/pdf/co2-monde.pdf
[7] http://antivoitures.free.fr
[8] Comité Français des Constructeurs Automobiles : http://www.ccfa.fr
[9] http://www.lepoint.fr/actualites-economie/exclusif-le-rapport-enterre-qui-accable-la-voiture-electrique/916/0/296691
[10] http://www.planete-energies.com/contenu/energie/consommation/fossile/reserves-mondiales-petrole.html
[11] Association for the study of peak oil ; http://www.peakoil.net/ ; Energy Watch Group : http://www.energywatchgroup.org/Startseite.14+M5d637b1e38d.0.html
[12] http://www.journaldunet.com/science/environnement/dossiers/06/0606-petrole/2.shtml
[13] http://wolf.readinglitho.co.uk/francais/fpages/freserves.html
[14] http://www.manicore.com/documentation/reserve.html
[15] http://www.linternaute.com/savoir/petrole/interview.shtml
[16] http://www.manicore.com/documentation/carb_agri.html
[17] http://www.agrocarb.fr/agrocarburants-de-deuxieme-generation.php
[18] http://www.biocarburants-energies.com/micro-algues.html
[19] « Courrier International » n° 956
[20] http://www.manicore.com/documentation/eolien.html
[21] « Courrier International » n°954
[22] http://www.lepost.fr/article/2008/09/25/1272901_petit-calcul-pour-la-voiture-air-comprime.html
[23] http://www.escapetheillusion.com/blog/category/topics/free-energy/
[24] http://www.moteurstirling.com/ ; http://quasiturbine.promci.qc.ca/ ; http://fr.wikipedia.org/wiki/Moteur_Pantone
[25] http://cocyane.chez-alice.fr/pdf/voiture_2litres.pdf
[26] http://generationsfutures.chez-alice.fr/vertueux/hypervoitures.htm
[27] http://evolution.loremo.com/
[28] http://www.ingveh.ulg.ac.be/fr/cours/Repetitions_MECA_0004/Repet_2.pdf
[29] http://pboursin.club.fr/velec/calculs.htm
[30] http://www.shell.com/home/content/eco-marathon-en/about/about.html) ; http://www.ecomotionteam.org/blog/
[31] http://www.carfree.fr
[32] http://www.dominique-bied-cap21.com
[33] http://fr.wikipedia.org/wiki/Autopartage
[34] http://www.manicore.com/documentation/trains.html
[35] http://fr.wikipedia.org/wiki/Taxe_carbone ; http://www.manicore.com/documentation/serre/taxe_C.html
[36] « Le bluff technologique », Jacques Ellul, 1988, Ed. hachette Littérature
[37] « La liberté de circuler », Colin Ward, 1991, Ed. Silence)
71 réponses à “Décroissance pratique : réduire la vitesse, par Samuel Gérard”
Un article très intéressant pour une proposition audacieuse.
Je n’ose imaginer cette situation explosive d’avoir à faire cohabiter sur une même route deux flottes de véhicules, les uns d’ancienne génération limités à 90 km/h au nom du meilleur rendement des carburateurs à cette allure, les autres à 60. Un problème de transition me semble se profiler à l’horizon politiquement, pratiquement et écologiquement difficile à gérer.
D’autre part sur les grands axes en mileu urbain et périurbain, l’encombrement aux heures de pointe ne risquerait-il pas de se prolonger au point d’effacer le gain attendu d’une telle mesure ? Du simple fait d’une vitesse d’évacuation du réseau moindre à volume de véhicule égal.
Je précise qu’en ce qui me concerne personnellement, j’ai cette chance de pouvoir totalement me passer de voiture et n’en possède donc pas…
[…] Original post by Paul Jorion […]
Un moyen de réduire de manière drastique son besoin de voiture, notamment dans son activité professionnelle: Le travail à distance, ou télé- travail.
Malheureusement, ce mode d’activité n’a manifestement pas encore la faveur des entreprises françaises, les offres en la matière sont anecdotiques – 6% de l’activité en France en 2006, qui s’illustre ainsi par son retard, selon cette source: http://www.assemblee-nationale.fr/13/propositions/pion1194.asp
@ Samuel Gérard
Pour être crédible, dans ce monde, il faut faire des propositions compliquées, et irréalisables : Vous êtes complêtement à coté de la plaque !!
Bravo quand même.
