Ce texte est un « article presslib’ » (*)
Il y a bien longtemps – à la vitesse où vont aujourd’hui les choses, le 14 juillet dernier, j’écrivais dans L’Amérique a changé… même si elle ne le sait pas encore : « Pour Oncle Sam, cela change tout : hier soir, les États–Unis ont basculé du libéralisme dans la social-démocratie ».
L’Amérique ne le savait pas encore il y a trois mois et elle ne le sait même pas encore aujourd’hui mais elle le saura peut–être la semaine prochaine – si mes tuyaux ne sont pas crevés. Le processus va très vite et même en s’accélérant et la raison en est la suivante : c’est le plus audacieux qui mène la bande.
Ce qu’on observe depuis quelques jours, c’est qu’en matière de nationalisation du système financier, le pays qui frappe le plus vite le plus fort détermine le niveau sur lequel les autres sont obligés de s’aligner : quand l’Irlande garantit tous les dépôts à vue, l’Angleterre doit suivre, sous peine de voir toutes ses banques siphonnées aussitôt vers l’Irlande, mais pour ce faire elle est obligée d’aller plus loin dans la nationalisation que n’importe qui d’autre, fixant automatiquement la nouvelle norme pour ceux qui ne veulent pas être laissés pour compte dans le nouveau paysage de la compétitivité : pour les États–Unis, pour l’Allemagne qui avait juré ses grands dieux la semaine précédente qu’il n’en serait rien, pour le Benelux, que les affaires Fortis et Dexia ont déjà conduit sur cette voie, pour l’Espagne qui vient de s’aligner sur la Grande-Bretagne, et bien entendu également pour la France, qui ne se doute encore de rien – même si l’on travaille peut–être dur ce weekend au ministère des Finances.
Je dénonce régulièrement la croyance dans l’autorégulation des marchés mais cela ne signifie pas qu’il n’existe pas d’effets d’auto-organisation dans le système financier et l’entraînement dans la voie de la nationalisation par le plus audacieux auquel on assiste en ce moment, en est un excellent exemple.
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
23 réponses à “Le plus audacieux mène la bande”
Ah, zut.. . Paul, il 2 ou 3 jours que je méditais d’envoyer un message dénonçant l’Irlande qui, en garantissant tous les dépôts dans ses banques, avait lancé un mouvement pervers que les autres pays devaient suivre sous peine de voir leurs propres dépôts nationaux fuir vers ce pays. Après le dumping social, le dumping environnemental, le dumping fiscal, voici que naissait le dumping de protection financière. Angela avait été la première à se fâcher… Cette Irlande fut la plus grande bénéficiaire de l’unification économique européenne et voilà qu’elle jouait cavalier seul au détriment des autres.
Ces garanties totales me semblent n’être qu’un message destiné à rassurer les déposants afin de les garder chez soi. Mais si le système devait s’écrouler, ce ne seront que de vaines promesses impossibles à tenir (sauf à dépouiller les citoyens pour protéger les avoirs des privilégiés, politiquement explosif).
Et voilà que vous me devancez… Enfin, ça me fait plaisir de voir que je commence à « sentir » suffisamment le jeu et le dessous des cartes pour penser un peu comme vous… 😉 .
Le plus hilarant c’est la tête à Paulson. Obligé de manger son chapeau tous les matins. Il est tout le temps plié en deux, un ulcère peut-être?? 😉 Ulcéré de devenir européen ça c’est sur.
@ Alain A
« Ces garanties totales me semblent n’être qu’un message destiné à rassurer les déposants afin de les garder chez soi. Mais si le système devait s’écrouler, ce ne seront que de vaines promesses impossibles à tenir (sauf à dépouiller les citoyens pour protéger les avoirs des privilégiés, politiquement explosif). »
Bien vu!
C’est pourtant exactement la logique du capitalisme, et donc ce à quoi on doit s’attendre!
Les mots « semblent, si le système devait s’écrouler, vaines, impossible à tenir, sauf à » ne sont là que pour vous (nous)rendre moralement supportable l’analyse logique que vous faites.
