Une ligne de crête très mince

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Je lis les commentaires à ma « conclusion provisoire » et je pense à deux choses complémentaires : à la « prise de parole » et à l’alternative entre spontanéité / anarchie et enrégimentement / emprisonnement.

La « prise de parole », c’est bien sûr un petit livre de Michel de Certeau (à propos de qui j’ai déjà eu l’occasion de dire le plaisir qui fut le mien de l’avoir connu – j’ai trouvé hier au courrier un envoi de Jean-François Six, ce qui m’a, là aussi, ravi) mais c’est aussi ce phénomène auquel on assista en 68, de ces « assemblées libres » où l’on pouvait entendre en effet quelques bonnes analyses politiques mais séparées par des heures de divagations des uns et des autres sur leurs problèmes personnels, d’origine psychologique essentiellement, confondus par ces orateurs avec des questions générales et qui auraient alors présenté un intérêt pour tout le monde : cette incapacité qu’ont certains à distinguer le privé du public, le singulier et l’universel, ou pire encore, leur conviction que ce qui est propre à leur personne constitue la définition-même du général. J’en ai déjà parlé à propos du « petit spéculateur », victime de cette affection.

C’est l’un des aspects. L’autre, c’est cette alternative spontanéité / anarchie et enrégimentement / emprisonnement, dont on est d’accord que ni l’une ni l’autre n’est viable. La première est haïssable parce que le contexte actuel est à ce point biaisé dans l’accès aux ressources et au patrimoine, que la spontanéité c’est simplement le moyen offert à ceux qui dominent déjà le système de parfaire leur emprise (à l’aide d’un certain revolver). La seconde est haïssable aussi et pour des raisons évidentes. C’est le thème du « Malaise dans la civilisation [Kultur] » de Freud : l’homme est prêt à accepter de renoncer à ses pulsions pour accroître sa sécurité personnelle et celle des siens mais il n’est pas pour autant prêt à tout sacrifier sur ce plan, et c’est là qu’échouèrent les régimes communistes : dans la surveillance permanente de chacun par chacun parce que trop de renoncement était exigé, ils croulèrent autrement dit sous le coût excessif de la supervision dans un système où la sécurité l’emporte à ce point sur la spontanéité que ce qui n’est pas tué dans l’âme par la peur, l’est par l’ennui.

L’avènement de la démocratie est de ce point de vue une très grande réussite puisqu’elle a accompli un bond positif dans le bilan spontanéité / anarchie et enrégimentement / emprisonnement. Mais l’équilibre économique entre le groupe des investisseurs, celui des dirigeants d’entreprise et celui des salariés (la « lutte des classes » de Marx) fut soit laissé au petit bonheur la chance, soit à la guerre totale, soit encore, comme aujourd’hui, au bon vouloir des banques centrales qui ont clairement choisi leur camp – celui des investisseurs – et non seulement ne s’en cachent pas mais ont aussi le culot d’y voir une « solution technique » : la rationalité économique incarnée.

Je l’ai déjà dit : il faut découvrir pour l’économique – laissé sur la touche dans le bond qualitatif de l’avènement de la démocratie – un moyen de l’apprivoiser, de le domestiquer, de l’empêcher de dévoyer comme il le fait aujourd’hui le politique, et ceci sur la ligne de crête très mince entre spontanéité / anarchie et enrégimentement / emprisonnement. Si ce moyen n’est pas trouvé il sera réglé par ceux qui ont déjà sorti leur revolver et qui ne se gênent pas de le signaler parce qu’ils savent se trouver du côté du manche. Il serait souhaitable que ceux qui parlent d’empêcher le retour des crises (plutôt que de « lisser » leurs effets) ou de mettre fin à la pensée unique, rappellent à l’ordre ces adeptes des armes à feu. Pour souligner qu’ils ont véritablement ces tâches à cœur et veilleront à ce qu’elles soient accomplies – dans un cadre démocratique.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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36 réponses à “Une ligne de crête très mince”

  1. Avatar de benoit
    benoit

    Paul, tu sembles considérer que la vie économique n’a pas été domestiquée.

    … Mais la vie « domestique » l’a t-elle été ?

    Je fais référence à mes interventions sur la file du billet invité de Daniel Dresse :
    http://www.pauljorion.com/blog/?p=1320#comment-13531

    Tu n’as jamais abordé de front la question de la violence. Or, la violence économique n’est qu’une expression aboutie/visible de la violence généralisée et particulière de l’Occident (violence souvent occultée, nevrotique).

    Peux-tu « soigner » seul l’économique ? En ignorant ses sources dans tout le reste de la vie socialAe, familiale, historique ? Dans l’Histoire de notre Pensée ? Dans l’Histoire de nos actes manqués ? Dans nos hontes ?

    … Peux-t-on « interdire » la violence sans ajouter de la violence ?
    Benoit.

  2. Avatar de et alors
    et alors

    @benoit…(et les autres..).
    Merci de nous le rappeler et de pointer cette incontournable question de la « violence » souvent réduite à une prétendue « agressivité naturelle ».
    Comment passer de nous violer, nous agresser à nous pacifier, nous apprivoiser ?

