La discussion relative à la mécanique quantique que vous m’avez encouragé à lancer me ramène à mon Pourquoi nous avons neuf vies comme les chats ?, publié en 2000 par le Collège International de Philosophie. J’y montre – sans prendre parti sur elle – comment l’hypothèse des mondes multiples qui s’attache à l’interprétation de la mécanique quantique par Everett permet de concilier un ensemble d’hypothèses philosophiques disparates : la Cogito cartésien, le meilleur des mondes leibnizien et le rôle de la Raison dans l’histoire chez Hegel.
C’est à ce texte que renvoie l’article de Wikipedia consacré à Science et conscience :
La situation se complique lorsque l’on se place dans le cadre de la théorie d’Everett. Dans ce cadre, l’évolution du monde n’est pas linéaire mais arborescente. À chaque instant l’évolution emprunte simultanément toutes les possibilités prévues par la mécanique quantique, et on peut alors légitimement se poser la question de savoir ce qu’il advient de la conscience individuelle. Notre conscience se divise-t-elle aussi pour coexister simultanément dans des mondes parallèles ? Paul Jorion répond négativement à cette question. Selon lui, la conscience emprunterait le chemin d’évolution qui est le plus favorable pour elle.
Voici, reproduite ici, à titre de hors d’œuvre, la présentation du mystère :
Les comportements inattendus au niveau microscopique des particules élémentaires qu’étudie la mécanique quantique sont quelquefois présentés au profane par le biais de l’expérience mentale dite du « chat de Schrödinger », laquelle débouche sur l’hypothèse induite des « mondes multiples ». La prémisse est celle d’états concurrents de la réalité qui demeurent superposés jusqu’à ce qu’un événement tel que leur observation – ou plutôt l’interaction avec eux que suppose leur mesure – les oblige à choisir une manière de se présenter, et ceci sans que l’alternative implicite à la superposition initiale perde pour autant de sa réalité. L’interaction – dont la mesure n’est que l’un des avatars possibles – est alors à l’origine d’une bifurcation de mondes entre deux de leurs états possibles.
Dans l’expérience mentale imaginée par Erwin Schrödinger dans les années trente du siècle dernier, un chat dont la survie ou la mort dépend de la brisure d’une fiole de cyanure déterminée par une variation quantique ayant une chance sur deux de se produire (réduction d’un train d’ondes), se retrouve simultanément mort et vivant dans deux univers également possibles mais ayant « bifurqué », ayant divergé l’un de l’autre. Le chat est à la fois mort et vivant mais dans deux mondes en voie de séparation, l’ontologie sous-jacente à cette conception étant donc celle de myriades d’univers co-existants, chacun évoluant selon un scénario qui lui est propre, d’où l’appellation pour cette interprétation de la mécanique quantique, d’hypothèse des mondes multiples (parallèles).
Ce qui – à ma connaissance – n’a jamais été évoqué dans les discussions relatives au chat de Schrödinger, c’est ce que celui-ci en pense. Sans doute parce que l’auteur de l’expérience mentale supposait que l’animal n’est pas pleinement conscient de ce qui lui arrive. Remplaçons alors le chat par un être humain pour rendre le cas de figure plus instructif. Si ce dernier est à la fois mort et vivant, on peut supposer que les principes courants en matière de conscience restent d’application, à savoir que, 1º dans le monde où il est mort, son cadavre est privé de conscience, alors que 2º dans le monde où il demeure en vie, son corps continue à être doué de conscience, c’est-à-dire, a la conscience d’être en vie (quand il n’est pas endormi, évanoui ou dans le coma). Autrement dit, en cas de divergence entre deux scénarios où dans l’un, l’individu meurt, alors que dans l’autre il demeure en vie, la conscience de soi doit nécessairement s’attacher au scénario où la capacité métabolique du corps reste entière…
Les notes – qui sont importantes – manquent du texte en ligne alors le voici en entier :
Pourquoi nous avons neuf vies comme les chats , Papiers du Collège International de Philosophie, Numéro 51, Reconstitutions, 69-80, 2000
(La même chose en anglais : Why, like cats, we have nine lives).
Armel et moi nous nous sommes arrêtés sur le côté Ouest de la rue de Condé. Francis – qui sait que nous allons prendre le métro à Odéon, s’est arrêté lui aussi. Mais Isabelle qui ne connaît rien à nos projets a déjà traversé la rue. Elle s’aperçoit soudain qu’elle est la seule à l’avoir fait, et revient sur ses pas. Mais une voiture débouche à toute allure, qui ne pourra pas l’éviter…
Quelques instants plus tard je m’entends dire à Isabelle : « J’ai vu votre sang sur la rue ». Armel lui dit : « La voiture est passée à quelques centimètres de vous ».
Dans la nuit je m’éveille et je pense : « Je l’ai vraiment vue morte : j’ai véritablement vu le sang d’Isabelle sur la chaussée. Aussitôt après je l’ai vue vivante, mais pendant une fraction de seconde je ne l’ai pas imaginée, mais littéralement vue morte ». Je me dis, le monde a bifurqué, je me suis trouvé un moment dans un monde où Isabelle a été tuée, puis aussitôt, dans un monde où – Dieu merci – elle était en vie. Est-ce que ma vision de l’accident ne suppose pas la brève co-existence de deux états-de-choses incompatibles ? co-existence qui se résoudrait comme en mécanique quantique par la synthèse soudaine de deux états également possibles et jusque-là superposés (la fameuse « réduction du train d’ondes ») ? Je pense à ce que rapportent certains rescapés d’un état « proche de la mort » et qui disent avoir éprouvé le sentiment que leur conscience (âme) « survole » la scène où leur corps lutte entre la vie et la mort. Ils affirment aussi que cette contemplation s’est interrompue brutalement et qu’ils ont alors repris conscience, autrement dit, que leur conscience s’est soudain trouvée réunie à leur corps meurtri dans un processus de réduction comparable à celui que subit un train d’ondes au niveau quantique.
Je me rendors. Quelque temps plus tard, toujours au milieu de la nuit, je me réveille et, en l’espace de quelques minutes, une suite de conséquences philosophiques de l’hypothèse des mondes parallèles précipitent dans ma réflexion : un torrent déductif où figurent une réconciliation des points de vue réaliste et idéaliste, une confirmation de la conception leibnizienne du « meilleur des mondes possibles », une expansion du cogito cartésien, le rôle joué par la Raison dans l’histoire, ce qu’il faut penser de l’idée que le temps aurait une réalité purement psychologique, enfin, comment concevoir (de manière non-contradictoire) la nature de l’Être-donné.
Bien entendu, le matin au réveil, je ne crois plus à aucune de ces sornettes, dont j’attribue l’élaboration au relâchement de l’esprit critique propre aux réflexions nocturnes. Et pourtant… au cours de la journée je retourne à plusieurs reprises vers ces réflexions, étonné de la qualité esthétique d’une démarche apportant des réponses à certaines questions philosophiques classiques à partir de l’hypothèse des mondes parallèles. C’est ce sentiment de la beauté de la cascade déductive qui m’encourage à la mettre sur le papier, en dépit de ce que je considère comme sa plausibilité quasiment nulle.
Ce qui m’a frappé au cours de ma réflexion nocturne, c’est non seulement l’aisance avec laquelle l’ensemble des questions qui se sont présentées à ma réflexion trouvaient une solution, mais surtout comment celles-ci – qui m’apparaissaient jusque-là disparates – se retrouvaient harmonieusement organisées en un tout, du fait précisément qu’une solution leur étaient apportée dans un ordre logique particulier. Nous nous étions faits à l’idée que la science était le domaine des questions qui trouveraient réponse, la philosophie au contraire, celui des celles qui resteraient ouvertes. Mais la science nous a – à tort ou à raison – déçu sous ce rapport. L’inversion des perspectives s’applique-t-elle aussi à la philosophie, à savoir, que ses questions à elle se révéleraient solubles ?
Mais quelle foi accorder à un système du monde dont le seul mérite serait de résoudre un sous-ensemble important des questions qui ont retenu, au cours des âges, l’attention des philosophes ? Autrement dit quelle garantie nous apporte quant à sa vérité une théorie dont la seule vertu est celle de sa cohérence, sa capacité-même à « faire système » ? Une telle disposition à répondre sans se contredire à ces questions, lui assurerait-elle – de manière inductive – une vraisemblance qui, sinon – au vu de son contenu propre – lui serait spontanément refusée ?
Un débat intellectuel a eu lieu récemment dont l’objet était que les philosophes se méprennent le plus souvent quant à la signification des positions défendues par les scientifiques, la portée épistémologique des théories et des faits à partir desquels ils construisent une argumentation philosophique leur échappant en réalité, si bien que, contrairement à ce qu’ils imaginent, les philosophes ne bâtissent pas à partir de la science, mais se contentent d’y trouver, de manière très lâche, une « source d’inspiration » (cf. Sokal & Bricmont 1997, Bouveresse 1999). Une occasion m’est offerte ici de répondre indirectement à cette accusation en mettant en évidence ce qui se produit quand un philosophe prend au sérieux ce que disent les scientifiques, en l’occurrence pour ce qui touche à la théorie dite des « mondes multiples » qui suppose que l’univers se fend de manière incessante en une multitude de mondes parallèles (1). L’aboutissement de ma réflexion, présenté en deux temps est, comme on le verra, surprenant à chacune des étapes de son développement.
Les comportements inattendus au niveau microscopique des particules élémentaires qu’étudie la mécanique quantique sont quelquefois présentés au profane par le biais de l’expérience mentale dite du « chat de Schrödinger », laquelle débouche sur l’hypothèse induite des « mondes multiples ». La prémisse est celle d’états concurrents de la réalité qui demeurent superposés jusqu’à ce qu’un événement tel que leur observation – ou plutôt l’interaction avec eux que suppose leur mesure – les oblige à choisir une manière de se présenter, et ceci sans que l’alternative implicite à la superposition initiale perde pour autant de sa réalité (2). L’interaction – dont la mesure (3) n’est que l’un des avatars possibles – est alors à l’origine d’une bifurcation de mondes entre deux de leurs états possibles.
Dans l’expérience mentale imaginée par Erwin Schrödinger dans les années trente du siècle dernier, un chat dont la survie ou la mort dépend de la brisure d’une fiole de cyanure déterminée par une variation quantique ayant une chance sur deux de se produire (réduction d’un train d’ondes), se retrouve simultanément mort et vivant dans deux univers également possibles mais ayant « bifurqué », ayant divergé l’un de l’autre. Le chat est à la fois mort et vivant mais dans deux mondes en voie de séparation (4), l’ontologie sous-jacente à cette conception étant donc celle de myriades d’univers co-existants, chacun évoluant selon un scénario qui lui est propre, d’où l’appellation pour cette interprétation de la mécanique quantique, d’hypothèse des mondes multiples (parallèles).
Ce qui – à ma connaissance – n’a jamais été évoqué dans les discussions relatives au chat de Schrödinger, c’est ce que celui-ci en pense. Sans doute parce que l’auteur de l’expérience mentale supposait que l’animal n’est pas pleinement conscient de ce qui lui arrive. Remplaçons alors le chat par un être humain pour rendre le cas de figure plus instructif. Si ce dernier est à la fois mort et vivant, on peut supposer que les principes courants en matière de conscience restent d’application, à savoir que, 1º dans le monde où il est mort, son cadavre est privé de conscience, alors que 2º dans le monde où il demeure en vie, son corps continue à être doué de conscience, c’est-à-dire, a la conscience d’être en vie (quand il n’est pas endormi, évanoui ou dans le coma). Autrement dit, en cas de divergence entre deux scénarios où dans l’un, l’individu meurt, alors que dans l’autre il demeure en vie, la conscience de soi doit nécessairement s’attacher au scénario où la capacité métabolique du corps reste entière (5).