@ Paul
Mais alors Paul, qu’en est-il des CDS ? Pourquoi personne ne parle plus des 52 000 milliards de dollars de CDS ?
Ils n’existent plus, ou quoi ?
Vous disiez le 29 septembre dernier :
Et aussi, dans le meme billet :
Charles Gave, hier, 11.10 (le jdf):
Auquel Armand semblait répondre, hier matin a 12h 30 (Billet « Se hater lentement ») :
Le krach va-t-il donc continuer du SEUL fait des CDS ? Ou cela mene-t-il ?
Oui, Armand a répondu à la question sur les CDS. Le fait est que le système financier meurt de mille blessures. C’en est une. J’essaie de parler de toutes, une à la fois.
Immanuel Wallerstein lit cette agonie d’une manière un peu apocalyptique dans son entretien avec Antoine Reverchon dans le Monde : il offre un tableau synthétique intéressant dans une perspective de cycles historiques. Ce n’est pas mon type d’approche mais cela mérite certainement le détour.
@Alain A
je ne vous suis pas vraiment, garantir les dépôts comme l’a fait l’Irlande n’est pas « pervers » moralement, en le faisant elle a entraîné les autres dans des mesures inéluctables et peut être pas souhaitables techniquement mais dans ce contexte chaotique aucune ne l’est
il faudrait maintenant qu’on s’approche de l’Acte II peut être scruter, dans les « bonnes » mesures financières ou bancaires qui vont être prises, celles qui peuvent améliorer certains « fondamentaux » du système, dans le sens de la nouvelle constitution économique = les ultra riches (1 % ayant accaparé 50 % de la richesse) vont-il accaparer 25 % ? le travail va-t-il être réhabilité (notre sarkozy cherchant toujours à casser le code du travail), l’OMC va-t-il faire amende honorable ? Ce serait le début d’effets vertueux, du coup….
Toute crise est effectivement une phase de transition, une adaptation vers une autre forme d’organisation.
En l’occurence, le débat, tant de fois passé à la trappe, sur la forme d’Europe attendue par les peuples va revenir de plus belle.
En effet, les Irlandais doivent toujours être appelé à revoter sur le traité européen simplifié. Or, le post de Post de Alain A nous rappelle l’état de la conscience européenne et de l’action concertée (rien, un rêve evanescent sur lequel tout est construit, habituellement ceux victimes de ces symptomes on les enferme ou on les met sous curatelle). Je vois mal comment les Irlandais, insultés dans le passé (ils revotent car les beaux esprits ont jugés que ces Irlandais étaient des mal comprenants), montrés du doigt aujourd’hui. C’est ce dernier, majeur, qu’ils risquent demain de tendre bien haut demain.
Ce sera l’une des premières conséquence politique du monde qui se reconstruit sous nos yeux. L’Europe, selon que les médias seront moins obnubilés par leur vision d’un horizon libéral indépassable, connaîtra peut être ce débat toujours enterré sur l’autre branche de l’aternative de la construction européenne. Celle d’une Europe forte qui ne se construise pas sur l’abandon des pouvoirs des nations qui ont fait leur preuve à une technostructure incapable. Cette dernière, qui a hérité d’un continent riche et puissant, maître de son destin, a transformé tout cela en une entité evanscente incapable d’actions coordonnées même quand sa survie est en jeu.
La possibilité d’une Europe forteresse, évacuée depuis le débat (la propagande) du traité de Massetrique, devrait reprendre. Les excommincateurs, merdeux de leurs choix passés en faveur d’une Europe libérale, devrait baisser la garde qualques instants et permettre le débat, quelques jours au moins.
Encore que, jamais honteux de leurs erreurs et anathèmes, ils vont déjà expliquant que c’est de plus d’Europe dont nous avons besoin et que ce sont les nationalistes (populistes, fachistes, neuneus, mettez le terme que vous voulez, ils ne sont pas regardant pour salir la juste cause de ceux qui ont vision plus afutée que a leur) qui sont les fautifs de ne pas avoir donné plus de pouvoirs à ces incapables qui pilotent de Bruxelles. Cette direction faillie devraient elle aussi être liquidée, sans parachute dorée (encore que pour s’en débarasser, payer un peu serait un bon investissement).
