Le leurre de la conscience

Comme notre débat sur la mécanique quantique se déplace en ce moment vers la conscience, je vous signale que j’ai publié en 1999, dans la revue L’Homme, un texte consacré à la conscience : Le secret de la chambre chinoise. On peut le trouver ici.

En gros, comme vous le verrez, la conscience est pour moi un mécanisme en réalité très accessoire qui nous informe après-coup de ce qui nous arrive et dont l’intérêt principal réside dans l’illusion de libre-arbitre qu’il nous laisse (la caverne de Platon). Si la chose vous intéresse, j’y reviendrai plus longuement. Voici en tout cas la conclusion de cet article :

Pourquoi deux mille cinq cents ans de réflexion se sont-ils révélés impuissants à remettre en cause le pouvoir décisionnel de la conscience ? Il me semble qu’il y a, sur cette question, quelque chose de l’ordre du préjugé, de ce qui ne se modifie qu’en tout dernier recours dans l’organisation conceptuelle (ce que j’ai appelé ailleurs noyau de croyance), quelque chose de l’ordre d’un tabou.

L’histoire des sciences nous est peut-être ici d’un certain secours. Lorsque Max Planck pose les jalons de la mécanique quantique, il nous est aisément loisible d’énumérer ses prédécesseurs : il bâtit sur les fondations posées par Clausius, Maxwell et Boltzmann. Lorsque Darwin met au point sa théorie de l’évolution des espèces ou lorsque Freud développe la métapsychologie freudienne, on aurait au contraire bien du mal à déterminer leurs prédécesseurs (l’œuvre parallèle de Wallace est contemporaine de celle de Darwin). On peut toutefois leur trouver ici et là dans l’histoire (et parfois quelques années auparavant seulement), des précurseurs, des penseurs qui exprimèrent des vues où l’on retrouve en germe, sous forme ébauchée et le plus souvent d’idée isolée, ce qui ne prendra tout son sens que dans la théorie complète que Darwin ou Freud développèrent ensuite. Lorsque des prédécesseurs existent, comme c’est le cas pour Planck, la quête de précurseurs apparaîtrait bien vaine puisqu’une ligne continue de prédécesseurs conduirait jusqu’à eux.

Qu’est-ce qui distingue alors les découvertes de Darwin ou de Freud, sinon leur réelle nouveauté ? « Qu’elles ne constituent pas des théories à proprement parler » disent aujourd’hui certains, « du fait qu’elles ne sont pas falsifiables, qu’elles ne se prêtent pas à la contrépreuve ». L’argument est sans mérite : leurs théories sont falsifiables, au même titre que le Big bangpar exemple, même si cela exigerait davantage d’argumentation discursive que de recours à la vérification expérimentale pure. Ce qui distingue leurs constructions, c’est qu’il est difficile, au sens de « dur » psychologiquement, pour un auteur de les formuler. Il existe ici, comme je l’ai dit, un tabou à surmonter, quelque chose qui provoque la crainte ou la colère si l’on y touche : il y a aussi une conversion à réaliser, en premier lieu pour son auteur, au moment où il formule sa théorie, en second lieu pour son lecteur au moment où celui-ci doit se laisser convaincre, au moment où certains remparts dressés par son affect doivent s’effondrer pour faire place à la conception nouvelle.

Ce qui caractérise le darwinisme ou le freudisme, c’est que s’ils sont vrais, le mérite de Darwin et de Freud, en tant qu’ils en sont les auteurs en est automatiquement diminué. Si nous ne sommes que les descendants de grands singes, alors le darwinisme lui-même a pour auteur le descendant d’un grand singe (les caricaturistes de l’époque s’en sont d’ailleurs donné à cœur joie), de même, si toute œuvre humaine est un moyen détourné de satisfaire une pulsion d’ordre sexuel, alors la métapsychologie freudienne elle-même est un moyen détourné pour son auteur de satisfaire une telle pulsion.

La théorie de l’évolution de Darwin ainsi que la psychanalyse – on l’a écrit – impliquent une dévaluation, un rabaissement de l’image que se fait la race humaine d’elle-même. La vanité de l’espèce en prend un mauvais coup, car il s’agit de bien plus que d’une théorie nouvelle, il s’agit aussi d’une leçon d’humilité. Copernic en avait fait autant lorsqu’il déplaça la terre du centre vers la périphérie ou lorsque Linné le premier classa l’homme au rang des mammifères.

Alors qu’est-ce qui nous empêchait de comprendre la distribution réelle des responsabilités entre le corps et l’âme ? Probablement un mécanisme psychologique du même ordre que celui que je viens d’évoquer à propos de Darwin et de Freud : si tel est bien le cas, alors composer la Neuvième Symphonie ou peindre La ronde de nuit, sont sans aucun doute des réalisations personnelles ayant leur fondement dans un être biologique modelé par une histoire, mais qui ne sont pas davantage liées à un sujet humain maître de ses actions, que le fait pour quiconque d’entre nous d’ouvrir une fenêtre machinalement. Quant à celui qui attacherait son nom à la découverte que les fonctions de l’âme et du corps doivent être simplement inversées, il rabaisserait d’autant sa propre découverte : elle aurait été tout aussi machinale, selon l’automatisme qu’il aurait mis en évidence. Il serait l’auteur de sa découverte par un mécanisme dont – il l’aurait prouvé – sa personne n’est le support que pour des raisons parfaitement fortuites au regard de l’histoire. Tout ce qu’il pourrait affirmer quant au fait qu’elle ne pouvait avoir lieu que par lui se trouverait automatiquement disqualifié : ce ne pouvait être que lui sans doute mais sans pour autant que la paternité en revienne à ce « moi, je » dont il aime ponctuer son discours.

Voilà en quelques mots ce qui expliquerait pourquoi les penseurs qui se sont penchés sur le mystère de la chambre chinoise se sont arrêtés au bord de son élucidation, puisque ce qu’il s’agissait de découvrir les aurait privés de la satisfaction de mettre en avant leur propre personne – satisfaction qui guide de tout temps le processus de la découverte.

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100 réponses à “Le leurre de la conscience”

  1. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    Vous dites d’abord (en substance) que la conscience est improbable chez les animaux, et vous poursuivez en disant à un contradicteur « Des preuves? …attention à ne pas projeter sur les animaux nos propres états mentaux… ».

    Je veux vous faire remarquer que vous ne trouverez ni plus ni moins d’arguments pour dénier la conscience aux animaux supérieurs, que pour l’attribuer ou la dénier à vos congénères humains.

    Le problème est exactement le même, que la conscience sur laquelle ou s’interroge soit animale, humaine, ou éventuellement artificielle!

  2. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    Vous rapportez 10e-18g comme une quantité d’énergie non signifiante au regard de l’incertitude quantique.