Ca roule! Je ne dépasse pas le 58,9 Km/h en légère descente avec vent de dos de 10 à 20 Km/h, et c’est mon moyen de transport perso le +rapide! Si vous aviez dit 50, pourquoi pas mais j’aurais été emmerdé par les radars. Déjà qu’en ville…
Sérieusement, dites moi combien de députés en l’état serai(en)t favorable(s) à votre idée? Yves Cochet sans doute, et après? Bon, et d’un, c’est déjà mieux que rien …
Je connais malheureusement trop bien ce secteur…. combien de milliards € l’Etat vient-il déjà d’injecter pour sauver cette French way of life et les emplois qui vont avec en faisant semblant d’anticiper sur le futur? Qu’est-ce que vous faites de la floppée de commerciaux qui passent 50% de leur vie professionnelle le cul ds une bagnole en faisant au moins une fois par an l’équivalent du tour de la terre et dont c’est la fierté?
Vous proposez en fait une mutation intégrale de civilisation dont la vitesse n’est qu’un aspect mineur, le résultat de bien autre chose, d’un autre monde où la pub stimulatrice des pulsions d’achat aurait disparue, d’où les commerciaux de tous poils auraient été reconvertis en réparateurs de bicyclettes car c’est plus complexe qu’en apparence, d’un monde où les décideurs prendraient leurs décisions sur la base d’une légitimation morale et pas sur la seule hypothèse économisciste d’alternatives entre deux options soit des hommes -des vrais – susceptibles de résister aux lobbies et leurs mirages si ce n’est leur prévarication (comment reconnaitre un spécimen ou spéciwomen de ce genre? Via la démocratie actuelle? Je n’en suis pas sûr du tout, surtout pour arriver jusqu’à un pouvoir, et ds l’état, une forme de pouvoir plutôt incompatible avec le sens moral nécessaire…), etc
@ Eugène
Non, non, Samuel ne propose pas la mutation : elle aura lieu de toute façon.
Il propose juste d’en effectuer une partie volontairement.
En voila une idée intéréssante, mais il me parait impossible de passer brutalement à 60 km/h d’un seul coup.
Par contre en imaginant de baisser de 1km/h par an ( ou plutôt 10 tous les dix ans) peut être que ça pourrait passer.
Par contre à ce rythme il va falloir 70 ans… Mais c’est mieux que rien.
De plus à partie du moment ou la baisse est enclenchée, les constructeurs n’auront plus aucuns intérêt à faire des véhicules de plus en plus puissants.
@ Thomas,
Tu auras remarqué que j’ai déjà mué?
Je m’interrogeais à haute voix sur la façon dont çà peut s’institutionnaliser. Trouver des hommes ou des femmes politiques qui vont y procéder ma parait hasardeux si on ne redéfinit pas en même temps qui fait partie du démos, mais peut être vais-je trop loin?
>Samuel Gérard
Votre article est très intéressante, il souligne le lien entre technologie et structure sociale: d’une certaine façon, votre solution mène à une forme de socialisation du service des transports. C’est une sorte de socialisme démocratique high tech que vous dépeignez.
> A tous
Je suis persuadé d’ailleurs que ce mode de pensée peut être étendu.
Je vais faire une proposition, sans doute un peu farfelu, mais que je lance à la discussion.
Je part du constat suivant: les grands groupes industriels, notamment dans l’agro-alimentaire utilise des procédés qui sont souvent rapidement amorti, et donc ils finissent par percevoir une rente indue du fait de leur capacité à structurer les marchés autour d’eux.
Il n’est pas rare ainsi de voir le même produit provenant de la même usine, vendu sous deux emballages différents et avec deux prix différents: l’essentiel de la différence de prix provenant des intermédiaires, du marketing et autres activités plus ou moins parasitaires permettant le maintien d’une rente.
Pourquoi ne pas nationaliser ce type de groupe? En quelque sorte, l’état gérerait ce qui est devenu le tout venant, où l’innovation n’a plus vraiment d’importance, et laisserait la place libre aux vrais entrepreneurs, qui pourraient ainsi exercé leurs « instincts » créatifs en toute liberté.
Si ces derniers inventent de nouveaux procédés, rien ne les empêcheraient de les vendre à l’état, qui augmenterait ainsi progressivement la qualité du tout venant…
C’est ce qui a été fait dans le domaine de l’eau dans certaines communes, où des fonctionnaires territoriaux gèrent le traitement et la distribution de l’eau: on constate une baisse des prix et une meilleurs qualité de service, tout en évitant la corruption locale.
Réenclancher des cercles vertueux dans les domaines energétiques, de la production, de la réutilisation des déchets offrent toutes les pistes de sortie de crise, pragamatiques et apportent de l’espoir.
Hélas, la décroissance ne peut être un programme succeptible de mobiliser les énergies, ce post est déprimant et véhicule avant tout les démonstations de JM Jancovici (site Manicore).