Aujourd’hui, plus que jamais, il faut dinstinguer l’idéalisme de la paix et le réalisme de la guerre. L’unilatéralisme est impossible, le multilatéralisme est improbable.
Quelques questions d’un profane en économie à M. Paul Jorion et aux lecteurs du blog :
1)Cette afflux de liquidité, de garanties des dépôts et des prêts interbancaires, baisse des taux, quasi illimité depuis le début de la crise ne va-t-il pas avoir un effet hyperinflationiste? Je m’explique, cette afflux de liquidité sans mesures ou plan d’investissement sur l’économie réelle ne va-t-il pas accentué la bulle en train de crevé?
Une solution n’est-elle pas tout simplement illusoire sans un changement radical du système monétaire, financier et des rapports entre capital et travail?
2) Que pensez vous des analyses de Roland Leuschel qui dès 2005 mettait en exerce la responsabiilité des banques centrales :
« Entre 1995 et 2004, la masse monétaire a augmenté de 130%, alors que la croissance du PIB sur cette période n’a été que de 67%… »
« L’abandon de l’or par les banques centrailes a permis aux Etats providences d’utiliser le système bancaire comme un moyen d’étendre le crédit de manière illimitée… », « le système financier actuel touche à sa fin », Le krach n’est pas pour demain. Mais sans doute pour après-demain.
« Aux environs de 2008, quand les enfants du baby-boom partiront à la retraite et devront vendre leurs actions pour maintenir leur niveau de vie…Ce krach sera plus dur que les deux précédents. » (cfr Le Soir, 11 et 12 oct 2008)
Il prévoyait aussi une flambée de l’or à un niveau plus élevé que le niveau atteint actuellement.
De plus j’ai l’impression que depuis la crise on assiste à une concentration plus grande du capital en moins de mains.
Me trompes-je? Et si l’analyse est correcte quelles en sont les implications.
Pour les banques cette concentration est tout avantage: elles ont moins de « fuites » et ont donc moins besoin de se refinancer.
On constate donc que l’accroissement considérable des inégalités précède la crise de 29 comme la crise actuelle ; est-ce une des causes identifiée de ces crises, ou bien une corrélation compliquée ? connaît-on des mécanismes de déstabilisation de l’économie par les inégalités ?
Radar Contre Info 7/10 écrit que « les richesses accaparées par les uns ont été « redistribuées » aux autres, non pas par l’impôt cette fois, mais sous forme de surendettement par l’intermédiaire du crédit. » Cela veut-il dire que les 1 % des plus riches, qui auraient accaparé 50 % de la richesse ces dernières années (de mémoire) déposent leurs excédents financiers qui souffrent plus longtemps sur les comptes bancaires alors que des moins riches les auraient consommés tout de suite, les banques pouvant alors utiliser ces dépots pour faire du crédit ?
Ce qui veut dire que si un grand champion adulé gagne un tournoi procurant un plaisir qui vaut mille fois le prix du billet, déposant le lendemain son petit million de dollars honnêtement gagné, eh bien finalement il commence à ce moment à nuire, à faire plein de tort au travail, aux pauvres, à la société, un genre de funeste personnage qui ne mériterait pas du tout d’être rémunéré !… Dans quelques années on en viendra peut être à une éthique économique de tous les jours ! riches, faites chaque jour un petit geste qui appauvrit ! pauvres, regardez chaque jour une K7 enregistrée !
@ AJH,
Et pendant qu’on y est, n’oublions pas de rappeler que depuis des années les banques font tout ce qu’elle peuvent pour réduire la quantité de monnaie réelle (sonnantes et trébuchante) en circulation, en dématérialisant à tout va : poussée des cartes de crédit et développement moyens de paiement électronique. La dernière parade en date contre le risque de « ruée sur la banque » : Moneo, qui attaque directement la petite monnaie. Mais j’ai l’impression (chouette !) que la sauce ne prend pas…
Mes sources à moi, m’indiquent que ce lundi matin à 7:00 heure de Londres le gouvernement de sa très gracieuse Majesté fera une annonce.