Or l’existence de telles bifurcations entre mondes possibles a été, selon les représentants d’un courant important parmi les physiciens contemporains, prouvée au delà de tout doute raisonnable. Je vais tirer de ceci un certain nombre de conséquences. La première est la suivante : s’il existe certaines stratégies de vie concurrentes où le choix malheureux signifie la mort inéluctable de celui qui le pose, son auteur ne s’en apercevra jamais, sa conscience de soi restant nécessairement attachée à celui (ou ceux) des mondes multiples où il reste en vie – quelque soit la faible probabilité du scénario auquel celui-ci (ou ceux-ci) correspond(ent). Il ne s’apercevra donc pas que son choix fut en réalité malencontreux. Dans les narrations autobiographiques qu’il tiendra dans le monde où il survit, il ira même jusqu’à justifier à qui veut l’entendre la justesse de son pauvre jugement, renforçant ainsi involontairement sa tendance aux choix tactiques médiocres. Cette stratégie se poursuivra jusqu’au moment où il se heurtera à une situation où sa probabilité de survie sera devenue cette fois objectivement nulle. Nous connaissons tous des individus très fiers de leurs prouesses et auxquels nous n’attribuons aucun rôle à leur talent dans ce qui leur arrive de positif mais seulement à la chance incongrue dont ils semblent bénéficier.
Ce phénomène expliquerait une observation faite par les psychologues – évoquée dans le contexte de l’irrationalité des comportements des joueurs compulsifs (Tversky & Wakker 1995) – la persistance dans l’erreur propre à l’espèce humaine, et qui la distingue à ce point de vue des autres animaux. L’auto-réflexion propre à la conscience qui s’auto-congratule (« mon choix tactique était judicieux… ») au sujet d’un comportement qui a conduit dans un monde parallèle à une mort certaine, est indispensable pour qu’une telle tendance se développe : l’animal privé de conscience est confronté à l’objectivité de la réussite ou de l’échec de ses comportements ; au contraire, l’homme dont la conscience s’attache nécessairement au monde où son corps demeure en vie, est encouragé à persévérer, quelque soit la stupidité objective de son jugement quant à la tâche d’assurer sa survie.
Et puisque j’ai évoqué ici le jeu, il m’est permis, dans la perspective des mondes multiples, de poser le théorème suivant : La roulette russe est une activité sans risque et qui peut rapporter gros. (Une proposition identique vaut pour tous les sports dits extrêmes). Il s’agit là en fait d’un simple corollaire de ce que je viens d’avancer : le joueur s’en sort – du moins dans sa propre histoire, celle à laquelle s’attache sa conscience de soi – tant qu’il existe dans l’éventail des scénarios possibles, au moins l’un où il reste en vie. La chance de survie étant fixée ici – selon la règle du jeu – à cinq chances sur six, le sujet s’en sort toujours. Bien sûr, dans la vie des autres, il meurt nécessairement une fois sur six, mais pour ce qui est de la sienne propre, le risque est nul qu’il disparaisse du fait de sa participation au jeu : il mourra sans aucun doute un beau jour mais pour une autre cause, lorsque sa chance de survie dans l’ensemble des scénarios possibles qui s’ouvrent à lui est devenue nulle, ce qui veut dire que dans la plupart des cas, il mourra « subjectivement » de mort dite naturelle, du fait de la corruption ultime de son corps matériel. La persistance du jeu au cours des siècles récents, en dépit de son danger apparent, est une conséquence de la vérité du théorème.
J’ai mentionné le fait que dans le monde d’un joueur de roulette russe ses partenaires de jeu meurent une fois sur six, alors qu’en ce qui le concerne personnellement cette probabilité est réduite à zéro. De manière plus générale, les acteurs qui meurent de mort violente dans mon histoire personnelle mènent en réalité une vie beaucoup plus paisible dans leur propre vie (l’expérience subjective qu’ils en ont). Inversement, la vie aventureuse que je mène apparaît beaucoup plus dangereuse à mes contemporains qu’à moi-même, ma capacité effective à m’en sortir indemne étant, comme on l’a vu, considérable. Cette constatation peut être généralisée en un deuxième théorème : Chacun mène (subjectivement) une vie beaucoup plus paisible que celle que ses contemporains observent.
L’histoire de sa propre conscience suit donc nécessairement une pente « optimiste » selon laquelle, en gros, on s’en sort, sinon toujours, du moins un certain nombre de fois (6). Le concept classique de providence désigne ce principe que chacun observe à l’œuvre pour ce qui touche à sa propre existence. Ceci explique en particulier pourquoi une proportion importante de situations fortement compromises connaissent cependant un dénouement heureux, dit « providentiel », et ceci en dépit de la probabilité objectivement faible de tels retournements de situation. Ainsi, malgré l’inéluctabilité objective d’une guerre mondiale thermonucléaire – en raison du malentendu culturel régnant entre protagonistes surarmés et enclins au raisonnement paranoïaque – nous avons tous, lecteurs potentiels de mon texte, survécu à la IIIème guerre mondiale.
Une série de questions qui vont de soi pour tout individu au sein de la culture occidentale, « Pourquoi moi, ici et maintenant… quelle est la signification du monde qui m’entoure par rapport à ma propre existence ? », etc. reçoivent alors chacune une réponse presque évidente et, ensemble, elles s’articulent en un tout esthétiquement satisfaisant.
Ma conscience se manifeste nécessairement au sein du seul monde où mon existence est possible. Mais comme il s’agit, parmi la multitude des mondes avérés, du seul où mon existence est à même de se manifester, au sein de ce monde singulier, mon existence n’est pas contingente mais nécessaire : ce monde singulier et mon existence en son sein sont consubstantiels. Y étant nécessaire, ma présence au sein du monde auquel je participe est ontologiquement non-problématique. L’évidence de cette thèse s’imposerait d’elle-même s’il nous était donné d’observer simultanément notre présence ici et maintenant dans le seul monde que nous habitons, et notre absence totale dans les myriades d’autres mondes parallèles où notre existence est impossible. Cette expérience est bien entendu irréalisable puisque l’observation par nous d’un autre monde singulier que celui auquel nous appartenons, impliquerait notre présence nécessaire en son sein, ce qui est contradictoire.
Ma nécessité au sein d’un monde singulier s’accompagne de celle de tous les événements qui ont précédé mon apparition dans son histoire. Ceux-ci ne sont cependant pas significatifs du seul fait de ma propre existence : ils sont significatifs aussi bien par rapport à l’ensemble de mes six milliards de contemporains (7). Ceci dit il serait toutefois non-pertinent pour moi de m’interroger quant à ce qui pourrait m’apparaître éventuellement comme la bizarrerie – due à son improbabilité – de leur séquence : c’est leur configuration particulière qui m’a rendu possible, tout autre séquence a débouché sur des mondes ontologiquement distincts ; les événements qui ont présidé à l’existence de ceux-ci seraient-ils même plus « plausibles » que je n’y demeurerais pas moins impossible.
Le prix ontologique à payer pour l’existence parallèle de myriades de mondes contingents est la nécessité en-soi de chacun de ceux-ci, c’est-à-dire la nécessité intrinsèque de chaque événement qui y intervient, au sein de sa propre séquence – ce que l’on est convenu d’appeler « déterminisme ». Prenons l’exemple d’une succession peu probable d’événements : ma mère survit à la IIème guerre mondiale en raison des circonstances suivantes. Sa propre mère, ma grand-mère – non-juive – meurt en 1941, en Belgique occupée, d’un cancer à évolution très rapide. Mon grand-père – juif – se retrouve chef de famille ayant la responsabilité d’enfants non-juifs, et pour cette raison échappe de peu à la déportation.
J’ai souvent songé à la rationalité inattendue du nazisme qui – prenant à la lettre la logique généalogique juive – a permis la survie de mon grand-père alors que ses frères et sœurs disparaissaient dans les camps. Au sein d’une approche de type « mondes multiples », mon interrogation n’a cependant pas lieu d’être : ma propre existence suppose automatiquement qu’au sein du monde qui est le mien, les Nazis adoptèrent une logique matrilinéaire pour leur façon d’établir la généalogie des Juifs. Ceci ne veut pas dire que mon existence explique ou justifie leur démarche ; cela veut dire simplement que le seul monde possible où mon existence se manifeste est celui où les Nazis appliquèrent à l’extermination des Juifs une logique matrilinéaire ; dans celui, ou ceux, où – dans une perspective de rationalité moindre – ils adoptèrent une logique patrilinéaire, je ne suis tout simplement pas né.
Autre exemple, pendant 200.000 ans les Néanderthaliens sont contemporains des Homo Sapiens. Pourquoi ont-ils alors disparu ? La question est en réalité indifférente par nécessité logique. En effet, dans un monde parallèle, un sujet conscient se constate Néanderthalien et se pose naïvement la question symétrique à la mienne : qu’est-il donc advenu des Homo Sapiens ?
Je n’ai donc pas à me préoccuper du pourquoi des conditions de ma propre existence : il s’agit là d’un donné nécessaire à mon monde singulier. Non parce que mon existence donnerait un sens à ce monde, mais parce qu’à l’intérieur de ce monde singulier, il existe une double nécessité : de son déroulement tel qu’il a été, et de ma présence en son sein à une époque donnée. Autrement dit, mon existence impose une contrainte rétrospective sur le monde au sein duquel j’interviens : mon existence est contingente dans la perspective de tous les mondes possibles, mais elle est nécessaire à l’intérieur du monde singulier dont je parle, à partir duquel je parle. Ce qui implique que, de mon point de vue, je vis nécessairement dans celui des mondes multiples où je trouve automatiquement ma place, puisque non seulement tous les événements qui y ont eu lieu avant ma naissance sont compatibles avec celle-ci, mais aussi parce que tant que je demeure en vie tous les événements contemporains me sont nécessairement eux aussi com-possibles.
Nous sommes tous – l’ensemble des contemporains, ceux dont l’existence impose un système de contraintes identiques sur l’existence passée du monde, et il en va de même, partout et toujours, pour toute « cohorte » quelconque de contemporains. Et ceci établit entre eux une contrainte leibnizienne de « com-possibilité » : quelque soit la variété apparente de mes contemporains, nous somme liés par le fait que notre émergence simultanée à l’existence est « com-possible » : compatible avec l’histoire antécédente d’un monde singulier.
Et il en va de manière symétrique pour l’avenir. Le monde que l’on offre à sa descendance est le même que le sien, du moins jusqu’au moment où ils sont conçus. Ensuite, chacun de ces mondes se met tout aussitôt à bifurquer. Du coup, il n’est pas entièrement vain d’entretenir le souci généreux de léguer un monde meilleur à ses enfants : le leur est nécessairement identique au nôtre sur une partie de son histoire en tant que soumis au même système de contraintes qu’exige son histoire antérieure ; le monde de mes enfants ne peut commencer à bifurquer qu’après que j’y ai moi-même vécu un certain temps (8).
La fin de ma com-possibilité avec mon monde signale ma mort. Dans le vieillissement mon métabolisme s’épuise à maintenir la com-possibilité de mes cellules et de mes organes avec le monde auquel j’appartiens. Tant qu’il en existe au moins un où mon existence est possible, ma conscience lui reste attachée. Ceci m’autorise à toujours me trouver dans ce qui est pour moi le meilleur des mondes possibles, celui où – parfois contre toute vraisemblance – je demeure en vie. On a redécouvert bien sûr ici la thèse leibnizienne mais par le biais d’une ironie : chacun vit dans le meilleur des mondes possibles, mais sans qu’il existe pour autant un univers unique qui disposerait de cette propriété. Notre monde à chacun n’est le meilleur des mondes possibles que parce que ceux-ci existent en arrière-plan en quantité astronomique – du fait de leur disposition incessante à diverger les uns des autres pour s’engager sur des trajectoires distinctes, et que notre conscience – étant liée à notre corps matériel – dispose automatiquement de la capacité providentielle à s’attacher à celui qui nous punit le plus bénignement pour nos erreurs.. Par ailleurs, cette harmonie ne résulte pas comme chez Leibniz d’une volonté divine extérieure à ce monde mais du flou ontologique qui caractérise la nature au niveau quantique. [Hegel affirme de cette volonté divine chez Leibniz qu’elle est l’« égout par lequel toutes les contradictions s’évacuent » (Leçons sur l’histoire de la philosophie, III : 348)].
