Le vrai débat sur la monnaie : un second point

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Dans le livre de John Kenneth Galbraith, L’argent (1975), il écrit :

Dans les entretiens télévisés, l’hôte, réputé pour ses questions incisives, a l’habitude de faire débuter l’entretien avec l’économiste invité en lui posant celle-ci : « Dites-moi, après tout, la monnaie, c’est quoi ? » Les réponses sont immanquablement incohérentes.

C’est pour cela que je ne pense pas qu’il suffise de lire ce qui en est dit dans les manuels à l’intention des enfants des écoles (même de terminale !). Dans La transmission des savoirs (1984), nous nous étions, Geneviève Delbos et moi, intéressés à la forme particulière d’aplatissement que subit le savoir en vue d’être transmis sous sa forme scolaire. Ce qui disparaît en particulier, c’est le raisonnement, c’est–à–dire l’articulation des propositions en un discours théorique. Le raisonnement est remplacé par un ensemble de phrases isolées – de préférence courtes – qui puissent être mémorisées et régurgitées en situation d’examen.

Les citations que certains réclament – de préférence en provenance d’un Prix Nobel – comme substituts d’un raisonnement, procèdent de la même anesthésie de la pensée. Ce n’est pas comme ça, vous l’avez compris, que je fonctionne.

La question de la monnaie est complexe et ce n’est pas parce que celle-ci a été inventée par des hommes que la complexité de son fonctionnement actuel ne dépasse pas son entendement présent. Certains de vous invoquent un consensus qui existerait à ce sujet, ce n’est pas le cas : les théories sont en grand nombre et, je l’ai déjà signalé, intentionnellement incomplètes, les auteurs qui s’y sont aventurés jugeant que seules des simplifications drastiques leur permettraient de faire quelque progrès.

Je ne sais pas si la monnaie réclame un Galilée, rien de ce que j’ai lu jusqu’ici ne me dissuade en tout cas de le penser.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

Partager :

347 réponses à “Le vrai débat sur la monnaie : un second point”

  1. Avatar de Sophie
    Sophie

    @Moi

    Je suis éviemment d’accord avec

    “Capitaux propres + Dettes = Actif immobilisé + Actif circulant et financier ”

    Dettes = DAV
    Actif circulant et financier = les billets banque centrale des clients déposants

    … mais pas avec votre conclusion (L’argent de votre DAV est prêté par votre banque), car ca n’a rien à voir: il n’y a aucun lien de cause à effet!

    De toute facon une banque, en acceptant un emprunt (et en créant la monnaie) va, au moment où cette monnaie est crée, voir augmenter du même montant son actif (montant de la créance) et son passif (DAV au compte de l’emprunteur) … c’est ensuite que les choses risquent de se corser pour elle lorsque l’emprunteur videra son DAV pour payer ses fournisseurs qui ne sont pas dans la même banque.

    N’oubliez pas non plus de lire la suite du lien que vous avez donné:

    Pour une banque, les dettes sont essentiellement constituées des dépôts à vue. Les actifs financiers sont constitués des crédits octroyés. C’est en effet la finalité d’une banque de distribuer du crédit !

    La solvabilité d’une banque est donc sa capacité à faire face aux demandes de retrait de ses déposants. Et cela fait partie de la responsabilité des autorités de tutelle, de s’assurer que les banques sont bien aptes à faire face à leurs obligations. Il y va en effet de la stabilité de l’économie tout entière d’un pays.

    Dans l’égalité vue plus haut, on voit que pour pouvoir distribuer davantage de crédit, la banque doit soit collecter davantage de dépôts, au risque de ne pas pouvoir rembourser ceux-ci, soit renforcer ses capitaux propres.

    Or une entreprise se trouve davantage en sécurité si une partie de son actif circulant n’est pas financée par des ressources qui viendront à échéance dans l’année. L’actif présente toujours un caractère aléatoire et donc risqué (en particulier quand il est constitué essentiellement de créances comme pour les banques!), alors que les dettes, elles, sont inéluctables ! c’est pourquoi il faut qu’une partie de l’actif soit financé non pas par des dettes mais par du capital.

    D’autre part si on impose à une banque d’augmenter ses fonds propres elle a plus à perdre en cas de faillite et aura donc tendance à adopter des activités moins risquées.

    Le niveau de fonds propres est garant de la solidité financière de l’entreprise. Les fonds propres sont donc garants de la solvabilité de la banque face aux pertes que les risques pris à l’actif sont susceptibles d’engendrer.

    Pour toutes ces raisons, le ratio de solvabilité, dans le cas des banques, s’exprimait initialement par le rapport du montant des fonds propres au montant des crédits distribués, ceux-ci étant pondérés par leur caractère plus ou moins risqué. Dans sa nouvelle version, le ratio prend en compte d’autres catégories de risque que le risque de crédit, à savoir le risque de marché et le risque opérationnel

    .

  2. Avatar de Bertrand
    Bertrand

    @Fab
    En fait mon commentaire se bornait à rappeler que la monnaie que vous aviez en poche n’avait pas la même valeur que si vous l’aviez investie. 10 Euros dépensés dans un sandwich ne vous donne aucun droit d’appropriation sur la valeur produite par le travail d’autrui, un investissement, le métier de la banque, en revanche le permet. Le débat sur la monnaie se concentre sur l’aspect technique de la création monétaire, en omettant « l’ordre juridique » qu’il a toujours engendré, soit en radicalisant pour simplifier le propos :
    Peu importe que l’argent soit créé ex-nihilo, peu importe le montant alloué comme réserve fractionnaire aux banques, peu importe la nature de l’intérêt. L’ordre juridique implique cette curiosité en forme d’écriture comptable et c’est l’hypothèse de départ :

    – 10 Euros investis > 10 Euros en monnaie fiduciaire.
    – Pourtant dans cette inéquation les deux quantités sont exprimées en euro pour la même quantité : 10

    En retenant ce pré-requis, tout le débat qui tourne autour de la conservation des quantités de monnaies ou de son aspect « création ex-nihilo » est forcément erroné par cette inéquation de départ.