Sont elles exactes? Exemple sur l’idée reçue concernant la propulsion électrique. Il faudrait 22 EPR supplémentaires pour alimenter le futur parc de véhicules. Est-ce si vrai? Et si nous réussissions à faire des économies drastiques dans l’isolation thermique des bâtiments, et si chaque toit était équipé de panneaux solaires, et si les abords des axes routiers étaient utilisés pour la prouction d’énergies renouvelables (biomasse, solaire), et si nous par ailleurs réussisions à stocker l’énergie produite pendant les pics de production et la restituer pendant les pics de consommation, et si nous utilisions les étendus desertiques pour produit de l’energie solaire, aurions nous vraiment besoin de 22 EPR supplémentaires… D’autant plus que les rendements du photovoltaïques croissent en fléche. L’épuisement du Lithium? les procédés d’extraction du Lithium de l’eau de mer? Et les projets de batteries Zinc-Air? Ces débats doivent exister. Ce serait intéressant de connaître de manière plus approfondi les éléments du débat.
Un cabinet de conseil environnemental, BeCitizen, développe le concept d’Economie Positive, bien plus plus enthousisament et mobilisateur que la décroisssance. L’idée force serait de transformer nos activités économiques en activité régéneratrice pour le climat, la biodiversité… surtout via des incitations fiscales (allégement de la fiscalité du travail contre une fiscalité carbonne ou fiscalité des activités polluantes par exemple).
Tout ça n’apparait pas irréalisable, des défis concrets demandent à être relevés et last but not least, du fait de la dispertion de la ressources énergétique, beaucoup d’emplois locaux peuvent être créés et le capital plus également réparti (entre des producteurs d’énergies particuliers par exemple contre des monopoles de l’éléctricité).
Un nouveau concenssus de société, un New Deal peut se dessiner sur ces questions. Les discours de Barack Obama sur la question, les récentes décisions européennes, le Grenelle de l’environnement, le boom des cleantechs sont autant de raisons d’esperer. Même s’il faudrait faire beaucoup, beaucoup plus. La crise peut servir d’accoucheur d’une nouvelle socitété. En tout cas, les solutions sont dans l’air du temps…
Cette solution (partielle), si elle est de bon sens et remarquablement démontrée ne s’imposera QUE lorsque les éléments extérieurs (prix du petrole, principalement) l’imposera non pas comme une hypothèse mais comme la seule solution viable.
Donc trop tard.
Le refus d’abandonner son confort, réel ou fantasmé, est probablement la force conservatrice la plus puissante, qui s’applique même lorsque la prise de conscience de l’urgence écologiste a eu lieu.
>Romain D
Dans le domaine environnemental, il se pose toujours le même problème: celui de l’évaluation et la compréhension des ordres de grandeurs.
Les voies alternatives que vous évoquez malheureusement sont entachés de nombreuses failles. Je vais vous en donner quelques exemples:
Considérons le lithium: on le trouve essentiellement dans quelques gisements salins, notamment en Argentine et au Tibet (ce qui explique en passant pour une petite partie la politique chinoise dans cette partie du monde). Cela corresponds à des réserves de 11 millions de tonnes: le lithium étant extrémement réactif, il n’existe pas à l’état métallique et donc on doit l’extraire de ses gisements de sels.
En l’état, 70% de la production mondiale de lithium provient d’un seul gisement en Argentine, et 12% des lacs salés tibétaine…
La production mondiale de cet alcalin est de 25000 tonnes par ans, elle suffit à peine aux besoins mondiaux, puisque en 5 ans le prix du kilo de lithium a été multiplié par 10.
Il serait donc extrêmement coûteux, et géopolitiquement hasardeux d’utiliser ce matérieux pour faire du stockage d’électricité.
L’extraction du lithium de l’eau est extrêmement coûteuse: on ne l’utilise que pour quelques applications, notamment militaire.
En l’état, les arguments de Mr Jancovici sont très raisonnable: il s’agit de raisonnements d’ordre de grandeur, que l’on peut minorer ou majoré de 10% ou peut être au pire de 20%, mais il n’y a pas de raison d’espérer gagner un ordre de grandeur à court terme…
@ Blob
L’idée n’est pas farfelue, mais qu’est-ce qui va faire, que tout d’un coup, les hommes vont se comporter différemment ?
Ce qui ressort de ces derniers message montre que le mur que notre société est en train de heurter n’est pas technique, géologique ou systémique, mais humain.
Bonjour tout d’abord (eh oui, aller moins vite commence comme cela),
pour rebondir sur certains propos et hypothèses exposés plus haut je pense que la vitesse, et son augmentation, est une conséquence de l’augmentation exponentielle de la population humaine, et ce particulièrement dans les deux derniers siècles écoulés. C’est un peu comme le principe de Venturi : dans un tuyau, pour augmenter le débit de particules y circulant, il faut augmenter leur vitesse. Comme le dit justement Ken Avo si on réduit la vitesse sur les axes « rapides », le trafic s’évacue moins vite et les bouchons durent plus longtemps.