    Introduction (une parmi d’autres…)

    Présentation de « la colombe assassinée » Laborit, Grasset 1987 :
     » la violence est un sujet à la mode. Pas un spécialiste, biochimiste, neurophysiologiste, comportementaliste, psychologue, psychiatre ou psychanalyste, mais aussi sociologue, économiste, légiste ou politique, qui ne l’ai pas étudiée. Toujours sous l’angle parcellaire de son savoir.
    Le Pr H. Laborit, fort de trente ans de travail interdisciplinaire consacré à la biologie des comportements, rappelle une double évidence : la violence est, d’abord une expression du fonctionnement du système nerveux, lequel n’est compréhensible qu’en décorticant ses niveaux d’organisation. Mais après avoir étudié la violence chez l’animal puis chez l’homme, il montre, encore, que celle-ci ne se limite pas aux relations interindividuelles. Elle régit, aussi, les comportements collectifs, dans le groupe, entre les groupes, entre les états.
    En se fondant sur des données anatomiques, biologiques, physiologiques autant que culturelles, Henri Laborit étudie les concepts tels que liberté, égalité, propriété, besoin, travail, territoire, patrie, etc, et pose la question : dans l’ignorance de ce que nous sommes et avec un discours logique toujours prêt à fournir un alibi aux meurtres, aux guerres et aux génocides, quelque chose peut-il changer ? « 

  3. Avatar de et alors
    et alors

    Et puis tant que nous y sommes, vu qu’il est question « d’anarchie, d’enrégimentement et d’emprisonnement », il va bien falloir qu’un jour ou l’autre, nous nous éclaircissions sur le « concept de liberté », à partir duquel s’est édifié un certain « libéralisme » ,
    Appellation pudique qu’il conviendrait de revisiter « épistémologiquement » plutôt qu’idéologiquement. Blog, forum, wiki…oui mais sur fond d’ateliers d’épistémologie populaire.

  4. Avatar de Di Girolamo
    Di Girolamo

    Paul Jorion dit

    « Je l’ai déjà dit : il faut découvrir pour l’économique – laissé sur la touche dans le bond qualitatif de l’avènement de la démocratie – un moyen de l’apprivoiser, de le domestiquer, de l’empêcher de dévoyer comme il le fait aujourd’hui le politique »…

    Je ne partage pas cette analyse : la manière dont est organisée l’économie , la manière dont est organisé la vie politique , la manière dont est organisée la vie médiatique , la manière dont est organisé l’aménagement du territoire etc etc etc…..bref l’organisation globale de la société fait système et ce qui pose problème aujourd’hui ce ne sont pas les éléments de ce système , fussent ils comme l’économie , essentiels et structurants;

    Nous sommes , physique oblige au bout d’un système ; c’est à dire que cela ne va pas durer, cela ne peut pas durer.

    Toute réflexion sectorialisée est donc un piège et ne peut que rajouter à la confusion. C’est pourquoi les économistes, les historiens, les ingénieurs, les sociologues , les philosophes , les agents d’entretien , les jardiniers, les chomeurs… etc etc doivent pouvoir aujourd’hui repenser ensemble globalement la société .
    Nous avons besoin d’une démocratie de projet et non d’une démocratie de gestion .

    C’est sur ces bases de refondation démocratique qu’il s’agira de reprenser l’économie : d’abord créer l’outil politique de recherche sociétale.

  5. Avatar de Steve
    Steve

    Bonjour à tous

    Benoît, et alors dit, vous rappelez des fondamentaux!

    Compte tenu des fondamentaux de notre culture, de l’acception inconsciente de ce qu’est le « pouvoir » dans notre histoire ( occidentale), de la foi dans la théorie scientifique par rapport à la théorie « sociale », on aboutit lors de la prise de pouvoir par la bourgeoisie industrieuse à l’application de ses règles, fondée et limitée par ses principes. Ce qui nous mène là où nous en sommes.
    Ceux qui « tiennent le manche » se réjouissent de suivre ce qu’ils nomment « les lois de la nature », ratatouille conceptuelle incohérente de la toute puissance non réglée de l’enfant. Combien en voyons nous ravis d’eux même et se rengorgeant en se vantant de leur conduite qui n’est somme toute que celle de chimpanzés en rut!

    La civilisation chinoise est , en partie, basée sur le concept de juste milieu, ce qui ne va pas sans violence d’ailleurs; la nôtre suit assez bien le concept de:
    « croissez et multipliez »! ce qui, mal compris dans un système fini , mène à une violence encore plus grande et plus rapidement.
    Après tout, « Croissez et multipliez » peut être LE slogan parfait de la confédération des Kystes,Polypes et Tumeurs !
    Avec les conséquences que tout le monde connait….

  6. Avatar de A.
    A.

    Paul,

    Vous versez dans le positivisme. La société n’est pas la nature et si c’est cette dernière peut s’écrire en langage mathématique, il n’en va pas de même pour la société. Je ne nie pas la possibilité d’une étude scientifique de la société mais je ne partage pas votre point de vue consistant à distinguer une sphère de l’économique et celle du politique. La science ne permettra pas une meilleure administration des choses même si elle peut y aider. La question n’est pas que technique, elle est essentiellement morale et politique.

    Peut-être que je me trompe, mais il me semble que croyez en la possibilité de domestiquer « l’économique » par la science même si ce savoir devra être traduit politiquement pour que le bénéfice retiré ne soit pas accaparé par une minorité.

    L’économique ne pourra être domestiquée que par l’imposition d’un nouvel imaginaire. L’argent dissout le don en effaçant les obligations que ce dernier n’éteint jamais. L’extension du marché ne peut se faire que par une corrosion de plus en plus croissante du lien social. A l’ancien imaginaire qui relevait de la religion, l’Occident a substitué celui de la science, axiologiquement neutre. En voulant écarter la guerre civile idéologique en faisant, selon l’expression deC. Lefort, de la démocratie un « lieu vide » de toute eschatologie, il a enclenché la mécanique de la démesure : toujours plus de choses à désirer, toujours plus de frustration.

