Ma communication au colloque Fermons le casino : comment construire une économie réelle plus juste et plus forte ? organisé le 3 mars par le groupe socialiste du Parlement Européen.
Les sociétés modernes d’origine européenne se sont bâties sur le schéma d’une structure tripartite où l’on trouve guerriers-pillards, prêtres et gens du commun. Au moment où la démocratie apparaît, l’appropriation de la terre et des ressources qu’elle contient par les guerriers-pillards est en place de longue date. L’héritage avait facilité et renforcé une telle appropriation. Les révolutions bourgeoises du XVIIIe siècle complétèrent le pouvoir fondé sur la force par celui fondé sur l’argent. C’est l’argent qui soutint à partir de là les rapports de force que l’épée avait autrefois instaurés. Au XXe siècle, le colonialisme et, paradoxalement aussi le communisme, assurèrent la mondialisation de cet ordre social et économique d’origine européenne. On évoque aujourd’hui la nécessité d’un « aplanissement du terrain de jeu » ( leveling the playing field), on ignore hardiment ainsi que le terrain ne fut jamais plan.
1. Les stock options ou l’alliance sacrée entres investisseurs et dirigeants d’entreprises
Dans une citation qui ne passa pas inaperçue en 2006 et qu’avait pu extraire de lui Ben Stein du New York Times, le fameux investisseur Warren Buffett avait déclaré : « Oui, il y a bien une lutte des classes mais c’est ma propre classe, celle des riches, qui la mène et nous sommes en train de l’emporter ». La petite phrase marqua le retour en force d’une expression démodée. Il est vrai qu’avec la montée en puissance de l’École de Chicago en sciences économiques, l’expression de « lutte des classes » avait été frappée d’un tabou et les mots « capitalistes » (autrement dit « investisseurs »), « patrons » (ou « dirigeants d’entreprises ») et « travailleurs » (ou « employés », « associés », « membres de l’équipe », etc.) retirés du vocabulaire économique et remplacés par la notion fourre-tout de « masse monétaire », et ceci dans un grand mouvement qui vit les personnes remplacées dans les explications économiques par des « forces physiques ». Ce qui ne signifiait pas pour autant que la lutte des classes avait cessé, ni surtout qu’elle n’avait jamais eu lieu.
L’opération finale et la plus décisive de la lutte fut menée à la fin des années 1970 par le bureau d’études McKinsey qui mit au point les « stock options » grâce auxquelles « les intérêts des investisseurs et des dirigeants d’entreprises seraient une fois pour toutes alignés ». Leur plan réussit, et ceci au-delà de toute espérance.
La répartition des revenus : ce qu’il en advint
Avant que les stock options ne soient inventées, les salariés participaient à un grand jeu des trois nations où les investisseurs et les dirigeants d’entreprises jouaient chacun pour soi. Mais l’introduction des stock options mit fin à cette époque : une alliance sacrée était née et les salariés furent balayés. Leur part du gâteau s’amenuisa de plus en plus et toute tentative de leur part de l’augmenter fut brutalement contrée par les banques centrales soucieuses des masses monétaires, faisant grimper les taux d’intérêt – et du coup le taux de chômage – chaque fois que les salariés faisaient mine de broncher.
Leurs revenus se réduisant, les salariés furent forcés d’emprunter toujours davantage. Les banques commerciales, complaisantes, s’exécutèrent. Parallèlement les sociétés avaient cessé de réinvestir leurs bénéfices et tout le monde emprunta désormais. Les intérêts devinrent une composante de plus en plus lourde des prix. Le « capital » – à savoir l’argent dont on a besoin mais dont l’on ne dispose pas – poursuivit sa concentration dans un nombre de mains qui se réduisait encore. Bien entendu, plus le capital est concentré, moins il a de chances de se trouver là où il pourrait servir utilement.
La spéculation : la montée en puissance de la Société Spéculative
Que faire quand on ne dispose pas de l’argent dont on aurait besoin et que l’on sait pertinemment que travailler davantage ne ferait pas une grande différence ? Acheter un billet de loterie bien sûr. À la fin du XXe siècle chacun avait abouti à cette conclusion et les expressions « bulle financière » et « croissance » étaient devenues synonymes.
