L’actualité de la crise : Le vilain mot commençant par « N », par François Leclerc

Billet invité.

LE VILAIN MOT COMMENCANT PAR « N »

Les meilleurs auteurs, puisque c’est une manière d’asseoir définitivement son propos, convergent dans leur analyse et, depuis peu, vers des solutions radicales à la crise financière. Des solutions, qui osent écrire en toutes lettes le vilain mot qui commence par un N.

Voici ces auteurs.

Paul Krugman, Prix (dit) Nobel d’économie, poursuit dans le New York Times du 18 janvier son assimilation des banques à des zombies, très pédagogiquement, pour ensuite estimer que l’éventuelle création d’une « banque de consolidation » (une bad bank plus honorablement dénommée), dont on parle beaucoup, impliquerait aussi, pour ne pas faire le travail à moitié, une utilisation de ce qu’il appelle ironiquement le mot en N. N pour nationalisation.

Nouriel Roubini, star montante de l’expertise de la crise, dont on sait qu’il ne mâche ni ses mots ni ses analyses, explique à l’occasion d’une conférence à Dubai tenue le 20 janvier, chiffres à l’appui, que le système bancaire américain est dans son ensemble virtuellement en faillite. En d’autre terme en banqueroute non déclarée.

Helmut Schmidt, ancien ministre des finances et chancelier allemand, vient de dresser dans l’édition du 15 janvier du Zeit le catalogue le plus contraignant et radical que je n’ai jamais lu des mesures qui devraient être prises pour que « plus jamais cela » ne soit pas une fois de plus proclamé en vain.

Willem Buiter, dans le Financial Times du 16 janvier, préconisait une nationalisation provisoire mais totale des banques rendant ensuite plus facile la création d’une bad bank pour y parquer leurs actif pourris.

Voilà ce qu’on appelle un tir groupé.

La collection d’experts qui précède est disparate, j’en conviens, mais les membres de cette dangereuse cellule invisible ont en commun d’être tous de dangereux révolutionnaires bien connus des services compétents. Des « services » comme on disait en URSS – l’appellation demeure en Russie – car on n’osait même pas les désigner par leur nom.

Tout cela n’a que trop duré, vive les solutions radicales ! Il faut en finir une fois pour toute ! Mais il faudrait tout de même que nos mêmes auteurs se penchent vite sur le détricotage des mesures qu’ils préconisent. Comment sans cela nous dépêtrerons-nous avec un système du crédit nationalisé ? Avec un monde financier atrophié, et donc impotent si l’on croît nos édiles ? Avec une poubelle de l’histoire remplie d’actifs pourris, que l’on ne pourra pas pour une fois décharger dans le Tiers Monde ?

Pour poser la question de fond, pouvons-nous vraiment reporter sur l’Etat la confiance qui fait aujourd’hui tant défaut entre financiers ? Cela serait bien la peine d’en arriver là, après avoir salué la chute du Mur et la ruée des camarades de l’Est dans notre monde de libre échange dont ils avaient tant rêvé.

« L’Etat c’est nous » a succédé à « l’Etat c’est moi ». Mais comment pourrait bien fonctionner cette appropriation ? Tout le problème est là.

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52 réponses à “L’actualité de la crise : Le vilain mot commençant par « N », par François Leclerc”

  1. Avatar de Omar Yagoubi
    Omar Yagoubi

    Le très beau mot commençant par S, comme SERVICE PUBLIQUE, fruit de la lutte de nos aînés après- guerre! Moraliser ce système??? Quelle morale, la votre, la mienne? Encore un mirage que l’on veut nous faire avaler cette « moralisation ». Non, je ne vois qu’une chose à faire en attendant mieux: Définir le périmètre des besoins vitaux d’un peuple, Energie, Nourriture et Logement, Education, Santé Publique, exclusivement gérés par l’Etat, c’est à dire nous. Le reste, et c’est beaucoup, pour le privé et son cortège de profits et de satisfactions à la petite semaine.
    C’est simple, et en plus j’aurais plaisir à payer mes impôts. L’hérédité on y croit jusqu’au moment où nos enfants font des conneries, la concurrence c’est pareil.