    J’essaye de m’imposer la discipline de pensée de ne jamais accepter un chiffre dont je ne puisse, au moins en principe, vérifier la cohérence par moi-même. C’est particulièrement important en ces temps de chaos financier!!!

    e = mc^2
    m = 10e-18 g = 10e-21 kg pour être dans le système MKS, où e sera exprimé en joules.
    c = 300 000 km/s soit 3 x 10e8 m/s
    donc e = 10e-21 x (3 x 10e8)^2 = 3 x 10e-5 joules

    3 x 10e-5 joules, c’est peu, mais c’est parfaitement macroscopique! Soit le chiffre est faux, soit le raisonnement ne tient pas…

  3. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    … soit aussi mon calcul est faux… 😉

  4. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    et il l’est! e = 9 x 10e-5 joules!

  5. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Paul Jorion,
    @quentin,
    @Moi,
    à propos du bateau menacé par le chaos…

    Observez au passage la subtilité toute socratique des rares interventions de Paul Jorion!

    Le sort du bateau en situation chaotique dépend-il in fine d’une fluctuation quantique?

    Du point de vue macroscopique, je ne peux que suivre Quentin : dans un système chaotique, une perturbation aussi petite soit-elle peut faire diverger l’ensemble du système vers un destin ou un autre.

    Cela dit, que la perturbation-aussi-petite-soit-elle puisse être une fluctuation quantique, c’est un tout autre problème!

    Si on l’admet, on se retrouve à considérer un avatar du chat de Schrödinger, qui est à la fois vivant et mort, tant que personne n’a constaté la chose. Il s’est transformé soudain en bateau à la fois coulé et à flot, mais çela ne doit pas nous étonner, ces choses-là sont possibles dans le monde quantique. 😉

    On doit en tout cas admettre que s’il coule, ce sera un effet majeur (en tout cas pour les passagers!) sans cause, car une fluctuation quantique aléatoire est-elle à proprement parler une cause physique macroscopique?…

    Si vous répondez oui, songez-y bien, le fantôme de Schrödinger pourrait surgir à tout moment pour vous obliger à imaginer un observateur pour qui le bateau serait à la fois coulé et à flot! C’est à dire à considérer que tout le bateau est dans un état intriqué, tout comme son chat. C’est exactement la même situation logique, que Schrödinger a inventé précisément pour vous mettre dans cet embarras.

    Il faut le rappeler sans cesse, un système macroscopique en état d’intrication quantique a une probabilité quasi nulle d’être physiquement réalisé. L’intrication est liée à la « granularité » du réel à très petite échelle, elle n’a plus de sens dès que le réel redevient continu. Une « décohérence » se produit inévitablement, il n’y a qu’à voir combien des ordinateurs quantiques de quelques qubits seulement sont difficiles à réaliser!

    Je pense, pour ma part, que les questions de ce type, qui, plus ou moins implicitement, étendent abusivement le domaine de validité des considérations quantiques, sont très artificielles, et ne nous font guère progresser.

  6. Avatar de Nadine
    Nadine

    @Marc Peltier
    Bonsoir

    Vous dites:« Je veux vous faire remarquer que vous ne trouverez ni plus ni moins d’arguments pour dénier la conscience aux animaux supérieurs, que pour l’attribuer ou la dénier à vos congénères humains. »

    Mais si. Vous avez à votre disposition tout les cas cliniques de dysfonctionnement de la conscience notamment les expériences avec des patients à qui on a sectionné le corps calleux pour des raisons médicales, c’est passionnant renseignez-vous et après on en discutera ensemble, et attention une personne peut voir, sentir, entendre, toucher, rougir, se mettre en colère etc et ne pas en avoir conscience !
    Connaissez-vous ces malades qui se disent aveugles alors que leurs yeux et les aires visuelles du cerveau fonctionnent correctement d’ailleurs ils n’ont aucune difficulté à s’orienter dans l’espace parce qu’en fait ils voient très bien mais n’en sont pas conscients.
    Étudiez tous ces cas cliniques et vous comprendrez que le langage est la condition essentielle à la conscience, sans langage il n’y a pas de conscience et les animaux ne parle pas !

    Vous dites « et il l’est! e = 9 x 10e-5 joules! »

    J’aime bien ce petit calcul mais c’est quoi au juste ce que vous voulez démontrer? Quand vous me l’aurez dit je pourrais vous dire si votre raisonnement est juste ou faux sans prétention aucune.

  7. Avatar de Moi
    Moi

    @Nadine : « Étudiez tous ces cas cliniques et vous comprendrez que le langage est la condition essentielle à la conscience, sans langage il n’y a pas de conscience et les animaux ne parle pas ! »

    Ils ne parlent pas, surtout le français, mais cela ne signifie pas qu’ils n’ont pas de langage. Ils communiquent entre eux et les chimpanzés sont capables d’apprendre le langage gestuel.

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Washoe

    « Ainsi, en 1970, Washoe avait eu un bébé mais il mourut dans les semaines qui suivirent. Quand les éducateurs lui retirèrent son bébé des bras, Washoe signa et signa encore pour qu’on le lui rende. Elle ressentait un grand désarroi. Washoe fit même une dépression le jour où on lui apprit que son bébé était mort. Ses yeux trahissaient une grande tristesse. »

  8. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    Sur la conscience et le langage :
    En concluez-vous que les chimpanzés, à qui ont a appris la langue des signes, ou un langage à base de jetons symboliques, ont acquis du même coup la conscience, alors qu’elle leur était inaccessible jusque là?

    En concluez-vous également que les enfants sauvages (les cas historiques d’enfants privés de contacts sociaux humains pendant leur développement), aphasiques la plupart du temps, n’étaient pas conscients?

    Sur le calcul énergétique :
    Ce calcul met en question une quantité qui nous est « balancée » pour faire argument « strictement scientifique » dans un raisonnement visant à démontrer que la conscience peut influencer la matière sans enfreindre le principe de conservation de l’énergie.

    Le procédé, je l’avoue, m’énerve. J’ai sauté sur une excellente occasion de dé-bidonner un chiffre d’autorité.

    Mon calcul montre que la quantité indiquée, théâtralement parée de ses 18 zéros après la virgule et avant le chiffre significatif, n’est pas ce qu’elle prétend être, c’est à dire une quantité non significative et justiciable de l’indétermination quantique. Soit le locuteur s’est trompé d’unité, soit son raisonnement est formellement inconsistant.

    Par ailleurs, je voudrais bien savoir qui a mesuré l’énergie nécessaire pour faire fusionner une seule vésicule synaptique, selon quelles méthodes, et avec quelle incertitude! Tout cela n’est pas sérieux!

  9. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    P.S. j’ai bien compris que vous critiquez ensuite l’argument exposé, mais en vous basant sur une application abusive de la mécanique quantique à un cerveau macroscopique. Vous lui faites bien de l’honneur, à cet argument!