    Nos sociétés de marchés ont réussi à faire ce que le communisme avait échoué à accomplir. L’ordre social tient, non par la répression des pulsions, mais au contraire par leur libération. L’injustice ne tient pas que par la peur, au contraire, une servitude volontaire la remplace grâce à une société du spectacle où l’on exite des pulsions de plus en plus nombreuses.

    Votre utile et salutaire réflexion est inséparable de ce qu’Orwell appelait une  » common decency ».

    @ tous :lisez Jean-Claude Michéa « l’EMpire du moindre mal » et son dernier ouvrage « La double pensée, retour sur la question libérale ».

  7. Avatar de Fab
    Fab

    @ Di Girolamo,

    On peut faire ce qu’on veut sur la ligne de crête, sauf regarder en bas si on a le vertige ! (((Le capitalisme ça occupe et on peut se dire : donc ça fonctionne, au moins)))

    Avez-vous l’exemple, l’idée d’un outil politique de recherche sociétale ? Merci.

  8. Avatar de gibus
    gibus

    @ et alors

    merci d’avoir évoqué ce grand monsieur que fut Henri Laborit. A lire ou à relire :La nouvelle grille.

  9. Avatar de Di Girolamo
    Di Girolamo

    @Fab

    L’idée .

    Nos démocratie représentatives sont organisées pour gérer un système ; tant que le notre fonctionnait et pouvait s’amender les citoyens et leurs représentants pouvaient se contenter , voir se satisfaire de cela , et tant pis pour les exclus , les victimes , les inadaptés …..

    J’affirme et je ne suis pas le seul que ce système n’est pas durable et qu’il rentre aujourd’hui en crise finale. (même si ça peut prendre encore du temps)

    Il nous manque donc un outil politique dédié à la réflexion globale , outil prospectif d’ élaboration du diagnostic et du projet devant répondre à la question :

    comment devons nous nous organiser aujourd’hui pour (sur)vivre durablement ? Outil permettant de raisonner globalement et de se projeter dans l’avenir .

    Cet outil ne peut être porté par un groupe, un parti , un individu parce qu’en proposant cette méthode on reste dans celle existante du système.
    Il va donc s’agir de créer un outil public, officiel , institutionnel , très médiatisé , très participatif, permettant de développer cette approche globale qui se constituera par le débat permanant entre TOUS les acteurs.
    Cet outil ne peut être porté par l’exécutif parce que par nature l’exécutif lui aussi est partisan ; il faut donc pour le porter , un acteur spécifique ayant cette mission spécifique . Selon moi c’est très exactement la mission du président de la république telle que décrite dans la constitution et jamais appliquée : un président élu par tous , au dessus des partis , ne gouvernant pas , veillant à l’application des principes essentiels de la démocratie , c’est à dire : que les citoyens puissent exercer leur souveraineté. Un président animateur du débat public et donc de cet outil de recherche sociétal .

    Cet outil doit être déployé à tous les échelons de l’institution , notamment les échelons locaux : communes, communautés de communes , régions…Mais aussi à l’échelon national ; son siège se positionnant dans un espace aménagé sur une chaîne publique de la télévision.(on est loin de la réforme sarkosy!)
    Cet outil , très participatif , utilisant bien sûr le net et tous moyens de communication permettant ces travaux citoyens.(ce blog s’intégrant à la démarche)
    En plus de moyens techniques importants , il faudra des moyens humains en terme d’animation de cet espace public de recherche . Ces moyens seront aussi déployés aux divers échelons ; le national assurant la cohérence de ces recherches.

    C’est ainsi que peu à peu , indirectement mais en profondeur , ce seront vraiment les citoyens qui détermineront et choisiront la politique de la nation : quand on comprend mieux , on vote mieux. Quand je dis citoyens je n’exclus ni les experts ni les représentants qui eux aussi sont des citoyens ( cet outil est donc un outil de liaison , de collaboration entre le citoyen et son représentant et les scientifiques .)

    L’exemple.

    D’une manière très très immodeste , mais ne trouvant aucun écho de mes idées , j’ai entrepris (phase de démarrage) de tenter cette expérience dans les communes se situant à proximité de chez moi ; soutenu par une subvention régionale sur des fonds dédiés à la démocratie participative , je vais organiser , en impliquant élus et habitants des soirées de réflexion globale : où en sommes nous (état des lieux) que pouvons nous faire (projet) ; les thèmes seront abordés grâce à des montages vidéos ( daylymotion est une mine) ; on ira du global au local ; ces soirées seront copiées collées d’une commune à l’autre ; un collectif local intercommunal sera constitué. L’idée étant de pérenniser la chose et d’essaimer, d’aller vers cet outil national.

    C’est donc une affaire à suivre …qui sera peut être un « bide » monumental ????

  10. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    @Paul,

    Votre choix de Freud est-il un hasard ? Il se trouve que dans un précédent billet (Le lion malade de la peste II), Olivier et Pierre-Yves ont eu un très intéressant débat autour du livre de Debord « La société du spectacle ».

    http://www.pauljorion.com/blog/?p=1463#comment-14481

    Le débat entre Olivier et Pierre-Yves avait pour origine une affirmation d’Olivier, qu’un commentateur le somma de justifier (je cite) :

    “Sur la pauvreté : et bien oui pour contracter un crédit, il faut y avoir été obligé par les circonstances (être pauvre) mais aussi avoir perdu le sens commun. Etre déstructuré, aliéné comme vous le dites. Pas facile en effet de résister à la société de consommation quand vous avez été désarmé de toute défense intellectuelle, quand, en d’autres mots, on ne vous a offert aucun autre horizon.”
    D’après vous, d’où vient ce désarmement intellectuel ?