  2. Avatar de Stilgar
    Stilgar

    @François Leclerc

    Si on nationalise la monnaie et la création monétaire, justement, je ne pense pas qu’il soit le moins du monde utile de nationaliser les banques (c-à-d d’y mettre de la monnaie « collective », celle des impôts ou des dettes, pour que les banquiers refassent bientôt les mêmes « c….ies ») … laissons les banques vivre avec leurs actionnaires privés: elles ne pourront plus créer de monnaie donc leurs éventuelles pertes se retrouveront en gains quelque part.
    Mais nationaliser la monnaie, c’est bien nationaliser le crédit, puisque la monnaie C’EST du crédit.

  3. Avatar de Loïc Abadie

    @François Leclerc
    « Tous les commentaires convergent vers le fait que l’on va bien vers des nationalisations étendues, car il n’y a pas autre chose à faire.  »

    « car il n’y a pas autre chose à faire. »

    Certainement pas pour moi, qui suis totalement opposé à cette voie suicidaire et sans issue. Les états n’en ont de toutes façons pas les moyens. Mais malheureusement il y a effectivement de grandes chances qu’ils essaient pendant quelques temps avant de devoir jeter l’éponge ou de faire faillite.

    « Loïc Abadie évoque une possible faillite des Etats, il est sans doute préférable de s’en tenir à ce que certains puissent faire défaut et soient secourus (FMI, etc…) »

    La question n’est pas de savoir ce qui est « préférable », mais de savoir ce qui va se passer dans le monde réel. Croire que le FMI ou tout autre gadget international puisse être d’un quelconque secours dans la situation actuelle relève à mon avis d’un optimisme disons…étonnant.
    Evidemment tout le monde aimerait que tout redevienne comme avant, mais ça n’arrivera pas !
    Le FMI pèse 338 milliards de $. A peine de quoi couvrir 1 mois de fuite en avant dans la dette aux USA, ou 1 mois 1/2 sur l’eurozone. Inutile de dire qu’en cas de problème de solvabilité de l’état US (ou même d’un état moyen comme l’Angleterre ou la France), le FMI servira juste à pondre de jolis discours (avant de disparaître à son tour, les états qui le financaient n’ayant plus les moyens d’assurer son existence).

    « Il me paraît plus probable, à l’éventualité d’une réduction drastique des revenus des ménages résultant de la reconstitution d’une épargne (forcée ?), que nous reviendrons à la bonne vieille «économie de la dette ». Avec d’un côté le risque d’une récession provenant d’une diminution de la consommation (70% de la croissance américaine), de l’autre les nouveaux délices de la fuite en avant. C’est comme si le choix était déjà fait. A. le souligne à juste titre, me semble-t-il. »

    Le choix est déjà fait, je suis malheureusement d’accord avec vous sur ce point…les dirigeants essaieront d’y revenir (à l’économie de dette), et ils s’y emploient d’ailleurs déjà avec beaucoup d’énergie depuis plus d’un an. Seul petit problème : ils n’y arrivent pas, malgré les « taux zéro », les « plans bushpaulsonobamasarkozy », les « quantitative easing », les « nationalisations de sauvetage », les subventions diverses et autres inventions keynésiennes qui défilent depuis la fin 2007. Et les échecs continueront de s’enchaîner les uns après les autres.
    Parce qu’il n’y a plus de volonté et de capacité des ménages à augmenter leur endettement, et que la psychologie des foules s’est violemment retournée, pour longtemps…Et en matière de psychologie des foules, plus le balancier a été poussé vers un extrême (euphorie et perte de conscience totale), plus il aura de force pour repartir vers l’extrême opposé (peur, refus de consommation, comportements de protection basés sur l’épargne).
    Pour moi, l’économie droguée à la dette est bien en train de mourir, et ce pour un bon bout de temps, et les états ne parviendront pas à enrayer ce 4ème hiver de Kondratieff.
    Donnons nous donc rendez-vous dans deux ans pour faire un petit « bilan intermédiaire » sur l’efficacité de ces plans.

  4. Avatar de Stilgar
    Stilgar

    A. dit 23 janvier 2009 à 12:43
    @Stilgar
    Et sur quels critères les banques centrales décideront-elles de la quantité de monnaie à mettre en circulation ?