On avait cessé d’acheter des actions pour les dividendes qu’elles accordent (la part prosaïque du surplus que la compagnie a pu dégager grâce à votre investissement) mais pour leur plus-value. Pour que ceci devienne possible il fallait transformer la bourse en un casino et la cote de l’action Total ou BP devait se modifier toutes les cinq secondes. Bien entendu rien dans la manière dont Total ou BP mènent leurs affaires ne justifie que la cote de leurs actions se modifie toutes les cinq secondes – pas davantage que tous les cinq jours d’ailleurs. Mais la condition est indispensable pour que la bourse se transforme en un casino où des plus-values colossales seront encaissées. Quand ce beau plan cesse de fonctionner, c’est le krach, que l’on constate en effet tous les quatre-vingts ans environ.
Des émeutes de la faim fomentées par des musées et des hôpitaux
Si le commerce du blé se trouvait uniquement entre les mains de ceux qui ont du blé à livrer ou qui veulent en prendre livraison, son prix serait déterminé par la quantité qui en est produite et celle qui en est requise : ce que l’on appelle communément la loi de l’offre et de la demande. Mais ce n’est pas de cette façon que les choses fonctionnent de nos jours : le prix du blé est déterminé aujourd’hui par les paris que font les grands investisseurs institutionnels : les fonds de retraite, les fondations universitaires, les hôpitaux ou les musées. On pourrait s’attendre – au sein d’un monde rationnel – qu’ils focalisent leur attention sur les pensions à verser aux retraités, sur l’enseignement à dispenser aux étudiants, sur le soin à apporter aux patients ou sur la mise en valeur des œuvres artistiques, que non : ils portent toute leur attention à pousser à la hausse ou à la baisse le prix du blé et ceci pour protéger leurs avoirs, sans se soucier outre mesure du fait que des individus vivent ou meurent du fait de leur spéculation.
Les marchés au comptant ou à terme permettent à ceux qui sont exposés à un risque réel (dû au climat, à l’environnement économique général, etc.) de se couvrir, autrement dit de contribuer à réduire le risque global. Au contraire, ceux qui prennent des positions « nues » sur ces marchés, créent de toutes pièces un risque qui n’existait pas préalablement. La couverture procure une assurance alors que les positions « nues » ne sont rien d’autre que des paris créateurs de risque pour les parties impliquées et pour ceux qui dépendent d’elles. La fonction assurantielle de la finance protège l’économie alors que les paris la tuent. Les politiques adoptées en haut-lieu devraient en tenir compte. Le moyen de prohiber les paris sur la fluctuation des prix est simple et bien connu : il est expliqué dans la norme comptable américaine FASB 133 où il sert à déterminer deux traitements fiscaux distincts pour les positions de couverture et les positions nues. FASB 133 devrait être mise à jour et transformée en une interdiction pure et simple de la spéculation sur les marchés des matières premières.
Recommandations
Mettons fin à l’alliance sacrée entre investisseurs et dirigeants d’entreprises : elle détruit en ce moment-même le tissu social. Interdisons les stock options.
Débarrassons les banques centrales de l’idéologie monétariste : les sociétés humaines ne sont pas faites de masses monétaires mais d’êtres humains. Les banques centrales ont mieux à faire que de prendre systématiquement parti pour les investisseurs et les dirigeants d’entreprises contre les salariés.
Appliquons sans tarder une politique fiscale appropriée pour augmenter les chances que le capital se trouve là où il est effectivement utile.
Fermons le casino : interdisons la cotation continue sur les marchés au comptant et à terme.
Interdisons aux spéculateurs l’accès aux marchés des matières premières : interdisons les aux « non-négociants ». Permettons à ceux-ci de focaliser à nouveau leur attention sur ce que la société attend d’eux : enseigner, guérir et favoriser l’accès du public aux œuvres d’art en vue de diffuser la culture.
Encourageons les opérations d’assurance et interdisons les paris sur la fluctuation des prix.
74 réponses à “Ce qui a mal tourné. Le point de vue d’un anthropologue.”
Je viens de découvrir ce blog passionnant et je place ma modeste contribution.