    Ma question est simple:

    Ce fameux désarmement intellectuel n’est-il pas le signe d’une victoire éclatante et achevée ?

    La démocratie ne suppose-t-elle pas aussi des compétences …?

    Et même si je partage votre vision d’une constitution « civilisatrice », je ne vois pas comment réparer les dégats de ces 40 dernières années ?

    Détail amusant, hier soir sur France 3, Bernard Stiegler nous parle de « ce qui s’effondre aujourd’hui » :

    http://ce-soir-ou-jamais.france3.fr/index-fr.php?page=emission&id_rubrique=515

    On zappera l’insupportable Michel Onfray , pour s’attarder sur les analyses de Stiegler et Rosanvallon.

    Certains commentateurs ici, n’ont rien à envier à nos médiatiques philosophes…

    Bonne journée à tous,

  11. Avatar de et alors
    et alors

    @ di girolamo, fab…

    Message bien reçu au sujet de: : « d’abord créer l’outil politique de recherche sociétale »… du moins « l’idée d’outil… »
    En cours de retraitement, reformulation…à suivre.

  12. Avatar de ghostdog
    ghostdog

    « I’m not a number, i’m a free man ! »

    Patrick Mc Goohan est mort…

    http://www.youtube.com/watch?v=9TfdA9fWb_g

  13. Avatar de guillaume
    guillaume

    « la vie se partage en deux catégories: Y’a ceux qui ont le pistolet chargé et ceux qui creusent; toi, tu creuses! »
    http://fr.youtube.com/watch?v=RGkjiq4uryw

    Paul écrit: « Si ce moyen n’est pas trouvé il sera réglé par ceux qui ont déjà sorti leur revolver et qui ne se gênent pas de le signaler parce qu’ils savent se trouver du côté du manche. »

    « C’est vraiment très ironique : les banques du monde entier pourraient finalement se retrouver sauvées non pas par les gouvernements, mais bien par la bombe à retardement des CDO qu’elles ont mise à feu, durant le boom du crédit, en usant de procédés pour le moins spécieux. »

    Business Spectator, le blog australien de référence en matière de finances, vient de poster un article détonant à propos des CDO synthétiques. Un article de Alan Kohler : « A tsunami of hope or terror?
    http://www.businessspectator.com.au/bs.nsf/Article/A-tsunami-of-hope-or-terror-LHRJP?OpenDocument&src=sph

    version traduite:
    http://bellaciao.org/fr/spip.php?article74934

    Çà vous inspire quoi?

  14. Avatar de Michel MARTIN

    « Gagner la conversation », devenir disciple et dans tous les cas se voir partout, satisfaire le Narcisse qui sommeille en chacun de nous. C’est peut-être simplement une phase d’apprentissage du net? Ou bien est-ce une marque d’une carence affective typique de notre société d’individus égomaniaques solitaires?

    Il me semble que les phases de forte évolution ou crises (des modes de vie, économiques, techniques…) mettent systématiquement aux commandes des personnalités agressives. Les modes de sélection se simplifient et on n’a plus le temps de faire la différence entre compétence et agressivité. C’est ce que j’ai observé depuis 30 ans dans les entreprises dans lesquelles j’ai travaillé. C’est ce qu’on a pu voir à notre dernière élection présidentielle. La crise actuelle risque bien de renforcer ce phénomène.

  15. Avatar de Eugène
    Eugène

    @ Paul, et alors, …

    L’apprivoisement de l’économique passera par l’hégétique; (voir ces concepts chez Jean Gagnepain, « Du vouloir dire » T2 ) c’est l’ « outil »… enfin… un vaste programme de travail et qui a au moins le mérite de comporter ses propres procédures de vérification-falsification. Je n’en vois pas d’autre à l’horizon d’aussi ‘quartésien’ par la nécessité qu’il promeut de façon justifiée d’une radicale différenciation entre les deux dialectiques ethno-politique et éthico-morale pour, en retour, mieux saisir l’articulation qui nous occupe ici. (‘quartésien’ en raison des deux autres plans dialectiques dont le jeu nous constitue)

  16. Avatar de jacques
    jacques

    Effet de style ou » fourchage » de langue ? Manche du revolver ou crosse de la pelle? Petit sourire pour calmer ma peur face à cette description de la pointe émergée de l’iceberg. Je doute fortemment de la capacité des autorités à faire face .Il n’y a que des solutions toxiques .Ils ont choisi ouvertement d’assumer les dettes douteuses .Mais devant la bulle des dettes publiques il n’y aura que l’hyperinflation pour s’en sortir avec toutes les pires conséquences que vous n’imaginez pas.Au bout du compte, ils réussiront.Mais quelles lecons en auront-ils tiré ? Une constitution pour l’économie ou une refermerture de la boite noire?

