L’inspecteur mène l’enquête

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Vous vous souvenez de l’enquête sur le prix des matières premières ? En mai dernier Mike Masters avait fait une déposition devant un comité du Sénat américain, mettant en accusations les gros investisseurs institutionnels : fonds de pensions, universités, hôpitaux, musées, etc. se livrant selon lui à une spéculation effrénée sur ces marchés. L’accueil avait été réservé : personne ne croyait très fort à son explication. Et puis à peu près une semaine plus tard, communiqué de presse en grande fanfare de ces fameux investisseurs institutionnels et tous les sceptiques de la première heure comme moi d’être réveillés en sursaut par le vacarme qu’ils font et de nous dire : « Ah bon ! Faudrait peut–être y aller voir d’un peu plus près… » J’écrivais dans mon billet intitulé Les méchants de la nouvelle génération :

Je serais resté dans l’hésitation si ces fonds institutionnels n’avaient cru bon il y a quelques jours de se mettre à pousser des cris d’orfraie : « C’est pas nous ! On n’a rien fait ! », mettant fin à mon incertitude en faisant naïvement l’aveu de leurs turpitudes.

Ils auraient – de leur point de vue – bien entendu beaucoup mieux fait de se taire.

Autre épisode, le mois dernier cette fois : le sommet du G-20 qui se présentait comme le lancement d’un « Bretton Woods II » et dont je vous communiquais les conclusions dans G-20 : On ne change rien et on prie :

« Les dirigeants se sont mis d’accord sur le fait que les réformes nécessaires ne connaitraient de succès que si elles sont fondées sur les principes du libre-marché, incluant l’état de droit, le respect de la propriété privée, le commerce et l’investissement libres, l’existence de marchés concurrentiels et de systèmes financiers efficaces et régulés de manière efficiente ».

Ma première réaction avait été de me dire : « Qu’est-ce que ce « respect de la propriété privée » vient faire là comme un cheveu dans la soupe ? » Et puis, comme dans le cas précédent, quelques jours plus tard, la pièce est tombée comme on dit : « Ah bon ! Faudrait peut–être y aller voir d’un peu plus près… »

Je ne vous dis encore rien. Si ce n’est que, comme dans le cas précédent, ils auraient – de leur point de vue – peut–être mieux fait de se taire.

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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8 réponses à “L’inspecteur mène l’enquête”

  1. Avatar de et alors
    et alors

    Sur la commune voisine, verte, arborée et promise à un développement durable et une sain(t)e qualité de vie, une méchante multinationale s’évertue à vouloir implanter une sale « activité incompatible avec le voisinage des zones habitées »…Beurk…Enquête publique : Face à face tragique entre d’une part – le sacro-saint droit de propriété…(d’implanter) et d’autre part – le relativement nouveau droit de l’environnement..( des propriétaires ..!)…

    « La reconnaissance au niveau constitutionnel du droit de l’homme à vivre dans un environnement sain donnerait à ce principe une valeur égale aux droits fondamentaux comme la liberté de circuler ou le droit de propriété » (charte de l’environnement)
    http://fr.wikipedia.org/wiki/Charte_de_l%27environnement
    Mais peut-être suis-je encore en limite du « hors-sujet » ?

  2. Avatar de benoit
    benoit

    Ah Paul, Dieu que vous piquez ma curiosite !

    S’agirait-il de nouvelles turpitudes de membres de l’administration Bush ? D’appropriations de biens publics ou semi-publics ? D’eviter que l’Etat ne puisse se porter acquereur d’entreprises qu’il aurait pourtant renflouer avec des fonds publics ? Les banques ? Les Big Three ?
    Des interets US a l’etranger ?
    La FED ?

    Aaaah… je me creuse la tete !

  3. Avatar de Philippe

    Vous nous faites languir, ce n’est pas votre style !
    Vous allez devenir le « Balzac » du grand feuilleton économique de cette fin d’année.

  4. Avatar de Jean Meyrand
    Jean Meyrand

    Inutile de nous faire languir en effet. Si vous n’avez pas le temps de finaliser votre article, remettez-le à plus tard, dans une version complète. C’est à croire que vous cherchez à être vous aussi reconnu en tant que fin analyste des tendances à venir. Ca devient exaspérant, dans les milieux intellectuels, ce besoin de reconnaissance et ce syndrome du « Vous voyez, j’ai été le premier à prédire cela! J’avais raison! ».
    C’est dommage car ce blog est d’une bonne tenue dans l’ensemble.

  5. Avatar de et alors
    et alors

    languir : « demeurer longtemps dans une situation inconfortable qui ronge la santé morale et physique. »…tout de même ! Paul peut bien jouer de temps en temps.. et nous avec…
    allez…je me risque… la mer, les océans ? ( la lune c’est déjà fait paraît-il..)

  6. Avatar de ZORRO
    ZORRO

    C’est pas la peine d’aller chercher midi à 14h, le communiqué a simplement rappelé la trouille de nos élites devant toute idée qui ressemblerait à une forme quelconque de communisme, point barre. C’est bien la preuve que les puissants financiers dirigent le monde depuis 200 ans et ont en horreur l’idée que le peuple avec ses idées égalitaires loufoques vienne troubler notre système de castes de fait.
    On se croirait revenu dans les années 30 avec la peur des cocos, le souci est que cette crainte a poussé les élites à engendrer le fascisme, prions pour qu’on trouve une meilleure solution cette fois !

  7. Avatar de Ton vieux copain Michel
    Ton vieux copain Michel

    On savait déjà que la Fed avait refusé de divulguer les montants des lignes de crédit accordées aux banques ainsi que la nature et la valeur des actifs bancaires qu’elle avait conservé en collatéral. Botus et mouche cousue. Du côté des banques, ce n’est pas mieux. Hier, un journaliste de la chaîne CNN, pourtant peu suspecte de gauchisme débridé, a eu la bonne idée de demander aux banques qui ont bénéficié de la manne du trésor américain (près de 350 milliards USD tout de même!), ce qu’elles avaient fait de l’argent reçu. Aucune n’a daigné répondre autrement qu’en termes très généraux. Certaines étaient même offusquées qu’un journaliste ose leur poser cette question. Or, il était explicitement convenu, que les banques fassent la transparence sur la destination des fonds octroyés. Il s’agit quand même d’un gros cadeau du contribuable. Un certain nombre de sénateurs américains ne sont pas contents du tout. Le débat risque d’être chaud en janvier car les banques, dans leur faim insatiable de capitaux, attendent impatiemment la deuxième tranche de 350 milliards.

  8. Avatar de Bernard
    Bernard

    Alors là, Paul, permettez moi d’être en avance sur vous:

    Le système financier capitaliste actuel est une machine à broyer la propriété privée, les meilleurs analystes l’ont compris depuis longtemps, avant même que les instruments les plus efficaces pour ce faire aient été mis à disposition des requins, je ne citerai parmi ceux-ci que les LBO pour exemple. Je me répète, mais le meilleur connaisseur du capitalisme du XXème siècle, Hannah Arendt, en a expliqué en 1958 clairement l’essence et la logique, à défaut de s’appesantir sur les mécanismes techniques.

    Il est vrai que les tendances totalitaristes de cette logique dégagent un fumet indigeste pour nos nez délicatement formés pour ne ressentir que l’aspect démocratique du système.

    Reste que le discours sur le respect de la « propriété privée du vainqueur » vaudra son pesant de ccahuettes et que nous l’attendons avec impatience!

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