Les bons, les méchants, les hedge funds et les pauvres salariés qui trinquent..oui, c’est hélas la triste réalité, d’aujourd’hui, d’hier et de demain, car, ne nous leurrons pas, la crise n’a pas été, pour l’instant, suffisamment puissante pour balayer un système cupide, pathologiquement cupide. Et quand bien même ce grand big bang économique surviendrait, je doute que la logique humaine construise un eden sur des ruines. J’en viens au fond de ma pensée. Ramenée au niveau cellulaire, la crise que nous vivons relève d’un mécanisme simple. La loi du plus fort. Une bactérie peut balayer notre défense immunitaire; à l’inverse si nos anticorps sont mieux armés, ce sont eux qui l’emporteront. Vision simpliste vous me direz, peut-être, mais si la loi du plus fort est valable au niveau moléculaire, ce qui nous constitue, comment envisager que l’homme produise autre chose qu’une lutte armée pour le pouvoir, pour ce qu’il envisage le plus profitable pour lui sans tenir compte de son voisin. Je ne vois pas de solution, le combat est inégal puisque nous nous battons contre notre propre adn. Pensées bien éloignées de l’économie, j’en conviens, mais je suis fatigué par certains discours politiques, économiques et syndicalistes qui se battent eux aussi pour imposer leur vision d’un monde équitable. On en revient systématiquement à un ordre guerrier. Les pauvres seront les premiers exposés à la crise, les plus riches s’en sortiront, et tout ce qui se trouve entre ces deux extrêmes vont se faire des cheveux blancs ! Voila peu ou prou ce qu’on nous débite à longueur de journée, merci pour l’info ! Acceptons que l’homme n’est pas égal et ne le sera jamais, qu’importe les mécanismes économiques que l’on pourra créer…alors choisir entre un kolkhoze fleuri ou une jungle spéculative reviendrait au choix illusoire bien connu en psychanalyse. Non, la vérité c’est qu’il n’y en pas, et si l’on devait malgré tout en dégager une, elle serait tellement crue à entendre, façonnée de chair et de sang, de trahison et de vies broyées, que l’on se satisferait du système actuel, c’est cela le choix illusoire, le refus d’accepter le monde tel qu’il est, se battre afin d’en créer un autre, meilleur, avant de s’apercevoir qu’il s’éloigne toujours davantage du bien être commun. C’est pour cela que rien ne change vraiment, un petit lifting sera opéré et nous repartirons pour une autre valse sanglante, la réunion du G20 se tiendra à Londres, le plus grand paradis fiscal de la planète, avec ça on peut espérer que les choses avancent !! La théorie de l’évolution tient un maître étalon dans le capitalisme moderne ! Mais au fait, la loi de l’évolution c’est quoi d’autre à part la loi du plus apte à survivre ?
Je réponds à quelques questions que vous me posez :
1) J’ai prononcé mon allocution sans consulter mes notes préalables. J’ai modifié celles-ci après coup pour refléter ce que j’avais effectivement dit. Donc, ce que vous pouvez lire est extrêmement proche de ce que j’ai effectivement dit.
2) La réception a été excellente : silence (respectueux ou atterré ?) pendant que je parlais et applaudissements nourris ensuite. Parmi les panélistes : division très nette entre ceux qui viennent me féliciter chaudement (« Enfin ! ») et ceux qui m’ignorent ostensiblement (« Je ne veux pas être vu en compagnie de ce gars-là ! »). Ces deux groupes de panélistes correspondaient à deux types de discours tenus par leurs représentants que je caractériserais respectivement de « éclopés mais toujours en vie et prêts à repartir au front ! » et « franchement dépressifs ».
3) Réactions, interactions depuis : rien.
4) Engagement politique personnel. Je l’ai dit : je suis allé parce qu’on m’avait invité et que les membres socialistes du Parlement Européen tombent pour moi dans la catégorie « interlocuteurs valables ». Ce qui s’applique aussi d’ailleurs au NPA, dont j’ai accepté une invitation à discuter le mois prochain et au groupe de réflexion de Corinne Lepage (MoDem) auquel j’ai également accepté de participer. Il y a bien sûr ici une sorte d’« harmonie préétablie » : les gens qui aimeraient vous entendre sont généralement aussi ceux avec qui vous êtes prêt à parler.
Merci Paul.
Il n’y a avait donc aucun décideur pour vous entendre.
Espérons que parmi vos auditeurs se cachaient quelques rapporteurs liés à quelques décideurs de poids, et que ces derniers insinueront vos justes conseils jusqu’à leurs cerveaux.
Faut-il croire que ces derniers écouteront vos requêtes?
Les révoltes sociales seront-elles contenues par la force que ces décideurs sauront mettre en oeuvre jusqu’à ce que des textes internationaux promus par eux réforment l’état actuel des choses?
Si vous suivez le parcours d’un Trichet par exemple, vous verrez qu’il ne peut modifier le système sans se ruiner ni se renier.
Peu de chances donc qu’une réforme ait lieu dans le calme.