Les paris ouverst sont les suivants :
– nationalisation, au moins partielle, des grandes banques, sous une forme ou l’autre. Je ne parie pas contre, ça me semble évident.
– fermeture des marchés boursiers UK.
NB : Paulson a viré sa cutie aussi, publiquement, en disant qu’il envisageait d’injecter du capital dans les banques US, comme je l’ai déjà signalé ici. Cette nov-langue signifie nationalisation.
Ils vont tous faire pareil.
J’ai raconté ici ce que j’ai vécu en Argentine en 2001. Je peux donc affirmer, avec un peu d’avance sans doute, mais assez peu de risqque de me tromper :
« NOUS SOMMES TOUS DES ARGENTINS MAINTENANT »
« » » »Je dénonce régulièrement la croyance dans l’autorégulation des marchés mais cela ne signifie pas qu’il n’existe pas d’effets d’auto-organisation dans le système financier » » » »
Ca sent la théorie du chaos ascendant PRIGOGINE.
Pour que celà marche il faudrait réinjecter de la « complexité » dans le système et donc suprimer toute idée de centralisme.
La stabilité « forte » des systèmes naturels est due a leur complexité . L’homme ne sachant utiliser les equa diff, modélise des outils « simplifiés » linéaires qui , a chaque fois le mene a l’echec.
QQun a dit récement que l’homme etait un ordi transporté ds une brouette.
Le système actuel est le « feux rouge » . Pour réguler le marché , il reste a inventer le « Rond point » qui réintroduit la complexité (du cerveau) dans la gestion du flux.
« » »Le plus audacieux mène la bande » » »
Curieux ce titre ; ça me fait penser au chapitre des « Bandes anonymes » de K Lorenz du livre « l’agressivité intra spécifique ou petite histoire du mal » ( groupes de milliers de poissons ou d’étourneaux) qui n’ont ni structure ni hierarchie et qui semble etre l’état intermediaire avant la socialisation .Un prédateur est impuissant a gérer la trajectoire de sa proie ! le groupe suit le premier qui tourne ! et cette situation n’inhibe pas l’agressivité intra-spécifique (les nids ou positions sont a la distance exacte des becs des voisins!.
Il semble qu’en cas d’urgence l’animal social (l’homme par exemple) régresse vers ce stade : rien de plus énervant de se retrouver a se gratter le crane PARCE QUE votre interactant le fait.
Je me permets de vous copier ici une partie d’un très intéressant article paru sur les site du journal les Echos ( http://www.lesechos.fr/info/inter/4783932.htm ). On y constate l’interpénétration total des marchés financiers mais aussi l’égoïsme des nations (cfr l’attitude de la GB) qui essaient, chacune, de s’en tirer, non seulement au dépens des autres pays mais aussi aux risques de l’effondrement de tout le système. C’est cela, Emmanuel, que j’appelais l’attitude perverse de l’Irlande qui a tiré la première.