  17. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    @ghostdog
    « Ce fameux désarmement intellectuel n’est-il pas le signe d’une victoire éclatante et achevée ? La démocratie ne suppose-t-elle pas aussi des compétences …? Et même si je partage votre vision d’une constitution “civilisatrice”, je ne vois pas comment réparer les dégâts de ces 40 dernières années ? »

    Le désarmement intellectuel est surtout le fait des élites, alors comme vous je pense qu’il s’agit d’un « achèvement » : Quelle démocratie occidentale ne s’est jamais assise sur ses grands principes déclarés dans sa Constitution ?

    Ces cinquante dernières années, les nations développées auront amendé leur arsenal législatif pour mieux le contourner au final. L’extension des jurisprudences pour défendre les lobbys influents est de mise, tout comme l’extension du droit publique (toujours d’obédience libéral) qui est sensé protéger nos libertés individuelles mais qui nous invite surtout à penser comme la « norme ». Si l’on s’attache à la production des « droits » et de la loi, on se rend compte que la Démocratie représentative de part son courant progressiste (gauche) ou/et son courant pro économie de marché (droite) aura toujours balisé par son arsenal législatif le train de la société du spectacle. Le droit à consommer, le droit de perdre sa liberté de penser via le marketing publicitaire est un droit absolu inscrit pour tous (mais par pour tout le monde) par le législateur, les politiques lui ont trouvé le nom de pouvoir d’achat. Aussi, bien avant la fuite en avant qui se traduit par l’acte de consommer à outrance, l’Histoire hagiographique de la démocratie libérale était écrite, comme une forme de « storytelling » par les animateurs professionnels du spectacle politique, les partis de gauche et de droite. Dans ce sens, l’achèvement est total, et la victoire complète. C’est un fait de civilisation, plutôt que le travail acharné d’une minorité qu’on appelerait « ultra-libérale » (cf Michéa, déjà cité par A. notamment)

  18. Avatar de Paul Jorion

    @ Ghostdog

    Ce soir ou jamais. Oui, j’aurais dû être là : je faisais partie des invités. Malheureusement, je ne suis pas en France.

  19. Avatar de Paul Jorion

    Ce soir ou jamais. Je viens de regarder l’émission. Je ne sais pas si j’aurais dû dire « malheureusement » à propos de mon absence : j’aurais eu du mal à contenir mon irritation devant l’ignorance de certains des intervenants quant à la nature de la crise. C’est la fin du progrès, la faute au recul du christianisme, des Chinois qui sont plus capitalistes que le roi… Mes amis ! On n’est pas sorti de l’auberge !

  20. Avatar de Jonathan Livingston

    hé, Guillaume suggère une lecture et personne ne commente… Ces assez juteux pourtant. Merci Guillaume. L’arnaque de certains banquiers est assez fabuleuse. Enfin, un texte qui donne à voir la réalité de ces fameux CDO…

  21. Avatar de Paul Jorion

    @ Guillaume, Jonathan Livingston

    Si personne n’embraie sur les CDO, c’est que les SIV, CDO, CDS, etc. ont été très longuement expliqués et débattus sur ce blog et dans mes livres. Utilisez la fonction « Rechercher » dans la colonne de droite.

    Si vous voulez relancer un débat sur ces questions, faites-le dans Les deux survivantes et les CDS pour les CDO synthétiques ou Comment fonctionnent les SIV pour les SIV.

  22. Avatar de antoine
    antoine

    Paul… comme l’a très bien vu le monde de la Finance, une guerre souterraine se prépare. Je vais essayer de formuler ça autrement: C’est Vous et ce que vous représentez contre Rotschild et ce qu’il représente. Ceux qui veulent le changement contre ceux qui veulent que tout continue comme avant.
    Autant vous le dire tout de suite, mais vous le savez sans doute: ils n’hésiteront pas à mettre la main à la poche pour empêcher les opinions publiques de douter (de fait ils ont DEJA commencé…). Je vois qu’ils ont commencé leur lent travail de sape quand je lis la réponse que Attali vous a -gentiment- adressé (en particulier son propos ridicule sur la possibilité de contourner certaines mesures… ).

    Dans une démocratie de masse le soft power fait tout. Des occasions d’être présent dans les médias dominants, vous n’en aurez peut-être plus beaucoup à l’avenir… (on va payer des gens pour que vous en ayez moins, quand les choses deviendront réellement importantes). Vous avez un rôle à jouer. Ne gaspillez pas trop de cartouches. Choisissez bien vos émissions. Et surtout ne sabordez pas votre blog. Ne serait-ce que pour ces raisons là.

  23. Avatar de Rumbo
    Rumbo

    Paul écrit:

    «  »Je l’ai déjà dit : il faut découvrir pour l’économique – laissé sur la touche dans le bond qualitatif de l’avènement de la démocratie – un moyen de l’apprivoiser, de le domestiquer, de l’empêcher de dévoyer comme il le fait aujourd’hui le politique, et ceci sur la ligne de crête très mince entre spontanéité / anarchie et enrégimentement / emprisonnement. » »

    J’ai déjà posé et reposé x fois la question: Que signifie la démocratie politique si elle n’a pas son pendant de démocratie économique? Que signifie la démocratie politique quand on reste sempiternellement sans le sou? Dépouillés par les banques, dépouillés par l’État.

    La technique est en amont du politique. Par exemple, un service des eaux obéit à certaines lois et obligations naturelles de fond dont il est impossible de déroger sous peine de forfaiture. Imaginerions nous que seulement un usager sur deux du service des eaux ait de l’eau courante, et que seuls les plus riches d’entre eux aient de l’eau courante et potable à la fois, les autres doivent payer très cher, en plus de leur abonnement, de l’eau ‘potable’ en bouteilles de plastique, tandis que 90% de l’autre moitié des usagers, qui pourtant paient régulièrement leur abonnement, n’ont même pas l’eau courante… Impensable! Et bien il en est exactement de même s’agissant du système financier.