En fait il faut se faire à l’idée que les décideurs SAVENT TRES BIEN CE QU IL FAUDRAIT FAIRE!
Mais le gestion du monde avec l’éthique du « père de famille » c’est « ringard » et trop simple pour être entériné par des « élites » arrivées où elles sont à force de compromissions politico financières.
complètement en phase avec vous pour ce qui serait d’interdire l’accès des marchés à terme sur matières premières aux hedge et autres investisseurs qui n’ont rien à y faire. permettre cela est totalement déraisonnable
@ Omar Yagoubi,
Et vous n’êtes pas le seul semble-t-il : http://www.radiofrance.fr/franceinter/chro/edito/
Eh bien!
C’est intriguant comment tout le monde devient spécialiste du sujet du moment… Et la du coup, hop les spécialistes de domainse importants autres lâche l’affaire et commencent tous a devenir penseurs/philosophes (vu qu’ils n’on évidemment pas la connaissance pour être « expert ») du sujet actuel. En l’occurence, economiste gestionnaire et financiers.
Votre discours empeste le communisme (ce qui n’est pas forcément dérangeant) le populisme (la plus quand même) et le manque de connaissance du domaine. Je ne vais pas critiqué mot par mot, mais j’aimerais relever/corriger quelques mythes populaires:
– L’idée des produits struturé et celui de l’assurance (hedging).
– la mauvaise utilisation des stock options sont la cause principale de la mauvaise gestion de beaucoup de compagnie, dans le sens ou il n’y en avait pas ASSEZ et surtout de trop courte durée. On aligne les intérêt de qui on veux, comme on veux avec des stock options, il faut juste que ca soit bien fait.
– un marché a des prix instantané car les titres peuvent être vendus de manière instantanés et si vous empecher celà les marchés secondaires s’en occuperont sans problèmes…
– Le mot spéculation est sans cesse utilisé de manière absurde! Nous sommes tous spéculateurs! Quand vous allez travailler pour une petite boite dont vous pensez qu’elle a du potentiel future, c’est de la speculations! Quand vous achetez une maison dans un quartier qui monte aussi! ETC ETC ETC
– Cette crise est due aux politiques des dernières années et non pas au marché. Des politiques de gens trop bête qui se croient multi-penseurs.
@Olivier N°2
Merci pour votre contribution qui mériterait de figurer dans le futur bêtisier des « analyses » de cette crise…Franchement la justification de la loi du plus fort grâce à l’emploi d’une métaphore entre la société humaine et l’organisation celullaire…
Morte de rire !!!
Sans vouloir vous offenser votre « argumentation » me fait l’effet d’avoir été effectivement produite par une seule cellule…
Rassurez-moi vous n’êtes pas une amibe ? (de type Naegleria fowleri dite dévoreuse de cerveau)
Plus sérieusement, tout cela pour vous dire que lorsque Paul propose une Constitution pour l’économie et que vous nous proposez votre « leçon de chose » (humains, cellules, même combat !) je ressens comme…un décalage…
@ Nicolas D.
Avant d’insulter la personne qui vous accueille chez elle (ces ultra-libéraux sont d’une impolitesse)… vous devriez d’abord lire son CV.
Paul Jorion est sociologue et anthropologue mais il a aussi été trader et ingénieur financier…Je crois qu’on peut donc lui affubler sans rougir le qualificatif « d’insider ».
Et en tout cas, en ce qui concerne les mécanismes purement financiers de cette crise, il mérite la casquette d’expert.
Je comprends votre colère face à quelqu’un qui ose mordre la main de ce qui l’a nourrit…
En tout cas merci pour votre réaction, elle ne fait que nous confirmer que nous sommes sur la bonne voie…
Bonne soirée.
PS : votre colère n’est rien face à NOTRE rage…et…nous sommes plus nombreux…
Bonsoir, un avis très critique au milieu de ce concert de louanges…
Une remarque pour commencer : qualifier « d’interlocuteur valable » un « parti » dirigé par un facteur qui se revendique ouvertement d’une idéologie marxiste responsable d’au moins autant de morts et d’atrocités que le nazisme me fait évidemment bondir.
Pour le reste : Les mesures proposées caressent parfaitement dans le sens du poil un auditoire socialiste qui est à peu près acquis d’avance à ce type de propositions et qui ne demande évidemment qu’à croire qu’elles pourraient constituer l’amorce d’une solution. En pratique, il s’agit pour moi de points de détail qui n’auraient aucun effet sur la crise en cours.