    Le Banquier créé ex-nihilo dispose de cette délégation de pouvoir confiée par le législateur : Accessoirement multiplier les moyens de paiements en conservant les quantités de monnaies ( en essayant de ne pas se planter) mais surtout de s’assurer que l’inéquation présentée plus haut soit TOUJOURS respectée, avec l’ordre social qu’elle engendre : Un « capitaliste » (sans notion péjorative) aura toujours besoin d’un législateur pour légitimer sa mainmise sur le travail d’autrui, c’est la conséquence de cette inéquation. L’amorce de ce travail juridique est assuré par le système bancaire, l’amorce est un rouleau compresseur.

    Je partage vos interrogations sur les conséquences du capitalisme, mon propos était juste de signaler que si l’objet « Banque » produit de la monnaie scripturale à la pelle et qu’il est légitime de comprendre ce mécanisme (l’objet du débat), la fonction de la banque au sein du corps social est plus subtile, et finalement plus importante que l’argent qu’elle créé ex-nihilo : Le Maintien de l’Ordre que tous les politiciens (peu importe la couleur) jugeront comme « Naturel » une fois parvenu au pouvoir. Il suffit de comtempler les réactions des politiques face à cette crise pour en prendre la mesure.

  3. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Sophie : ce que vous dites est très intéressant.

    Vous reprenez le texte du lien donné par « Moi » au prétexte qu’il sert votre propos. J’en cite un extrait :

    La solvabilité d’une banque est donc sa capacité à faire face aux demandes de retrait de ses déposants.

    Mais comment diable la banque ne pourrait pas faire face aux demandes de retrait de ses déposants si elle n’a pas prêté leur argent et qu’il dort bien tranquillement dans ses coffres?

    Pouvez-vous me citer une source qui soutient que les banques ne prêtent pas les dépôts (à vue ou pas, peu importe)?

  4. Avatar de Archimondain
    Archimondain

    @Julien Alexandre
    ca répond a ma question 🙂
    merci

  5. Avatar de Moi
    Moi

    @Sophie : « mais pas avec votre conclusion (L’argent de votre DAV est prêté par votre banque), car ca n’a rien à voir: il n’y a aucun lien de cause à effet! »

    Actif circulant et financier, cela signifie dans les termes que cet argent a été prêté, contrairement à l’actif immobilisé (fonds propres, 8% min réglementaires des actifs risqués).
    La formule est celle-ci “Capitaux propres + Dettes = Actif immobilisé + Actif circulant et financier ”

    Capitaux propres = capital de la banque
    Dettes = DAV (+ emprunts auprès d’autres banques)
    Actif immobilisé = 8% min de réserve des actifs risqués (Bâle II)
    Actif circulant et financier = crédits octroyés par la banque.

    L’actif immobilisé étant une constante, comment une banque peut-elle augmenter sa faculté de crédit (l’actif circulant). Réponse: « pour pouvoir distribuer davantage de crédit, la banque doit soit collecter davantage de dépôts, …, soit renforcer ses capitaux propres ». Autrement dit, soit elle est recapitalisée, soit elle fait de nouveaux emprunts sur le marché interbancaire, soit elle trouve de nouveaux déposants.

    « De toute facon une banque, en acceptant un emprunt (et en créant la monnaie) va, au moment où cette monnaie est crée, voir augmenter du même montant son actif (montant de la créance) et son passif (DAV au compte de l’emprunteur) … »

    Non. Elle ne peut pas faire comme vous dites.

    Ainsi le bilan d’une banque (on oublie les fonds propres, etc):

    Actif = un billet de 100
    Passif = DAV du client A

    Le client B vient demander un prêt de 100 mais ne le retire pas tout de suite. Le bilan devient:

    Actif = créance auprès de B + billet de 100
    Passif = DAV du client B + DAV du client A

    Le client B retire son billet.

    Actif = créance auprès de B + 0 en caisse
    Passif = 0 (DAV du client B) + DAV du client A.

    Et là si un client C arrive pour un nouveau prêt de 100, la banque ne le peut pas à moins de chercher de l’argent chez un nouveau déposant ou une autre banque. Certes, la banque pourrait faire comme vous le croyez et faire comme si l’argent existait et le bilan serait toujours équilibré:

    Actif = créance auprès de B + 0 en caisse + créance auprès de C = 200
    Passif = 0 (DAV de B) + DAV de A + 100 dans DAV de C = 200

    Mais au moment où C va utiliser son DAV, il va y avoir compensation auprès d’une autre banque. Ainsi C va acheter une voiture et paye par carte de crédit, le vendeur de voiture D se retrouve crédité de 100 auprès de sa banque. Le soir-même, la banque de D va contacter la banque de C et lui dire « eh oh tu me dois 100, fais-moi le transfert du pognon ». Et là la banque de C ne peut pas dire « t’occupes, ouvre-moi une ligne de crédit, je te payerai demain ». En réalité c’est centralisé et compensé entre banques, ce qui fait que l’argent ne circule pas réellement mais il doit exister réellement.

    D’après J. A. (et c’était une question d’Archimondain que je me posais aussi), même si D a son compte auprès de la même banque que C, l’argent réel sera forcé d’exister sinon il n’est pas permis (légalement?) à la banque de faire son crédit à C. C’est le seul cas théorique que je vois où la banque pourrait masquer son insolvabilité et ainsi créer de l’argent par une écriture.