D’où une conception qui débouche sur une réconciliation de l’idéalisme et du réalisme. Le monde existe effectivement, mais celui que j’observe est par nécessité « mon monde » : celui dont les contraintes justifient mon émergence à l’existence. Ce n’est pas celle-ci qui procure au monde sa signification mais elle contribue à la signification de ce monde singulier au sein duquel j’existe : celui-ci est bien mon monde à moi et je le partage avec mes contemporains, même si leurs parcours en son sein n’arrêtent pas de diverger par rapport au mien. D’où une extension possible du cogito cartésien : « Je pense donc je suis, je suis donc mon monde est d’une certaine manière ». Le fait de ma conscience me permet d’appréhender le monde où j’existe, et cette existence est consubstantielle avec un monde singulier : il y a sur ce monde une contrainte qui est celle de ma com-possibilité avec tout ce qui d’autre le compose. Le fait que je pense ne façonne pas le monde ni ne le détermine a posteriori, mais moi et le monde singulier au sein duquel j’apparais, nous sommes solidairement liés dans le tissu d’un scénario unique parmi des myriades d’autres qui sont non seulement possibles mais se réalisent également par ailleurs.
De même, mon existence et la conscience que j’en ai, après que se soient succédées un nombre considérable de générations, suppose la reproduction de comportements similaires et solidaires sur une longue période. En fait, plus j’apparais loin dans l’histoire, plus mon existence suppose – comme contrainte – une survie plus longue de l’espèce, dont la probabilité dépend de l’amenuisement des attitudes autodestructrices, et de l’émergence au contraire de comportements de plus en plus unifiés. Autrement dit, plus j’interviens tard dans l’histoire de mon monde plus mon existence suppose un progrès dans la réconciliation de l’espèce avec elle-même. On n’observe pas là l’exercice d’un principe évolutionniste, mais les implications d’une contrainte rationnelle. C’est-à-dire, plus loin j’apparais dans l’histoire de mon monde, plus mon existence suppose l’exercice de la raison dans l’histoire de ce monde. Mais aussi, et quelque soit le moment où une conscience se révèle à elle-même, celle-ci constatera nécessairement dans la période qui l’a précédé cet exercice de la raison dans l’histoire qui l’a précédée. Comme le conçoit Schelling, « la nature comme le savoir est un système de raison » (Hegel, Lectures on the History of Philosophy, III : 515).
Plus spécifiquement : mon existence n’interdit pas la barbarie nazie dans les années qui précèdent immédiatement ma naissance, mais elle suppose la rationalité minimale qui leur fait adopter la conception juive de la généalogie quand ils entreprennent l’élimination des Juifs. Ainsi, chacun appartient pleinement à son époque, et seulement à elle. Ce n’est pas par hasard que je nais en 1946, c’est là que s’ouvre l’univers de ma possibilité : ni avant, ni après mais à ce moment là même dans un monde singulier.
Chacun se voit ainsi offrir son époque comme un bien inaliénable : c’est celle non seulement où il est devenu possible mais aussi celle où son absence serait marquante, s’inscrirait positivement comme une lacune. Je porte dans mon essence l’empreinte de la barbarie qui a précédé de peu ma naissance, ainsi que de celle qui m’entoure depuis. Autrement dit, elle ne m’est pas étrangère, je suis du monde où elle est : il y a consubstantialité, il y a harmonie automatique entre mon époque et moi-même ; j’en suis le fruit, et elle- même porte – en creux – mon empreinte : il est impossible que je n’y sois pas apparu.
Il y a quelques années, John Barrow et Frank Tipler (1986) ont proposé leur « principe cosmologique anthropique ». Partant de la constatation qu’un monde susceptible d’engendrer des créatures telles que nous est contraint de manière très spécifique et à l’intérieur d’un éventail très étroit de valeurs possibles pour les constantes physiques universelles, Barrow et Tipler considèrent l’existence d’un tel concours de circonstances comme improbable, et résultant nécessairement d’un dessein. Le caractère sidérant d’une telle coïncidence s’évanouit cependant s’il s’avère qu’il existe par ailleurs des myriades d’univers parallèles où ces constantes possèdent des valeurs différentes. La constatation censée « significative » de la très faible probabilité d’un univers « anthropique » se révèle en réalité triviale si les univers sont multiples. Sous sa forme alors banalisée le « principe cosmologique anthropique » se reformule de la manière suivante : Nous apparaissons nécessairement dans le monde où nous sommes possibles, et nous sommes absents par définition de tous les autres.
En conséquence, il est très peu vraisemblable qu’il existe d’autres systèmes stellaires habités dans tout monde où je suis moi-même présent : la chaîne d’événements nécessaires à l’apparition de la conscience sous la forme que j’observe en moi et chez mes semblables est trop singulière pour que l’on puisse imaginer que quelque part ailleurs dans ce même monde elle se soit développée sous une forme analogue. De ce point de vue, Barrow et Tipler ont sans doute raison : la signification de notre monde réside d’une certaine manière en nous-mêmes. Et à l’intérieur de chaque monde possible où la conscience apparaît, c’est la forme sous laquelle elle se manifeste qui lui procure sa signification, au sens où, comme l’affirme Schelling, l’homme, ou sous sa forme généralisée, la Raison, est le moyen par lequel la Nature prend conscience d’elle-même (Schelling cité par Hegel : 517).
De même qu’il existe des myriades de mondes possédant leur propre histoire, de même il en existe des myriades d’autres où le temps n’a jamais eu lieu, soit que les trains d’ondes au niveau quantique ne se sont jamais réduits en l’une ou l’autre de leurs expressions phénoménales possibles, soit que leurs manifestations se sont toujours annulées sans jamais déboucher sur la dissymétrie qui instaure une histoire dans son irréversibilité (9). Dans la mesure où il existe des mondes sans histoire, il est permis d’évoquer comme le font les physiciens, la « réalité purement psychologique du temps ». Mais un monde sans histoire est aussi un monde où la conscience n’apparaîtra jamais. Le temps est donc nécessaire pour qu’il puisse exister un jour une « réalité psychologique » de quoi que ce soit. Il n’est donc pas exact de dire que le temps n’a qu’une existence « psychologique » : le fait psychologique, c’est-à-dire le fait d’une représentation au sein d’une conscience, ne peut intervenir que dans un monde déjà pourvu d’une chronologie. Il demeure que certains mondes possibles sont privés d’histoire.
Il est maintenant tentant de démonter l’échafaudage qu’a constitué dans mon exposé l’hypothèse des mondes multiples et d’examiner ce qui en résulterait. À savoir, les réponses apportées aux questions philosophiques évoquées seraient-elles également valides si les savants se trompaient en réalité et si l’interprétation spontanée que nous avons de l’univers, à savoir qu’il est unique, était après tout la bonne ? Si oui, ce qui apparaîtrait alors, c’est que les questions que la philosophie se pose, formaient déjà système, préalablement au fait qu’on leur apporte une réponse qui les lie sur le mode déductif. Autrement dit, en posant les questions qu’elle a posé au fil des âges, la philosophie aurait en réalité postulé une ontologie très spécifique, mi-réaliste, mi-idéaliste, qui comprend à la fois une représentation modélisée de ce monde et ce qui s’approche de plus près de ce qu’un être humain peut considérer comme étant sa signification en soi, et par rapport à lui.
De plus, la raison pour laquelle le simple fait de poser de telles questions s’assimile à un amour de la sagesse deviendrait évident. Notre présence nécessaire au sein d’un monde fait tout entier d’existences com-possibles propose les termes d’une réconciliation : comment œuvrer à maximiser cette com-possibilité en étendant la compatibilité et la complémentarité des consciences. Ce monde dans l’horreur propre au temps où nous sommes nés (je m’adresse ici à mes contemporains) est bien le nôtre d’une manière non-contingente. Si nous ne l’aimons pas, libre à nous de le changer (10). Ce faisant, nous ne modifierons sans doute jamais qu’un monde singulier parmi des myriades de mondes parallèles, mais il nous est du moins offert d’en transformer un. Et pour ce faire, nous disposons d’un atout majeur : nous avons, pareils aux chats, la capacité de nous tromper du tout au tout quant à la manière de le faire, huit fois.
Notes :
(1) La théorie des mondes multiples (« many-worlds ») est une reformulation de la mécanique quantique publiée en 1957 par Hugh Everett III dans sa thèse défendue à Princeton. D’autres physiciens de premier plan, tels Gell-Mann et Hartle, souscrivent à des variantes très proches de cette conception. Price fait observer que « [La théorie] des mondes multiples est un retour à la conception classique, pré-quantique, de l’univers dans laquelle toutes les entités mathématiques d’une théorie physique sont réelles » (Price 1994-95).
(2) Price : « Selon l’hypothèse des mondes multiples, l’ensemble des aboutissements possibles d’une interaction quantique se réalisent. La fonction d’onde, au lieu de se réduire au moment de l’observation, continue d’évoluer de façon déterministe, couvrant la totalité des possibilités inscrites en elle. Tous ces aboutissements existent simultanément, mais cessent d’interférer l’un avec l’autre : ils ont divergé en un ensemble de mondes tous également réels mais mutuellement inobservables » (Price 1994-95).
(3) Price : « Une mesure est une interaction entre sous-systèmes qui déclenche un processus d’amplification, le plus souvent à l’intérieur d’un objet (que nous appelons alors en général l’instrument de mesure) ayant plusieurs degrés de liberté internes, conduisant à un changement dans la structure au plus haut niveau de l’objet (qui peut être l’appareil d’enregistrement) » (Price 1994-95).
(4) Price : « Du point de vue du chat survivant, il occupe un monde différent de celui de sa copie malheureuse et décédée » (Price 1994-95).
(5) La mort dans l’un des scénarios provoque une rapide divergence des deux mondes : « Les mondes bifurquent, “décohèrent”, l’un de l’autre quand des événements irréversibles ont lieu. [… Ceux-ci] détruisent pratiquement toute possibilité d’interférence future [entre les mondes ayant divergé] » (Price 1994-95). Au contraire, en l’absence d’une telle irréversibilité, l’ensemble des mondes où je reste en vie retrouvent rapidement leur unité. À propos du fait que nous ne ressentons pas (à l’intérieur des mondes où nous restons en vie) l’effet de ces bifurcations constantes, Price fait la remarque suivante : « L’argument selon lequel la représentation du monde implicite à cette théorie est infirmée par l’expérience, du fait que nous ne sommes pas conscients du processus de bifurcation, sont comparables à la critique du système copernicien selon laquelle le mouvement de la terre considéré comme un fait physique réel est incompatible avec l’appréhension de sens commun de la nature, puisque nous ne ressentons pas un tel mouvement. Dans les deux cas l’argument perd de son impact lorsqu’il est montré que la théorie elle-même prédit que notre expérience sera ce qu’elle s’avère être. (Dans le cas du système copernicien, l’addition de la physique newtonienne fut nécessaire pour que l’on puisse démontrer que les terriens sont nécessairement insensibles au déplacement de leur planète) » (Price 1994-95).
(6) Nombre de fois qu’une intuition à fondement empirique a pu évaluer à neuf, avant que cette disposition à une immortalité relative ne soit attribuée aux chats. D’où le titre du présent essai.
(7) Sans parler de toutes les autres créatures vivantes et de l’ensemble des entités inertes – que j’ignore ici en raison de la qualité toute spéciale d’auto-référence que la conscience autorise. Les animaux – ou certains animaux – disposent peut-être d’une conscience mais, contrairement à nos co-spécifiques, ils échouent (en tout cas auprès de la plupart d’entre nous) à nous convaincre qu’ils en disposent effectivement (le chat de Schrödinger en particulier).
(8) Price : « [la conception des] histoires multiples définit une hiérarchie d‘histoires de type plus familier connectées entre elles où chacune est l’“enfant” de l’ensemble des histoires parentes possédant un sous-ensemble seulement des événements irréversibles qui définissent cet enfant, et est aussi le “parent” de toute histoire possédant un sur-ensemble de tels événements » (Price 1994-95).
(9) Intuitivement, on pourrait penser que tout monde sans histoire versera un jour où l’autre dans la chronologie, du fait qu’il existe à tout moment (constaté bien entendu dans un monde historique parallèle) une probabilité non-nulle qu’une dissymétrie créatrice d’irréversibilité apparaisse.
(10) À moins hélàs que le sentiment de liberté qui accompagne la conscience ne soit lui purement illusoire. Je me dois de mentionner cette éventualité, ayant défendu cette thèse par ailleurs (Jorion 1999). Si, comme je l’ai avancé dans ce texte antérieur, la conscience est privée de tout pouvoir décisionnel, nous sommes alors réduits au statut de témoin impuissant de notre histoire individuelle, capables seulement de rédiger à son sujet une narration autobiographique qui entérine les faits. La conscience comme cul-de-sac constitue une interprétation possible du mythe platonicien de la caverne (voir Griswold 1999 : 14).