A aucun moment (j’ai déjà fait la remarque) n’est cité le vrai problème, c’est-à-dire une bulle de crédit géante créée par les politiques de fuite en avant dans la dette des états depuis plusieurs décennies.
A aucun moment n’est évoquée la façon qui permettrait de résorber cette bulle et d’éviter qu’elle renaisse à l’avenir.
A aucun moment n’est évoquée la façon dont il conviendrait de passer à une économie saine, c’est à dire une économie où la dette ne grossit pas plus vite que la création de richesses réelles (je ne parle pas de morceaux de papier).
Au lieu de cela, l’attention est détournée sur des problèmes totalement secondaires : les stocks options (l’essentiel des entreprises n’en ont pas), le fonctionnement des marchés de matières premières, la spéculation excessive (alors que celle-ci n’est que le produit des excès de liquidités et de crédits que les états et leurs délires keynésiens déversent sur les opérateurs pour « relancer l’économie », liquidités inutiles qui trouveront toujours un endroit où aller, en général le plus mauvais).
Ensuite qu’est-ce qu’une « politique fiscale appropriée » ? Encore plus d’impôts de la part de notre état qui est presque le champion du monde des prélèvements obligatoires (le poids de l’état dans notre économie ne cessant de gonfler depuis la fin de la 2ème guerre mondiale) ?
Si c’est de cela qu’il s’agit, nul doute que nous garderons un taux de chômage record même quand la crise sera terminée et que les autres pays verront leurs économies et leur marché de l’emploi redémarrer.
J’espère qu’un jour certains dirigeants s’occuperont du vrai problème : il y a trop de dettes, et il faut évoluer vers un système économique non basé sur une fuite en avant dans la dette et sur d’incessantes « relances » artificielles qui dérèglent tout…Angela Merkel, qui a vécu la faillite du sinistre modèle proposé par « l’interlocuteur valable » du NPA, et sait ce que c’est qu’une crise, est pour ma part la dirigeante européenne en qui j’ai le plus confiance.
@ l’ours tropical,
« De quoi Ubu est-il fondamentalement la figure ? Du despote parasitaire. Quelle est la puissance despotique d’aujourd’hui qui soumet absolument le corps social et le laisse exsangue d’avoir capté la substance de son effort ? Certainement pas l’Etat – dont on rappellera qu’il restitue en prestations collectives l’ensemble de ses prélèvements… – mais le système bancaire-actionnaire qui, lui, conserve unilatéralement le produit intégral de ses captations. »
F. Lordon
@ ghostdog
votre arme favorite, c’est le sabre, la massue ou le rouleau pâtissier? j’aime bcp vous voir à l’œuvre 🙂
@ M. Jorion
Vous avez été invité par et avez accepté l’invitation du NPA? Voilà qui est réjouissant…
J’avais une question bête, mais alors tellement bête que j’ose la poser: est-on condamné à vivre avec des capitaux? Je veux dire, si on s’attèle à répondre aux besoins de tous les humains, on arrive encore à en accumuler autant? Ou faut-il forcément accumuler d’abord pour ensuite y répondre à ces besoins (sans oublier qu’il faut encore les définir, ce qui n’est pas si simple)? C’est certainement bête à souhait, mais le capital, c’est-y pas un « surplus »?
@ Loïc Abadie
Ne vous inquiétez pas: le décompte des morts du capitalisme doit bien exister quelque part.
@IGor,
En réalité face à l’autisme intellectuel de certains intervenants je me sens …profondément désarmée…
@ ghostdog
je voulais mettre en lien une vidéo d’une chanson parlant d’armes… mais la violence… je connais une philosophe qui parle de ruser avec la violence, comme au judo peut-être…
La philosophe et l’un de ses livres
@IGor,
j’ai vu ce livre chez Aden, une de mes librairies préférées à bxl…mais je suis fauchée comme les blés…donc pas de bouquins pour le moment…
Enfin parce qu’en ces temps de crise rien ne vaut une bonne tranche de rigolade…
Selon un encart publié dans le dernier numéro de la revue FO Hebdo, un accord a été conclu le 1er Mars entre le syndicat Ver.di et les représentants de la quasi totalité des Länders (les Régions allemandes) qui prévoit….Une augmentation de 5,8% d’ici à fin 2010 .
Les 700 000 fonctionnaires concernés vont percevoir un versement compensatoire de 20 € pour Janvier et février 2009, et une prime supplémentaire de 40 € à partir du 1er mars 2009 ainsi qu’une augmentation de 3% de leur rémunération.