  6. Avatar de Fab
    Fab

    @ Bertrand,

    Merci pour votre message. Vous parlez du rôle de maintien de l’ordre qu’a la banque : je ne peux qu’être d’accord ! L’argent a un rôle de maintien de l’ordre…L’argent tend à n’avoir plus que le maintien de l’ordre pour seul rôle. Et je pense que nous, citoyens du monde, commençons à en prendre conscience. D’où les doutes que j’exprime de donner la priorité à une amélioration du système : bancaire pour certains, économique ou financier voire politique pour d’autres. C’est reculer pour mieux sauter. Je place la priorité ailleurs et je pensais qu’il eut été propice de profiter de la crise actuelle pour parler de choses importantes et trouver une autre motivation que la consommation ! On peut vivre très bien sans entrer dans le système de consommation, et de ça aussi beaucoup de gens se rendent compte.
    Quelle serait alors la solution ! Je ne sais pas, et ne veux surtout pas me prononcer de peur de passer pour encore plus fada, mais j’aimerais qu’ »on » y pense. Ca peut sembler utopique, mais nombre de peuples de par le monde vivent sur d’autres bases que les nôtres. Il ne faut pas l’oublier et persister dans l’idée que nous sommes les plus intelligents et avons donc le droit d’imposer notre mode de vie « aux restes » du monde (par la force souvent) et de piller notre planète : ça ne marchera pas. Ca ne marchera plus longtemps.
    Vu la prise de conscience mondiale, vu l’état de la planète (à quelque niveau que ce soit), je pense que ça vaudrait le coup d’y réfléchir

    Merci

  7. Avatar de Sophie
    Sophie

    @Moi
    Je ne puis faire plus que les explications que j’ai apporté jusqu’à ce jour… je vous laisse donc réinventer la comptabilité bancaire puisque ni vous, ni Archimondain, ni J.A. (et quelques autres) ne veulent faire le petit effort de lire les livres des spécialistes universitaires, économistes et banquiers plusieurs fois cités sur ce blog,
    … et en particulier Plihon (économiste à la banque de France ET universitaire)

    Les banques financent une partie de leurs opérations de crédit par des ressources financières qui correspondent à l’épargne contractuelle et aux ressources non monétaires inscrites à leur passif . Ces financements sur ressources financières, c’est-à-dire sur une épargne préexistante, ne donnent pas lieu à de la création monétaire pour des raisons expliquées précédemment (p. 19).
    On fait ainsi apparaître les trois sources principales de création monétaire, dénommées « contreparties » de la masse monétaire :
    – la contrepartie extérieure : c’est la création monétaire qui résulte des opérations externes dont on peut distinguer deux catégories : en premier lieu, les opérations de la banque centrale, notamment à l’occasion de ses interventions sur le marché des changes (voir p. 94 et Plihon, 2001) ; en second lieu, les opérations des banques : lorsque celles-ci prêtent (empruntent) de l’euro à l’extérieur de la zone euro, elles créent (détruisent) de la monnaie à cette occasion. L’évolution de la contrepartie extérieure est liée directement à la situation de la balance des paiements. Si la balance globale (qui regroupe les transactions courantes et les mouvements de capitaux à long terme) est excédentaire, cela induit une création monétaire d’origine extérieure, par l’accumulation de réserves de change de la Banque centrale européenne et de créances extérieures du système bancaire ;
    – la contrepartie « créances nettes sur l’Etat » retrace la création monétaire qui résulte de l’endettement de l’Etat. Ces créances sont détenues, pour l’essentiel, par les banques et la banque centrale ;
    – la contrepartie « créances sur l’économie » correspond aux financements consentis par le système bancaire aux agents non financiers autres que l’État (ménages, entreprises). Comme on peut le voir sur le tableau 6, cette contrepartie représente de loin la principale source de création monétaire (près de 76 % en janvier 2004), tandis que les autres sources de création monétaire représentent respectivement 21 % pour les créances nettes sur les administrations publiques et 3 % pour les opérations avec l’extérieur.

  8. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Sophie : il n’y a rien à réinventer. Les livres spécialisés, merci je les ai lus APRES avoir réfléchi seul de mon côté, et c’est bien comme cela que j’ai compris où je m’étais trompé (car j’avoue humblement avoir pensé plus ou moins comme vous à un moment…).
    Quand un économiste/professeur/etc. parle de « création monétaire » par les banques, c’est au mieux un aplatissement du savoir ou une volonté de ne pas créer de panique (« quoi la banque prête mes sous? Je vais les chercher de ce pas et dire à tout le monde de faire de même »), au pire une incompréhension de sa part.

    Je vous renvois amicalement à ma précédente question

    PS : Plihon a été économiste à la Banque de France il y a 25 ans. Aujourd’hui, il fait parti du réseau Attac il me semble.
    Ceci n’enlève rien à la qualité de son propos. Encore une fois, il ne dit rien de différent de ce que je dis :

    …trois sources principales de création monétaire, dénommées « contreparties » de la masse monétaire

    Vous comprenez ça comme de l’argent créé à partir de rien vous?

    A priori, je devrais être étonné que 2 personnes puissent lire le même texte et y comprendre des choses radicalement différentes s’il n’y avait pas un biais, largement expliqué dans un contexte similaire par Paul Jorion dans ce billet

    Vous lisez « création monétaire » donc vous dites « les banques créent de la monnaie ». Plihon précise pourtant bien qu’il s’agît des contreparties de la masse monétaire.

  9. Avatar de Sophie
    Sophie

    Tennez un autre texte, d’Alternatives Economiques ( Hors-série n°45- Juillet 2000)
    Mais comme j’en ai assez d’argumenter pour rien, je cesse de le faire, mais je ne comprends toujours pas pourquoi quelques uns ici ne peuvent admettre l’idée qu’en créant de la monnaie (de crédit, par un crédit) une banque augmente les deux cotés de son bilan et que de ce fait elle n’a aucun besoin de « ponctionner » les comptes à vue, puisque le crédit qu’elle fait va justement augmenter ceux ci…

    Mais nous sommes de toute façon d’accord pour dire que si « vous » considérez que le terme monnaie ne peut représenter que de la monnaie centrale, alors vous avez raison, les banques ne créent pas de votre monnaie…

    Le miracle de la création monétaire

    Devises, crédits aux particuliers, aux entreprises et à l’Etat sont les sources, ou contreparties, de la masse monétaire. Néanmoins, tous les crédits ne contribuent pas à augmenter la quantité de monnaie en circulation.

    Supposons que les habitants d’un pays possèdent des pièces d’or. Pour ne pas se faire dévaliser, ils les déposent dans une banque qui leur donne en échange des « tickets de consigne », des billets. Grâce à ces tickets de consigne, on peut reprendre son or quand on veut en ramenant les billets.