    … et sur quels critères les banques commerciales décident t’elles actuellement de la monnaie à mettre en circulation? La réponse tiens en un mot  » la demande » (ménages, entreprises, Etat..;
    Si toute la monnaie doit être nationalisée, la demande restera la même . Néanmoins la banque Centrale disposera de 2 leviers pour réguler l’économie : la quantité de monnaie et le véritable taux d’intérêt (qu’elle pourrait d’ailleurs adapter à l’utilisation des prêts ), alors qu’actuellement elle ne dispose d’aucun des deux, puisque ce sont les banques commerciales qui sont à l’origine de 93% de la monnaie, et que le taux décidé par les banques centrales – les taux de refinancement – n’ont un effet que sur 17 à 20% du total de la monnaie, la monnaie centrale dont ont besoin les banques commerciales .

  5. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    @ Stiglar et Loïc Abadie

    Excusez-moi d’avoir à tort enregistré du mauvais côté votre avis sur la nationalisation des banques. Vous avez, à juste raison, rétabli les choses.

    Qui peut le plus, peut le moins, Stiglar. La nationalisation de la monnaie supprime de facto la nécessité d’effectuer celle du crédit, et celle des banques. Je vous en donne volontiers acte et vais potasser Maurice Allais.

    Quant aux résultats des plans actuels, je ne peux que constater avec vous, Loïc Abadie, je l’ai même écris pour ceux qui sont en cours, ils ne sont pas garantis. Mais le binome bad bank plus nationalisation provisoire est quand même un remède de cheval. La question est de savoir s’il va ou non être mis en pratique.

    Mais, à ma connaissance, le très respectable Kondratieff, auquel vous faîtes appel, était étranger au maniement du concept de « psychologie des foules ».

  6. Avatar de alexis
    alexis

    @ François 78 : bonnes remarques !
    Dans mon coin, je pense aussi que la crise est peut-être et avant tout même « énergétique » . Nous n’avons pas atteint officiellement le Peak Oil, mais à regarder de près les courbes des derniers tableaux de l’AIE (2008), la production de brut conventionnel des champs pétroliers classiques à « piqué » en 2007, le différentiel est produit à la marge par du non conventionnel (plus cher et de moins bonne qualité) et par du conventionnel « à découvrir »… belle formule d’autant que ni la qualité, ni les quantités et encore moins les coûts ne sont assurés.
    Télécharger sur le site de l’AIE le rapport à destination de la presse, et se pencher sur la page 6 particulièrement :
    http://www.iea.org/Textbase/speech/2008/Birol_WEO2008_PressConf.pdf
    La courbe bleue foncée est très parlante. On peut se poser des questions sur le tracé des courbes au delà de 2008…

    Dans de telles conditions énergétiques on peut se poser des questions sur la viabilité d’une « relance » et d’une « croissance » à venir.

  7. Avatar de Di Girolamo
    Di Girolamo

    Suite au commentaire de François 78
    et de la réponse de A. qui dit :

    23 janvier 2009 à 10:23
    @François 78
    Je partage votre avis et il est dommage que ce blog ne se concentre que sur l’aspect économique.

    Et au commentaire ci dessus de alexis …….

    Peut on (sur ce blog comme ailleurs) continuer à « raisonner sectoriel » ? :

    ……« Les coûts d’un plan d’économie et de remplacement total de l’énergie seraient astronomiques, et son rythme improbable. Pourtant, les gouvernements des nations développées ont déjà mis en place un plan similaire, mais ayant un autre objectif. Une enquête réalisée par la chaîne de Télévision NBC a estimé que le gouvernement fédéral des Etats-Unis avait déjà dépensé 4 200 milliards de dollars pour répondre à la crise financière, soit plus que les dépenses totales pour la Seconde Guerre Mondiale en tenant compte de l’inflation (12). Est-ce que nous voulons rester dans l’histoire comme la génération qui sauva les banques mais laissa la biosphère s’effondrer ? »….

    http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2376

    Sommes nous bien tous ici sur la même longueur d’onde concernant cette « crise » , le diagnostic et par quel bout prendre tout ça ?

  8. Avatar de bob
    bob

    Penser que les capitaux accumulés depuis 40 ans à travers les fonds de pensions ainsi que l’investissement des Etats modernes et des enterprises privés dans des infrastructures et dans l’intelligence humaine ne soient pas suffisants pour traverser cette crise est vraiment assez infantilisant.