Une autre augmentation de 1,2% est d’ores et déjà prévue pour le 1er Mars 2010.
« Angela Merkel, qui a vécu la faillite du sinistre modèle proposé par « l’interlocuteur valable » du NPA, et sait ce que c’est qu’une crise, est pour ma part la dirigeante européenne en qui j’ai le plus confiance. »
euh…nous aussi ?
@ Ghostdog
Ce n’est pas de l’autisme c’est de l’idéologie – au même titre que nous, d’ailleurs – mais le résultat correspond étrangement à ces petites statuettes vendues par 3 : ne rien voir, ne rien entendre… Il en manque un. Zut !
« En fait, une culture commune d’abord, puis un certain stock d’expériences sociales identiques donnent aux membres des divers groupes, strates, classes, des moi sociaux relativement proches les uns des autres, c’est-à-dire un terrain récepteur semblable. » La conviction idéologique
J’ajoute, sans trop de risque : et des répulsions semblables.
@Loïc Abadie :
Je trouve surprenant que les libéraux ne se rappellent pas que les politiques « Keynésiennes » entreprises par les démocraties occidentales depuis la fin de la seconde guerre mondiale, ne sont que les fruits des rapports incestueux entre la Banque et le milieux politique, soit le libéralisme économique du monde des affaires mâtiné de l’intérêt bien compris du législateur. En France, les grandes banques sont dirigées par des proches du pouvoir, aux Etats-Unis, c’est exactement la même chose. Il incombera aux libéraux la responsabilité historique de nous prouver que le capitalisme peut fonctionner autrement, soit sans fuite en avant vers la dette. Pour ma part, je crois que l’idéologie libérale comme trait de notre civilisation, ne pouvait s’affranchir de la dette des Etats comme sujet de discussion ultime dans le show politique de toute démocratie libérale qui se respecte.
Désormais, la vie décente pourra s’écrire comme un chiffre, comme une statistique vers le désendettement, soit le gage ultime de « l’économisme » : la négation de l’humanité, puisque la dette exprimée comme telle, est le moteur du capitalisme ici-bas, du vrai capitalisme, pas de celui « supposé fonctionner sans Etat » loué par toutes les franges des courants libertariens.
@ Paul
Assimiler les « capitalisssses » aux guerriers-pillards, la formule est audacieuse mais très parlante et compréhensible. Mais assimiler les prêtres aux entrepreneurs me semble moins pertinent. Certes, il y a eu en France, un culte de l’«entrepreneur héros de la société qui se modernise» assez amusant et dont Bernard Tapie fut le modèle. Mais contrairement à Reagan, il a fait le chemin opposé entre politique et films de série B ïŠ .
Ceci me rappelle qu’une des premières fois que le jeune scientifique que j’étais il y a 40 ans s’est dit qu’il y avait quelque chose de pourri dans nos sociétés, c’est quand j’ai lu dans un article de « La Recherche » que, dans la France de 1960, 2/3 des maires des petites villes et villages étaient les descendants directs de la noblesse (= guerriers-pillards) d’avant 1789…
@Ghostdog
Je partage votre rage quand je vois la persistance d’une lecture simpliste et la focalisation sur une cause unique à vraiment tout de certains de nos co-commentateurs : les Anglais pour Mahéo (très cohérent larouchien) et l’Etat keynésien pour Loïc (fidèle ultra-libertarien). Mais il n’est pire sourd qui ne veut point entendre : ils ne sont pas peut-être pas bornés mais seulement rusés. Ceci illustre un élément que je trouve trop absent de nos réflexions : même sur un blog aussi policé que celui-ci ne se fréquentent pas que des purs esprits qui essaient de se convaincre mutuellement du bien fondé de leurs opinions. Il y vient aussi des personnes qui font partie de groupes ou d’associations ayant des objectifs et des intérêts bien précis. Méfiez-vous, je suis peut-être un crypto-éco-socialo-prêcheur qui tente de vous séduire… 😉
PS vient de lire votre dernier commentaire avant de poster le mien. Librairie Aden: nous sommes proches géographiquement et idéologiquement il me semble…
Bonsoir,
Ce qui me gène avant tout dans la plupart des propos, est qu’ils partent d’un appriori, les entrepreneurs, les riches, les investisseurs…..sont par nature cupides, et les autres sont des victimes. Je trouve cela trés réducteur.