Malheureusement ce constat me conduit à la seule conclusion que pour réduire la vitesse (pas que des véhicules) générale de nos sociétés il faut en diminuer drastiquement les effectifs.
Suis-je trop pessimiste ou peut-on entrevoir une prise de conscience générale qui ne génère pas un bouchon mondial ?
Nos déchets constituent une matière première inépuisable, peut-être que si nous pouvions-nous réfléchir autre chose que d’en rester à des stations d’épuration, et des incinérateurs, ….. pour essayer écologiquement d’en extraire quelques bio-carburants ?
Il me manque aussi, qu’il ne soit pas intégrer le fait que la construction de bon nombre d’objets, dont celle d’un véhicule neuf, est particulièrement énergétivore, …. peut-être devrions-nous réaliser que notre conception du « jetable », jusqu’à concevoir l’idée d’un parc de véhicules jetables doit aussi considérer, l’énergie nécessaire à la construction d’une automobile ou d’un camion ?
Je me demande aussi si nous ne pourrions pas économiser aussi beaucoup d’énergie, à cesser de transporter, sans qu’il en soit d’aucune nécessité n’importe quoi dans tous les sens, et de tant d’autres activités produites dont le gaspillage énergétique est à la limite du soutenable, insoutenablement superficiel et léger ?
Ne pourrions-nous pas aussi dans le cadre des économies d’énergie, s’oser de quelque peu critiquer toutes ces usines qui déménagent beaucoup ici et là, pour des motifs de rentabilités lesquels sont souvent contraires, extrêment rarement compatibles de motivations aussi bien sociales qu’écologiques
N’y aurait-il pas aussi à parler, cela très fort, de toutes les économies d’énergie à réaliser , si l’humanité voulait bien cesser de guerroyer sans cesse, car très concrètement, le fait de la guerre détruit, tue, pollue, elle en donc d’autant plus énergétivore ?
Cela sans dire, qu’à priori, nous avons encore besoin d’utiliser le pétrole pour nous permettre de réaliser sereinement la transition énergétique vers l’après-pétrole, ….
Bonjour,
@ Paul Jorion
Merci pour cette ouverture sur la décroissance !
Un point central de notre système est souligné : » la civilisation de la bagnole ».
S’attaquer à ce pivot a des implications concrètes dans l’établissement d’un nouveau système.
@ Samuel Gérard
Bel article.
Pour l’hydrogène il y a quelques secteurs où la photocatalyse à son mot à dire.
Pour l’habitat cela pourrait être intéressant :
http://www.pureenergysystems.com/news/2004/08/27/6900038_SolarHydrogen/index.html
A quand un article sur le thème « Moins de biens, plus de liens » ?
Mouai !
Pas terrible comme idée, sachant qu’il y a plus simple et plus efficace : le vélo.
Il faut savoir que la voiture, si on cumule temps de transport + temps de travail pour payer la voiture et l’essence, ne permet pas de se déplacer (en ville) plus vite qu’un vélo. En fait le vélo est 2X plus rapide.
(je peux fournir les détails du calcul si vous le souhaitez).
D’autre part, les stats montrent que la plupart des travailleurs sont relativement proche de leur lieu de travail (une poignée de Km). Donc le vélo est plus qu’envisageable. Le seul vrai inconvénient c’est les intempéries (la solution est facile à mettre en oeuvre) et la fainéantise (plus dur … lol).
La voiture pourrait rester pour les grand trajets, mais sous forme de location, ca serait bien suffisant.
Nous ne sommes en crise que parce que nous le voulons/valons bien.
Nous ne sommes en réalité que prisonnier de l’idée de la voiture, telle que véhiculée par les médias et les pubs.
Nous avons une telle marge de manoeuvre que demain, tout pourrait être résolu si nous le voulions vraiment.
Original comme idée… surprenant. J’aime bien.
Pour le vélo j’ai comme un gros doute… comme un tres tres gros doute.
Quelle est la part en terme de pollution du transport de marchandises, relativement aux trajets domestiques?
Quelle est la part de gens qui, à la campagne, doivent faire 15 km pour ne serait-ce qu’aller chercher le pain? (c’était mon cas)?
@ blob
Concernant les batteries, il existe bien d’autres combinaisons chimiques que le Lithium, utilisant des ressources abondantes et facilement recyclables, comme le Zinc. De sérieux problèmes sont certes posés par la formation de dendrites sur les éléctrodes. Par sûr du tout que ce soit insurmontables. Après tout, la filière du Lithium a été développée pour des accumulateurs de petite capacité, pas pour des véhicules électriques. Les constructeurs aujourd’hui prennent ce qu’ils ont sous la main pour leurs démonstrateurs. D’autres filières se développeront. Des infos sont disponibles sur ce site : http://www.electron-economy.org/article-29354239.html .