    Faisons maintenant un peu de comptabilité -sans comptabilité, on ne peut rien comprendre à la monnaie (mais on peut également ne rien comprendre à la monnaie tout en étant un excellent comptable…). Après la mise en consigne, la banque possède un actif en or de 100. Mais elle doit cet or aux clients qui le lui ont apporté, elle a une dette à leur égard, notée au passif, de 100également. La monnaie est une dette pour l’émetteur de monnaie et une créance pour son possesseur.

    A-t-on créé de la monnaie en imprimant les billets? Oui, diront certains: on a l’or plus les billets, la quantité de monnaie a doublé. Evidement non, car la monnaie fiduciaire (les billets) s’est seulement substituée à la monnaie matérialisée par de l’or: la masse monétaire est seulement ce qui appartient au public et peut être dépensé -on ne peut plus dépenser l’or déposé à la banque. L’or est la source ou la contrepartie de la masse monétaire, en billets pour le moment.

    Les sources étrangères de la monnaie

    Imaginons que nos habitants exportent plus qu’ils n’importent. Ils obtiennent, disons, 40 en devises, de la monnaie étrangère qui n’a pas cours légal dans le pays. Le public, qui veut de la monnaie locale, amène ces devises à la banque, laquelle lui fournit en échange des billets, par une opération de change (encore des tickets de consigne). L’actif des agents non financiers a augmenté de 40 en billets, de même que le passif de la banque; il y a alors une création monétaire dont les devises sont la source. On appelle contrepartie extérieure de la masse monétaire les devises (l’or étant noyé dans ce concept). L’excédent commercial, plus généralement l’excédent de la balance des paiements, est donc source de création monétaire.

    Mais les voleurs- pensons aux frères Dalton- aiment aussi les billets de banque. Pour ne pas se faire dépouiller, le public dépose ses billets à la banque. Ce n’est pas la même banque. La première, celle qui émet les billets nationaux et change les devises, c’est la banque centrale. Elle laisse les banques commerciales assurer cette nouvelle fonction de collecte des billets.

    Que se passe-t-il? Le public substitue à son actif des billets par des créances auprès des banques commerciales: des dépôts à vue. Les banques commerciales possèdent maintenant des billets à leur actif, mais doivent aux déposants un montant équivalent. Aucune création monétaire dans cette opération anti-Dalton: la monnaie de banque centrale (les billets) s’est transformée en monnaie de banque commerciale, dont le principal support est souvent le carnet de chèques, que l’on appelle la monnaie scripturale.

    Les banques commerciales sont alors tentées de ne pas laisser dormir leurs encaisses, d’autant plus qu’on leur propose de les leur emprunter moyennant un petit profit: le taux d’intérêt. Elles se laissent tenter. Supposons qu’une banque prête un montant supérieur à ce qu’elle détient en billets. Comment fera-t-elle? Elle créditera le compte de l’agent non financier qui pourra payer par chèque, carte de paiement, etc. Apparemment, aucune monnaie n’a été créée, aucune planche à billets n’a ronronné. C’est faux. De la monnaie a bien été créée, le public possède maintenant dans son actif un moyen de paiement supplémentaire, sous forme de dépôt à vue créé par le crédit (ce sont les crédits qui font les dépôts). De l’autre côté, au passif, le public doit cet argent à la banque qui, du coup, possède sur le public une créance, le crédit bancaire. Personne n’est devenu plus riche: le public a une dette de plus et un actif en banque de plus du même montant; la banque, une créance de plus (le crédit accordé) et une dette de plus (le dépôt à vue).

    Le crédit à l’économie: monnaie de singe?

    Une nouvelle contrepartie de la masse monétaire vient d’apparaître: le crédit bancaire au public (les ménages ou les entreprises), nommé crédit à l’économie. Quand le public rembourse tous les crédits accordés, on constate une destruction de monnaie. Rien n’a brûlé, mais il y a bien destruction de monnaie, car la masse des moyens de paiement des agents non financiers a fondu en même temps que le crédit, la source qui l’avait fait naître.

    Ce crédit bancaire ressemble fort à une création de monnaie de singe, dans la mesure où le stock d’or et de devises, la « vraie contrepartie » de la masse monétaire, n’a pas bougé. Si le bénéficiaire du crédit ou l’ancien déposant veut de la monnaie en billets, la banque risque la faillite: elle n’en a généralement pas assez, c’est le risque d’illiquidité. Elle se précipite alors à la banque centrale et lui demande un crédit du même montant, pour honorer sa dette, en monnaie sonnante et trébuchante. La banque centrale hésite, mais se dit que si elle refuse, le système bancaire est par terre; alors, elle accorde le crédit en gros; comme la banque commerciale l’avait accordé au public.

    Enfin, voilà de la vraie création monétaire, diront certains: la planche à billets, et pas ces écritures qui ne créaient que de la monnaie de singe. Grave erreur: pas un centime de monnaie n’a été créé, la masse monétaire n’a pas bougé, bien que de la monnaie de banque centrale (1) ait été émise. Mais elle se trouve dans les coffres des banques et ne fait donc pas partie de la masse monétaire. Après ce refinancement, la banque, avec un large sourire, fournit les billets demandés. Enfin de la création monétaire? Toujours pas! De la monnaie fiduciaire a simplement remplacé de la monnaie scripturale: des dépôts à vue ont disparu à l’actif du public, remplacés par les billets, et ils ont disparu du passif de la banque commerciale, en même temps que les billets de banque à l’actif.

    Il ne manquait que l’Etat qui, s’il doit financer son déficit budgétaire, va aussi profiter de la création monétaire. Il le fait soit en empruntant de l’épargne déjà existante, en émettant des obligations à long terme ou des bons du Trésor à court terme souscrits par le public ou par les banques, soit en demandant des avances à la banque centrale. Dans le premier cas, il n’y pas création monétaire, simplement transfert par l’emprunt de monnaie existante -comme, plus haut, quand les banques émettaient des obligations. Pour le reste, il y a bien création monétaire (financement monétaire de la politique budgétaire). Comment cela se produit-il?