    Certains évoquent une situation apocalyptique dans les pays les plus développés, mais le capitalisme a toujours évolué cycliquement sur des périodes de destruction de capital.
    C’est en ce moment que la machine US réajuste logiquement les capitaux sur de l’investissement productif.
    Quels progrès technologiques depuis 40 ans?
    – informatique et TIC
    – construction
    – santé
    – biotech
    – agro-alimentaire (rendement à l’hectare)
    Comment imaginer que tous ceci soit un mirage?

    Même si il n’y avait plus un dollars en circulation (ce qui est bien évidemment faux) la sommes de connaissance et de progrès humains (sciences, santé, immeubles…) accumulés depuis tant d’années réduit à zéro le risque de faillite des Etats développés.

    C’est ça la force du capitalisme: la destruction cyclique du capital, pour mieux rebondir.

    C’est sur que les rendements à 15% c’est terminé, c’est du 3% maintenant comme la croissance du PIB (et des salaires) et ce pour de nombreuses années.

    Tu verras Loic tous va bien se passer (sauf pour quelque Madoff et Kerviel)

  9. Avatar de Loïc Abadie

    Le problème vient pour moi d’une incompréhension de la nature de la crise en cours (que j’ai évoquée à de nombreuses reprises dans mon blog).
    – Ce n’est pas une crise des « subprimes ».
    – Ce n’est pas une crise des banques.
    – Ce n’est pas une crise de la dérèglementation.
    – Ce n’est pas une crise de la « spéculation ».
    Le problème est bien plus global, c’est une crise du crédit au sens large, plus précisément la plus grande crise du crédit au sens large de l’histoire.

    Les dirigeants politiques adorent entendre des conseillers leur produire des discours sur le thème des banques, de la dérèglementation et de la spéculation : Ces discours renvoient en effet à des solutions toutes simples.

    – Le politique de gauche se dira « je vais faire payer le méchant spéculateur, nationaliser les méchants banquiers, faire quelques plans de relance et l’économie repartira comme avant ».

    – Le politique de droite, malheureusement converti au keynésianisme depuis plusieurs décennies, se dira « je vais revoir la réglementation des marchés, faire une bad bank pour aider nos gentils banquiers à faire des crédits comme avant, faire quelques plans de relance, et l’économie repartira comme avant. »

    Dans le cas d’une crise du crédit au sens large, la réalité est beaucoup moins drôle à entendre (c’est pour cela que presque personne ne veut l’entendre). Comment faire pour maintenir en vie un système où les agents augmentaient leur endettement de 10% et plus chaque année pendant que leurs revenus n’augmentaient que de 2 ou 3%, une fois que ces agents ont touché les limites de leurs possibilités et ne sont plus capables (et n’ont plus envie par manque de confiance) de poursuivre le schéma de Ponzi précédent, qui s’était perpétué pendant 10, 20 ans ou plus selon les pays concernés ?
    La réponse n’est plus du tout évidente. Exécuter un bouc émissaire (le « spéculateur », le « banquier », la « dérèglementation ») ne sert plus à grand chose et ne permet plus de revenir à l’état précédent…imprimer des morceaux de papier où il est écrit « 1$ » ou « 10$ » n’augmente pas non plus la richesse d’un pays.
    Il faut accepter de remettre en cause le modèle précédent, de se limiter à accompagner la crise pour qu’elle joue son rôle indispensable de « redistribution des cartes », d’évolution de la nature des emplois, de la nature des biens produits et des services en réponse à une demande qui a changé, d’évolution naturelle des structures sociales, en aidant simplement les plus démunis (et pas ceux qui ont fait les bêtises ou les entreprises qui sont incapables de s’adapter à la nouvelle donne) à tenir le choc pendant la tempête.
    Parce que cette tempête aura lieu de toutes façons vu la fuite en avant pratiquée au cours des dernières décennies.

    Et ensuite, ne pas oublier, après la crise, de mettre en place un système monétaire ne permettant plus la fuite en avant dans le crédit. Ce qui suppose la remise en cause du système de réserve fractionnaire, au moins dans sa forme actuelle.

  10. Avatar de Stilgar
    Stilgar

    Pas souvent d’accord avec Loïc Abadie, cette fois, je le suis sur son analyse de la maladie…

    Donc (et là nos avis divergent certainement sur les remèdes), plus de réserve fractionnaire, les banques n’ont plus le droit de créer de la monnaie (de crédit) et ne peuvent donc (comme les actuels établissements financiers) que jouer un rôle « d’intermédiation » en trouvant les capitaux soit d’épargne préalable, soit de financement auprès d’une banque centrale seule émettrice de monnaie.