  10. Avatar de Nadine
    Nadine

    @moi
    Vous dites:  « Ils ne parlent pas, surtout le français »
    Comme c’est facile et inutile !

    Pour le reste vous avez raison.

  11. Avatar de Nadine
    Nadine

    @Marc Peltier
    Bonjour
    De quel argument parlez-vous?
    Et E=mc2 ça sert à quoi?

  12. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Nadine
    L’argument exposé par J.S., et que vous rapportez : l’idée de Eccles que la conscience pourrait agir sur la matière par l’entremise des vésicules synaptiques, en influençant des évènements de nature essentiellement quantiques.

    La valeur de l’énergie de fusion d’une vésicule synaptique était présentée en valeur de masse (le gramme). C’est insolite, mais on peut admettre. Energie et masse sont équivalents par la formule d’Einstein e = mc^2.

  13. Avatar de Moi
    Moi

    @Nadine: « Comme c’est facile et inutile ! »

    J’admets. 🙂

  14. Avatar de quentin

    @Marc Pelletier

    Je suis d’accord avec ce que vous dites à propos du bateau qui coule. Je n’envisage pas non plus d’intrications ou d’effets quantiques au niveau macroscopique.
    Ma conclusion est bien la même : si on admet que la « perturbation-aussi-petite-soit-elle » est quantique, on doit pouvoir dire que le bateau a coulé sans cause.

    Maintenant ces questions sont peut être artificielles dans le cas d’un bateau mais je pense qu’elles ont leur importance dans le domaine du vivant, pour la simple raison que celui-ci est constitué de systèmes chaotiques très structurés imbriqués les uns dans les autres.

    Il se trouve que le neurone a un comportement chaotique et que le cerveau est lui même un système chaotique. Quelles seraient les « perturbations-aussi-petites-soient-elles » du neurone ? Je l’ignore, mais nous nous trouvons à l’échelle cellulaire, et nous parlons de champs électrique (non pas de protéines) : nous sommes vraiment proche du niveau électronique, c’est à dire du niveau quantique.

    Il n’est donc pas fondamentalement aberrant d’envisager que l’évolution du cerveau se fait globalement « sans cause ». Et ceci ne signifie en aucun cas qu’on ne puisse pas prédire du tout son évolution (les expériences de Benjamin Libet prouvent le contraire), mais plutôt que cette prédiction est irréductiblement approximative.

    A ce propos je viens de tomber sur un texte intéressant qui apporte de l’eau à mon moulin :
    http://www.academie-sciences.fr/conferences/seances_solennelles/pdf/discours_Korn_17_06_02.pdf

    Extraits :

    « Or, la physiologie et l’analyse statistique nous ont révélé que chaque zone active ne peut émettre vers sa cible, que le contenu d’un seul paquet de neuromédiateur ou « quantum ». Et ce, avec une certaine probabilité. Autrement dit, chaque synapse joue aux dés le fait qu’elle relaie ou non, après un influx, l’information au neurone qui lui fait face. »
    « Un autre facteur de variabilité appelé bruit synaptique m’a encore intrigué. Il consiste en ce que chaque neurone du système nerveux central est soumis en permanence à des fluctuations incessantes de son potentiel de base. »
    « Le « bruit » de la cellule de Mauthner présente une organisation temporelle qui évoque un chaos déterministe. »

    Pour en revenir au libre arbitre : il n’est pas question de prouver le libre arbitre, je ne pense pas que ce soit envisageable scientifiquement. Disons simplement qu’il n’est pas exclu à priori.

    Faisons l’hypothèse qu’il existe. Dans ce cas il doit forcément être lié à un indéterminisme. Or le seul indéterminisme que l’on puisse envisager dans la nature est lié aux fluctuations quantiques. S’il existe, le libre arbitre s’exprime donc par les fluctuations quantiques.

    Par ailleurs s’il existe, son siège est le cerveau. Donc dans cette hypothèse le cerveau doit être soumis aux fluctuations quantiques. Or le cerveau – coïncidence ou pas – est précisément susceptible d’être soumis aux fluctuations quantiques, comme je l’indiquais plus haut (et ce n’est pas le cas de n’importe quel organe dans le corps, ni même de toutes les cellules…)

    Ca ne prouve rien, c’est complètement spéculatif et gratuit, je l’admet, il n’empêche qu’on trouve précisément ce que l’on cherche là ou le cherche en supposant le libre arbitre, et je trouve que c’est quand même une sacré coïncidence…

  15. Avatar de Eugène
    Eugène

    le leurre de la conscience?

    Mais c’est qu’il y a au moins deux déterminismes différents à l’oeuvre!

    Le premier celui du langage en tant qu’il est humain et se détériorant de plusieurs façons différentes observables ds les quatre formes d’aphasies (tout ne tombe pas en panne en même temps).
    le second celui d’un autocontrôle implicite (inconscient aurait dit Freud) de ce qu’on s’autorise à dire ou non, soit la preuve par les névroses- névrosés qui poussent ce jeu très loin, sans s’en rendre compte, que ces deux déterminismes ne sont pas superposables mais interagissent.( bien qu’on puisse trouver des aphasiques névrosés ou le contraire!)
    J’en ajoute un autre, nous nous exprimons ici en langue Française, donc en faisant appel à un autre ‘déterminisme’ sociologique – non superposable aux deux premiers. Les pathologies culturelles du sociologique, les schizophrènies par exemple, provoquent chez ceux qui en sont affectés jusqu’ à la construction de leur propre langue vérouillant ainsi jusqu’à l’idée même de communication!
    Il ne faudrait pas non plus oublier que de s’écrire, le langage, en sciences dures par exemple, va permettre de faire apparaitre à la conscience des lois et des résultats que ni l’imagination seule, ni le langage seul ne pourraient faire apparaitre! Les outils mathématiques en sont la preuve la plus quotidienne, exemple: i<2=-1 ; mais i<4=+1 permettant de faire réapparaitre du réel là où il n’y avait qu’un imaginaire! Par ailleurs, cette faculté d’outil, le crayon utilisé par le mathématicien sur une feuille de papier par exemple, n’a strictement rien à voir avec la fonction instrumentale qui permet aux animaux de se saisir d’une brindille pour titiller la fourmilère, mais que nous partageons avec eux comme la possibilité de représentation.

    Le leurre de la conscience? et même plutôt quatre fois que deux!