    Le progrès technique et technologique progresse (automatisation, etc) et remplit ainsi sa mission dans la production des biens et des services. Le système financier lui est resté complètement archaïque, car si son outil (informatique en temps réel, internet, etc) s’est développé, il n’accomplit aucunement son but et reste basé sur la rareté entretenue de l’argent, tandis que les biens encombrent le marché comme jamais, les magasins et les usines en regorgent, aucune pénurie, bien au contraire. Mais il y a « pénurie » d’argent pour au moins les 2/3 des gens, même si, à l’évidence, la masse monétaire n’a jamais autant augmenté (ce qui est un comble!). C’est bien la preuve sans détour que l’argent n’est pas, n’est – jamais – dans les poches qu’il faut.

    Au XIXème sièle, à Lyon, les ouvriers tisserands détruisirent le métier à tisser que Jaquard avait inventé, car cette machine allait leur retirer le pain de la bouche. J’ai appris que les bateliers de la rivière où Denis Papin effectuait des essais du bateau à vapeur qu’il avait inventé détruisirent ce bateau pour les même raisons que les ouvriers tisserands. Les conditions ouvrières d’autrefois, durissimes, pouvaient faire comprendre ces attitudes extrêmes à courte vue. Les milieu financiers pourtant repus ont la même attitude! Pas de progrès aucun en finance pour que nous gardions nos privilèges quelqu’en soient les conséquences délétères et mortifères. Les résultats sont là, et risquent d’être pires encore.

    Nous ne comprenons pas qu’au – progrès – dans la production doit correspondre le – même progrès – dans la distribution dont la clé est une finance qui reflète strictement les réalités matérielles de la producion contemporaine. Ce qui n’est pas le cas malgré plusieurs révolutions industrielles.

    Dans cet aveuglement, nous sommes vraiment les enfants de la révolution bourgeoise, et plus précisément, de la révolution bourgeoise d’inspirantion protestante anglo-américaine. Celle qui tire l’essentiel des ficelles du monde « développé » depuis environ deux siècles et demi, induit les guerres, fomente les révolutions, divise sans arrêt pour règner, etc

    Des solution techniques existent et ont été expérimentées pour une finance ajustée et juste, reflétant exactement les réalités matérielles économiques, donc un pouvoir d’achat en équilibre absorbant normalement la production avec 0 intérêts à payer, les dépenses publiques étant financées en amont. Les milieux financiers ont fait et font la sourde oreille et même exercent une sourde adversité contre les bonnes solutions de techniques financières et monétaires. Car ces tehniques vraies, sans tricheries, donc à la comptabilité rigide, une fois mises en œuvre signifieraient la fin de leurs sacro-saintes politiques du crédit grâce auxquelles ils dominent sans partage les sociétés, les peuples, les nations et le monde. Car les milieux bancaires et financiers les plus puisssants sont peu intéressés à exercer sainement leur vrai métier de gestionnaires et gardiens du seul argent épargné qui constituerait ansi la quasi totalité de la masse monétaire M1 (100%-monnaie). On sait bien qu’un livre ne suffirait pas pour dénoncer les méfaits et les trahisons du monde financiers (Enron, Crédit lyonnais, les prêts hypothécaires-poisons à partir des États-Unis, l’affaire Madoff pour couronner le tout, etc, etc, et tant et tant d’autres que j’omets).

    Mais l’urgence et la priorité est qu’il faut s’efforcer de construire d’autres système financiers selon les modèles sains et efficaces qui nous sont accessibles (j’ai mis et remis tous les liens internet possibles sur ce blog au sujet des vraies et bonnes solutions financières et monétaire, et les remettrai si l’on m’y convie) sans trop s’occuper du système financier et fiscal actuel dont il n’y a rien à attendre tout en sachant très bien qu’il peut exercer (il l’a fait dans le passé) sa capacité de nuisance et de destruction. C’est la mondialisation-globalisation qui détruit les tissus économiques créatifs, gages de liberté possible pour la majorité des hommes. La mondialisation conjugue à la fois les inconvénients du capitalisme et du socialisme. Avant le 11 septembre, j’entendais souvent autour de moi quelqu’un me dire: « moi, je suis citoyen du monde » et je rétorquais inmanquablement: « alors tu es citoyen de Wall-Street ». Texto. L’après 11 septembre parle de lui-même…

    Si nous continuons à nous en remettre à ce pouvoir frauduleux qui nous chloroforme avec un discours démocratique lancinant et creux (et surtout pas pour une démocratie économique!) où la banque et l’État sont puissamment unis pour dominer les peuples et leur faire un destin d’hommes soumis aux gardes chiourmes de l’argent et au chantage à l’emploi, une situation de « non-retour » risque de se produire. Les milieux financiers ne pouvaient pas ne pas savoir qu’une telle crise allait nécéssairement se produire. Avec cette crise et ses « développements », les tenants du système financier feraient en sorte qu’assaillis et paralysés, les « peuples », déjà en voie de désintégration, en arrivent à demander et à accepter les « solutions » financières et « politiques » des puissances d’argent qu’ils n’accepteraient jamais en temps normal. Ceci dit en résumé mais c’est la vérité.