  11. Avatar de Philémon
    Philémon

    Messieurs les experts , vous aurez beau faire toutes les théories que vous voudrez , tant que les paradis fiscaux et la spéculation sur les marchés secondaires pour les opérations à terme ne seront pas complètement et définitivement supprimés , la volonté de s’en sortir et de guérir sera en réalité absente . Comme si rien ne s’était passé , les mêmes prennent les mêmes et recommencent à adorer le veau d’or en lui offrant simplement davantage de plus petits et de plus faibles en sacrifice .

  12. Avatar de alexis
    alexis

    @ Di Girolamo : je ne crois pas en effet que nous soyons tous sur la même longueur d’onde… ll y a des spécialistes qui donnent des réponses de spécialistes et on ne peut les en blâmer et les dilettantes de mon espèce, spécialistes de rien du tout, curieux, paranoïaques, catastrophistes, voire carrément eschatologistes convaincus, dubitatifs dans tous les cas de figure quant aux explications données de ci de là et surtout avides de comprendre.

    Les clampins de mon acabit glanent des infos sur de nombreux sites, en français et en anglais et essayent, si ce n’est de tirer des conclusion, du moins de questionner ceux qui, a priori, sont sensés en savoir plus qu’eux.

    Au vu de mes lectures et vagabondages virtuels, j’ai la prétention de supposer les deux conclusions suivantes :
    1- LA crise est une crise énergétique et de ressources « naturelles », parce que : notre fameuse croissance se heurte à un mur physique, l’impossibilité d’une croissance d’extraction/production/consommation/gaspillage infinie, dans un monde bêtement fini. Certes il en reste, mais la croissance n’est plus possible et à terme, il ne restera plus rien !
    2- Au risque d’être cynique, notre système libéral (ou ultra libéral, kapitaliste ou you name it) par la crise et la chute connexe de la consommation de nos ressources non renouvelables, a) prolonge pour quelques temps nos réserves et b) devrait peut-être permettre de faire baisser drastiquement nos émissions de GES, évitant de justesse les catastrophes climatiques à venir.

    J’ai même l’outrecuidance sur ce blog d’aller plus loin.
    Il serait donc judicieux de taxer fortement (et de manière croissante, 20% par an par ex) ces ressources naturelles (fossiles et minérales) qui, croissance ou pas viendront à manquer demain ou après demain nolens volens. Redistribuer la dite taxe à la manière de James Hansen (ie à part égale pour tous les citoyens, cf sa lettre aux époux Obama) ou, via l’Etat dans la recherche, les économies… Et par ailleurs… Laisser faire, laisser couler l’automobile, l’aviation, les constructeurs d’autoroutes et d’aéroports, les banques, les assureurs et j’en passe. Finies les aides, les subventions, les baisses d’impôts et tuttiquanti… on appelle ça le libéralisme je crois.
    On pourrait même pousser le vice jusqu’à cesser de taxer le travail et taxer fortement encore le capital et autres spéculations. Et c’est tout.
    Quand un mur est pourri on ne s’amuse pas à consolider, à bricoler dans les coins, à refaire les enduits et les peintures… On casse tout et on reconstruit. Nous en sommes là.

    La solution est simplissime, libérale en bien des points et interventionniste à minima : la taxe.

  13. Avatar de bob
    bob

    Ca n’est pas parce que les capitaux ont utilisés les effets levier via l’endettement qu’il n’y a plus de capitaux.
    Ceux qui l’ont fait vont perdre plus que ceux qui ne l’ont pas fait, c’est tout.
    Mais il s’agit toujours d’une destruction cyclique du capital importante mais habituelle.
    Dans ces condition il parait judicieux de réglementer un peu plus ce genre d’activité.
    La régulation des Etats s’impose donc logiquement y compris par l’émission des Emprunt d’Etat qui permet aux Nations de reprendre la main sur les investissements.
    Car les emprunts d’Etat ne sont rien d’autre qu’une captation de capitaux par les Nations qui souhaitent les placer à meilleur compte.
    Si certains veulent continuer à investir sur des bulles spéculatives, c’est leur problème, mais actuellement j’imagine que c’est discrètement risqué pour encore un certain temps. Car on ne sait jamais jusqu’où les Nations (et les politiciens) souhaiteront reprendre la main dans le jeu économique.
    Mais vu le discours d’Obama, de Sarkozy, de Merkel et de Strauss Kahn, si j’étais spéculateur professionnel compulsif, je naviguerais très prudemment.