    Nous n’avons aucune conscience des opérations logiques en nous qui nous permettent d’analyser qualitativement et quantitativement du son et du sens et nous font émerger à ce langage comme nos concepts.
    Nous n’avons aucune conscience des opérations « abstraites » à l’oeuvre en nous qd nous utilisons-fabriquons tous nos appareillages, de la paire de pompes avec laquelle nous médiatisons notre marche jusqu’à la fabrication d’une pompe à eau pour ne pas avoir à boire à 4 pattes ds la rivière, ou la voir flotter en l’air ds une capsule spatiale.
    Nous n’avons aucune conscience des opérations « abstraites » qui nous font sortir de la grégarité comme échapper à l’autisme.
    Nous n’avons aucune conscience de l’autocontrôle de nos désirs-envies naturels.

    le rapport avec le biologique et le neuronal? Evident: sans le corps l’esprit disparait. Sans l’esprit le corps n’est plus qu’un tas de cellules vivantes ne survivant que sur un lit d’hopital avec son environnement technologique incontournable. Ns sommes donc des esprits corporels ou des corps spirituels, comme il n’y a de sciences qu’humaines … je vous laisse sur cette ambiguïté qui me fait bien rire.

  16. Avatar de quentin

    Dire que la conscience est un leurre parce qu’il y a des déterminismes inconscients et sociaux, c’est un peu comme affirmer qu’un chef d’entreprise (ou d’état, peu importe) n’a aucun pouvoir de décision parce que l’ensemble des processus de son entreprise sont réalisés par d’autres et que son entreprise obéit aux lois du marché. Pourtant, ce n’est pas parce que le chef d’entreprise ne fabrique pas lui même tout ce qu’il produit et ce n’est pas parce qu’il s’adapte au marché que ces actions n’ont aucun impact sur l’évolution de l’entreprise.

  17. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @quentin

    Roger Penrose, par ailleurs un très grand esprit, a postulé que seule la mécanique quantique pouvait rendre compte de l’autonomie de la conscience. Il a même désigné le lieu de ce mystère : ce sont les microtubules qui constituent le cytosquelette des neurones. Il s’y passerait des trucs quantiques, des qubits y seraient formés et fonctionneraient comme un automate cellulaire. Il semble qu’il en arrive là après avoir constaté que c’est le seul lieu possible pour des phénomènes quantiques dans le cerveau, compte tenu des connaissances que nous avons. Je resterais prudent sur ce que j’en dis, parce que je ne connais son travail qu’indirectement, par des vulgarisations.

    La démarche me fait penser à celle de Descartes, qui part d’une définition de l’âme, puis cherche à la localiser dans le cerveau, et, constatant que celui-ci n’est constitué que de structures conjuguées à droite et à gauche, sauf la glande pinéale (l’épiphyse), conclut : « Ca ne peut être que là! ».

    Comment on passe de l’activité des qubits dans les microtubules, à la décharge périodique du neurone, coordonnée avec d’autres neurones pour contribuer à un état mental, ça reste un mystère. Mais admettons…

    Le processus clé de la conscience aurait lieu simultanément dans tous les microtubules de tous les neurones, ou même de certains seulement? Mais alors, il faut bien imaginer une forme d’émergence mystérieuse pour tirer une cohérence de cette multitude de calculs quantiques par nature essentiellement indépendants.

    Ou alors, un seul phénomène quantique dans un seul tubule d’un seul neurone suffit pour introduire dans le cerveau la liberté nécessaire? Alors, gare à l’ami Schrödinger qui va aussitôt nous démontrer que tout le cerveau est intriqué.

    Cette approche me semble basée sur un enchaînement de conceptions que l’on pourrait résumer ainsi : La conscience résulte nécessairement d’un processus non algorithmique (elle n’est pas déterminée par un calcul), elle n’est pas non plus déterminée par la matière, le contexte qui s’impose est donc celui de la mécanique quantique.

    Voire.

    Il me semble que nous pourrions nous contenter de l’idée, somme toute raisonnable par rapport à notre expérience, d’une conscience contingente, qui dispose d’une autonomie relative, si elle émane (pour ne pas dire émerge) d’un système chaotique suffisamment indéterminé, au niveau macroscopique. Je ne pense pas qu’il soit nécessaire pour cela de recourir à la mécanique quantique, avec tout son fatras de paradoxes, inévitables dès qu’on la transpose hors de son domaine de validité naturel.

    Le mouvement brownien, par exemple, est chaotique et indéterminé tout en restant un phénomène de la physique classique. Un tel phénomène peut donner suffisamment d’indétermination à système chaotique et néanmoins déterministe.

    Le texte de Henri Korn, que vous citez, donne des pistes dans ce sens, me semble-t-il…

  18. Avatar de quentin

    @Marc Pelletier

    Si on part de la supposition que nous disposons d’un libre arbitre, je pense qu’un chaos déterministe dont les conditions initiales tiendraient uniquement de la physique classique ne peut pas suffire à l’expliquer car dans ce cas l’indétermination n’est qu’apparente, c’est simplement une ignorance, une imprécision de nos connaissances. En gros, ça signifierait que la conscience nous dirait « hop hop, pas vu pas pris » et profiterait du fait que nous ne pouvons pas connaitre exactement ses conditions initiales pour être libre ? Je pense personnellement que le simple fait de pouvoir en principe déterminer l’évolution d’un système suffit pour affirmer qu’il est réellement déterminé.

    Par ailleurs en tant que matérialiste, je me vois forcé d’admettre que la matière elle-même doit posséder les propriétés qui peuvent faire « émerger » la conscience. Ces propriétés sont la perception du monde associée à la notion de « présent » et d’écoulement irréversible du temps, et peut-être le libre arbitre. Je ne crois pas à l’idée d’émergence « ex-nihilo » (comme la monnaie), il faut forcément que ce soit rendu possible à partir du niveau d’en dessous…

    Rien dans la matière « classique » ne laisse supposer qu’il y ait des propriétés perceptives / actives / temporelles qui rendraient compte de notre conscience. Le modèle classique décrit un monde qui se suffit à lui même, sans besoin de conscience nulle part pour l’observer. En gros ça implique quasiment le dualisme. Seul le phénomène de la mesure en physique quantique permet de s’approcher de ces propriétés. C’est en effet un phénomène « perceptif », actif et irréversible sur la matière.

    C’est donc uniquement l’hypothèse matérialiste qui me fait conclure que la conscience doit être un phénomène quantique, faute de pouvoir l’expliquer de manière classique.

    Pour ce qui est d’expliquer la sensation d’identité cohérente à grande échelle que nous avons tous (enfin je crois), j’ai émis l’hypothèse récemment dans un texte hautement spéculatif qu’il pourrait s’agir d’une intrication quantique persistante du champs électrique à l’échelle du cerveau… Qu’en pensez-vous ?

  19. Avatar de Nadine
    Nadine

    @@Marc Peltier

    Je suis biochimiste de formation et je connais très bien la théorie d’Eccles, je puis vous assurer que cette approche est vraiment marginale et n‘est d‘aucune utilité pour comprendre le fonctionnement de la conscience. Les spécialistes de neurobiologie n’utilisent pas la mécanique quantique pour formuler leur théorie sur les mécanismes du cerveau.
    Qu’il y ait de la chimie quantique au niveau moléculaire c’est l’évidence puisque les liaisons chimiques en sont une conséquence directe mais au-delà on tombe dans de la biochimie tout à fait classique ? .
    Dites-vous bien qu’on ne sait résoudre l’équation de Schrödinger que pour un atome au-delà c’est trop complexe et on ne fait que des approximations de calculs!
    Alors vouloir expliquer quelque chose d’étrange (la conscience) avec quelque chose d’encore plus étrange (la mécanique quantique) c’est assez gonflé, il y a d’autres voies bien plus prometteuses pour expliquer la conscience.