Je ne suis pas expert et ne pronconcerait pas sur la validité des chiffres avancés, mais il n’est pas absurde de penser qu’il est loin loin d’être certain que des progrès ne puissent être effectués qu’à la marge par rapport aux données chiffrées de JM Jancovici. La production d’électricité solaire connaît un gros engoument aujourd’hui et fait des progrés très rapide. D’après certains calculs (je n’ai pas les références sous la main), recouvrir 2% de la surface du globe de panneaux suffiraient aux besoins énergétiques de la planéte. Et on parle de surfaces désertiques, inexploitées.
Je ne suis pas persuadé du tout que le discours sur la décroissance puisse être aujourd’hui mobilisateur. Parler d’économie régénératrice me semble par contre bien plus porteur. Après tout, et je rejoins tout à fait le point de vu de Paul sur le sujet, nous faisons parti de la nature et en sommes san continuation. Nous prenons conscience des dégats portés sur la nature (j’élude le débat sur la conscience…). Dès lors, ne serait-il pas bienvenue d’apporter des solutions propres à regénérer les écosystèmes, plutôt qu’à songer à faire le moins de mal possible, ne nous considérant que comme des intrus dans la Nature?
L’Homme l’a d’ailleurs très souvent fait avant la révolution industrielle, notamment par ses pratiques agricoles. Cela étant, ce type d’Economie ne pourra fonctionner qu’avec des vertus de modération, comme préconnisé par JM Jancovici.
>Romain D.
Dans le cas du solaire, le rendement quantique des meilleurs photopile est relativement proche de la limite théorique: pour attendre cela, on doit avoir recours à des moyens déraisonnables, c’est à dire à des matériaux coûteux et rares, dont les réserves sont quasiment épuisé.
On peut espérer arriver à un rendement de l’ordre de 12 à 15%, mais la production totale reste faible. Par ailleurs, les déserts sont des lieux hostiles, qui posent d’énormes problèmes logistiques, qui viennent renchérir les coûts de productions.
Par ailleurs, les bilans écologiques de la production de panneaux photovoltaïques sont tous très mauvais: avec les technologies envisageables, la fabrication de ces panneaux est coûteuse du point de vue énergétique (ce sont des matériaux très pur à faible entropie, qui nécessite donc de relâcher énormément d’entropie dans l’environnement) mais aussi du point de vue des matériaux utilisés. Les photopiles avec de hauts rendements utilisent des terres rares dont les gisements sont en fin de vie, et beaucoup d’eau très pure, ce qui épuise les nappes fossiles.
Le solaire n’est donc qu’un appoint à la marge: il n’est pas possible, avec les technologies actuelles de gagner un ordre de grandeur.
On peut évidemment envisager des ruptures technologique: après tout, en 1900 l’énergie nucléaire n’avait pas encore été découverte, et il semblait que l’on s’approchait des limites terrestre.
Le procédé Haber, permettant l’utilisation de l’azote atmosphérique est ainsi le résultat direct d’une conférence de William Crookes faites en 1898 à Bristol qui s’inquiétait des limites des réserves de nitrates mondiales. Haber décida alors de relever le défi lancé par Crookes de trouver un procédé viable d’exploitation de l’azote atmosphérique.
Néanmoins, rien ne prouve que ces ruptures auront lieu à temps: entre la découverte de la structure de l’atome et l’exploitation industrielle de l’énergie atomique, il s’est écoule 50 ans.
Avons nous une telle durée devant nous? Sans doute pas. Cela contraint donc nos choix, et nous oriente vers des choix conservateurs qui fonctionnent.
Cependant,
@ Ken avo : à propos du rendement des moteurs, il s’exprime principalement à un régime donné. Et même avec un rendement un peu inférieur, rouler moins vite est moins énergivore. Dans l’idée de la réduction drastique de la vitesse exposée plus haut, il va de soi que l’ensemble des véhicules, anciennes et nouvelles générations confondues, devrait rouler à 60km/h, pour éviter les problèmes de cohabitation que vous soulevez justement.
Par ailleurs un marché de l’adaptation de la gestion électromécanique des moteurs via les garagistes pourrait voir le jour.
@Eugène : je pense pour ma part que la vitesse et la grande mobilité est une composante majeure de l’évolution de nos société. Pratiquement toutes les modifications infrastructurelles et culturelles des sociétés dites « développées » y sont liées.
@JB : la notion de progressivité doit effectivement être étudiée avec attention, et en tenant compte du temps disponible avant l’épuisement des ressources ou l’augmentation majeure des prix des carburants. En l’état, 70 ans semble un délais bien trop long…! 10 km/h par an serait déjà plus raisonnable de ce point de vue (avec un soucis lié à la signalisation routière changeant perpétuellement, mais peut-être est-ce un problème mineur). L’intérêt d’une réduction assez rapide tient justement dans le fait qu’elle oblige littéralement les constructeurs et ingénieurs à changer de paradigme : on passerait alors du « toujours plus confortable, sûr et puissant », au « toujours plus léger, sobre et écologique à fabriquer ».