A mes yeux, les politiques par leur course au pouvoir, à l’ambition aux avantages sont en grande partie responsable de la crise actuelle, il n’y a qu’a voir l’énormité des déficits. Lequel d’entre nous serait déclaré compétant, prévoyant s’il menait les comptes de son ménage ou de son entreprise de la sorte.
Je schématise, mais pense que si les états avaient consciencieusement remboursé en plus des intérêts le capital de la dette, beaucoup de banques auraient eu les moyens de vivre et n’en auraient pas été acculées à mettre sur les marchés du vent ( produits dérivés ).
Ce n’est pas le fait de légiférer ( il n’y a jamais eu autant de lois ) qui aidera à trouver une solution durable, si je ne tue pas avec une bombe, je peux tuer avec un fusil ou même avec un couteau et si tout cela me manque je peux tuer avec des mots.
Il nous faut petit à petit redonner à l’homme les outils de liberté, de créativité, de responsabilité, ( rendez vous compte qu’aujourd’hui nous en sommes arrivés à payer des personnes pour nous authoriser à faire ce qui n’est paa interdit ).
Mais pour cela il nous faudrait complètement changer les rapports que nous avons, et ceci à toutes les échelles, ce qu’aucune loi ne peut imposer.
Solution il y a, mais elle se trouve au fond du coeur de l’homme.
Il me semble que vos propositions sont proches de celles proposées par Lyndon Larouche, non?
Vous avez oublié les paradis fiscaux dans votre liste de propositions.
J’ai lu rapidement vos propositions, mais elles semblent plutôt me convenir
Je vais relire ça avec beaucoup d’attention demain matin.
@Berny !
je crois que vous décrochez la palme de la mauvaise foi et du « mauvais argument » dans ce fil de commentaires…On remarque que la compétition fait rage chez les libéraux-libertarians, les néo-cons (mais où vont-ils chercher tous cela ???) mais franchement je crois que votre :
« Je schématise, mais pense que si les états avaient consciencieusement remboursé en plus des intérêts le capital de la dette, beaucoup de banques auraient eu les moyens de vivre et n’en auraient pas été acculées à mettre sur les marchés du vent ( produits dérivés ). »
remporte la médaille du foutage de g…
Je propose que chacun des commentateurs « adoptent » un « contradicteur » de Paul dont on pourrait compiler les « saillies verbales ».
On pourrait se les ressortir les soirs de grosse tempête !
Paul , à quand un bêtisier ?
@ ghost dog
… calmez-vous. Ces interventions jouent sur le paradoxe : « Tout fait croire que c’est la faute à Reagan alors que c’est celle de Clinton… », « Tout fait croire que c’est la faute à von Hayek, mais c’est en réalité celle de Keynes », « Tout fait croire que c’est la faute de la finance mais curieusement c’est celle de l’État ».
Je crois que votre réaction à vous est symptomatique du climat actuel : si ce type de paradoxe constitue un sujet intéressant de débat « en temps de paix », en raison précisément du fait que cela excite l’imagination, en temps de crise, comme aujourd’hui, où l’impatience grandit et où l’on se fie davantage à l’évidence, cela apparaît au mieux comme un jeu de l’esprit et au pire comme de la mauvaise foi, voire même de la provocation gratuite.
GHOST DOG
Qui ne pense pas comme vous est un ( néo con ) néo je ne m’en doutais pas, con je le suis peut être trop souvent, mais pas necessairement dans le sens que vous donnez.
Ceci dit je vous remercie pour la médaille, ( ce sera la première )
@ loïc Abadie
je répondrai point par point
1. Votre réaction par rapport au NPA est désolante. Cela ne vaut guère mieux que le courrier de lecteurs du Figaro. L’histoire du couteau entre les dents commence un peu à dater. Venez dans mon cours, je vous enseignerai la différence entre communisme(s) et totalitarisme.
2. Vous évoquez la bulle du crédit. Très bien. Que proposez-vous ? D’augmenter les salaires ? No n? Pourtant si les gens ont tant emprunté ou s’ils s’en remettent tant à l’Etat, c’est bien parce que l’argent leur manque. Bien évidemment, vous n’en faites pas mention. Vous qui gérez si bien votre patrimoine, connaissez-vous des gens dans le besoin ? Vous mélangez-vous quelque peu ? Ou alors avez-vous une sainte horreur des pauvres et (je reprends le terme en vogue chez les néoliberaux) des assistés ? Je suis sans doute « un peu » rentre-dedans, mais je ne crois pas avoir lu sur ce post ou sur votre blog la moindre référence à un être humain.