    La Banque centrale achète, en fournissant par exemple des billets de banque, une partie des bons du Trésor détenus par les agents non financiers. Si elle en achète beaucoup, leur valeur va augmenter et, comme ils sont très demandés, le taux d’intérêt que l’Etat devra proposer va baisser. On assiste à une création monétaire, car des créances non monétaires se sont transformées en monnaie (2) . La banque centrale vient de faire une opération d’open market. Elle a créée de la monnaie et fait baisser le taux d’intérêt. Une telle politique lui sert à soutenir l’économie. Si la banque centrale revend, contre par exemple des billets de banque, une partie des bons du Trésor qu’elle avait achetés aux agents non financiers, si elle en vend beaucoup, leur valeur va baisser et le taux d’intérêt augmenter. On assiste alors à une destruction monétaire. La banque centrale vient de faire une opération inverse d’open market, elle vient de détruire de la monnaie, d’assécher une partie de ce qu’elle estime être un surplus de liquidité à éponger; elle a fait monter le taux d’intérêt. Elle agit ainsi lorsqu’elle a peur de l’inflation. Une autre contrepartie de la masse monétaire apparaît: les crédits à l’Etat (3).

    Tout crédit bancaire est-il donc source de création monétaire? Non, si la source du crédit est la collecte d’une épargne existant déjà; et si, par exemple, les ménages transfèrent une partie de ce qu’il y a sur leurs comptes à vue vers un plan d’épargne logement, il y a une destruction monétaire, du fait de la baisse du montant de monnaie utilisable immédiatement. De même, si les banques commerciales émettent des obligations (c’est-à-dire empruntent de l’argent) souscrites par le public, on a une autre destruction monétaire: la masse monétaire détenue par le public passant dans les mains des banques disparaît, pas physiquement, mais en tant que pouvoir d’achat immédiat. D’où la présentation habituelle des contreparties de la masse monétaire, où ces sources non monétaires, dites ressources stables, sont déduites des crédits pour correspondre à la monnaie en circulation (voir encadré).

    La moitié des crédits correspond à de la création monétaire

    On note qu’il n’y a qu’un peu plus de la moitié des crédits qui correspond à de la création monétaire. On remarque également l’insignifiance du rôle joué par l’extérieur, qui ne représente que 3% de M3. La plus grande partie de la masse monétaire est donc bien la conséquence des crédits bancaires (au secteur privé, dans son écrasante majorité, mais aussi à l’Etat): une simple écriture comptable, du vent, pas de l’or ou des devises. Ce qui ne veut pas dire que ce vent ne puisse pas, en soufflant, avoir des effets tangibles sur l’économie, pour relancer l’activité ou lutter contre le chômage.

    Patrick CASTEX

    Alternatives Economiques – Hors-série n°45 – Juillet 2000
    Notes
    (1)

    On l’appelle également, avec les billets qui sont entre les mains du public, la base monétaire. Cette monnaie détenue en particulier par les banques -mais ne faisant pas partie de la masse monétaire-, existe en fait, non pas sous forme de billets, mais de compte à la banque centrale, comme le compte en banque d’un particulier.

    (2)

    C’est un peu plus compliqué. Les bons du Trésor négociables ne faisaient pas partie de la masse monétaire M3 dans les agrégats avant 1999; ils apparaissaient dans un agrégat frontière, M4, avec les billets de trésorerie émis par les entreprises.

    (3)

    Les avances au Trésor sont maintenant rigoureusement interdites par le traité de Maastricht, car considérées comme trop dangereusement inflationnistes.

  10. Avatar de Archimondain
    Archimondain

    @Julien Alexandre
    J’ai réfléchis à ma question et à votre réponse. Je dois bien admettre que je ne suis pas convaincu.

    Si une banque possède 100. Elle est en droit d’en prêter 90 tout en laissant les 100 inchangé aux yeux du client qui les a déposés.
    Si celui-ci veux faire un achat avec, la banque devra effectivement emprunter, car elle n’est pas en droit de laisser courir le crédit si les 100 ne sont plus dans ses ‘comptes’. Mais si ceux si sont utilisés pour payer quelque chose à quelqu’un qui a un compte dans cette même banque, les 100 ne quittent pas la banque, cela ne change rien qu’ils soit sur un compte ou sur un autre. La seul différence, c’est que ce nouveau dépot ne peut donner lieu à du crédit supplémentaire, puisqu’il a déjà servit une fois à cela.

    Cela ne vous parait-il pas logique ?

  11. Avatar de Archimondain
    Archimondain

    Et, c’est moi qui ait choppé le 100 ème commentaire 🙂

  12. Avatar de bankster.tv

    @2Casa: Comme vous avez pu le lire sur le blog de la personne en question et sur le copié/collé, cette personne confond reserve fractionelle (obligatoire) avec multiplicateur de crédit. Non seulement cela apporte de la confusion pour les néophytes, mais quand on affirme en se servant d’un exemple faux pour démonter quelque chose de vrai, c’est comme quand on remet en cause les travaux d’un prix nobel, on y réfléchit et on verifie à deux fois (ou +) !.. C’est la raison pour laquelle ces posts ont été éffacés de la page commentaire de l’argent dette sur vimeo (je ne sais pas ce qu’est bellacio).
    Au passage en Europe avec 1111.12 vous ne récoltez pas d’intérêts réels sur 100.000 d’argent fictif, c’est 2% soit du 1 pour 50 soit avec 1111.12 on récolte sur 500.000. Voila pourquoi les pseudo débat autour de l’exactitude d’un calcul (à savoir est ce qu’on collecte sur 90.000 ou 100.000) nous fait marrer, parce que dans LA VRAIE VIE (ICI et MAINTENANT), c’est sur 500.000 … mais bon bref passons…

    Et concernant nos interventions, elles opérent ponctuellement et de moins en moins souvent. Notre seul but est de faire découvrir le film de Paul Grignon.
    Mais si nous vous genons, ne vous arretez pas à nous, allez voir ZeitGeist Addendum, ou tellement d’autres maintenant…

    Allez en attendant le début de la fin, détendez vous : http://www.youtube.com/watch?v=dnT21hmlT4o

    A noter également que le pseudo bankster est utilisé par d’autres personnes que nous, donc si vous voulez vous referez a ce qu’on pense/dit, faites le à partir du site. merci.