Une telle mesure ne conviendra forcément pas à tous : de nombreux corps de métier obligent à se déplacer beaucoup et loin en embarquant du matériel intransportable par le train (je pense notamment à des amis photographes). Il faudra les aider à survivre le temps que l’économie se relocalise un tant soi peu. Je suis pour ma part assez convaincu que la condition de réussite d’un projet tel que celui-ci tient avant tout à la possibilité de son appropriation par les citoyens. En la matière, et dans ce cadre nouveau, une foule d’idée nouvelles, plus ingénieuses et pertinentes les unes que les autres, certaines sommeillant dans les cartons depuis des années, peuvent voir le jour.
@Blob : tout à fait, les structures sociales et la techniques sont intimement liée (Michel, Serres, Jacques Ellul et d’autres ont très bien étudié la question). j’aime bien l’idée de démocratie sociale high tech, si l’on rajoute la donne environnementale et la notion de simplicité. En effet, la sophistication extrême facilite la vie des gens, mais par ailleurs peut conduire à l’impuissance du citoyen.
@ Yves de Bressy : au contraire de ce que vous avancez, réduire la vitesse sur les route diminue fortement les encombrements et bouchons (lesquels se créent en des points de ralentissement important, et non de vitesse basse absolue), comme de nombreuses études l’attestent. Ainsi, aux alentours de nombreuses villes, demande-t-on aux automobilistes de lever le pieds parfois plusieurs dizaines de km avant les points sensibles, de manière à fluidifier la circulation. C’est une dynamique assez particulière que celle des flux routier, qui diffère sensiblement des flux hydrauliques par exemple.
@ Cécile : il va de soi qu’une telle mesure s’inscrit dans un schéma de réduction de la consommation énergétique. Des véhicules plus légers et moins puissants sont moins énergivores à fabriquer. De plus, leur emploi devenant un peu moins indispensable au quotidien dans le cadre de vitesses drastiquement réduites (notamment 35km/h en ville), nous pouvons imaginer que cette mesure autorise la fin du véhicule particulier pour tous (signifiant ainsi moins de véhicules construits) laissant la place aux altérnatives locatives, aux transports en commun, aux transports à énergie musculaire. C’est une sorte de compromis pragmatique entre le schéma actuel et l’idée d’une décroissance brutale consistant à ne plus construire de voiture du tout. ce serait une mesure transitoire, ne préfigurant en rien les mesures nécessaires en 2050.
@ Jide : fin août 2008, des tensions fortes commençaient à se faire sentir en rapport avec le prix des carburant (dont la hausse avait, il est vrai, une composante spéculative importante). La »crise » a fait oublié cela, mais a plongé les constructeurs automobiles dans le doute, et certain dans la faillite. dans les deux cas, j’imagine que l’on pourrait profiter d’une situation exceptionnelle pour réformer la mobilité de façon volontaire. Sinon, comme vous le soulignez, cela se fera tout seul… probablement trop tard pour éviter une immense casse sociale et peut-êtres des conflits mondiaux d’envergure…
@ Romain D
Paul Jorion a défini le capitalisme comme le résultat du rapport de force entretenu entre trois agents : investisseurs, entrepreneurs, travailleurs. Le capitalisme a certes des structures objectives qui peuvent être distinguées. Mais il constitue un système en soi aussi parce que l’ensemble des agents a intériorisé ses principes de fonctionnement (concurrence, propriété privé, etc…). C’est un système en nous et hors de nous. (http://atheles.org/agone/contrefeux/denotreservitudeinvolontaire/index.html). Parmi les principes que nous avons intériorisés il me semble que la technologie est quasiment devenu une religion. Nous avons la foi que la technologie sera capable en toute circonstance de résoudre nos problèmes.
Tout est une question d’ordre de grandeur et de temps nécessaire :
Il s’agit de remplacer 85 million de baril consommés par jour juste pour le pétrole.
Et je n’ai pas les chiffres en mémoire pour le gaz et le charbon mais c’est tout aussi gigantesque.
Si l’on en croit les dernières nouvelles du GIEC au sommet de Copenhague, nous n’avons même plus le temps de tergiverser. Les émissions de CO2 doivent cesser et cela très rapidement. Les progrès technologiques sont toujours bon à prendre mais dans le cas présent c’est devenu un leurre. Continuer à consommer, se déplacer de la même façon est suicidaire.
Alors oui je suis d’accord les esprits ne sont pas prêt. Le plus gros effort à faire est envers nous-même.