Références :
Barrow, John D. & Tipler, Frank J., The Anthropic Cosmological Principle, Oxford : Oxford University Press, 1986
Bouveresse, Jacques, Prodiges et vertiges de l’analogie, De l’abus des belles-lettres dans la pensée, Paris : Éditions Raison d’Agir, 1999
Griswold, Charles S., Adam Smith and the Virtues of Enlightment, Cambridge : Cambridge University Press, 1999
Hegel, G. W. F., Lectures on the History of Philosophy, III, [1840] Lincoln : University of Nebraska Press, 1995
Jorion, Paul, Le secret de la chambre chinoise, L’Homme, 150 : 177-202, 1999
Price, Michael, Frequently Asked Questions about Many-Worlds,
http://www.geocities.com/Athens/Acropolis/1756/everett.txt
Sokal, Alan & Bricmont, Jean, Impostures intellectuelles, Paris : Odile Jacob, 1997
Tversky, Amos & Wakker, Peter, « Risk Attitudes and Decision Weights », Econometrica, 1995, vol. 63, i, 6 : 1255-1280
97 réponses à “Mondes multiples et conscience”
@Nadine
J’aurais du écrire « votre univers, qui ne comporte qu’un seul proton et un seul électron… », car le mot système pourrait être ambigu ici. Le problème est lié au fait que cette entité univers ne pourrait interagir avec rien d’autre qu’elle-même. Selon un point de vue réaliste, cette entité existe néanmoins. Selon l’interprétation relationnelle de la physique quantique, elle n’existe pas.
Bonjour a tous ,il me semble que la nous touchons l’intouchable ,il n’y a ni action ni reaction tout est spontanee .Preter un comportement a l’individu est le debut du probleme alors imaginez la suite .Vous existez uniquement parce que vous n’etes pas ce qui est ,si c’etait le cas vous ne vous ressentiriez pas (l’oeil ne sait pas qu’il existe ni a quoi il sert).
@ Rumbo
Vous concluez :
« Cette équiprobabilité de l’être et du néant est irrésolvable en logique binaire où nous arrivons très rapidement à des antinomies. Mais elle est résolvable immédiatement avec la trialectique de Lupasco et ses trois états, potentiel, actuel et un état T qui pourrait se dire “en devenir”, semi potentiel actuel.
La logique de Lupasco est une logique du tiers inclus… »
Cela n’ est pas surprenant…On sent bien que la logique bivalente (« être » ou « n’ être pas » ainsi) est comme un scalpel rouillé pour appréhender des phénomènes de type quantique ou même métaphysiques.
Il faudra bien que l’ on accepte l’ idée qu ‘il existe d’ autres valeur de vérité que vrai ou faux, et cela sera possible quand on acceptera l’ idée qu’ un réel hors de moi, indépendant de moi (que l ‘on appelle « le » reel), n’ « existe » pas.
Ce qui existe pour moi, serait influencé par moi. Ce que j’ appelle réel serait la résultante accessible à mes sens, de ces influences par les autres consciences.
Ci joint, un point de vue « exotique », mais qui mérite l’ attention, car il donne des pistes de réflexion a partir d’ un mélange des travaux en logique de Bertrand Russel, et de science fiction !.
( une valeur de vérité supplémentaire possible serait « vrai dans l ‘espace dimensionné considéré et faux en dehors de l’ espace » .Une dernière valeur serait réservée au métaphysique inaccessible « n’ existe pas, non dimensionné »)
[http://sboisse.free.fr/et/ummo/analyse/logique4V.html]
Pffft,
Vouloir expliquer la conscience par la physique quantique c’est comme vouloir expliquer le vol de l’oiseau par la balistique.
je veux dire qu’il y a trois niveaux dont aucune science ne parvient encore à franchir les deux paliers!
Entre la table de Mendéléïev et LUCA (last universal common ancestor) (1ére cellule vivante)
entre LUCA et autres vertébrés supérieurs, et l’homme avec ses facultés.
Chaque niveau possède ses lois qui ne sont pas celles des autres bien qu’humains, nous soyons du vivant, lui-même composé de matière.
Tout çà me rapelle aussi une histoire sur la question de la pensée et du langage: « comment pense un aphasique qui cause encore un peu? comme il parle! » Bref, çà m’étonnerait que vous puissiez trouver les lois de la rationnalité ds ce que la rationnalité à produit! fut-ce une des plus belle théorie de la physique!
les plus curieux d’entre vous iront donc s’intéresser aux lois du langage lui-même, sain ou quand il montre ses défaillances aphsiques! Cà cause, çà cause! ds des régressions à l’infini ou ds des raisonnements circulaires sur le déterminisme causal…
@ Eugène,
remplacer Quantique par Cantique et cela marche …
@Marc Peltier
Je crois comprendre ce que vous voulez dire. Ce que vous expliquez se vérifie surtout dans les sciences de la vie où il existe une co-dépendance entre l’environnement et le sujet. A ce titre on peut dire que les êtres biologiques font émerger un monde qui en dehors du sujet n’existe pas. Les êtres biologiques modifient leur environnement et en retour l’environnement modifié modifie les êtres biologiques et ainsi de suite. Mais je crois que dans ce schéma on reste dans la physique classique tout en se rapprochant de la cybernétique. Il me semble que cette approche n’aide pas à comprendre le comportement quantique de la nature. La difficulté vient sans doute d’un certain formatage de notre esprit correspondant à la longue évolution de ce monde en co-dépendance avec nous et qui nous empêche d’imaginer les phénomènes en dehors de l’espace et du temps. D’ailleurs une des caractéristiques essentielles de la conscience c’est bien sa capacité à « spatialiser ». L’espace et le temps sont une création de la conscience au même titre que les couleurs, les sons, etc. Regardez tout ces cas cliniques où la conscience est modifiée comme par exemple cette personne qui après avoir été blessé au lobe frontal reprit connaissance dans un coin du plafond de sa chambre d’hôpital et se regarda avec euphorie sur son lit enveloppé de bandage. La conscience n’a pas de lieu même s’il est plus pratique pour l’individu qu’elle se trouve derrière ses yeux, question sans doute d’adaptation la plus efficace.
Mais pour moi la réalité profonde (et non notre monde émergeant) existe indépendamment de nous même et c’est lui qui nous a fait et je ne pense pas que sa nature soit inconnaissable, c’est sous estimer le potentiel créatif des hommes.
@ Marc Peltier
(autres commentateurs bienvenus, personne n’a répondu à cette question, déjà posée)
Excusez mon ignorance je vous prie : pouvez-vous justifier lorsque vous écrivez 20 février 2009 à 12:04 « J’écarte le point de vue dualiste qui serait de toutes façons hors de ce débat », ou est-ce une profession de foi de votre part ?
Merci d’avance.
@TELQUEL, Nadine et Paul Jorion
Le point de vue que je propage ici peut en effet donner le vertige, ou frustrer, mais en vérité, ce n’est pas si grave. Seule la physique des hautes énergies, et donc des très petites distances, est concernée en pratique.
Nos difficultés à interpréter les mesures sont liées à la quantification. Pour faire image, on pourrait dire qu’à très petite échelle, le réel est constitué de grains de réalité distincts. Si vous travaillez sur des phénomènes pour lesquels cette granularité est sensible, vous éprouverez forcément des difficultés à vouloir décrire ce qui se passe entre les grains, car il n’y a a pas de réel entre les grains.
C’est pourquoi j’intuitionne que seuls les nombres entiers sont légitimes en physique aux hautes énergies.
Mais à nos échelles sensibles, le réel est en pratique continu. Si vos mesures, ultra précises, ont une incertitude de 10e-18, et que vous intervenez à 10e33 fois l’échelle de Planck, vous n’avez pas à vous casser la tête, c’est bien du continu que vous observez. Et vous êtes alors fondé à prétendre décrire la nature même des choses réelles que vous avez mesurées, qui existent et demeurent, même entre vos mesures.
Si nous parlons maintenant du cadre conceptuel général, de la nature de la connaissance scientifique, nos réticences sont liées, me semble-t-il, à la croyance qu’il existe une hiérarchie des lois naturelles, que certaines sont plus « fondamentales » que d’autres, et qu’il existe in fine une loi ultime dont tout découle.
Comme les lois supposées les plus fondamentales se manifestent précisément aux grandes énergies, et que nous nous sommes employés depuis 80 ans à en brouiller le sens, nous craignons que tout notre édifice conceptuel ne s’écroule (mise en cause de la causalité, et d’un réel indépendant de l’observateur, notamment).
Mais je crois que cette hiérarchie est infondée, pour des raisons que j’ai évoqué dans mon post précédent (20 février à 12h04 §3-) : le domaine de validité des lois naturelles est limité par les émergences qui se manifestent avec la complexification des systèmes, qui en quelque sorte cloisonnent et organisent le réel en échelles de pertinence des lois.
Ce qui est vraiment fondamental est plutôt à rechercher, selon moi, du côté de ces phénomènes d’émergence, et de symétrie et brisure de symétrie.
C’est pourquoi je ne vois pas de réelle contradiction dans le fait de proclamer qu’aux grandes énergies, le réel n’est constitué que de phénomènes (objectivité faible), tout en continuant à faire confiance, à notre échelle sensible, à une réalité indépendante et localisée (objectivité forte).
C’est aussi pourquoi j’ai une certaine réticence à suivre Paul Jorion dans sa vision d’une conscience qui parcourt tous les univers « quantiquement possibles » qui ne lui sont pas contradictoires. Une telle conscience, jusqu’à preuve du contraire, ne se manifeste que dans des systèmes macroscopiques ayant évolué quelques milliards d’années, à une très grande distance, en termes d’émergences, du monde quantique.
Ces entités (la conscience et le monde quantique) sont, selon moi, tout simplement incommensurables, même si leur confrontation dans la situation d’une mesure physique aux hautes énergies conduit à des paradoxes. Ces paradoxes disparaissent si l’on renonce à vouloir à toute force mettre du réel là où il n’y en a pas.
Albert Einstein et Niels Bohr ont beaucoup discuté de ces questions. On rapporte que Bohr, qui défendait l’objectivité faible que lui imposait la mécanique quantique, aurait dit un jour à Einstein, qui ne voulait pas renoncer au réel indépendant (« Dieu ne joue pas aux dés ») : « Mais enfin, Albert, cessez donc de vouloir dire sans cesse à Dieu ce qu’il doit faire! »
@Patrice
Je devrais être plus prudent en parlant de la conscience, car je mesure mon ignorance des innombrables apports des philosophes à ce sujet. Que ceux qui sont plus instruits me pardonnent si je semble naïf parfois, mais j’estime que tout un chacun a le droit (et le devoir!) de philosopher, par lui-même…
J’imagine que l’on peut concevoir la conscience de trois façons :
Matérialiste : Nous sommes des machines, la conscience est le produit du fonctionnement de machines très complexes, biologiques, qui traitent de l’information sensorielle et mnésique. Rien ne s’oppose à ce que des machines non biologiques ne produisent de la conscience. En corollaire, cette conscience est contingente, et notre libre-arbitre est, à un certain niveau, un peu illusoire. Néanmoins, la production de la conscience par la matière crée une sorte de brisure de symétrie radicale dans le réel, en ce qu’elle distingue un sujet et des objets.
Dualiste : L’esprit et la matière sont essentiellement distincts, irréductibles l’un à l’autre, et rien ne s’oppose à ce que l’esprit soit autonome (éternel, par exemple), bien qu’on ne le constate que toujours couplé à la matière. La conscience est un attribut de l’esprit, qui comporte des degrés. Le domaine de liberté de l’esprit n’est pas limité, mais la conscience est éventuellement limitée dans ses capacités. Les degrés de conscience peuvent être quelconques entre l’état binaire 1/0 et … Dieu. On ne saurait produire de vraie conscience artificielle, puisque l’esprit procède d’une essence particulière, irréductible.
Émergeant : La conscience procède de la matière, mais ne s’y réduit pas. Elle constitue, pour nous qui sommes conscients, le couronnement de multiples émergences imbriquées les unes dans les autres, et qui sont ancrées dans le réel, la matière, et l’évolution. Il n’est pas exclu que nos consciences ne participent collectivement à de nouvelles émergences, qui nous échappent, évidemment.