    La démocratie serait elle donc plus puissante qu’elle ne le pensait?
    pt’être ben que oui, pt’être ben que non.

  14. Avatar de Eugène
    Eugène

    @ A.

    Ne t’inquiètes pas, il n’y a que des théories vérifiables et/ou falsifiables. La ‘V’érité n’est que la VALEUR (1, pour rappel) accordée à une proposition (2) … mythique ? scientifique ? poétique ? et alors?
    1- la valeur, mieux la fonction de valorisation n’est qu’une fonction naturelle, il n’y a donc pas de quoi s’exciter la dessus;
    2 – qu’est-ce qu’on peut bien faire d’une proposition isolée d’une théorie? Rien, autant jouer du piano ou faire du vélo.
    3 – les théories sont toutes un jour ou l’autre revisitées et remplacées par d’autres encore plus difficilement falsifiables.

    Allez, va faire un petit tour sur la référence que j’ai donnée au-dessus, et je te garantis que tu vas t’autoguérir sans médicament, ni … sorcier, de cette crise de foi(e) passagère.

  15. Avatar de A.
    A.

    Loïc s’obstine, en dépit de son analyse pertinente lors du message précédent, à ne pas admettre que, ce qu’il appelle la fuite en avant des Etats (les milliards injectés), est la seule façon de ne pas sombrer dans la déflation à la sauce japonaise.

  16. Avatar de Moi
    Moi

    @A. : je crois que la déflation ne le gênerait pas.

  17. Avatar de Loïc Abadie

    @Stilgar : Nous sommes globalement aussi d’accord sur les remèdes, en tout cas au moins sur ce point : banquiers jouant un simple rôle d’intermédiation dans un système à réserve pleine, basé sur un étalon qui interdise à l’état et aux autres agents économiques toute nouvelle possibilité de fuite en avant (la banque centrale n’est plus nécessaire dans ce contexte, elles sont d’ailleurs plus des éléments qui dérèglent le système qu’autre chose). Simplement, comme je suis prudent, je pense qu’il faudrait que le passage à ce système soit progressif.

    @A : la déflation est pour moi un mal nécessaire (la destruction des dettes en excès se faisant en partie par des séries de faillites qui réorganisent le système et en partie par les remboursements des acteurs restant solvables). Mais l’alternative qui serait la conséquence de la poursuite des politique keynésiennes actuelles (cessation de paiement des états / hyperinflation) reviendrait au final au même, en plus violent (les états n’ayant alors même plus, ou quasiment plus les moyens d’accompagner la crise , les désordres sociaux encore plus importants, avec une perte de confiance des ménages au final encore plus forte).

    Sur le Japon, ils ont déjà tenté tout ce que font les US et l’Europe en ce moment : taux 0, relances multiples, quantitative easing, sauvetages des banques et forte hausse de l’endettement public. Sans grand résultat.
    Il n’y a pas eu (pour le moment) de catastrophe là-bas parce que leur crise du crédit était moins étendue, et a eu lieu à une époque ou le reste du monde était en forte croissance, ce qui a permis au Japon de limiter la casse (il a pu compter sur ses exportations pour compenser un marché intérieur affaibli).
    aujourd’hui il n’y aura plus cette bouée de secours, quasiment tous les pays développés lâchent simultanément et de façon massive, avec un effondrement des exportations comme conséquence : -43% à Taiwan, -30% attendus en Corée en Janvier (exportations vers la Chine à -35%), -27% pour le Japon. Ce sont des mouvements vraiment énormes, qui excluent à mon avis toute possibilité de crise « douce » à la japonaise.

  18. Avatar de Stilgar
    Stilgar

    @Loïc Abadie

    Pas d’accord avec votre analyse sur le Japon… 4% de chômage pour un pays vieillissant, une PNB/hab de 36000 $, 2° PNB mondial, ce n’est pas si mal que ça…

    Mais je préfère débattre sur nos « remèdes » (alors que nous sommes très opposés au niveau de la position politique): A l’idée d’une réserve pleine je préfère celle d’une « collectivisation/nationalisation  » de la monnaie … et n’est ce pas en fait la même chose.