  24. Avatar de Paul Jorion

    @ Rumbo

    « Citoyen du monde » ? Non, non : ce ne sont pas les multinationales qui vont nous gâcher notre plaisir, ça doit rester vrai, c’est important !

    Si tous les gars du monde
    Décidaient d’être copains
    Et partageaient un beau matin
    Leurs espoirs et leurs chagrins
    Si tous les gars du monde
    Devenaient de bons copains
    Et marchaient la main dans la main
    Le bonheur serait pour demain

    Ne parlez pas de différence
    Ne dites pas qu’il est trop blond
    Ou qu’il est noir comme du charbon
    Ni même qu’il n’est pas né en France
    Aimez-les n’importe comment
    Même si leur gueule doit vous surprendre
    L’amour c’est comme au régiment
    Il n’faut pas chercher à comprendre

    J’ai mes ennuis et vous les vôtres
    Mais moi je compte sur les gars
    Les copains qu’on ne connaît pas
    Peuvent nous consoler des autres
    Le bonheur c’est une habitude
    Avec deux cent millions d’amis
    On ne craint pas la solitude…

    Paul Fort n’a pas écrit que cela bien entendu.

  25. Avatar de Pierre-Yves D.
    Pierre-Yves D.

    @ A.

    A mon sens Paul Jorion ne propose pas une constitution pour l’économie au nom de la science économique stricto sensu. C’est au contraire parce qu’il ne se satisfait pas du rôle que joue la science économique, laquelle s’est coupée progressivement de l’économie politique, et, à ce titre est devenue un élément idéologique au service des puissants, qu’il pense nécessaires des nouvelles règles du jeu pour l’économie. Ces règles se rapportent au fonctionnement de l’économie, mais leur influence ira bien au delà de la sphère strictement économique. N’oubliez pas que Paul est anthropologue, une science économique décontextualisée socialement n’a, me semble-t-il (j’en suis même persuadé !), aucun sens pour lui. Les systèmes économiques, naissent, vivent et meurent comme les sociétés et les civilisations. IL ne s’agit donc pas de considérer le monde économique comme un état de nature dont on devrait simplement découvrir les règles implicites et éternelles. Du reste nous pourrions faire également la critique de l’état de nature. Nous savons depuis Darwin que la Nature évolue elle aussi. Et je ne parle pas de l’interaction nature-culture, qui est encore un vaste débat ! Quoiqu’il en soit Paul a écrit tout un livre dans lequel il prône une épistémologie de l’invention, plutôt que de la découverte. Le combat pour une constitution économique part donc d’une part d’une interrogation éthique et morale, à portée politique, autrement dit d’un refus du monde tel qu’il va, et d’autre part se fonde sur certaines hypothèses quant au fonctionnement actuel de l’économie-monde. Or si l’on n’accepte pas la façon dont marche notre monde économique, c’est bien que l’on considère que le fonctionnement de l’économie n’a rien de naturel, même si l’économie est une pensée relativie au monde physique.

    @ Di GIrolamo

    vous dites : « la manière dont est organisé la vie politique , la manière dont est organisée la vie médiatique , la manière dont est organisé l’aménagement du territoire etc etc etc…..bref l’organisation globale de la société fait système et ce qui pose problème aujourd’hui ce ne sont pas les éléments de ce système , fussent ils comme l’économie , essentiels et structurants…Toute réflexion sectorialisée est donc un piège et ne peut que rajouter à la confusion. C’est pourquoi les économistes, les historiens, les ingénieurs, les sociologues , les philosophes , les agents d’entretien , les jardiniers, les chomeurs… etc etc doivent pouvoir aujourd’hui repenser ensemble globalement la société . Nous avons besoin d’une démocratie de projet et non d’une démocratie de gestion. »

    Pour les mêmes raisons que celles que j’ai dites plus haut, je ne pense pas que la réfléxion de Paul soit sectorielle. C’est le point d’application — sa constitution pour l’économie — qui l’est, sectoriel. Et si je dis point d’application c’est bien parce qu’à travers ce point — le biais de l’économie — on touche à beaucoup d’autres secteurs, lequels ne sont d’ailleurs distingués de la sphère économique que de façon assez artificielle. Vous dites très bien d’aileurs que les « éléments du système » sont « essentiels et structurants ». Pourquoi ne prenez-vous donc pas au sérieux votre propre proposition ? En prenant au sérieux une constitution pour l’économie qui agirait bien sur un élément du système, pour le transformer précisément, lui faire accomplir une mutation ?

    Je ne vois pas en quoi une constitution pour l’économie serait antinomique d’une démocratie de projet. Une constitution ce n’est pas une fin, mais un moyen au service de l’éthique et de la politque, tout comme l’est, dans un autre registre, le moyen technique que représente votre outil participatif.

    Votre projet d’outil participatif au service de la démocratie citoyenne est très intéressant : une plus grande implication de chacun d’entre nous dans les affaires de la cité ne peut qu’être une chose positive. Si j’ai bien compris c’est un outil collaboratif et d’aide à la décision. Vous situez le plus haut échelon du fonctionnement de votre outil en gestation au niveau national. Or le projet de constitution concerne le niveau mondial. Je vois donc plutôt une complémentarité entre les deux approches.
    Aucune bonne idée ne sera de trop par les temps qui courent, sauf si ces idées sont réellement contradictoires entre elles, ce qui ne me semble pas le cas en l’occurence, du moins au stade où nous en sommes.