  20. Avatar de Paul Jorion

    @ quentin

    En fait donc, la fluctuation quantique, c’est le dernier candidat possible qui puisse soutenir l’hypothèse du libre-arbitre dans le cadre d’une explication matérialiste.

    Mais, même si cela tenait la route, quel serait alors le lien entre un ensemble de fluctuations aléatoires (« libres » dans un sens du mot libre) et un comportement manifestant le libre-arbitre, c’est–à–dire la présence de décisions prises en fonction de principes rationnels, pratiques, moraux, juridiques, etc. (« libres » dans un tout autre sens).

    Ou, pour situer ça dans un cadre un peu plus technique : le concept de « degrés de liberté » ne peut pas s’appliquer de la même manière quand on parle de la particule soumise à une fluctuation quantique, et quand on envisage un individu dont on dit qu’il exerce son libre-arbitre.

  21. Avatar de quentin

    @Paul Jorion

    D’après moi la fluctuation quantique a le mérite de soutenir bien plus que le libre arbitre.

    Bien entendu le passage d’une particule au cerveau n’a rien d’évident, je n’affirme pas posséder la solution. Il est également évident que le monde matériel qui nous entoure n’est pas doté de conscience. J’ai tout de même quelques idées à ce sujet que je peux essayer de décrire, mais c’est très spéculatif, j’espère que vous ne m’en voudrais pas.

    Personnellement je conçoit les choses en terme de système chaotique, puisque le cerveau est en quelque sorte une double imbrication de systèmes chaotiques.

    Mathématiquement, un système chaotique peut posséder un attracteur dans « l’espace des états », qui constitue l’ensemble des états qu’il peut prendre. On peut alors voir son évolution temporelle comme un déplacement le long de cet attracteur. Le déplacement à court terme reste prévisible. Deux états très proches se côtoieront dans un premier temps mais leurs trajectoires divergeront avec le temps (avec parfois des embranchements), et après un laps de temps plus rien n’indiquera qu’ils étaient proches au départ.

    C’est la notion de système chaotique qui permet d’expliquer le mieux la transition du niveau microscopique (de petites fluctuation en chaque instant) au niveau macroscopique (évolution prévisible à court terme, une lente divergence de l’état à moyen terme). J’imagine le cerveau comme un système chaotique dont l’évolution est pilotée par la conscience. Son attracteur, constitué des états qu’il peut prendre, serait en quelque sorte notre contenu mémoriel…

    Cela signifie que notre cerveau est globalement déterminé par des principes rationnels, par nos émotions, par notre personnalité, le contexte extérieur, etc., mais que la conscience est capable d’infléchir légèrement son évolution. Ce léger infléchissement peut avoir un effet rétro-actif important provoquant une divergence (c’est le principe du système chaotique) : mes inflexions vont elle même déterminer l’évolution de ma personnalité qui en retour va déterminer mes actions à venir, etc.

    Cet infléchissement étant de nature quantique (une intrication persistante au niveau du champ électrique ?), il serait en même temps une « mesure » en continue de l’état du cerveau, que l’on associerait à l’aspect perceptif de la conscience, mesure qui provoquerait l’infléchissement.

    On pourrait considérer le cerveau comme une machine à amplifier les fluctuations quantiques sur un système macroscopique (sans négliger la structure de ce système).

    En tout cas c’est comme ça que je vois les choses, ce sont des hypothèses…

  22. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @Paul Jorion
    @quentin

    Vous élargissez le débat au libre arbitre. Les concepts formés autour du libre arbitre peuvent-ils nous aider à cerner nos questions sur la conscience, ou est-ce l’inverse?

  23. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @tous

    Peut-on imaginer une conscience qui n’aurait pas d’histoire?

    Doit-on introduire la question du temps dans toute théorie de la conscience, ou est-ce au contraire la conscience qui induit le temps?

  24. Avatar de Paul Jorion

    @ Marc Peltier

    Si vous avez lu l’article dont il est question ici : Le secret de la chambre chinoise (1999), vous avez dû voir que la conscience est pour moi un sous-produit du mécanisme qui assure que les informations provenant de nos différents sens soient synchronisées « en temps réel », c’est donc à l’origine, un outil de gestion du temps, celui-ci devant être considéré comme un donné. La mémoire accumule alors une information qui permettra l’anticipation, c’est–à–dire la représentation « imaginaire » de scénarios possibles. La valeur d’affect (on passe cette fois à mon livre Principes des systèmes intelligents [1990]) qui s’associe à ces divers scénarios détermine au niveau du corps lequel de ces scénarios lui semble le plus probable, qui s’y prépare alors.

  25. Avatar de Rumbo
    Rumbo

    Arrivant bien trop tard sur ce billet, c’est un peu une gageur d’y intervenir.

    J’ai bien aprécié la teneur et le ciblage exact du tout premier billet de Quentin du 22 février 2009 à 19h38, de même les interventions qui suivent jusqu’au milieu des réponses faites. À cette heure, et je n’ai lu que de loin l’autre moitié des interventions.

    Il me revient cette réponse, lors d’une émission de TV il y a assez longtemps, d’un membre de l’Union rationaliste (cette vénérable association fondée en 1930 par Paul Langevin), il disait exactement ceci: « Un support biologique structuré est capable de produire de la pensée. Quand ce support est détruit, il ne produit plus de pensée ». Avec le recul, il y aurait là une affirmation dogmatique métaphysique que cela ne m’étonnerait pas, car rien n’indique ici que la « pensée », ou conscience « hors champ » ne serait pas à l’ « œuvre », de toute éternité comme on dit.

    Nous nous situons en tant qu’observateurs par rapport à – nos – mesures à nous êtres humains, par rapport à
    – nos – « points de vue », et nous n’avons que cela. Nous examinons l’Univers, macro et micro, selon – nos – critères. Nous aurions évidemment tort de procéder autrement vu que nous n’avons que ces moyens-là.

    Là dessus, la mécanique quantique vient nous titiller en nous faisant nous « prendre les pieds » dans nos propres mesures qui interfèrent alors avec l’ « environnement », sorte d’interaction du sujet ‘observant’ un objet ‘observé’, les « résultats » sont « ailleurs » mais c’est sûr qu’il y en a, et, en plus, il y en a, au moins toute, l’informatique.