  13. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Archimondain : relisez bien ma réponse « la banque sera tenue d’emprunter la somme nécessaire pour assurer la fourniture de liquidité « . Votre exemple illustre simplement un transfert de reconnaissance de dette. Et vous serez d’accord que dans le cas que vous décrivez il n’y a donc pas de création monétaire:)

  14. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Sophie : je suis content de voir que l’on progresse quand vous dites

    Mais nous sommes de toute façon d’accord pour dire que si “vous” considérez que le terme monnaie ne peut représenter que de la monnaie centrale, alors vous avez raison, les banques ne créent pas de votre monnaie…

    Quand vous aurez demandé à votre banque si elle prête les dépôts et qu’elle vous aura répondu « oui bien sûr », nous serons sur la même longueur d’onde 🙂

  15. Avatar de Marc Peltier
    Marc Peltier

    @ barbe toute bleue
    « La « richesse » est simplement la quantité d’énergie dont on peut disposer, individuellement, ou en commun. »

    Votre idée semble être que l’économie est équivalente à la physique. Je ne le pense pas du tout, mais admettons un instant…

    Une formulation physique plus rigoureuse serait alors : « La richesse est le quantité d’énergie ET D’INFORMATION dont on peut disposer, individuellement, ou en commun. »

    On mesure alors que l’on n’a guère avancé dans les concepts…

  16. Avatar de Nadine
    Nadine

    @Julien Alexandre

    Finalement vous aviez peut-être raison…quelle patience !

  17. Avatar de Archimondain
    Archimondain

    A non, dans ce cas moi je vois une création monétaire, car malgré les 90 crédités et utilisables à n’importe qu’elle usage (scripturale, fiduciaire, etc…), les 100 qui ont permis ce crédit peuvent également être utilisé ‘comme si il s’agissait d’argent différent’. Il y a bien ici usage de 190 EN MEME TEMPS alors que seul 100 devrait pouvoir être utilisé en même temps. Il y a donc bien une création de 90. (mais restreint à un usage intra-bancaire).

    Cela ne vous apparait-il pas logique ?

    Je considère que quelque chose est de l’argent (reconnaissance de dette ou pas) à partir du moment ou il peut être dépensé sans contrepartie comptable (dépenser 100 en échange de 100 n’est pas une vrai dépense). Il semble bien que ce soit le cas ici. Avec quoi n’êtes vous pas d’accord ?

    Merci d’avance

  18. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Archimondain : non il n’y a pas « usage de 190 en même temps ». A moins que vous puissiez définir ce qu’est un « usage intra-bancaire ».

  19. Avatar de Archimondain
    Archimondain

    Je définie un usage d’argent intra-bacaire comme un usage de cet argent entre DAV de la même banque.

    Je veux transférer 100 de mon compte vers le compte d’un ami à la même banque. Ce transfert ne change absolument rien pour la compabilité de la banque. quand bien même ces 100 ont déjà été prêtés, à travers le transfert, je les utilise comme de l’argent (par exemple pour rembourser mon ami d’une dette ou encore pour le rémunérer d’un certain travail) alors que ce n’est pas supposé en être (puis qu’il est prêté). Pendant que j’utilise cet argent pour faire le transfert à mon ami, ce « même » argent qui est aussi prêté, est utilisé autre part par quelqu’un ayant contracté un crédit. Il y a donc bien usage potentiel de 190 en même temps.

    La différence encore une fois, étant que le dépot résultant du transfert ne peut donner lieu à de nouveaux crédits, puisqu’ils sont déjà lié à un crédit.

    Etes-vous convaincu ?
    Sinon je ne demande qu’à comprendre ce qui cloche.

  20. Avatar de Sophie
    Sophie

    @Julien Alexandre
    … sauf qu’il faudra vous y faire … la monnaie est aussi bien Banque centrale (monnaie fiduciaire) que banques commerciales ( monnaies scripturales) … et que je maintiens que les banques comerciales NE PEUVENT PAS prêter les DAV
    A part cela, oui, nos points de vue se rapprochent … sauf qu’ils sont diamétralement opposés 🙂

  21. Avatar de 2Casa
    2Casa

    @ B…kster.tv

    Pour aller vite les nouvelles vont vite !

    Bref, je le serai, pour une fois : que nous ne divergions pas sur les objectifs je ne suis pas sûr, mais sur les méthodes absolument.

    Relire mon petit topo sur l’Ethique de la discussion. Ou bien J. Habermas, K.O. Apel.

    Toutes mes amitiés à MM. Chouard, Bru, aux Banksters vrais, faux, supposés, à Sophie pour sa pugnacité.

    En ce qui me concerne le débat est clos. Enfin pour ce qui est de la monnaie.

  22. Avatar de Tentative de lucidité
    Tentative de lucidité

    @2Casa

    Et quelle est ta conclusion (a propos de la monnaie) ?

    D’avance merci pour ta ou vos réponses

  23. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Archmondain : merci pour votre définition de l’usage intra-bancaire. Malheureusement cela n’a pas de sens. Ce que vous appelez usage intra-bancaire n’est rien d’autre qu’un transfert de reconnaissance de dette. Si l’ami à qui vous avez transféré votre reconnaissance de dette décide d’utiliser ce nouveau dépôt comme moyen de paiement ou retrait en liquide, la banque devra emprunter l’argent nécessaire. Les 100 € initiaux ne permettent à aucun moment « d’utiliser » simultanément 190€. Vous donnez en substance la réponse à votre question quand vous dites « ce transfert ne change rien pour la comptabilité de la banque « . Ce transfert là non, un retrait ou un paiement si. Avec comme conséquence directe pour la banque la nécessité d’emprunter afin de préserver sa solvabilité.

    @ Sophie : en temps normal je vous aurais certainement dit qu’il n’est de bonne compagnie qui ne se quitte, mais je trouve votre obstination stimulante. Néanmoins, pour la bonne tenue du débat, je crois qu’il est nécessaire que vous précisiez d’où vous tenez l’affirmation que les banques ne prêtent pas les DAV? Pourquoi vous affirmez que les banques ne prêtent que les dépôts d’épargne? Quelle est dans notre cas précis la différence entre ces 2 types de comptes pour la banque qui l’empêche de faire avec les DAV ce qu’elle fait avec les dépôts d’épargne ?
    Me répondrez-vous???