La décroissance cela fait « peur » et c’est très compréhensible.
Pour autant cela me semble être une issue civilisée intéressante.
Il faut « décoloniser notre imaginaire » (Serge Latouche (que je n’aime pas trop à cause de sa pédagogie de la catastrophe…).
@antoine,
bien sur, je parle des villes. Ca n’a pas de sens en campagne, ni pour le transport de marchandise. A chaque problème sa solution.
>Samuel Girard
Il y a une notion importante provenant du logiciel libre que l’on oublie trop souvent (et même dans le domaine du Logiciel Libre), c’est l’idée du KISS: Keep It Simple, Stupid!
Pour ajouter certaines données au débat sur le futur technologique voir ce site
http://electronvert.blogspot.com/
Il faut quant même se poser la question de ce qu’est l’horizon temporel de la durabilité.
Est-ce 20, 50, 100, 1000 ans ou l’éternité ?
Je suis d’accord pour l’économie régénératrice et sur le fait que nous sommes de et dans la nature. Cependant, je pense que nous nous exposons exagérément au rôle de gestionnaire unique du système terrestre. Que l’ère de l’anthropocène est une occupation outrancière des surfaces.
Il y aura toujours trop de la vie qui nous échappera et la meilleure solution est d’accorder définitivement des surfaces à la seule Nature, pour ses propres besoins.
Nous en bénéficierons par la bande, dans l’environnement de l’économie régénératrice.
Je distingue Nature et Environnement.
La Nature existait avant l’Homme, l’Environnement est né avec l’humanité.
Paul Jorion ne parle que d’Environnement et laisse supposé que nous puissions devenir les gestionnaires actifs de toute la planète. Il y a une différence entre se faire le gestionnaire de la planète et en être responsable. Être gestionnaire conduit à nous mettre en position tendue sur les seuils de contre-productivité. Être responsable c’est reconnaître notre part inextinguible de méconnaissance et donner de la marge à la Nature en cessant le cumul des environnements.
Réduire la vitesse et les effectifs, droit de circuler un jour sur deux selon le numéro de plaque. Cela forcerait au covoiturage. Évoluer vers le partage des fonctionnalités, ici la mobilité.
IL pourrait y avoir report sur l’aviation. Il faudrait peut-être simultanément taxer les billets d’avion, pour na pas favoriser un élargissement des flottes d’aéronefs
@ Crystal
Par nature, je me méfis de l’idée de système comme explication de la réalité. Dans la réalité, il n’existe pas de système pur. Il existe une grande varité de capitalismes, comme il a existé diverses formes de communismes.
Nous évoluons pas étapes. Cette crise est une étape majeure. Elle nous fait ainsi prendre conscience non seulement du manque d’éthique d’une excessive concetration du capitale mais surtout de son inefficacité économique. Comment procéder à une plus juste répartition du capital?
Cette crise nous fait prendre conscience de l’inefficacité de la mondialisation organisée autour du libre échange. Cette dernière non seulement concourt à une concentration toujours plus grande du capital mais également à déprimer la demande mondiale (chaque nation sur la voie de toujours plus de compétitivité en vient à organiser la baisse de la part relative du travail dans la valeur ajoutée). Comment fournir des emplois à tout le monde et bien rémunérés?
Avec l’envolée récente des cours des matières premières, cette crise nous fait également prendre conscience que nous sommes dans une bulle environnementale et que notre mode de dévleppement basé sur la consommation n’est pas durable. Comment organiser nos sociétés pour faire vivre dignement ses membres durablement (et si possible harmonieusement)?
Les réponses sont en nous. Encore faut il le savoir puis le vouloir. Je ne pense pas qu’il faille raisonner système mais que des choix pragmatiques sur le mode d’incitations produiront plus de résultat que la coercition.
Aussi, il est certainement trop tôt de parler de décroissance pour proposer un nouveau modèle de développement. C’est le sens de mon message.
Je crois que nous avons toutes les solutions à portée de main.
Exemple de cercle vertueux pouvant être mis en place : une des clefs étant de faire baisser le coût du travail relativement à l’énergie (fossile) et au capital. La fiscalité peut apporter des réponses.
En effet, une économie fonctionnant sans énergies fossiles (énergie fortement concentrée, facteur de concentration accrue du capital via essentiellement l’automatisation et les faibles coûts du transport) aura aura besoin de beaucoup plus de bras pour fonctionner. Beaucoup de réponses peuvent être apportées par une taxe carbone vennant remplacer les charges sociales pesant sur le travail. L’énergie carbonnée devient plus cher, accélérant les économies d’energie et production d’energies renouvelables. Transfert nécessitant de la main d’oeuvre, favorisé par une diminution des taxes sur le travail. Cette dernière encourage par ailleurs le processus de relocalisation de la production, réduisant le trafic aérien et marittime. Et encourage les pays pollueurs fortement exportateurs à décarbonner leur économie (Chine) pour continuer à vendre leurs produits. Plus : économiser de l’énergie voire en produire pour un particulier, c’est autant de pouvoir d’achat en plus qui ira sur des produits qui seront d’autant moins cher qu’engendrant moins de pollution pour les produire.