    Je crois que nous avons énormément de mal à saisir le côté didactique extrêmement fécond de la mécanique quantique, dont nous n’avons pas, certainement, épuisé et de loin les ressources si toutefois on devait en arriver à bout. À mon sens, la mécanique quantique (et j’ajoute: la logique chinoise qui, selon mon intuition, lui correspond sur des plans essentiels), se trouve être un banc d’expériences cognitives et d’ « entraînements » d’une richesse insoupçonnée, pourrait en arriver à nous « instruire » bien davantage, rétroactivement, sur le monde macroscopique qui nous est « familier » (?). Voire.

    Car c’est bien dans la dimension de ce monde macroscopique que nous devons, d’abord, apprendre à vivre, en même temps qu’apprendre à apprendre. Ainsi, pouvoir régénérer et réinspecter rationnellement – logiquement – notre monde macroscopique que nous n’envisageons (qu’on le sache ou pas d’ailleurs) que sous l’angle de la logique de l’identité et du tiers exclu manifestement inadaptée face à la mécanique quantique dans les domaines de la connaissance.

    Il ne s’agit pas de disqualifier les éléments qui nous ont appris à vivre jusqu’à présent. Car la logique de l’identité et du tiers exclu reste valable pour le domaine moral et éthique, pour la conduite de la vie en général. Mais en ce qui concerne le développement de la connaissance, sa pédagogie, l’ontologie dans son ensemble, il faut affiner notre logique par la mécanique quantique et voir quelles seront les rétroactions sur nos méthodes de recherche. Car, précisement, le (ou les) crible devant émerger des connaissances quantiques acquises, devrait en toute bonne logique, éclairer d’un jour absolument nouveau les impasses et les butoirs où achoppent systématiquement notre philosophie de l’identité et du tiers exclu (qui, par ailleurs, n’existe pas dans la logique chinoise) on perçoit ceci sur ce blog au delà de l’intérêt particulier des interventions.

    Ainsi, nous serions à même d’élucider, même partiellement, les pensées traditionnelles; ces dites: pensées traditionnelles, stupidement qualifiées d’irrationnelles par l’ « idéologie » rationaliste, car il y en a bien une.
    Il existe un témoignage, c’est le livre de Fritchof Capra: Le Tao de la Physique, Éd. Tchou, en français, 1979.

    Ceci me pousse à constater encore une fois que les inventeurs dans leur ensemble, montrent que leur intuition « colle » à une réalité existante, où à naître à coup sûr. Ils intègrent « les lois » (les lois de sciences et même les lois du droit) ce sont comme des « sauts quantiques », des degrés de « conscience » imprévisibles (?) mais généralement libérateurs, si l’on pousse la raison logique dans ses derniers retranchements.

    @François78 dit le 23 février 2009 à 22h22,
    me fait penser à cette réflexion de Dali (à qui je dois beaucoup comme philosophe, car comme peintre, mes capacités sont nulles) comme quoi: « Dieu n’est pas intelligent, car l’intelligence est une maladie que Dieu Lui-même ne peut pas se permettre comme cela peut arriver aux moindres de ses créatures. »

    Touts ces développements et évolutions des connaissances doivent, normalement, correspondre aux « bornes cosmologiques » qui scandent toute la pensée humaine à travers l’ « histoire ». Ainsi la vision ptoléméenne a été remplacée par la vision copernicienne. Le Soleil est le centre autour duquel la Terre tourne, ainsi que tout son système, le système solaire, lui même situé sur le bord de la galaxie (en forme de double sombrero) où l’on se trouve, c’est la Voie lactée vue par nous, et notre galaxie est une galaxie parmis des milliards, etc. À la théorie du big-bang (en expension « définitive », ou modélisé selon le ruban de Mœbius, ou devant peut-être imploser (?) un jour) l’on peut rajouter, entre autres, qu’il s’agit peut-être d’un Univers formé de bulles de champagne (groupes de galaxies?), ayant des bigs-bangs ici et là, etc. Donc, il n’y aurait pas de « capitale », et nous voilà tous devenus des provinciaux galactiques et inter-galactiques (?). Mais pour ma part je confère et conserve au Soleil (peu importe qu’il soit une étoile banale parmi des milliards de milliards d’autres) tout son sens de Symbole-Réalité déterminant pour nous tous.

    Quand je le peux, je retrourne aux autres interventions

  26. Avatar de Rumbo
    Rumbo

    Un rajouture, comme ça, au passage car cette: « histoire » de la conscience, mine de rien, est sans doute d’une bien plus grande portée qu’on croît.

    La mécanique quantique est probablement la première ouverture, un très petit « portillon », juste entr’ouvert, sur cette pierre d’achoppement philosophico-psychique (ou spiritualiste) des relations entre le sujet et l’objet sur lesquelles quelques 25 siècles de philosophie (philosophie occidentale s’entend) ont conflictuellement buté presque sans interruption. Les sujets-hommes que nous disons êtrene considèrent, à la base, les êtres et le choses que sous la relation sujets-objets. D’accord, ça marche pour les objets. Mais, loin d’en rester là, ce serait « trop facile », car les « objets » de choix sont justement les autres « sujets »… Mais ça na peut pas marcher dans les rapports sujets-sujets, sauf à ce qu’une partie des « sujets » transforme l’autre partie en esclaves, prolétaires, ou soutiers quelconques, même après qu’on eut inventé les étiquettes de citoyens, ce qui se révèle un leurre.

    Même sous la très « brillante » philosophie libéro-consumériste, ce qui permettait de consommer indéfiniment et donc d’apaiser, un temps, les pulsions « phagiques » (ne pas confondre avec phallique) et très au delà, puisque le – fétiche – de l’argent auquel l’on a pourtant élevé des autels et pratiqué de véritables rites, voit sa ruine surgir au moment historique précis de son pseudo-triomphe…

    La grande leçon de la mécanique quantique serait de nous avertir, enfin, que notre place centrale à tous est bien celle d’un sujet. Le sujet est: central et il est: multiple. Il faut se débrouiler avec ça; ce serait la porte de sortie.

    La mécanique quantique et la conscience sont sans doute sur le point de démêler leur écheveau dans nos têtes. Et si l’on dit que nous assistons à une crise profonde de civilisation, dont la crise des finances ne serait que l’écume du cyclone, les leçons cosmologiques, dont la mécanique quantique est l’une des principales, n’attendent que le « rinçage » et le « déblaiement » des déjections et des décombres (mais quel en sera le prix pour les êtres humains? Car c’est bien ça qui nous préoccupe, qu’on l’avoue ou non) de ces deux siècles environ d’industrie vite transformée en industrie financière exclusive et qui à présent « tourne » (comme un plat qui tourne et est inmangeable) comme une décoction frelatée, alors que cette « décoction » était notre « ambroisie ». Voilà ce qui se passe quand on se prend pour les dieux de l’Olympe.