  24. Avatar de Étienne Chouard

    En réponse à Julien Alexandre (message du /1 à 21h43) :

    Message de Jean Bayard, à propos de la Banque postale (qui part en rando montagne et qui vous salue 🙂 )

    « Il semble bien que les dirigeants de la Banque Postale (de création récente) ne se soient pas encore « débarrassés » de leur culture « CCP », et qu’ils pensent toujours que les comptes de dépôts de leur clientèle (qui sont de la monnaie, c’est indéniable) ont pour contre partie de la monnaie, comme c’était le cas avec les CCP. Ceux-ci répondaient alors à la définition de l’établissement financier qu’ils étaient.

    Il faut rappeler qu’auparavant la trésorerie des CCP était utilisée par le Trésor Public qui se servait à cette fin d’un compte extérieur (aux CCP), celui de la Banque de France. Il ne faut pas oublier non plus que les CCP ne prêtaient pas d’argent, pour la bonne raison qu’il aurait fallu alors le prendre sur la trésorerie du Trésor ! Et s’ils ne prêtaient pas d’argent, ils ne pouvaient pas en créer (exception faite cependant de l’inscription en compte du salaire des fonctionnaires, toujours pour les mêmes raisons de trésorerie de l’Etat).

    Voir à ce sujet sur mon site, le dossier : « Comment distinguer les banques qui créent la monnaie et les établissements financiers qui ne peuvent que la faire circuler ».

    Depuis que la Banque Postale dispose du statut de banque, les choses ont changé. Dorénavant, elle peut (créer et) prêter comme n’importe quelle banque par une simple écriture comptable : elle inscrit à son actif une créance (qui n’est pas de la monnaie) et à son passif les fonds qui sont portés au compte DAV de l’emprunteur (qui est la monnaie). Pour être certain que la Banque Postale ne crée pas la monnaie, il faudrait qu’elle nous explique comment elle met à disposition les fonds qu’elle prête à son client, vraisemblablement titulaire d’un compte ouvert dans ses livres.

    Si, pour mettre des fonds à la disposition de l’emprunteur (son client),

    – si elle passe l’écriture ci-dessus (comme une vraie banque), alors, elle crée la monnaie ;

    – si elle fait un chèque (et pas une simple écriture créditant un DAV) tiré sur la Banque de France à l’ordre de son client (comme le ferait un établissement financier), alors, elle ne crée pas la monnaie (elle la transfère). Dans ce cas, son client peut aller déposer ce chèque dans une autre banque.

    L’examen du bilan de La Poste au 31 12 2007, montre en effet qu’elle prête peu si l’on compare les créances sur la clientèle (24,4 mds €) d’une part à l’actif et les dépôts à vue et à terme de sa clientèle (91,8 mds €) d’autre part au passif. Indéniablement l’histoire y est pour quelque chose. La BNP à fin 2004 (je n’ai rien de plus récent) affiche respectivement 237,7 mds € contre 258,1 mds €. Vous pouvez voir la différence.

    C’est la raison pour laquelle, elle dit à propos de son bilan : « Il se caractérise par sa structure atypique pour une banque de détail, avec un montant de dépôts significativement plus important que celui des prêts à la clientèle. »

    Vis-à-vis de ses concurrentes, la Banque Postale est structurellement prêteuse, tandis que la BNP est au contraire structurellement emprunteuse. Ce qui est indépendant des chiffres de la clientèle donnés ci-dessus. »

    Jean Bayard
    9 janvier 2009
    ________________

    Par procuration (et en plein boulot de préparation de mon propre message),

    Étienne.

  25. Avatar de barbe-toute-bleue
    barbe-toute-bleue

    @Marc Peltier

    Vous allez pensez que je suis de mauvaise foi à vouloir ainsi retomber sur mes pieds, mais l’information est issue d’énergie qui a permis de l’accumuler, grâce à des gens qui l’ont rassemblée, et mise à disposition. Cette information peut disparaitre par une action contraire. C’est plus facile d’ailleurs de détruire que de construire, puisque cela ne demande pas d’organisation architecturale.

    Pour pousser plus loin : pourquoi faire des guerres ? Elles ont un bilan énergétique non constructif, cad nul, voir plutôt négatif, pour l’humanité. Juste de l’annihilation qui laisse un gros tas fumant au milieu. Le fait est que, la guerre a toujours été un moyen de se payer sur le mort.
    Avant on appelait l’activité, autorisée aux soldats, du pillage.
    Mais dans le type guerre américaine actuelle ( disons plus largement colonialiste, pour n’oublier personne ), il s’agit de raid, à l’extérieur, toujours sur le même principe : si de « l’énergie » peut être retirée du désordre, elle ne l’est qu’au profit de quelques-uns.

    Désolé pour la parenthèse au milieu d’un débat très technique sur la monnaie.

    Vous aurez compris que lorsque je parle de Joules comme unité de richesse, c’est totalement in-gé-rable. C’est donc en partie ironique … quoique… si on pouvait inventer un moyen deee … Pas moi, je n’ai pas encore vu la lumière pour pouvoir offrir une solution pragmatique au monde.

    Par contre, avec cette idée, richesse=énergie ( pas une égalité monolithique, on pourrait détailler sur plusieurs pages ), vous savez sur quoi on peut adosser une monnaie ou un crédit, et surtout, ce sur quoi vous ne pouvez pas ! Suivez mon regard, en particulier si vous aussi aviez entendu parler de produits dérivés.

    Le risque pour le pari futur, est que vous ne savez pas comment « l’énergie instantanée » se dépose au fur et à mesure, ni si les challenges de l’avenir sont réalisables.
    Si ils ne l’étaient pas, commencez immédiatement la propagande pour la décroissance, car il ne resterait que cette issue.

    Rassurez-vous, je n’ai pas de chapelle à défendre, je superpose juste une autre grille de lecture. Cela devient-il une sécurité ou de l’inertie ??? Bon, c’est vraiment regarder par tout au dessus. Mais ce n’est pas pour me montrer prétentieux, j’y vois plus clair ainsi, même si ça peut paraître étonnant à d’autres.