Extraits de l’article des Echos :
« Les banque islandaise, furent privatisées au début des années 2000, quand l’accès aux marchés des capitaux était facile et peu cher. Elles ont connu une expansion exceptionnelle sous la houlette de jeunes patrons diplômés et dynamiques. A l’étroit sur leur terre volcanique de 312.000 habitants, elles sont parties à la conquête des marchés scandinave et britannique. Faute de pouvoir se financer sur les seuls dépôts des épargnants islandais, elles ont emprunté dans toutes les devises, faisant bondir la dette externe du pays jusqu’à 550 % du produit national brut (PNB), tandis qu’elles-mêmes affichaient des actifs plus de dix fois supérieurs au produit intérieur brut. Le tout en finançant un incroyable développement de l’économie islandaise, qui, depuis dix ans, a enregistré une croissance du revenu par habitant deux fois supérieure à celle des pays de l’OCDE. L’esprit d’entreprise des Islandais a fait le reste. Les Vikings sont repartis à la conquête du monde, et c’est ainsi que (…) Kaupthing, créé en 1982 à partir d’une petite société de courtage, est devenu la septième banque scandinave, réalisant 70% de son activité hors d’Islande et dégageant un bénéfice net de 812 millions d’euros en 2007 ! »
Fin de la saga : « Mercredi 8 octobre : crise diplomatique avec la Grande-Bretagne, qui saisit les actifs bancaires islandais ». (ndaa : sous le couvert de la loi antiterroristes et sous le prétexte que la sécurité nationale de la Grande-Bretagne était menacée (sic) !). « Jeudi 9 octobre : mise sous tutelle de Kaupthing, 1re banque du pays, et suspension de tous les cours de Bourse. Toute la finance islandaise, à l’exception des caisses d’épargne locales, est sous la coupe de l’Etat. Samedi 11 octobre : manifestations devant le Parlement. Le gouvernement annonce un accord avec les Pays-Bas sur les clients d’Icesaver et un règlement de la crise avec Londres. Mardi 14 octobre (demain) : une délégation islandaise doit se rendre à Moscou pour négocier un emprunt de plus de 4,5 milliards d’euros. L’appel au FMI apparaît inévitable. »
Malgré « l’embellie sur les marchés », l’optimiste n’est probablement pas de rigueur, car le traitement de la crise n’est pour le moment que la plus gigantesque opération de collectivisation, – ou de socialisation suivant l’humeur et les convictions-, des pertes de quelques uns au détriment de la collectivité. Si on ne change rien au système lui-même, il repartira de plus belle dès que le calme sera revenu et reproduira tôt ou tard les mêmes effets
La crise actuelle n’a pas été pensée et voulue par d’insaisissables capitalistes comploteurs ; elle ne résulte que de la veulerie cupide d’apprentis sorciers qui croyaient naïvement avoir inventé la fontaine de jouvence de la création de leur richesse personnelle. Mais il est clair que les plus réactifs des prédateurs financiers, – donc les plus redoutables -, ont très vite vu l’opportunité dans la calamité, et imaginé cette grande lessive par les contribuables qui préserve l’essentiel du système qui les fait vivre sans toucher aux mécanismes de création des gains immoraux bien que légaux qui ont conduit à la catastrophe. La crise financière actuelle est ainsi l’occasion pour « le capitalisme financier » de mettre toutes ses turpitudes dans un sac, et de contraindre la collectivité à l’en débarrasser en ayant prudemment pris auparavant en otage un système bancaire irresponsable, bien plus cupide qu’intelligent, pour s’assurer que le pouvoir politique ne pourrait rien refuser sous peine de cataclysme universel.
Tous les politiques, et tous les banquiers ne sont pas de mauvaise foi, évidemment, mais ils sont tous complices tant qu’ils se taisent, même si, dans le contexte actuel, on peut comprendre qu’ils ne puissent pas dire grand-chose tant que les « travaux » de curetage sont en cours.
Pour pouvoir parler, il leur faudrait d’abord :
– (i) fermer les marchés pour faire stopper au plus vite l’effet Larsen dévastateur que provoque le micro des annonces des mesures étatiques d’assainissement en passant devant le haut parleur des « marchés », et laisser les operateurs se débrouiller en gré à gré, – avec internet c’est plutôt simple, et ce serait probablement en plus un test vrai grandeur de l’inutilité des marchés-.
– (ii) rétablir provisoirement un système de parités fixes sur les changes et
– (iii) écarter des bénéfices de la « nationalisation des pertes » tous les organismes qui ont des avoirs dans les paradis fiscaux, – ou dont les actionnaires de référence ont des avoirs dans des paradis fiscaux -, tant que tous ces avoirs n’auront pas été rapatriés dans un pays « normal ».
Jean-Paul
Cher Paul,
Lectures passionnantes, comme souvent.
Votre avis sur le risque déflationniste évoqué par Roubini et, plus modestement, par le blog tropicalbear,
très en vogue en ce moment ?