3. votre focalisation sur l’Etat et sur l’impôt : on a déjà entendu ça quelque part. Les résultats vous paraissent-ils probants, disons par exemple, en Californie ? Et puis entre nous, votre « moins-d’impôt » caresse-t-il moins dans le sens du poil? Et qui caresse-t-il d’ailleurs ? Présentez-vous aux élections vous serez élu! Et vos électeurs vous serons gré de continuez la lutte des classes au profit des puissants.
4. Sur vos présupposés enfin : vous évoquez des » relances artificielles qui dérèglent tout… » Avec ce « tout », vous parlez bien du marché ? Quand on vous écoute tout va mal parce qu’on ne laisse pas le marché assez libre. Parce qu’on se mêlerait trop de ce qui ne regarde que le marché. Si tout va mal, c’est parce qu’il n’y a pas assez de vrai marché. Un peu comme naguère il n’y avait pas assez de vrai communisme dans le communisme soviétique. Finalement la boucle est bouclé e: il y a les mêmes raisonnements « fanatiques » chez les libéraux, les communistes et les nazis. A chaque fois, la foi du charbonnier qui anime les membres d’une de ces trois sectes les empêche de voir leur monde qui s’effondre.
@Paul,
schrompf…
Le problème qui est posé est : » comment faire la transition vers autre chose sans casse »
Je pense qu’ il faut partir de la situation qui existe, et construire de façon pragmatique la dessus.
La démarche de Paul me semble saine, elle est fondée sur du solide, n est pas entachée du prisme déformant de l’ idéologie.
Il est important de comprendre que la solution ne peut être trouvée d’ un coup, il faudra essayer ce qui est proposé, et sur une durée suffisante.On peut imaginer en europe de telles expériences adaptées a chaque état en fonction de la situation spécifique, avec un retour central de l’info pour affiner le dispositif.
La mise en place de ce que propose Paul est un changement de civilisation, on peut bien se laisser du temps pour le faire dans le calme.
PS: le temps presse, la tentation totalitaire est palpable partout, si la bête n’ a pas d’ autre issue, elle mordra, il faut la faire maigrir doucement.
Complétez cette intervention de celle de Frédéric Lordon, économiste au CNRS, à propos de la nationalisation des banques. Un homme clair et libre. Allez voir son interview sur la TELELIBRE.FR.
@ Berny
Vous avez l’air sincère dans vos propos et pourtant ils suscitent l’irritation, vous l’avez lu. Aussi je voudrais essayer de vous comprendre et de vous convaincre à partir de votre 1ère réaction.
1er §
Nous ne parlons pas ici de morale individuelle. Si les puissants sont critiquables (et critiqués durement ici) c’est parce que leur cupidité fait beaucoup de victimes. Les petits pingres sont inoffensifs.
2ème §
Les politiques, même du bord opposé aux mien, font ce qu’ils croient devoir faire, en géral avec sincérité. Si les déficits se sont creusés depuis quelque temps, c’est surtout parce qu’ils ont cru devoir diminuer les recettes (taxes et impôts) pour faire plaisir aux électeurs/contribuables. Calcul à courte vue…
3ème §
L’Etat ne peut rembourser immédiatement un capital emprunté pour en moyenne 20 ans. Et s’il remboursait le capital, il n’y aurait plus d’investissements productifs et plus d’intérêt à rembourser… et donc plus de capitalisme.
La suite
Je ne comprend pas tout mais vous voulez sans doute dire que le changement collectif passe par ce que chacun de nous fait ou ne fait pas. C’est en partie vrai mais pas aussi simple : l’homme est un animal social et il fait souvent ce que le groupe dans lequel il vit lui dit de faire. Aujourd’hui, le mot d’ordre dominant est : « Jouissez, consommez, soyez un parfait homo oeconomicus préoccupé seulement de votre intérêt personnel et la main invisible du marché fera le reste ». La majorité le fait et elle est en train de recevoir la main invisible du marché libéralisé sur la g…
Les habitués de ce blog essaient d’imaginer des changements collectifs et individuel qui soient profitables au plus grand nombre. Une seule espèce ne sera pas protégée : les vautours.
Bonne nuit.
@Alain A.
merci pour votre intervention, et oui je confirme certainement la même rage…et le même désespoir. Et puis le petit sourire quand même en lisant les mots de frères humains…
excellente fin de soirée à tous