    Mais je crois que le titillement de la mécanique quantique relève probablement davantage de la phénoménologie développée par le philosophe Husserl que celle de Hegel. Car cette phénoménologie de Husserl prend en compte la conscience d’elle-même qui tend à devenir alors la – conscience de la conscience –. L’un de ceux qui a le plus créé et contribué à étoffer la démarche de Husserl est Raymond Abellio (1907-1986), qui fut polytechnicien, ingénieur, un temps homme politique, écrivain (il eut plusieurs prix littéraires dans les années 1945-50) et philosophe.

  27. Avatar de Boukovski
    Boukovski

    François Lang, professeur de pharmacologie, commente sur Buddhaline les ouvrages du neurobiologiste Antonio Damasio

    L’erreur de Descartes : la raison des émotions

    (1995 – titre original :

    Descartes’ error : emotion, reason and the human brain.

    Putnam Book, 1994).

    Le sentiment même de soi

    (1999).

    http://www.buddhaline.net/spip.php?article783

    Extraits :

    « Chaque neurone (situé dans le cerveau, dans la moelle épinière ou dans les ganglions) reçoit au niveau de son corps cellulaire des messages activateurs ou inhibiteurs provenant d’autres neurones ou de récepteurs sensoriels, et la synthèse de ces différents messages va conduire (ou non) à l’activation de ce neurone qui va alors à son tour transmettre son message à d’autres neurones ou organes. Cette synthèse s’appelle une intégration. Elle se produit dans chaque neurone mais également à un niveau plus élevé au sein de chaque unité fonctionnelle, noyaux profonds ou régions corticales. Ainsi, chaque structure cérébrale reçoit en permanence une masse d’informations, en fait la synthèse et génère la réponse adaptée en activant soit d’autres structures cérébrales, soit des muscles, soit des organes ».

    « Au cours de l’évolution, le cerveau a progressivement développé des réseaux d’intégration de plus en plus complexes qui sont venus se surimposer aux unités fonctionnelles de base. Cela correspond anatomiquement à l’accroissement du néocortex. Ce néocortex est le siège des activités supérieures de l’esprit tels que raisonnement, mémoire, imagination, langage, qui sont l’apanage de l’espèce humaine. C’est sans doute pour cette raison que de nombreux philosophes et scientifiques ont considéré que le néocortex était certainement le siège de la conscience. Mais ce terme de conscience est extrêmement trompeur car il recouvre de nombreuses significations ».

    « Mais si l’on définit simplement la conscience comme le sentiment d’exister, d’être soi, on peut alors concevoir que cette conscience essentielle puisse être indépendante de l’activité intellectuelle et trouver son origine ailleurs que dans les centres d’intégration supérieurs. C’est là toute l’originalité de l’approche de Damasio qui a recherché l’origine du sentiment de soi dans le cerveau primitif, en partant des données neurobiologiques sur les fonctions primordiales du cerveau ».

    « […] quelle est la fonction primordiale du cerveau ? C’est d’assurer l’homéostasie, c’est-à-dire le maintien permanent des paramètres internes de l’organisme dans des limites très étroites pour permettre la survie. Ce désir involontaire et inconscient de rester en vie, qui se manifeste par des ajustements internes aux variations de l’environnement, est retrouvé chez les êtres unicellulaires et précède donc l’apparition d’un système nerveux et d’un cerveau ».

    « Cependant, le développement d’un cerveau permet à l’organisme d’étendre considérablement ses capacités à sentir son état interne et les variations qui y surviennent. Ainsi, chez l’homme certaines structures cérébrales (tronc cérébral, hypothalamus et cortex insulaire) sont dévolues à cette tâche de surveillance et de réajustement constant. Elles reçoivent en permanence des informations sur l’état des viscères, des muscles, sur la température corporelle, la composition chimique du sang, établissent instant après instant un état des lieux sous forme de configurations neuronales, véritables cartes corporelles internes, et prennent les mesures appropriées pour corriger les déséquilibres dangereux ».

    « Ce système de régulation fonctionne de façon inconsciente et autonome. Cette autonomie signifie que ce système n’a pas besoin des structures d’intégration supérieures pour fonctionner mais cela ne signifie pas qu’il en soit totalement indépendant. En effet, certaines décisions prises au niveau des centres corticaux peuvent influencer (perturber) cette activité régulatrice ».

    « Damasio a désigné sous le terme « proto-soi » l’activité de ces structures, car bien qu’inconsciente, cette perception continuelle de l’état interne du corps sous la forme de cartes neuronales de premier ordre constitue la base nécessaire à l’apparition du sentiment de soi. Lors de l’interaction de l’organisme avec un objet (au sens large) réel ou virtuel (recréé par le mental), l’état interne du corps se trouve subtilement modifié et ainsi le proto-soi génère une carte corporelle nouvelle. Le compte rendu de ce changement entre l’ancienne et la nouvelle configuration neuronale est enregistré sous formes d’images neuronales non verbales, les cartes neuronales de deuxième ordre. Ces cartes neuronales établissent une relation causale entre le changement et l’objet. Ainsi, la représentation neuronale du proto-soi non conscient en cours de modification permet à l’être de se sentir en train de connaître ; c’est l’émergence d’une conscience, que Damasio appelle la conscience-noyau ».

    « Cette conscience définit le soi central transitoire. Pourquoi transitoire ? Parce qu’il est centré sur l’ici et maintenant, sans cesse recréé par les objets avec lesquels l’organisme interagit dans l’instant présent. Damasio l’imagine sous forme de pulsations de conscience, qui commence avec le changement du proto-soi et se termine lorsqu’un nouvel objet vient à son tour déclencher sa propre série de changements. Il serait illusoire de rechercher une localisation cérébrale unique pour la conscience-noyau car manifestement plusieurs structures sont impliquées dans la création de ces cartes neuronales de deuxième ordre (thalamus, cortex cingulaire et certains cortex préfrontaux) ».

    « C’est de l’interaction entre ces différentes structures que naît la conscience-noyau. Il est cependant très probable que le thalamus, qui est relié aux structures d’élaboration du proto-soi et aux centres d’intégration supérieurs, joue un rôle central dans l’apparition de la conscience-noyau ».
    « La relation avec les centres d’intégration supérieurs permet à ces derniers de mettre en mémoire l’événement et cette mise en mémoire est cruciale dans l’apparition d’une nouvelle conscience que Damasio appelle la conscience-étendue, fondement du soi autobiographique. C’est à cette conscience que nous faisons référence lorsque nous pensons à une conscience exclusivement humaine car, de fait, elle est remarquablement développée chez l’homme ».

    « Alors que la conscience-noyau est une conscience de l’instant, la conscience étendue crée le passé et le futur, et place ainsi l’individu dans le temps. Elle permet la reconnaissance des objets, le rappel des souvenirs, la mémoire de travail, le fait d’éprouver des émotions et des sentiments, le raisonnement et la prise de décision. Les événements mémorisés sont archivés dans plusieurs aires distinctes du néocortex et sont périodiquement réactivés. Lorsqu’ils sont réactivés, ils sont perçus de la même façon que des objets réels et déclenchent alors l’activation de la conscience-noyau ».