    Non du tout du tout, la physique n’est pas équivalente à l’économie. La physique va expliquer pourquoi nous sommes ici, dans ces conditions, actuellement. L’économie essaie de jongler avec des équilibreuuuuh très instables, pour que tout ne se casse pas la gueule.

  26. Avatar de Bru
    Bru

    J’essaie un dernier argument sur le thème « la monnaie scripturale est bien de monnaie ».

    La base monétaire, celle qui n’est pas créée par les banque commerciale, mais par les banque centrale, en l’occurrence les pièces et les billets représente un montant d’un peut plus de 1000Md$ à l’été 2008.

    Les réserves cumulées de devise des chinois et japonais représente plus du double de ce montant. D’où peuvent bien sortir ces réserves monétaires qui n’existe pas ?

    LA MONNAIE N’EST PAS SE QUI SE RETIRE SOUS FORME D’ARGENT, MAIS CE QUI EST ACCEPTE COMME FORME PAIEMENT.

  27. Avatar de Julien Alexandre
    Julien Alexandre

    @ Archimondain : merci pour votre définition de l’usage intra-bancaire. Malheureusement, cela n’a pas de sens. Ce que vous appelez usage intra-bancaire n’est qu’un transfert de reconnaissance de dette. Si l’ami à qui vous avez transféré votre reconnaissance de dette dans la même banque décide d’utiliser ce dépôt comme moyen de paiement ou pour effectuer un retrait en liquide, la banque devra emprunter l’argent nécessaire. Les 100 € initiaux ne permettent à aucun moment « d’utiliser » simultanément 190 €. Vous donnez en substance la réponse à votre question quand vous dites « ce transfert ne change absolument rien pour la comptabilité de la banque ». Ce transfert là non. Un retrait ou un moyen de paiement si. Avec pour conséquence la nécessité d’emprunter pour la banque afin d’assurer sa solvabilité.

    @ Sophie : en temps normal, je vous aurais probablement laissé vaquer à vos élucubrations d’un magistral (et non moins amical) « Il n’est de bonne compagnie qui ne se quitte ». Mais je trouve votre obstination stimulante intellectuellement.

    Aussi, pour la bonne tenue du débat, je crois qu’il est nécessaire que vous nous précisiez à ce stade :

    – d’où tenez-vous que les banques ne prêtent pas les DAV (vous travaillez dans une banque? un ami travaille dans une banque? vous l’avez lu quelque part? une source même un petite? Légifrance?)

    – pourquoi affirmez-vous alors que les banques ne prêtent que les dépôts d’épargne?

    – dans notre cas précis, quelle est la différence fondamentale pour une banque entre ces 2 types de comptes qui l’empêche de faire avec les DAV ce qu’elle fait avec les dépôts d’épargne? (je précise bien dans notre cas précis, pas besoin d’expliquer en quoi un DAV est différent d’un compte-épargne).

  28. Avatar de Nadine
    Nadine

    @Etienne
    @Les créationnistes

    Une simple précision pour mettre peut-être d’accord tout le monde:

    Je disais plus haut:

    « Parce que plus une banque acquière de la monnaie scripturale provenant d’autres banques, plus la banque amasse des créances sur ses concurrentes , elle pourra créer des crédits donc prêter sa monnaie scripturale qui en cas de fuite sera compensée sans difficulté si elle n’utilise que 90% des dépôts, le reste couvrant les retraits en monnaie fiduciaire. C’est la seule raison d’être de ce système fractionnaire.
    Les règles prudentielles permettent aux banques de limiter leur crédit de tel sorte que les compensations bancaires n’entraînent pas des soldes en leur défaveur plus important que leur réserve voir leur fond propre.
    Ce sont les dépôts qui font les crédits mais non l’inverse sinon c’est la faillite assurée. »

    Quand je dis que ce sont les dépôts qui font les crédits c’est au niveau uniquement des banques prises individuellement car au niveau du système bancaire dans son ensemble ce sont bien les crédits qui font les dépôts, c’est presque une évidence !

  29. Avatar de Nadine
    Nadine

    @Bru
    Remarque interessante.
    Pouvez vous préciser votre question ?

  30. Avatar de Bru
    Bru

    Je soupçonne tout de même M. Jorion, d’étudier au travers du pugilat actuel (dont il a allumé et entretenu le feu), notre comportement, nos réflexions et nos relations face a ces objets si particulier que sont argent et monnaies. Force est de constater que c’est la panique, la noyade, le désastre.

    Le sujet abordait ne paraissait tout de même pas insurmontable : « les banques commerciales créent-elles oui ou non de la monnaie ? ».

    Chacun, de part sa relation à l’argent a ses propres convictions/opinions desquelles il ne démordra a priori jamais.
    Je m’inclus dans le lot, je ne suis pourtant pas en général le dernier a faire évoluer ses avis, et les intervenant de ce blog paraissent d’un bon pragmatisme… Mais sur un sujet aussi basique on n’y arrive tout simplement pas. Ca en dit long sur une éventuelle réforme monétaire (quelque soit le niveau, nationale, mondial, …), le mieux pour nos dirigeants si le cas se présente sera probablement de ne pas trop en dire sur les détails, de rester vague… comme les anciens ont fait en nous menant à la situation actuelle…

Contact

Contactez Paul Jorion

Commentaires récents

Articles récents

Catégories

Archives

Tags

Allemagne Aristote BCE Bourse Brexit capitalisme ChatGPT Chine Confinement Coronavirus Covid-19 dette dette publique Donald Trump Emmanuel Macron Espagne Etats-Unis Europe extinction du genre humain FMI France Grands Modèles de Langage Grèce intelligence artificielle interdiction des paris sur les fluctuations de prix Italie Japon Joe Biden John Maynard Keynes Karl Marx pandémie Portugal psychanalyse robotisation Royaume-Uni Russie réchauffement climatique Réfugiés spéculation Thomas Piketty Ukraine ultralibéralisme Vladimir Poutine zone euro « Le dernier qui s'en va éteint la lumière »

Meta