La conscience n’émerge pas directement du substrat matériel (des neurones, par exemple), il existe plusieurs niveaux d’émergence pré-conscients et déjà immatériels, liés au traitement de l’information sensorielle et mnésique, et eux-même apparus au cours d’une phase complexifiante de l’évolution.
En conséquence, on ne peut pas imaginer de conscience « en soi », qui serait indépendante de tous les étages sous-jacents, d’une part, et d’un milieu physique dans lequel cette conscience se manifeste et évolue, d’autre part.
Autrement dit, l’altération du substrat matériel fait disparaître la conscience, comme dans le matérialisme. Mais comme pour le dualisme, la conscience n’est pas complètement déterminée par la matière, car chaque niveau d’émergence diminue la contingence qu’elle subit.
L’autonomie de la conscience par rapport à la matière peut être un objet d’étude, mais qui présente de grandes difficultés logiques (autoréférence, isolement du sujet).
La question de la conscience artificielle reste ouverte; elle n’est pas impossible par principe, mais la profondeur des autoréférences récurrentes à mettre en oeuvre pourrait bien rendre sa réalisation très difficile, autrement que par un long processus évolutif.
Pour revenir à la question de Patrice, j’adopte, vous l’avez compris, le point de vue de l’émergence, mais il me semble que tout ce que j’ai écris ici resterait compatible avec une conception purement mécaniste de la conscience.
J’ai exclu la position dualiste car elle me semble impliquer d’emblée une forme de transcendance qui éteint le débat, et à laquelle nous n’avons pas besoin de recourir pour discuter de ces questions qui restent liées à la physique. Il faut rester économe en hypothèses, n’est-ce pas? On peut voir dans ma position un acte de foi, mais j’ai tendance à penser que c’est la position inverse qui le serait…
@Eugène
Vous me faites penser à mon fils qui à la première difficulté me dit toujours: « pffft, laisse tomber c’est bon ».
Dites vous bien que dans tout ces commentaires qui vous paraissent inutiles il y a aussi le plaisir d’échanger des points de vue différents.
@Patrice
Vous dites: « NOUS SOMMES TOUJOURS AU PRESENT, EN REALITE !!!! »
Pouvez vous nous en dire un peu plus.
Merci
Je ne dirais pas comme Eugene que c’est du délire car je ne connais rien à la quantique ni aux théories des multiverses evoquées. Mais ce que je vois clairement c’est que les dits scientifiques ainsi que Paul dans cet article sont obligés d’utiliser des métaphores pour faire appréhender leur point de vue. Et la ce n’est plus de la science. Les faits constatés semblent irréductibles à la science actuelle. Si on n’est plus dans la science on est dans le mythe ou la poétique. Cette poétique est bien présente mais ce serait plutot une poétique du sens comme chez Claudel, qu’une poétique du son comme dans les rimes. Je penche pour le mythe qui veut faire rentrer les faits constatés dans les limites de notre savoir. D’ou les multiverses et autres inventions qui feront rire nos petits enfants. Ainsi il me semble que comme l’eau est devenue H2O il va falloir qu’une avancée dans un des coins de la science fasse naitre un nouveau langage qui permettra de systématiser les faits. Et celà viendra à n’en pas douter, mais quand? En attendant ça phosphore bien et ça imagine beaucoup preuve supplémentaire qu’il manque à la science le langage adéquat. Un scientifique n’imagine pas, il modélise des constatations. Une avancée majeure il me semble sera de créer un langage de la qualité (comme contradiction de la quantité), une extension à la mathématique peut-être? Il me semble que les particules quantiques ne se laissent pas appréhender par la mesure de quantités, il y a comme disparition d’une des mesures quand l’une des autres est précise scientifiquement. Celà me fait penser au fait qu’une personne ne peut jamais être appréhender à travers seulement son salaire, ou son age, ou un comportement, mais seulement par une prise en compte globale qui permet de lui donner la qualité d’être quelqu’un de bien par exemple. Ou un mauvais parent ou d’autres. Et celà ne se quantifie pas. Il me semble que c’est le défi actuel de la science face à ses propres limites qui s’exprime dans ces théories. Et ces problémes là ne se résoudront pas avec les savoirs que nous avons. Il faudra les dépasser avec d’autres langages, d’autres outils car ils contredisent la science actuelle.
@ …
On ne peut ni le saisir ni le voir … ainsi il O-père …
@Marc
Je comprends et je suis aussi assez bien votre point de vue. Mais nous en sommes, de là où nous pensons, avec nos faibles moyens expérimentaux, réduit à le faire dans un cadre métaphysique, faisant référence à l’ensemble de ce que des gens beaucoup plus compétents ont déjà sculpté, et notre meilleure pertinence sera surtout de poser de bonnes questions, auxquelles d’autres, tôt ou tard pourraient répondre, parce qu’elles vont dans le bon sens.
Je vais me contenter de vous moduler sur deux ou trois points. Vous me direz si ce genre de précision est utile ou pas.
Je ne suis pas là pour répondre à la place de Paul, mais il me semble que quand il avance son impression, il pose juste une question pour voir si d’autres points de vue lui permettrait de compléter le sien. Il ne croit rien apriori.
A propos des entiers, oui, mais… A quel niveau descend t-on ?
Entier multiple de l’unité. Nous ne sommes pas encore expérimentalement descendu au niveau de la particule élémentaire. Et au niveau élémentaire, si on la considère comme unité, vous pouvez lui attribuer « un », mais sous d’autres conditions hors de notre univers envisageable, ce un reste-il valide ?
Je pense aux théoriciens qui parient leur destin à fouiller du côté des cordes, qui ne ramèneraient la particule élémentaire, non pas forcement à un élément solide, mais à une vibration.
Suivant les conditions de par chez nous, vibrant uniquement dans un panel de mode, mais qui pourrait vibrer différemment, ailleurs.
Pour se contenter d’envisager notre univers ( si d’autre existent, ils seraient hors de portée de l’expérimentation ) on devrait pouvoir se suffire d’entiers.
Si on considère les vibrations, des primordiales peuvent donner le goût de l’unité de ce côté-ci de l’univers pour constituer nos particules, mais on est quand même sur des harmoniques qui ne sont pas des entiers. Ah si ! La longueur de la corde peut-être ? La corde est-elle « solide » ? Ce mot a t-il encore un sens ? Qu’est-ce qui fait sa longueur, exprimée selon quelle dimension ??
Ensuite, à propos de conscience, sujet sur lequel je ne prendrais sûrement pas parti non plus.
Doit-on faire une différence entre conscience et âme ?
La conscience est liée à l’individu, alimentée énergétiquement par un corps.
Si l’âme existe, de quel type d’énergie autonome s’agit-il ? Pour le moment, depuis quelques années que des acides aminés ont pu être créés à partir d’une soupe primaire, sous l’action d’UV, il n’y a toujours pas eu génération spontanée de la moindre nouvelle mono-cellule.
Et vous aurez peut-être remarqué, que toutes les questions que je me pose, ont une base énergétique, puisque je ne vois pas de question d’où on pourrait exclure cette donnée du niveau des fondements.
Après vous avoir lu, c’est vers ce type de précisions, liste non exhaustive, que j’aurais besoin de continuer les approches .
@nadine,oui » la realite » n’existe que dans le moment present ,le temps et l’espace on juste pour fonction de faire apparaitre ce qui est sans juxtaposition;ce qui tend a prouver que ce qui est , n’existe pas ,ce qui existe est eternel.Le mystere de ce que vous appelez » la realite profonde » l’etre humain et sa raison ne peuvent franchir la barriere de la dualite, ce qui est, est non duel c’est le tout,et le tout ne peut s’apprehender par les concepts puisqu’il est tout les concepts .
@ Telquel,
lisez le « tao te king » de Lao Tseu, et vous verrez comme il est facile de sortir de la dualité …
ps: bonjour taotaquin
@scaringella
Vous dites : « Et celà ne se quantifie pas »
Je me rends compte qu’il est peut-être utile de préciser ce terme, pour exclure toute ambiguité.
Dans le langage courant, quantifier, c’est mettre un chiffre en face d’un paramètre variable.
Dans cette discussion, c’est le sens de la physique qui doit être compris. Quantifier, c’est introduire dans les raisonnements et les équations la notion de quantum (d’action, d’énergie…), c’est à dire de relations qui ne se font qu’en (quantum ou rien) ou en multiples de (quantum ou rien). C’est rendre compte du fait qu’aux très petites échelles, « la nature ne rend pas la monnaie ».
Pour le reste de votre contribution, je suis d’accord avec vous pour considérer que nous n’avons pas fait ici de la science, mais de l’interprétation épistémologique. Ce n’est pas illégitime…
@TELQUEL
Ce que vous dites illustre très bien les raisons pour lesquelles j’ai écarté de mon raisonnement la description dualiste de la conscience. Si l’on adopte ce point de vue, vous avez en fait tout dit, et le débat est clos.
@eugène
Vous avez tout à fait raison de nous renvoyer à des réflexions sur le langage, ça me semble tout à fait pertinent. En revanche, le pffft, qui nous asperge tous de dérision, ne me semble pas très constructif!
@barbe-toute-bleue
Nous devons nous méfier de la tendance de l’esprit à fabriquer des images. Ca ne marche plus en physique des grandes énergies. La théorie des cordes explore un formalisme mathématique qui décrit les choses comme « reflétant », ou « équivalentes à » des entités qui vibrent. Mais il ne faut pas prendre ça au pied de la lettre, et former des images là-dessus…
L’âme : je pense que nous avons tout intérêt à ne pas introduire dans nos raisonnements un concept qui nous vient des religions, et qui emballe tant d’implicites. Ma position est la même que pour ce qui concerne le dualisme.
Je pensais que la réflexion s’éteignait doucement, mais non, c’est reparti comme en quarante ! Alors je continue mon monologue de profane. Qui consiste surtout à me poser des questions parce que c’est beaucoup plus facile et moins risqué que chercher des réponses.
Quelqu’un a mentionné le langage nécessaire à la conscience. En tout cas nécessaire à l’évocation de la conscience ! Mais comment savoir ce qu’il se passe dans le cerveau reptilien ? Pas de mots, c’est sûr, mais peut-être des concepts qui permettent de se déplacer, d’aller à gauche plutôt qu’a droite, de déterminer l’attitude la plus efficace. Un embryon de libre-arbitre ?
Autre question : n’avons-nous pas été au bout des capacités explicatives des théories scientifiques d’avant-guerre (Théorie Quantique, Théorie de la Relativité Générale) ? D’un coté, nous butons sur les poupées Russes (des particules dans les particules) et de l’autre, au mur du Big Bang et à la masse manquante de l’Univers (la Théorie est vérifiée… Mais il nous manque juste 90% de la masse de l’Univers…)
Comme le mentionnait quelqu’un d’autre, il faudrait inventer un vrai langage scientifique artificiel. quelque chose de plus construit que l’actuel Pidgin sur base d’anglais et de mots grecs et latins que les scientifiques utilisent actuellement.
@Marc
Comme vous le diriez, la théorie des cordes veut explorer trop loin en aval, elle n’est que hypothétique, entre autres théories, pour qu’on puisse y associer des images, et même une réalité. Le point de ceci est : tant qu’on considère la particule élémentaire comme on le fait aujourd’hui, on applique le calcul des marches en quantas. Mais on ne sait toujours pas quelle est la forme de l’élémentaire.
Le chemin à la débroussailleuse, se trace depuis ce qui est éprouvé expérimentalement, notamment observation astrophysique sur tout le spectre électromagnétique, et accélérateur de particule d’énergie croissante.
Dualisme plutôt que âme. Vous êtes prudent à l’excès pour ne pas risquer de justification ultérieure le jour où vous croisez une bigote. Vous avez peut-être raison. Par contre vous êtes moins prudent quand vous l’excluez. Je préfère prendre la position de ne pas pouvoir me prononcer. Si il peut se trouver cette forme d’énergie indépendante d’un support matériel, il peut y avoir dualisme, et sans aspiration religieuse.