Il convient de donner un coût aux externalités négatives (pollution), non pris en compte dans le prix des biens. Le mécanisme de droit à polluer du protocle de Kyoto apporte des réponses très intéressantes.
Quand aux ordres de grandeur, nous avons à faire à une dicussion d’experts sur ces questions. Mais il convient d’être conscient (autant que faire ce peut) que chaque expert parle au nom de la vision de l’Homme (ou du lobby) qu’il promeut. Les chiffres sur les potentialités de décarbonner notre économie font débat et c’est heureux. JM Jancovici est un expert… parmi d’autres. En tant que (jeune) citoyen, je préfére entendre parler d’économie positive plutôt que de décroissance.
Quand à la place de la technologie, hormis un saut remarquable dans la maîtrise de la fusion nucléaire, toutes existent déjà et ne demandent qu’à être améliorées à la marge pour décarbonner l’économie et restaurer des écosystèmes. Les solutions sont multiples (biomasse, solaire, éolien, hydrolien, microalgues…)
La première étape clef étant bd’améliorer l’efficacité énergétique des habitations. Il est ainsi possible aujourd’hui de bâtir des bâtiments produisant plus d’énergies qu’il en consomment sous nos climats tempérés.
@ Blob
Concernant le solaire actuel, les panneaux sont fabriqués en silicium qui est l’élément le plus répandu sur terre (le sable!). Oui, c’est couteux en énergie (et en eau pure) mais en maximum 4 ans (sous des latitudes tempérées), l’énergie produite est supérieure à l’énergie consommée. Il n’y a pas de rapport entre l’entropie générée entre cette source d’energie et les énergies fossiles.
Les rendements obtenus par les concentrateurs solaires sont bien supérieurs.
Les panneaux de demain pourront être des films en polymères ou composés organiques que l’on peut appliquer facilement sur tout type de surface. Ils sortent des laboratoires et sont produits avec les procédés de l’impression. Avec un moins bon rendement, ils sont bien moins couteux et entropiques (énergie + eau pure).
Un exemple de l’accélaration de la production d’énergie solaire : http://www.enerzine.com/1/7231+first-solar-a-produit-1-gigawatt-delectricite-solaire+.html http://www.enerzine.com/1/7233+baisse-continue-des-prix-de-revient-du-photovoltaique+.html
L’accélération pourrait être très rapide!
Concernant l’accès aux zones désertiques, on peut très bien soutenir que des zones arides du sud de l’Europe, aux Etats-Unis, dans les pays du Golfe, en Israël, au Magheb, en bordure de mer, sont au contraires très accessibles. Et certainement bien plus accessibles que des puits de pétrole en eaux profondes…
60km/h en rase campagne et 35km/h en ville ! Mais ce n’est pas du tout révolutionnaire ou contraignant ! Dans les années 90 j’avais lu un article de science et Vie qui disait que la vitesse moyenne des automobiles en France était de 37 km/h et de 16 km/h à Paris. De plus dans mon entreprise, l’ordinateur de bord du véhicule de notre VRP qui fait près de 70 000 km/an indique une vitesse moyenne de 65 km/h pour des trajets pourtant essentiellement autoroutiers.
Et ceci sans parler du concept de vitesse moyenne généralisée introduite par Jean-Pierre Dupuy et Ivan Illich qui consiste à ajouter au temps de déplacement le temps qu’il faut travailler pour se le payer. On atteint alors des vitesses ridicules. Par exemple si on a un coût de revient de 0.50 €/km et que l’on gagne 10 €/heure de travail, si on veut faire 100 km, il faut travailler 5 heures et comme 100 km à 37km/h cela prend 2h45, on a donc une vitesse moyenne généralisée de 100 / (5h+2h45) soit 13 km/h. A cette allure mieux vaut prendre un RTT et y aller à vélo. La conclusion de ce concept et que la voiture n’a aucun intérêt pour les pauvres, elle ne fait gagner du temps qu’aux riches, c’est donc un mode de déplacement très élitiste. Par contre le vélo et le mode de transport le plus efficient qui n’ai jamais été inventé.
@ Laurent S,
Entre 14:00 et 15:45 j’ai fait une boucle de 46,1km. Moyenne 26,34. Avec ton calcul et par rapport à ton 13Km/h je suis donc approximativement riche de 3/4 d’heure ou de 52’…. pour discuter!