    Je voudrais bien que les citoyens du monde prennent leurs destins en main. Mais tout comme il ne faut pas tout attendre de solutions régulatrices qui viendraient d’en haut il ne faut pas non plus compter uniquement sur les ressources de la spontanéité démocratique pour résoudre une crise aux multiples dimensions.

  26. Avatar de TELQUEL
    TELQUEL

    Bonjour a tous je vous recommande le travail de Martin Heidegger sur la liberte.

  27. Avatar de François Leclerc
    François Leclerc

    Je suis étonné que le terme « autogestion » ne paraisse pas dans cette discussion. Non pas qu’il représente une panacée, car à quoi se réfère-t-il exactement ? Mais parce qu’il impliquait une alternative non bureaucratique au capitalisme, on parlait alors de « socialisme autogestionnaire ». Cela permettait d’évoquer un autre modèle, démocratique, de société, en considérant que les deux autres avaient failli. De proposer une troisième option. Mais le principal problème de cette époque, c’était que les différents courants idéologiques qui s’en réclamaient n’avaient que peu de réalisations en magasin à proposer.

    Le terme quasi disparu, son contenu est apparu. D’une manière très diffuse et multiple.

    Soit dans le cadre d’applications du « think global, act local » des écologistes. Exemple qui a récemment fait l’actualité, la communauté de Tarnac. Soit, au contraire à une échelle planétaire, avec « l’appropriation » de la musique via sa copie numérique. Soit, par des actions de type médecine collective, non payée à l’acte comme le revendique la « médecine libérale », ainsi que par une réflexion sur ce modèle de santé publique. Soit par des mécanismes de distribution de l’eau potable, comme en Afrique du sud, quand le modèle de tarification pratiqué fait que le prix d’un nombre limité de métres cubes d’eau mensuel et très réduit, afin de favoriser un accès non descriminatoire à la ressource, et que son prix unitaire grimpe avec la quantité, pour éviter le gaspilage. Soit, mais on n’en finirait pas, par la « Bolsa familia », allocation mensuelle distribuée à plus des dizaines de milions de brésiliens, une sorte de salaire social, sous seule condition qu’ils envoient leur enfant à l’école.

    Cette floraison d’initiatives, de réflexions, de pratiques sociales, de natures et dans des domaine très différents, à des échelles qui ne le sont pas moins, est une incontestable expression de la recherche d’un autre modèle de vie et de société, sans parti guide, sans idéologue en chef, sans même de coordination ou de constitution formelle de courant de pensée, sans, aussi, que leur avenir soit assuré. Il y a là un aspect contre pouvoir, ou plutôt contre société, qui n’est pas en soi porteur d’une extension de ces pratiques parcellaires à l’ensemble du fonctionnement social. Nous avons devons nous une autre société, mais totalement émiettée. Ce qui ne signifie pas qu’elle ne soit pas parfois massive (pensons à la musique).

    De la multiplication de ces pratiques au passage, selon des modalités parfaitement indiscernables aujourd’hui, à un modéle démocratique généralisé, il y a un grand pas à franchir. Qui ne le sera peut-être jamais. Mais s’intéresser à tous ces phénomènes économiques et sociaux, les inventorier, peut être à la source d’une réflexion collective extrèmement fructueuse. Sans qu’il soit nécessaire de reparler d’autogestion.

  28. Avatar de Di Girolamo
    Di Girolamo

    @Pierre-Yves D

    Si on part du principe (c’est ce que je crois et ça se discute) qu’il va nous falloir repenser nos sociétés globalement , c’est bien de là qu’il faut partir: c’est à dire que l’étude de chaque élément va se faire à la lumière et dans la cohérence d’un projet global ; ce genre de réflexion globale c’est très exactement du ressort de l’activité politique (je ne p

  29. Avatar de Di Girolamo
    Di Girolamo

    …j’ai décidemment du mal avec ma souris !…….ce genre de réflexion globale c’est très exactement du ressort de l’activité politique ( je ne parle biensûr pas de la politique de gestion à laquelle se résume aujourd’hui la politique)

    C’est donc dans le cadre de ce travail politique que l’étude sur l’économie doit se concevoir ; c’est le projet de société qui va déterminer le type d’organisation de l’économie et non l’inverse .

    Méthodologiquement il faut mettre en musique cette recherche sociétale , les réflexions sur comment organiser l’économie s’intégrant à ce travail .

  30. Avatar de A.
    A.

    @ di Girolamo à propos de son premier billet.

    L’opposition « démocratie de projet »/démocratie de gestion » recouvre selon moi le clivage démocratie directe/démocratie représentative. Quelles que soient les formes de gouvernement, à partir du moment où l’on instaure une représentation avec une élection, on dévoie le projet démocratique. Une « démocratie de projet » peut bien s’imposer, mais si elle est représentative, ce seront les mêmes qui seront à la manoeuvre.

    Le problème majeur, c’est l’aliénation (concept que je maîtrise mal). Cette société est aliénante bien que les droits individuels issus de la Révolution, constituent un indéniable progrès. Mais au lieu de servir à établir ce que Michéa, à la suite d’Orwell, appelle un société décente, ils sont le socle d’une démesure des désirs dont le marché devient le coordinateur. Une rupture avec l’actuel organisation sociale et économique repose, non sur un bricolage tendant à réparer les fissures qui sont apparus, ce à quoi me fait penser le billet de Paul, mais avec la croyance en une possibilité de croissance économique illimitée.

    Sans penser autrement la société (ce à quoi le teme de « décroissance » invite), toute initiative consistant à améliorer la « machine » ne fait, in fine, qu’empirer les choses.

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