@Phil
Vous avez raison, on ne sait rien. Et je crois, encore moins que ce que vous espériez peut-être, mais c’est exactement la bonne route : pour savoir, il faut d’abord se rendre compte à quel point on ne sait rien ( parole trop rarement employée à la sortie d’un conseil des ministres ).
Et si vous me le permettez, je vais même vous casser votre mur du Big Bang : il s’agit d’une hypothèse, pas d’un fait. Ceci nous aide à nous orienter.
Mais beaucoup de gens, y compris des physiciens très compétents, n’hésitent pas à présenter ceci comme un départ ponctuel, plutôt que linéaire, plane, ou volumique.
On ne sait pas si le premier principe de la thermodynamique s’applique alors, mais il faudrait argumenter pour savoir si il ne s’appliquait pas. Si il s’applique ( principe de conservation de l’énergie ), il n’y a pas d’origine ici, c’est une continuité, dans un univers plus large et inobservable, déjà présent.
Appliquer les principes de la thermodynamique à l’énergie quantique du vide, à la séparation matière/anti-matière, aux ruptures de symétrie, vous, et moi, et nous, sommes presque au même niveau que les scientifiques les plus pointus pour en discuter : nous n’en savons rien. On suppose juste des directions.
Les poupées russes baignant dans le jus quantique, et en interactions extrêmement mal comprises, sont très intéressantes, d’autant qu’on va sans cesse en tirer des applications pour notre vie quotidienne. Vous en parlez comme d’un espoir éculé , et ce point de vue est assez amusant. Vous seriez pas un blasé, vous ?
Ensuite, question communication, question vulgarisation ( votre second point sur le langage, pas celui de Joe le lézard ), si pour théoriser et démontrer, il y a obligation de passer par l’outil mathématique, on ne l’est plus pour intéresser toutes personnes hermétiques à ce langage.
Le discours servant à propager et à expliquer, tout est permis, toute évolution aussi, il faut juste éviter de trop déformer la meilleure approche que l’on ait faite de la réalité. Quand un langage s’arrête d’évoluer, il devient ce qu’on qualifie de langue morte. Ça ne doit pas concerner les sciences.
Du nouveau sur les liens de la conscience avec la mécanique quantique.
Site:http://www.futura-sciences.com/
» Conscience et mécanique quantique : un revers pour la théorie de Penrose »
Bonjour,
je suis trés en retard dans la réflexion,
sagesse et compassion de l’état de Bouddha des « animaux humains bouddhistes » me semblent dire la même chose que vous.
Il faut rajouter que in-fine Sagesse est Compassion.
Sagesse comme factualisation des consciences aux mondes (nos paroles, écris, bâtis scientifiques et autres n’en serait qu’une occurence à nous actualisée en faits « palpables »)
Compassion, comme état indiscible non affectif d’appartenance véritable à l’Etant ( : au Tout ?).
uhmuhm…
Merci de votre attention
Cordialement
J’ai découvert – et c’est curieux – sur le tard, votre article sur la conscience, « Pourquoi nous avons neuf vies comme les chats », qui, je présume, a du déclencher un déluge de commentaires… En voici un de plus !
Permettez-moi de vous « dire » que je l’ai trouvé remarquable à (au moins) deux titres.
– L’élégance coupante (comme le célèbre rasoir ?) du mariage entre l’intuition et la science (même si l’expérience n’est pas à proprement parler reproductible en laboratoire).
– Le sentiment de proximité qu’il procure, encore une fois par son élégance.
Ce qui est intéressant dans votre théorie, c’est qu’elle est très fortement confortée par les probabilités, même si, à la fin de sa vie, la probabilité d’avoir « survécu » est faible !
En effet, quelle est la probabilité qu’une conscience existe précisément ici (pourquoi pas) et maintenant (même sur toute la durée de son existence, soit environ 80 ans), à part d’« être », sur les 13,5 Milliards d’années d’existence de l’Univers ?
Elle est presque nulle. Ce qui reviendrait à dire que, sur l’échelle du temps, la probabilité de votre existence à cet instant précis, et de la mienne, tend vers zéro. Quand on y ajoute la probabilité d’existence de l’Univers, c’est sans commentaire.
Mais non, nous sommes forcément conscients.
Cependant, votre article évoque la conscience de manière binaire : « est » ou « n’est pas ». Quid des consciences altérées, « discrètes » ?
On parle également d’ « inconscience » durant le sommeil, mais qui n’a pas eu fortement conscience d’exister dans son propre rêve et qu’aucune autre réalité n’est possible ?
La conscience est également une part de la résultante de l’expérience accumulée pas le biais de la mémoire ; elle évolue donc dans le « temps ». Sommes-nous à 60 ans la « même conscience d’exister » qu’à 20 ?
Dernière chose : Dans mon « continuum », s’il existe une probabilité même rocambolesque que la science mette au point un système de « sauvegarde » de la conscience et ce, avant ma mort naturelle… alors me voilà fatalement numériquement, mais immortel ! Cela dit, après la lecture de votre article, je n’en serais donc pas étonné.
NB : Je ne sais toujours pas comment, endormi au volant, j’ai réussi à prendre ce virage et éviter la voiture arrivant en face…
Cordialement,
Benoît CARON,
Je viens de découvrir ce fil, qui est apparu à l’occasion du post de B.Caron.Je n’ai ni la capacité, ni l’ambition de réfléchir au statut philosophique ou ontologique de la conscience, tout en sachant le role central qu’elle occupe dans la construction de la connaissance. M’en tenant au versant scientifique, comme ceux qui me connaissent n’en serons pas surpris, je voudrair réagir aux échanges entre Nadine et Marc Peltier sur l’hypothese de l’atome d’hydrogene solitaire, considéré par Nadine comme un univers a part entière. (Hypothese de Nadine).
@Nadine + M.Peltier.
J’utilise habituellement, Nadine votre hypothese pour démontrer l’importance des idées de Macch concernant la construction d’une cosmologie.
1°) Si vous réduisez un univers a cet atome, le formalisme quantique vous oblige à introduire dans le protocole opératoire avant mesure la conscience, car selon les idées de Bohr et Dirac il nous faut convenir que votre univers est constitué à minima d’un proton, d’un électron et de votre propre conscience; ainsi posé l’expérience de pensée est compléte. (A moins que vous n’y posiez un autre et embarassant intervenant, ce qui ferait peut etre plaisir aux exegetes bibliques).
2°) L’opérateur « conscience » force l’observateur à savoir qui « tourne autour de qui », est ce l’électron ou le proton, car vous avez le libre choix de vous positionner sur l’un des deux, le principe de relativité vous y autorise. Or implicitement vous supposez que ce soit l’électron « qui joue le role d’un satellite », dans cette situation cet implicite est inconsistant, car il viole le principe de relativité, auquel je ne veux pas renoncer.
Les bilans d’énergie violent la conservation de l’energie de façon flagrante.
3°) La seule porte de sortie, que personnellement j’entrevoie, se trouve chez Macch et ce faisant je rejoins M.Peltier : Il faut au minimum a votre expérience de pensée un deuxieme atome d’hydrogené pour atribuer un statut au noyau, votre univers prend comme « Barycentre » a la précision de 1/1836 celui des deux noyaux. Vous pouvez alors construire le vecteur d’état du systéme, avec au sens d’Everett votre conscience opératoire dans cet univers. A ce stade l’opérateur conscience est susceptible de réduire les bilans d’énergie dans notre univers de pensée à deux atomes, (opération de la mesure) ou d’envoyer le systéme dans un autre univers, qui constitue une couche superposée au premier mais sans relation causale au sens quantique. Paul Jorion pense qu’il en existe une, si il a raison, ce n’est pas la physique quantique d’Everett qui pourra en donner les règles, mais peut étre d’inespérés progres a integrer la conscience dans la physique.
L’autoréference rend improbable cet attente, non, ?
@Bernard Laget
Tu y crois, toi, à « la conscience », opérateur désincarné qui serait extérieur à ce petit univers d’un proton et d’un électron?
universum : de uni et versus; en latin, tout ce qui tourne autour de nous …
@Nadine
Pardonnez moi d’avoir utilisé le modele de Bohr-sommerfield qui caricature l’orbitale de l’électon, cependant la M.Q. ne nous interdit pas avec Heisenberg de localiser l’électron dont le caractere ponctuel n’est pas interdit au contraire; mais expérimentalement ce sera au prix d’une perte d’information sur son impulsion ou son moment cinétique orbital.
@paul Jorion
Une remarque/ Pour les scientifiques « La Conscience » est une intersubjectivité partagée par les scientifiques, et jusqu’à nouvel ordre elle est réputée ideologiquement ne pas avoir d’effet sur l’expérience ( a voir) autrement dit elle n’intervient que par la modélisation conceptuelle d’une expérience.
@ Nadine, Jorion, Laget et … qui sait ?
Dans l’exemple précédent, la seule possibilité pour que l’équation s’équilibre, c’est tout simplement :
– la conscience n’est pas la pensée
– il existe une cinquième dimension qui est l’éther dans laquelle se meut l’esprit
Cela recoupe d’ailleurs les dernières découvertes sur la théorie des cordes cosmiques, et de l’énergie cachée appelée parfois masse manquante, ou matière noire, dont on sait aujourd’hui qu’elle représente plus de 90 % de l’énergie visible par nos moyens actuels de l’univers.
J’ai vu qu’on a proposé ici d’avancer quelques idées il y a longtemps. J’arrive également un peu tard dans cette discution mais il m’a paru important de participer.
Etant donné l’approche de la plupart des intervenants, et notamment celle de Patrick, ainsi que la manière dont ils s’expriment, je vois qu’ils n’ont pas beaucoup progressé depuis les conceptions Hégéliennes… C’est étonnant. Par ailleurs l’ambition de la réflexion m’apparait un peu trop grande et tomber dans le domaine de l’Hubris, et je vais vous expliquer pourquoi.
Mais avant cela, j’aimerai mettre en évidence une lacune qui ne transparait pas souvent : Avez vous déjà essayé de penser avec le vent, sans les mots, sans les symboles rigides ? Vous aurez alors un petit aperçu des limites de la grande majorité des philosophies. Avec les mots on rend compte de peu de choses en réalité. Et réduire la conscience à la raison (en tant qu’elle assemble les symboles), c’est là une erreur fondamentale (même au sens de la raison kantienne).
Mais pour en revenir à vos conceptions M. Jorion, je les trouve pour une fois marrante car totalement dénuées de rigueur scientifique (même si on y trouve une rigueur logique). Elles m’étonnent encore de la vigueur qu’a la raison à vouloir se valider elle même par tout les moyens à sa porté. Mais il n’y a pas de lien direct entre une métaphore scientifique et la conscience. Le seul lien est celui qui a amené les scientifiques à cette conception, le sens inverse n’est pas justifiable. Il peut parfois arriver qu’un tel lien fantasmé aboutisse à un sentiment agréable, voir à une image qui prend valeur de révélation, mais ce n’est pas pour cela qu’il y a là vérité.
En l’occurance, cette dialectique a pour seul but de vouloir ramenner directement le multiple rationnel au soit, et peu importe le système symbolique, vous y arriverez toujours à grand renfort de mises en relations douteuses et d’extrapolations, mais ça n’apporte pas d’eau au moulin. Cela dit, vous avez le mérite d’avoir réussi à montrer par cette métaphore que notre vie est nécessaire dans ce système très particulier, et donc totalement justifiée.
Si vous souhaitez partir sur l’idée d’univers multiples, il m’apparait plus judicieux de choisir une voie bouddhiste, assez complête et bien plus profonde. Vous y trouverez une conception, cette fois valant en elle-même et pour elle même, à savoir le principe de vacuité. Sa pratique a beaucoup plus de conséquences sensibles qu’un modèle scientifique et peut, de nombreuses manières (indélicâtes et outrageante) s’apparenter à la théorie des univers multiples…
C’est une névrose très contemporaine qui consiste à voir la science comme valant pour conception philosophique et c’est extrêmement dangereux. La science en réalité (car il s’agit bien de réalité et non de vérité), ne traite que de l’univers en tant que faits observés et potentiellement observables, ainsi que des modèles simplifiant et analysant que ces faits inspirent à une communauté. Elle ne prend en compte, par définition, ni la réalité dans son ensemble, ni la vérité en tant que croyance profonde ayant des conséquences sensibles, ni la conscience en tant qu’elle vaut en elle même et pour elle même, ni même le sens que l’on peut donner à la vie (la sienne propre, ou la vie dans une optique plus large).