    Maintenant vous proposez deux choses : un étalon, la suppression de la BC (« E » dans notre cas). J’aimerais que vous expliquiez votre idée plus avant avant afin d’éviter de débattre sans mieux connaitre votre position.
    Quel étalon ?
    Qui décide des taux d’intérêts, mais surtout qui décide des variations possibles de la masse monétaire, puisque dans votre suggestion je comprends que la masse monétaire reste fixe et que seule l’augmentation de la vitesse de rotation de la monnaie permet le financement d’une augmentation de la quantité de crédits…
    Et puis, « quid » du paiement des intérêts (puisque, à ce jour, l’augmentation de la masse des crédits et/ou de la base monétaire est le seul moyen de satisfaire globalement cet « impôt » privé qui revient aux banques sur l’augmentation de la quantité de monnaie scripturale)?

  19. Avatar de Di Girolamo
    Di Girolamo

    @ Alexis

    Le problème n’est pas : des spécialistes d’un côté et des non spécialistes de l’autre ( mes commentaires montrent bien que je me situe là) et une espèce de culpabilité entre des « qui savent » et des andouilles qui feraient mieux de rester à la maison.

    Ce problème est à regarder en fonction :

    – de la définition qu’on donne au problème (disons « la crise »)
    – de la méthodologie qu’on choisit pour le traiter (dans un premier temps mieux comprendre et mettre nos pendules à l’heure)

    Là je dirai qu’il y a un choix à faire concernant ce blog , ce qui renvoit à Paul Jorion et aux autres participants ; pour ma part je suis tout à fait prêt « à débarasser le plancher » si le choix est de cantonner strictement ce blog à un débat de spécialistes sur les secteurs économique et financier en cherchant des solutions techniques. Apparement ce n’est pas pour l’instant le cas , mais il existe un décalage profond entre les commentateurs.

    Mon point de vue , celui que je défends et que je soumets donc à débat est que « la crise » n’est pas sectorielle mais systémique (et pas systémique/économique)et que pour la traiter il nous faut « inventer  » des outils et méthodes adaptées; méthodes et outils globaux ; ce choix demandent aux spécialistes un énorme effort d’humilité puisqu’ils doivent remettre en question ce qu’ils ont appris et l’utiliser autrement dans un nouveau cadre.

    Le plus probable , c’est que cette question pourtant esentielle ne soit pas abordée frontalement et qu’on laisse aller au fil de l’eau…..Comme on le fait d’ailleurs pour la société qui vous l’avez sans doute remarqué a un fonctionnement sectoriel ;de là à dire que c’est un élément essentiel du problème (l’absence d’outil politique public global), il n’y a un qu’un pas que je franchis.

  20. Avatar de Michel Houdan
    Michel Houdan

    Je lis les blogs excellents de Paul et de Loïc Abadie et j’entrevois assez bien ce que sera la déflation, restriction chômage. C’est moins probable mais si c’est l’inflation qui adviendra, à partir de quel taux d’inflation l’économie occidentale se bloquera totalement dans un immense chaos. Car enfin une forte inflation c’est comme qui dirait qu’il n’y a plus d’argent, qu’on ne peut plus rien acheter, que notre travail est payé avec de la monnaie de singe. Oui ou non , si on a beaucoup d’inflation, verrons nous un écroulement général. C’est cela que Loïc veut dire, je crois; mais j’aimerai avoir un développement sur ce sinistre scénario.