Extrait ci-joint :
Tropical Bear
« – Nous sommes face à une crise du crédit d’une ampleur exceptionnelle et au moins aussi importante que celle de 1929 (en fait nettement plus importante).
– Les états préfèrent largement l’inflation à la déflation et essaieront de tout faire pour contrer la déflation.
– Les déficits publics vont fortement augmenter avec la crise en cours (moins de recettes, des dépenses supplémentaires pour faire face aux problèmes liés à la crise).
Et pourtant, je suis totalement déflationniste (en première partie de crise), voici pourquoi :
– Essayer, ce n’est pas réussir. Pour reprendre l’expression de Mike Shedlock : « faith in the fed is the last bubble ». j’y ajouterai « faith in the government is the last bubble » (la foi dans les capacités d’action des gouvernements est la dernière bulle).
Les inflationnistes ont en effet une foi absolue dans les capacités de creation monétaire et d’endettement des gouvernements. Celle-ci est en réalité limitée par deux points essentiels : la dette privée et les taux longs.
Il faudrait aujourd’hui environ 8 ans d’inflation à 10% pour ramener la dette totale US à un niveau acceptable (sous les 180% du PIB). Toute tentative gouvernementale de relancer l’inflation déclencherait une forte hausse des taux longs, ce qui dynamiterait encore plus vite la montagne de dette privée en excès et précipiterait son effondrement : Les dirigeants ne peuvent pas se le permettre.
– La déflation d’actifs est déjà largement vérifiée dans les faits (voir le tableau en haut de l’article) et le processus de deleveraging a résisté à toutes les actions entreprises jusqu’ici par les gouvernements pour l’enrayer.
– Sur la dette publique US maintenant, elle va augmenter, cela est clair…tout comme la dette publique japonaise pendant les années 90. Mais nous partons d’un niveau bas comme je l’explique ici :
En particulier, les engagements de l’état en matière de retraite n’engagent que ceux qui sont assez naïfs pour y croire (et certainement pas l’état) vu qu’ils ne seront jamais respectés : ce n’est pas de la vraie dette !
Ce qui a flambé au cours des dernières décennies, c’est la dette privée (déflationniste), pas la dette publique.
La capacité de l’état à transformer de la dette privée en dette publique pour contrer la déflation est très limitée : quand les marchés diront » stop » au gouvernement via une hausse des taux longs sur les bons du trésor, celui-ci ne pourra que s’incliner (sinon les conditions de crédit se durciraient encore plus, ce qui ne ferait qu’amplifier la déflation au final). »
@Jean-Paul
Sommes-nous tous otages et condamnés à l’abattoir?
Sans doute, quelques millions de personnes disposent-elles encore chacune de quelque milliers à quelques dizaines de milliers d’euros et, pour des raisons diverses ne les ont pas « jouées en bourse », ni en sicav. Échaudées, inquiètes ou écoeurées, elles pourraient les placer dans l’une ou l’autre banque alternative, coopérative, etc. Leur somme ferait déjà un petit « front de résistance » . Mais voilà, par quelle stratégie d’investissement ces banques citoyennes pourraient-elles offrir une protection relative contre « l’inflation résolutoire »( sans doute à venir- je ne sais pas-) . C’est une préoccupation de classe moyenne, mais sans classe moyenne, nous allons où maintenant ?