Il est possible de donner des sens à la vie dans un contexte scientifique et de contraindre le domaine de la croyance à celui de la science, mais c’est alors réduire énormément ses possibilités de vie et de ressentir et par la même les moyens de justifier de sa vie. La science en étant par ailleurs arrivé à pouvoir modéliser de façon parfaitement convenable au sens des faits la conscience (rentrant ainsi dans le cercle très fermé des totalitarismes^^), elle réduit l’homme à la condition de simple pierre (que nombreux seraient d’ailleurs bien aise de tailler).
Donc évitons de lui donner un trop grand crédit dans la manière dont nous choisissons de vivre, et laissons la science à la place qu’elle mérite, c’est à dire à la conception d’outils qui favorisent notre survie. Lui donner plus de crédit est source de mort. Les scientifiques, en tant qu’ils sont agnostiques et laissent Dieu en paix, par allégeance aux mathématiques, ont souvent tendance à croire qu’il n’existe pas et à s’en satisfaire, mais cette autohypnose maladive est réellement inquiétante pour ceux qui ont les pieds sur terre (et non la tête dans la terre).
La science est basée sur des conceptions mathématiques, qui sont des modalités formelles et fractionnaires de notre pensée qui ne valent que dans un système mathématique. Mais l’homme est, bien sûr, c’est évident, bien plus que les mathématiques, quand bien même celles ci arrivent à le modéliser dans l’approximation de ce qu’elles observent.
On vous voit vous envoler les gars, et on a sacrément peur que vous vous pétiez une jambe le jour ou vous redescendrez sur terre.
Ce fil se situe en catégories des philosophies des sciences, ce que vous dites est fondé et je suis sur que bien des scientifiques dignes de ce nom ont suffisamment de recul et de richesses personnelles pour élargir la vision du monde et de l’homme conscient au niveau ou vous vous placez. Vos conseils avisés ne s’adressent pas non plus en ce qui concerne Jorion a un ignorant de la science contemporaine, c’est à dire un philosophe dédaigneux, ni a des « potaches de la science » , des technos besogneux, mais a une communauté « pas trop conne » qui éssaye de réfléchir (ici et ailleurs) sur le monde qui nous entoure et dans lequel nous trempons culturellement et socialement.
Hugh Everett n’est pas un auteur de science fiction, ni que je sache un déssinateur de BD; la théorie contestée et contestable des multivers fait partie du corpus quantique, et l’on peut comprendre que Jorion s’y interesse sans ratisser dans les « térrains fumeux » de la « patascience » (Everett n’en fait pas partie bien entendu).
Qui que vous soyez, philosophe, scientifique, ou un honnete homme cultivé, perméttez moi de vous conseiller de lire le bouquin de Jorion d’une part et d’adopter un ton moins condescendant envers les humanoides ici présents d’autre part. Vous me faites penser à un philosophe coutumier des médias, donneur de leçons, qui vient de tomber dans un drolatique traquenard. J’apprécie l’hospitalité de Jorion et la tenue culturelle de ce Blog, sachez y apporter votre richesse personnelle, ce que nous éssayons tous de faire.
Hentarbleiz,
Vous semblez ne rien connaître de mes travaux. Ce que vous critiquez c’est « autre chose » que ce dont je parle. À quoi bon ?
La cinquième dimension …
Cette dimension appelée autrefois « éther », dans laquelle se meut l’ »esprit », est la dimension qualitative par excellence. Elle est le lieu de la conscience.
Là ou le quantique devient Cantique (un chant sacré, le « om » de l’indouisme) l’énergie n’est présente que sous sa forme harmonique (ce qui explique que l’on ne l’aperçoive que lors des fameux sauts quantiques)
La ou la dualité n’existe pas, car les phénomènes harmoniques sont consonants ou ne sont pas, prenez l’exemple d’un accord de musique, de la palette de peinture d’un peintre qui est reconnaissable quel que soit le contenu du tableau.
et cetéra …
Vous m’en voyez désolé M. Jorion, je vais me renseigner d’avantage. Merci pour votre critique.
@Hentarbleiz
« La science est basée sur des conceptions mathématiques, qui sont des modalités formelles et fractionnaires de notre pensée qui ne valent que dans un système mathématique. Mais l’homme est, bien sûr, c’est évident, bien plus que les mathématiques, quand bien même celles ci arrivent à le modéliser dans l’approximation de ce qu’elles observent. »
Bonjour les portes ouvertes………………!!!!!!
Je vous remercie pour votre critique, elle est bienvenue. Ce que j’ai écrit ici était sans doute plus pour remettre mes propres idées en place car je suis peu coutumier de ce genre de réflexion (car non je ne suis pas philosophe, ni scientifique, ni vraiment cultivé, ni même porté sur les média…).
Cela dit, j’ai souvent tendance à rencontrer de la « patascience » comme vous dites et j’en connais les dangers. J’ai sans doute mal compris de quoi il retournait ici, vous m’en voyez désolé…
Ma faute aura sans doute été de croire que vous étiez à mon niveau, comme beaucoup de débutants font. Or vous semblez être bien au delà, et c’est donc une richesse formidable que je serai heureux de découvrir.
Même si M. Jorion se trompe, ce n’est pas grave. Vraiment.
Que serons-nous quand nous n’oserons plus ?
Lisez donc ce Monsieur : http://www.futura-sciences.com/fr/news/t/physique-1/d/einstein-autrement-une-interview-posthume-en-7-questions_22726/
Cordialement,
Benoît CARON.
Bonjour,
@ Paul Jorion :
Sous réserve de ma bonne compréhension de votre explication (la réserve est importante) : il me semble, aussi séduisante que soit votre explication, qu’elle laisse de côté tout un pan de réalité : celui des comportements (presque dominants actuellement) auto-destructeurs (volontairement je veux dire, c’est-à-dire pas destructeur parce que l’individu ne le perçoit pas comme tel de façon subjective mais comportement pensé et vécu comme la volonté, plus ou moins formalisée, de se détruire).
Ces comportements auto-destructeurs me semblent être devenu un réflexe dominant des sociétés occidentales. Mais peut-être que le comportement auto-destructeur fait parti de l’équilibre de la vie sur terre et ne peut être décrit comme l’apanage d’une société plutôt qu’une autre. Je ne parle que de la société occidentale car c’est évidemment celle à laquelle j’appartiens et que je connais le mieux, je ne me hasarderai pas à parler d’autres sociétés.
Les comportements compulsifs ont un point commun avec les consommations abusives d’alcool et l’usage de stupéfiants. Il me semble que ces comportements relèvent tous d’appels individuels au secours : l’attente, individuelle que la collectivité apporte le sens de la vie que l’individu appartenant à la société occidentale a perdu.
C’est précisément ce phénomène qui m’a fait écrire, à l’occasion d’un autre commentaire, que je pense qu’aucune société structurée n’aurait pu survivre aux catastrophes qu’ont été les 2 dernières guerres européennes mondialisées.
Au plaisir de vous lire bientôt,
@Paul
Je vous suis a 100% d’accord sur la distinction pensée/conscience, personnellement je fais volontiers l’amalgame car la conscience est l’opérateur de la pensée, laquelle reste un concept trop abstrait; « je pense donc je suis » ne vaut pas à mes yeux le : »je suis conscient » de ce que je suis né en 1946 (au hasard, et en plus c’est vrai).
Plus précisémment je dirais que la pensée est produite par la conscience, comme « Les pensées » sont produites par la conscience de Blaise Pascal.
Sur ce théme et quite à me répeter, c’est avec délice que je savoure les pensées de Saint Augustin, et par la méme devient le complice d’une conscience, celle entendue dans le silence d’une lecture.
Cher Bernard,
vous posez :
« la conscience est l’opérateur de la pensée »
si vous me permettez:
la conscience peut appréhender la pensée, mais elles n’ont pas de rapport de dépendance.
Les pensées se situent dans l’espace/temps (4 premières dimensions)
La conscience se situe dans l’éther (la cinquième)
Nous ne pouvons accéder à la cinquième dimension que par une forme de conscience sans pensée, tel que l’inspiration, la contemplation, la méditation, la prière, l’inconscient de lLacan etc …
Il me semble que Schopenhauer a approché cela quand il a dit:
« il est possible de réaliser ses désirs, mais il est impossible de décider de son désir »
@Paul
Le fait d’évoquer cette cinquième dimension qui vaut dans un sens qualitatif m’apparait pertinente en tant que telle, et je partage cette idée qui me permet de m’évader depuis la science. Mais c’est avant tout une métaphore, et vouloir avancer d’autre idées au delà, c’est de la construction religieuse. (je ne suis absolument pas contre, notez bien)
En ce sens, la conception dualiste conscience/pensée est intéressante en tant que c’est votre point de vue, mais, il me semble que vous vous avancez un peu trop (mais libre à chacun) en prétendant qu’on s’aventure dans la cinquième dimension seulement avec une conscience sans pensée… D’ailleurs, qu’est ce que la pensée ? Quelle place et quel sens donnez vous à la volonté ?
Le point sur lequel je vous rejoins est la réponse que vous faites à M. Laget.
M. Laget, Il me semble également possible de concevoir la conscience autrement que comme opérateur de la pensée.
Sur la conscience opérateur de la pensée :
Paul Jorion a propagé un point de vue déroutant, mais, à mon avis, profondément fondé :
Comme le mettent en évidence des expériences de neurologie et de psychologie expérimentale, la « prise de conscience » d’une pensée ou d’un percept intervient toujours après que la pensée ou le percept soit formés. La conscience n’est pas la source de la pensée. Jorion voit la conscience comme un mécanisme de mise en ordre du temps, en aval de l’activité cognitive.
J’ai pensé, donc je suis!
@Marc Peltier
« Tu y crois, toi, à « la conscience », opérateur désincarné qui serait extérieur à ce petit univers d’un proton et d’un électron? »
universum : de uni et versus; en latin, tout ce qui tourne autour de nous …
Non , je n’y crois pas plus qu’au chat de schroedinger, je ne crois pas non plus a un modele d’univers constitué d’un pauvre atome d’hydrogene qui s’enmmerde comme un rat mort.D’abord je tiens beaucoup a réhabiliter sur ce Blog et aussi aupres de paul jORION les idées de Mach, qui non seulement ont guidées le père Einstein, mais sauf érreur de ma part, sont le socle d’une cosmologie du type Friedmann-lemaitre.
Pour revenir au sujet du fil « Conscience-Science » je suis frappé de ce que dans la communauté scientifique qui modélise a l’envie une cosmologie issue d’une singularité de type Big Bang, avec soit dit au passage une génese brillantissime concue par Prigogyne, tout le monde implicitement postule qu’a des trilliards de degrés il n’y avait que des rayonnements et des particules élementaires.
Or, je n’ai pas fait de phylo, mais il me semble que cet implicite oublie que pour discourir de cette genese, inflationniste ou pas il faut une conscience, la notre, celle d’Hawkings, de Reeves. Il y a a mes yeux une faute de raisonnement; En est tu d’accord ?
Personnellement je fais remonter cette attitude des scientifiques a un bouillon de culture religieux, ils discourrent du monde comme si ils se placaient du point de vue de l’éternel !!!!
Evacuons du big bang le grand barbu judeo-chrétien qui orne la Sixtine, que reste t’il des consciences intersubjectivement d’accord pour en parler…………..et cette réflexion me donne à penser, alimente en combustible intellectuel ou métaphysique ma propre conscience.
Ce bouillon de culture religieux est né de l’invention du monothéisme et je tomberai sur ce point entierement d’accord avec notre Hote et ses cheres bifurcations pour comprendre la « bifurcation » en occident qui éclos à la renaissance ou Aristote vient chatouiller les dogmes monothéistes de Rome. Avec Jorion j’apprécie mieux la singularité de la pensée Chinoise, voire Boudhique qui n’a jamais eu a assumer une filiation DIVINE comme l’occident.
Pour faire court, le réel serait t’il une création de la « Conscience » entendue comme « collective » ,,,??
Je le crois profondément, mais et c’est la force de l’occident le réel n’a pas d’autre possibilité que celle d’exister par ceux qui le concoivent. Il n’y a pas d’objet vu sans la vision………
Mais ne faut-il pas distinguer réel et réalité ?