  21. Avatar de Rumbo
    Rumbo

    @ Loïc Abadie dit :
    24 janvier 2009 à 04:25

    @Stilgar dit :
    24 janvier 2009 à 08:31

    Votre débat a l’heur d’être clair, et je partage certaines des options des deux « camps », disons 1/4 Loïc et 3/4 Stilgar. D’accord donc avec Loïc Abadie en particulier pour le taux de couverture monétaire à 100% (réserves pleines des banques), mais je m’en démarque au moment celui-ci dit qu’il n’y a plus besoin de la BC. Car si la couverture monétaire était de 100%-monnaie, les banques ne devraient donc prêter que l’argent de leurs déposants, point. La masse monétaire ne subirait aucune incidence des prêts effectués en son sein. Mais alors, à quel titre créeraient-elles donc de la monnaie? Elles ne devraient donc pas en créer puisque les banques fonctionneraient à réserves pleines. La création monétaire devant seulement être créée et émise (et, partant, détruite) par, disons, un Institut national ou plurinational d’émission (destruction) monétaire (alias BC); on peut appeler cet Institut d’émission comme on veut, et il fonctionnerait obligatoirement sous compétences bancaires. De cette façon, la création monétaire par un « Institut à part » serait la clé parfaite pour les dépenses publiques et, disons ainsi pour faire court, financer à intérêts 0% les investissements et dépenses publiques (avec des frais minimes, par ex. voir le WIR suisse). Soit dit en passant, ceci signifierait que le sytème fiscal, particulièrement nocif, n’aurait plus sa raison d’être actuelle. Ainsi l’État maigrirait pour le bien de tous de plus ou moins 50%, sans perte d’efficacité, soit: moins d’État, mais mieux d’État. Car: moins d’État mais mieux d’État est une formule qui a été rabâchée ad nauseam sans jamais aucun effet dans l’état actuel des choses! L’Institut d’émission monétaire serait le principal organisme garantissant la monnaie, monnaie étant vraiment le reflet des actifs d’un pays ou d’un groupe de pays et non plus le magot jalousement gardée par les chiourmes des Al Capones de service.

    Je crois que ce débat est bien fourni par – 3 interventions – de fin décembre 2008 du professeur Werrebrouck sur Contreinfo. Extrait et lien ci-dessous permettant d’aller à ces 3 inteventions:

    «  »Les keynésiens et socio-démocrates ont sans doute raison d’affirmer que les années 80 furent celles de la dérèglementation (la destruction des « fire wall » financiers) et donc celles de l’ouverture de la boîte. Mais les ultralibéraux peuvent en retour affirmer que ce sont les injonctions fédérales américaines (l’interventionnisme étatique) qui sont responsables du drame des subprimes. C’est dire que le débat n’est toujours pas clos et si certains voient la crise comme la sanction de l’ultralibéralisme, d’autres continuent de penser que le problème n’est pas le marché qui ne saurait se tromper mais l’Etat aveugle, soumis aux groupes de pression, qui a exigé des banques des prêts immobiliers au profit de personnes notoirement insolvables.
    Toutefois le débat sur les « fire wall » est très insuffisant car il néglige le fait que l’économie d’endettement aux USA s’est inscrite dans un contexte d’épargne proche de Zéro, ce qui est un phénomène relativement rare.

    Les historiens de l’économie auront un jour à démêler l’écheveau des liens et de leurs causes qui vont jeter un pont entre la finance et le déséquilibre des comptes courants des USA, notamment vis-à-vis de la Chine. Pour des raisons insuffisamment élucidées le mode de coopération entre la Chine et les USA a abouti à un mercantilisme agressif côté chinois compensé par un transfert d’épargne rendant soutenable un déficit public abyssal côté américain. C’est un couple étrange que forment la Chine et l’Amérique, joliment désigné « Chimérique » par notre collègue américain Niall Ferguson. » »

    L’intervention de Werrebrouck est en trois parties dont voici un lien

    http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2485

  22. Avatar de Alexis
    Alexis

    Merci Di Girolamo, mais je crois que je vais me contenter maintenant de lire se blog en dilettante que je suis et ne plus intervenir pour poser mes questions naïves et bassement matérialistes du genre « Le capitalisme peut-il fonctionner avec des énergies fossiles et des matières premières en déplétion (décroissance) ? ». Mon intervention précédente était provocatrice, je n’ai pas la prétention de poser LES bonnes questions et encore moins d’apporter LES bonnes réponses, mais vous êtes le seul à y répondre.

    J’ai tout de même le sentiment que ces chers financiers se regardent essentiellement le nombril sans voir les origines et conséquences matérielles de leurs activités et théories. On se doutait depuis longtemps que les conséquences sociales et humaines n’étaient pas leur soucis, et je n’ai même pas abordé le problème…

    Quand on se pose des questions de nombril, on trouve des réponses de nombril. Le contexte, les liens de cause à effets, les conséquences… rien à secouer ! On ne les changera pas !

    PS. Je ne pense pas qu’il en aille différemment du côté des « travailleurs », mais quand il faut bouffer jusqu’à la fin du mois et payer les traites d’une baraque, de sa foutu bagnole et autres objets de consommation nécessaires ou superflus, la question est un peu plus pointue. N’est-ce pas ?

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