@Armand; (O banqueiro anarchista , F. Pessoa) inutile de proposer de l’or! Trop volatile…
@jlm
Otages? Bétail d’abattoir? Difficile de répondre ! 🙂 … La rumeur veut que le gouvernement américain ait très peu de marge de manœuvre pour effectuer des reformes en profondeur qui pourraient entre autres favoriser l’émergence de solutions « auto-organisées » autours des crédit unions et des coops, tant les pressions des milieux financiers sont fortes pour que rien de fondamental ne change dans les us et coutumes des tribus de Wall Street. Le fait qu’il ait jusqu’à présent paru privilégier le rachat des créances pourries plutôt que la nationalisation/sanction et l’injection de l’argent directement dans l’économie est une indication de sa préférence actuelle pour le secteur financier, qui pourrait finalement s’en sortir très honorablement avec le double bénéfice de voir ses dettes véreuses transfusées chez les contribuables, et d’avoir réalisé au passage quelques jolies plus values aux dépens des petits porteurs paniqués en jouant convenablement sur les variations actuelles des cours de bourse. Cela dit, sauf à inonder les palais présidentiels d’e-mail vindicatifs, ou, plus méchamment, à retirer brutalement le tapis en transférant massivement tous leurs avoirs dans des crédit unions, – ce qui n’est pas très réaliste dans le cas particulier des américains qui sont souvent surendettés et inquiets pour leurs jobs -, je ne vois pas très bien ce que les citoyens contribuables peuvent faire pour le moment. Je crois en tout cas qu’exiger par tous les moyens que leur argent n’aille pas aux titulaires de comptes bancaires dans les paradis fiscaux est un minimum. Si cette crise permet d’y voir un peu plus clair dans la case « trou noir » des paradis fiscaux, ce sera déjà un résultat utile, et c’est de toute façon un préalable à toute reforme sérieuse du système financier international
Oui, la mise au ban des paradis fiscaux est un objectif concrêt et nécessaire pour nous, mais nécessaire aussi pour la survie du système… cet argent circulera « au grand jour et en sécurité » dans les prêts à long terme des banques aux Etats « tenus en laisse », ou je me trompe ? Au fond c’est l’occasion de blanchir…
§
« Donnez-nous vos sous ou vous serez ruinés ». Les banquiers nous ont coincés entre deux injonctions contradictoires.
Les réseaux alternatifs devraient davantage profiter de la crise pour se faire connaître… tant que nous laissons chacun « nos sous » dans le système actuel et bien, je ne vois pas très bien comment nous mettons notre volonté critique en pratique. L’État (belge) joue le même jeu d’injonction contradictoire, d’un côté il déclare au vingt heures « je me porte garant de tout et pour tout montant », puis au journal de la nuit, ajoute : « nous ne garantissons les banques systémiques (les quatre plus grosses).
En résumé, si écœuré, et dans l’attente de vous décider pour une banque alternative, vous placer tout dans un coffre, l’État vous prévient de ce que la seule solution c’est de rentrer au bercail…)
Où placer ses sous, chez qui déposer son compte en banque ?
Il me semble que cette question résume bien notre situation et à tous les niveaux : pratique, politique, théorique, existentiel…
Efficace ou pas, l’idée d’une « constitution économique » donnait au moins des repères à l’avenir, certes l’idée pourrait maintenant être reprise par Sarko, mais comme « vaccine », afin que tout change et reste le même. D’un autre côté, il me semble que les propositions de « reprise en main de la monnaie par l’état » sont un trop gros morceau à faire passer, mais aussi que le « ouf » de soulagement de lundi est un clou sur notre cercueil… enfoncé sur l’air une sorte de dénégation de la part du système bancaire « non non, vous voyez bien que nous ne faisons pas ce que nous voulons avec la monnaie…et que nous avons besoin de vous »
Bref une petite banque honnête et solide dans l’écodéveloppement tranquilliserait mes angoisses …
http://www.planetfinancegroup.org/FR/activites.php
Rien qu’à lire la liste des trucs et machins… je me sens déjà dépassé…qu’en penser ? Pour me rassurer… faudrait que Paul ait un job d’analyste financier et d’ethnologue dans le groupe
http://www.microcredgroup.com/
… et en plus, je ne sais pas si je blague.
Le plus audacieux mène la danse. Mais le plus audacieux s’en réfère à Greenspan : d’après Larouche, c’est lui qui a conçu le plan de Brown …
Alors la conclusion de Larouche (qui un spécial certes, mais dont l’analyse de la crise est plutôt pertinente):
« Tant qu’on aura pas décidé d’annuler tous les contrats dérivés mondiaux, nous sommes condamnés à une hyperinflation mondiale.
« Les mesures annoncées ce week-end et lundi resteront comme les décisions les plus incompétentes de l’histoire, prises par les gouvernements les plus incompétents de l’histoire ».
oui c’est vrai