La science appréhende et explique des réalités en fonction des objets qu’elle se donne, à partir des modèles qu’elle invente, mais comme vous le dites en substance, la science ne peut se mettre en position d’extraterritorialité par rapport au monde dont elle n’est jamais qu’une formation. La science discerne de nouvelles réalités au fur et à mesure que s’élaborent de nouveaux modèles et/ou que sont complétés les anciens, puis en exploite ensuite par ses applications pratiques, les potentialités.
La science ne peut identifier une réalité ultime, ses résultats se devant d’être constatés et vérifiés dans le monde empirique, monde empirique dont toute la diversité est appréhendée au travers des catégories de l’espace et du temps et en fonction d’une logique d’identité, celle dont les principes ont été mis en évidence par Aristote, et qui vaut autant pour la science (épistémé) que pour tous les autres domaines explorés par Aristote, comme l’éthique ou le politique.
Par définition la science selon Aristote et dont nous sommes les héritiers n’a pas pour but la connaissance ultime des choses puisque sa méthode d’investigation résulte toujours de médiations lesquelles procèdent du choix de certaines prémisses à l’exclusion d’autres prémisses. C’est ce qui distingue la science de toute approche mystique qui suppose elle une relation directe avec ce qui serait une réalité ultime, avec tout ce que cette visée implique de mises en parenthèse de la multiplicité l’objet par excellence de la science.
Le réel c’est la dimension métaphysique du monde, ce qu’Aristote appelle l’être en tant qu’être, le « il y a », qui est la condition de possibilité de toute science et indique notre co-appartenance à la totalité du monde. Ou, si l’on peut dire, le point aveugle de la science. La science procède nécessairement de ce fondement métaphysique, car l’être en tant qu’être c’est l’identité même, principe d’identité sur lequel est fondé tout l’édifice aristotélicien.
Réel /réalité ?
Si nous sommes tous d’accord pour convenir avec de bons arguments, accéssibles a la raison que:
– La terre soit plate
– Non Finalement elle est plutot ronde
– Elle est au centre du monde, tout tourne autour
– Non, c’est le soleil
– L’univers est infini, non répond Olbers, peut etre lui dit Hubble, mais il s’expanse !!
Etc, Etc……………
Alors La réalité du moment est celle que nous partageons avec les autres;
Pierre-Yves D je vous rejoint sur la distinction que vous faites de cette réalité, de la réalité d’avec le concept d’un hypothétique réel quintessentiel. Je l’ai qualifiée » d’intersubjective » la réalité est celle dont nous convenons, en particulier en sciences dures. D’Espagnat, parlait d’un réel voilé a propos des violations des inégalités de Bell.? Réel voilé, réel artificiel, réel songé, inventé……….qu’en dire ? Mais il y a aussi des réalités, à Hiroshima l’équivalence matiere énergie prend un sens qui lui n’est plus voilé….
Ces quelques notes, me conduisent ( en raccourci) à approuver le « Grand Albert » quant il édicte que seule la théorie nous indique l’endroit ou il faut regarder pour débusquer de nouvelles réalités, et dans ce sens « la conscience » construit « le réel » / J’accepte volontiers pouvoir me tromper de sémantique et donner acte à Paul de ce que j’appelle conscience devrait s’appeller pensée, il suffit d’en convenir.
Une remarque au passage, dans les écrits (en latin bien sur) de Saint Bernard de Clairvaux le terme « DEUS » n’existe pas, n’est jamais utilisé: il est remplacé par celui de » VERBUM », » Au commencement était le Verbe, sentence étonnante…………!
Le démiurge serait t’il le Verbe…………..? La réalité procederait t’elle du « Verbe »?
P.S. J’ai été soufflé lors d’un passage à « La Procure » de voir la taille du rayonnage des écrits de Saint Bernard, et la densité de pensée qu’a produit le fondateur de l’ordre Cistercien, prédicateur de la 2eme croisade, sachant aussi qu’en l’espace de 80 ans l’Europe de Pobblet jusqu’en Angleterre fut couverte d’Abbayes Cisterciennes, ruches de moines batisseurs qui dans des travaux d’interet collectif ( a l’usage de tous, assainissement drainages ,irrigation) diffuserent une foi comme une trainée de poudre incroyable / Nous sommes loin de nos « pauvres » financiers internationaux qui eux ont commerce avec le Diable, pas avec les hommes.
@Bernard,
En écho à ce billet et à vos discussions passionnantes, je suggère la lecture d’un psychologue, Mr Julian Jaynes, dont la thèse a été publiée en français au éditions PUF » La Naissance de la Conscience dans L’Effondrement de L’Esprit » (en ligne sur scribd.com)
En voici une fiche de lecture :
http://laguerretotale.blogspot.com/2007/07/introduction-la-lecture-de-julian.html
L’intérêt que j’ai trouvé dans cette thèse est le défrichage du mot « conscience » avec les outils de la psychologie, malgré le titre rebutant de ce travail, je l’avais trouvé accessible. La psychologie propose des concepts parfois radicaux pour délimiter les champs d’investigations autour des mots (est-ce qu’un mot qui véhicule un concept est propre ou impropre pour définir un état psychologique ?), j’ai pensé que cela pouvait être un complément à cette réflexion.
La démarche scientifique consiste, entre autre, à s’en tenir aux faits, aux résultats redondants d’une expérience au modus operandi rigoureux (un peu de latin, ça fait toujours savant). L’hypothèse de base est alors confirmée ou infirmée et parfois, on découvre un resultat surprenant qui dépassera l’expérience initiale par son retentissement. Par la suite, il faut communiquer les résultats de cette expérience, et c’est souvent là que ça se gâte.
C’est ma vision d’une expérience scientifique, rappelons le.
Alors, si l’on s’en tient aux faits j’avance deux postulats :
1) Homo eco… non, pas lui, sapiens, nous sommes des éléments des l’Univers. Corps, conscience : on est dedans. Nous sommes le resultat physique d’un brassage complexe des éléments de cet univers. Acides aminés (disque proto-solaire), fer (supernovaes), etc.
2) Nous sommes conscients. Nous sommes même conscients d’être conscients.
Vous me voyez venir, vous sentez la lourde transitivité poindre son museau :
A travers nous, c’est l’Univers qui est conscient, qui se regarde. Le déterministe dira que l’Univers l’a fait exprès : Je n’ai pas la prétention de confirmer ça, n’étant qu’une infinitésimale partie de cette « conscience ».
Rapportons enfin le niveau de connaissance actuel concernant l’Univers à celui de la « conscience » et l’on s’aperçoit qu’il reste largement de place pour la théorie de Paul Jorion.
Cordialement,
Benoît Caron.
Benoit, je vous rejoint sur le concept d’un univers ou il n’y est que des acteurs et plus de spectateurs, c’est meme a mes yeux la seule alternative digne de ce nom pour tuer les idéologues et les idéologoes dévastatrices. Paraphasons Freud……… »Il faut tuer notre pére » ou le laisser au ciel !
« La Conscience est une composante de la réalité, peut etre méme du réel » !!!!suivant le sens que l’on donne au mots.
Je crois que c’est Botul qui l’a écrit…..Hi HI
« D’où une conception qui débouche sur une réconciliation de l’idéalisme et du réalisme. Le monde existe effectivement, mais celui que j’observe est par nécessité « mon monde » : celui dont les contraintes justifient mon émergence à l’existence. »: soit, mais était-il vraiment besoin d’en passer par l’hypothèse des mondes multiples pour en arriver à cette conclusion ? Cette hypothèse, « une bifurcation de mondes entre deux de leurs états possibles« , s’appuie sur la notion d’état qui est mal définie, de sorte qu’on peut imaginer que ces « univers multiples » sont un seul et même univers en différents états. Que cette hypothèse conduise à « ce sentiment de la beauté de la cascade déductive » est imputable au fait qu’elle offre un cadre englobant le réel qu’on veut expliquer et la théorie ou conscience qui l’explique.
Tiens, c’est amusant, le post que je viens de poser m’a donné une idée. Il n’y a pas besoin de la notion de « mondes multiples » car : 1) il existe des représentations multiples du monde; 2) ces représentations sont des réalités; 3) elles peuvent être contradictoires entre elles. Par exemple, X sait que Y est mort mais Z ne le sait pas. Donc, le réel peut être réellement et logiquement en contradiction avec lui-même. C’est donc la logique du tiers exclu qui est insuffisante pour rendre compte de la réalité.
Il manque une donnée dans l’exemple du chat de Schrödinger qui fait que cette expérience ne traduit pas la réalité physique des particules. En effet, on peut produire des particules à foison et vérifier, par la statistique, qu’elles ont les propriétés que leur attribue la physique quantique. Pour que cette expérience traduise le fonctionnement des particules, il faut donc imaginer des tas de boîtes avec chacune un chat dedans, et des tas d’expérimentateurs humains qui en ouvriraient chacun une. On verrait alors que les chats sont tantôt morts, tantôt vivants, exactement comme les photons diffractés sur un écran sont tantôt en phase, tantôt en opposition de phase. L’idée qu’à l’ouverture de la boîte le chat ne peut être que mort ou vivant, mais pas les deux à la fois, devient fausse. A condition de « statistifier » l’expérience, le chat apparaît aussi bien mort que vivant.
Ce qui complique singulièrement notre compréhension du monde physique, c’est que nous devons utiliser à cette fin une mémoire et des informations : ce sont des entités réelles qui ne sont pas soumises aux lois de la physique, bien que leur existence en dépendent. Quoiqu’il en soit, ça change tout de considérer mémoire et information comme des réalités, et non comme des adjuvants secondaires qu’il ne serait pas utile d’inclure dans les raisonnements. Il devient en effet très facile de montrer que le principe du tiers exclu est insuffisant, sans même en appeler à la statistique.
Considérons simplement une mémoire très commune, celle du registre d’état civil. D’abord on y note que Untel est né tel jour à tel endroit, donc qu’il est vivant. Puis, quelques années plus tard, (parfois quelques heures après), le même registre d’état civil va affirmer le contraire parce qu’Untel est décédé. Dans cette mémoire, Untel est donc à la fois vivant et mort. Pour lever la contradiction, il faut entrer dans le détail de cette mémoire, consulter deux pages, donc deux lieux différents : sur l’une il est vivant, sur l’autre il est mort. On en revient ainsi au fait que, en un point, et un seul, de l’espace de cette mémoire, Untel est soit vivant, soit mort, mais pas les deux à la fois. Si donc vous lisez l’un de ces deux points, vous savez, sans lire le second, qu’il dira le contraire. Ne retrouve-t-on pas là le soit disant paradoxe des particules jumelles ?
Dans l’expérience des particules jumelles, on soumet l’une à un certain état, et l’on constate que l’autre se retrouve automatiquement dans un état corrélé à la première, alors même qu’aucune influence ne peut aller de l’une à l’autre. Le paradoxe vient du fait que, quand on dit qu’elles ne peuvent pas se transmettre une influence ou information, on les considère individuellement, ce que confirment les données de l’expérience: l’une est séparée de l’autre par une distance telle que, même à la vitesse de la lumière, elles ne peuvent pas s’influencer. Puis, quand on dit qu’elles sont corrélées, on les considère collectivement, ce que confirment les résultats de l’expérience: il faut mémoriser des mesures séparées et les comparer pour pouvoir affirmer qu’elles le sont.
Ces deux points de vue, également légitimes, ne devraient pas déboucher sur un paradoxe. C’est donc dans la dualité singulier/collectif qu’il faut chercher une solution, pas dans ce fatras de décohérence, réduction d’onde et compagnie, qui sont autant de concepts inventés à chaud, sans référence aucune à un cadre conceptuel plus vaste. La question de base est la suivante: un « état individuel », vivant ou mort par exemple, pourrait-il être « observable » par un « observateur » si celui-ci ne disposait pas d’une mémoire pour lui dire ce que l’état « observé » n’est pas ? Autrement dit, peut-on « observer » un « état » sans opérer un tri entre tous les états a priori possibles de façon à n’en retenir qu’un seul ? Ainsi, à ces « bifurcations du réel », qui peuvent sembler indépendantes de l’observateur, correspondraient autant de choix de l’observateur, donc autant de nouvelles bifurcations dans son système de représentation.