    « Si nous revenons à la théorie de Damasio sur la conscience-noyau qui se manifeste sous forme de pulsations générées par les changements du proto-soi, on peut se demander ce qui se passe entre les pulsations. Quel est l’état de la conscience à ce moment-là ? Maître Deshimaru écrit :

    « Quand nous avons conscience de quelque chose, cet état de conscience n’est pas le véritable ego. Il est lié à l’objet par une relation d’interdépendance. Si nous n’avons ni sensation ni pensée, la conscience n’est pas conscience d’objet ; elle ne peut être l’objet, mais elle est exactement comme l’objet. »

    Ainsi, la conscience-noyau n’est pas le véritable ego, car elle dépend encore de l’objet ».

    « […] on pourrait dire qu’entre les pulsations de conscience-noyau apparaît notre véritable nature […]. Cette conscience-ci, Damasio n’a pas pu la décrire car elle sort du champ de l’investigation scientifique ».

    Commentaires

    :

    . L’origine du sentiment de soi serait dans le cerveau primitif.

    . « Si la représentation neuronale du proto-soi non conscient en cours de modification permet à l’être de se sentir en train de connaître » on a du mal à comprendre comment se fait le passage de cette intégration au sentiment d’unité qui permet à l’observateur de se voir sentir/penser. On dirait qu’il manque une étape.

    . La conscience du soi n’est localisée précisément nulle part dans le cerveau primitif, elle est le résultat d’une interaction entre cartes neuronales. Cette conscience du soi est donc impermanente et fluctuante : l’émergence d’une conscience-noyau définit un soi central transitoire.

    . Le sentiment d’une permanence du soi transitoire proviendrait de la conscience-étendue qui provient elle-même de la mise en mémoire par les centres corticaux des cartes neuronales créées par le cerveau primitif. Cette permanence du soi est donc une illusion, puisqu’elle provient de ce que la conscience étendue considère comme des objets réels des objets qui n’existent pas (les objets du passé et du futur).

    . La conscience-étendue active périodiquement les cartes neuronales du cerveau primitif et créée donc un sentiment de réalité à partir d’informations stockées cad à partir de quelque chose qui n’est plus actuel et présent dans le monde des choses : d’où peut-être le fonctionnement en grande partie en circuit-fermé de l’intellect humain et le caractère essentiellement répétitif de ses pensées ?.

    . On peut émettre l’hypothèse que si ce qui est entre deux pulsations de la conscience-noyau est une conscience qui est

    « exactement comme l’objet »

    alors s’efface dans la perception la distinction sujet/objet (origine de la fusion dans le tout et de la béatitude mystique ? réalité ultime ?).

    1. Avatar de roma
      roma

      pour prolonger, entretien de Damasio in:
      http://www.scienceshumaines.com/-0ales-emotions-2c-source-de-la-conscience-0a_fr_1624.html
      et résumé des 2 livres « L’erreur de Descartes » et « Le sentiment même de soi » chez Odile Jacob
      http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2000/nov/A_Damasio.html
      + résumé de « Spinoza avait raison « :
      http://www.automatesintelligents.com/biblionet/2003/sep/damasio.html

  28. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    Quand la conscience de l’homme s’endort et s’atrophie peu à peu devant le téléviseur, le livre, le leurre de l’intellect moderne partout présent et tyrannique sur l’esprit de l’autre. La lettre comme l’intellect tue continuellement l’esprit.

    Il suffit simplement d’en prendre conscience et de l’observer partout, quel désastre !

  29. Avatar de Pascal B
    Pascal B

    Je profite de cette intervention pour rendre hommage au Professeur Remy Chauvin, disparu le mois dernier, qui dans un livre de 1989 (« dieux des fourmis, dieux des étoiles » il me semble…) avait abordé la question sur le plan de l’évolution : quel serait le rôle de la conscience ? Il s’agit d’une question première tout aussi mystérieuse, voire plus que « de quoi est faite la conscience ». Nous avons déjà tous lu que finalement, l’espèce animale / humaine, pouvait sans peine se passer de la conscience pour s’adapter, de même que de simples expériences de pensée mettant en place un ordinateur relié à des capteurs sensoriels et programmé assez simplement finalement, peu reproduire le shema acquisition – transmition de l’information – traitement de l’information (par exemple retirer son bras artificiel du feu quand son capteur détecte un seuil x de température…) qui se passent parfaitement de la conscience, ou plutôt qui miment le mécanisme de l’utilité de la douleur, permettant de donner le signal d’alarme d’un danger present ou à venir (la peur dans ce dernier cas…)
    On voit que finalement le seul rôle de la conscience est de faire ressentir la douleur, et le plaisir : d’accord mais pourquoi ? permettre une meilleure protection par un meilleur système d’alarme plus efficace qu’un inconscient programme, qui court-circuite la raison ne voulant pas retirer son bras du feu ? pourquoi pas.
    A-t-elle un rôle dans l’intelligence, au sens où le laissait supposer Bergson qui distinguait l’intuition de l’intelligence organisée ? auquel cas, comme pour la douleur elle aurait un rôle de type vérification, contrôle des pensées, rôle en réalité assez mineur.

    1. Avatar de Paul Jorion

      J’ai personnellement défendu l’idée dans Le secret de la chambre chinoise (L’Homme 1999) que la conscience est un sous-produit du mécanisme d’inscription de la mémoire. Les animaux n’en seraient donc pas privés mais la parole donne à la conscience une qualité particulière : la parole intérieure (MSH 1996).

  30. Avatar de Claude Animo
    Claude Animo

    « mettre en avant [sa] propre personne – satisfaction qui guide de tout temps le processus de la découverte »

    Affirmation péremptoire qui ne laisse guère de place à une quelconque variation.
    Mais cependant…
    Dans de nombreux cas, la découverte est un moment privilégié qui place l’inventeur en harmonie avec l’univers. Sans la moindre intention de mettre en avant sa propre personne.
    La découverte est souvent une affaire entre soi et soi.
    Avoir conscience de la vie, aussi fugace ce sentiment soit-il, n’en est pas moins réel.
    Il n’est alors pas nécessaire d’être un saint, un mystique ou un fou: il suffit « juste » d’avoir conscience de sa place dans le processus de création.
    Je pense que mettre en avant sa propre personne est par contre, dans la plupart des situations, un processus profondément régressif.

    1. Avatar de Fab
      Fab

      Très vrai, très beau donc.

      PS : mettre-satisfaction, auto-satisfaction, maître-satisfaction, maître-étalon, mettre des talons : cherchez l’intrus.

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  1. AGI et ses magouilles c’est l’adolescence de l’humanité. Parents: accrochez vous. Ça va secouer.

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