La Chine tire-t-elle les ficelles ?

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Les États–Unis ont-ils été manipulés par la Chine et la crise qui est en train d’engloutir le monde en est-elle la conséquence ?

Je ne le pense pas : les États–Unis creusèrent leur propre tombe quand dirigeants d’entreprises et investisseurs conclurent une union sacrée dont la stock-option fut longtemps l’emblème et dont la folie des start-ups marqua le point culminant, et ceci aux dépens des salariés. On permit aux ménages américains, dont les salaires déclinaient en dollars réels au fil des ans, de substituer du crédit facile (accès simplifié et taux défiant toute concurrence) à l’argent qui faisait défaut. C’est la Chine qui alimenta la pompe. Quand la source se tarit, l’édifice s’écroula.

Ce scénario avait-il été mis au point par la Chine de la manière dont il s’est déroulé ? Je l’ignore. Ce qui est certain, c’est que les Chinois avaient dû envisager deux cas de figure : le premier, celui où le petit ballet chorégraphié conjointement avec les États–Unis se déroulerait dans les meilleures conditions possibles, et le second, celui où les événements prendraient un autre tour, et il n’avait pas dû leur échapper que, dans un cas comme dans l’autre, il en résulterait pour eux un immense bénéfice : économique avec le premier scénario, politique avec le second, et ceci précisément pour la raison que je viens de mentionner : que les États–Unis avaient délibérément créé une situation explosive en laissant patrons et actionnaires mettre KO les salariés, alors que la tâche qui demeurait assignée à ceux-ci était de continuer à consommer au même niveau que celui que la prospérité exceptionnelle des années 1950 avait déterminé.

La fin des années 1980 vit apparaître la titrisation des Asset–Backed Securities, les Obligations Adossées à des Actifs, où sont agrégés, sous forme aisément transférable, plusieurs milliers de crédits personnels : prêts immobiliers, prêts automobiles, prêts accumulés sur les cartes de crédit, prêts obtenus pour payer les sommes exorbitantes qu’exige aux États–Unis l’obtention d’un titre universitaire. Quand la Chine se mit à accumuler en quantités astronomiques non seulement des Bons du Trésor américain mais aussi ces Asset–Backed Securities, elle contribua par sa demande insatiable à déprimer ce marché dont les taux baissèrent pour refléter l’aisance avec laquelle ces obligations trouvaient acheteur (la Chine possède aujourd’hui des Mortgage–Backed Securities émises par Fannie Mae et Freddie Mac à hauteur de 422 milliards de dollars, l’équivalent de 10 % de son PIB). Ces taux bas encouragèrent à leur tour les consommateurs américains à emprunter davantage.

Une dynamique s’était créée qui bénéficiait aux salariés américains qui tentaient de maintenir par l’emprunt leur train de vie antérieur (1). La Chine y trouvait également son compte : la plupart des biens de consommation achetés par les consommateurs américains étaient produits par elle, offrant ainsi un débouché tout trouvé à son industrialisation rapide.

Bien entendu, cela durerait ce que cela durerait. Les Chinois ont dû penser à ce qui se passerait quand cette belle mécanique s’enrayerait : les organismes de financement du crédit à la consommation américains se révéleraient rapidement déficitaires ; menacés par la faillite, ils iraient quémander pour échapper à une fin indigne. La Chine désormais riche se porterait à leur secours, investissant les sommes qui leur épargneraient ce déshonneur et prenant pied du coup au cœur-même du système financier américain. Mieux : les États–Unis entrés alors dans la seconde partie d’un de leurs cycles économiques typiques, celle où l’Etat mobilise ses ressources (celles de la communauté bien entendu) pour venir à la rescousse des investisseurs et des patrons en mauvaise posture, abandonneraient provisoirement le modèle du capitalisme de marché pour celui du capitalisme d’Etat – à l’instar de la Chine elle-même.

Ceci offrirait à la Chine le répit qu’une Amérique riche et arrogante lui aurait refusé, se montrant au contraire autocratique et peu disposée à tolérer un rival en pleine ascension. C’est là que nous en sommes et la Chine n’a rien à craindre en effet : toutes les ressources militaires américaines sont mobilisées – et immobilisées – en Irak et en Afghanistan. La garde prétorienne du Président Bush voudrait sans doute en découdre avec l’Iran mais n’en a plus les moyens. Alors, pensez, affronter la Chine !

––––––
(1) Artemus Ward, un humoriste américain avait déjà dit au milieu du XIXe siècle : « Vivons heureux dans les limites qu’imposent nos moyens – même si nous devons pour cela emprunter un peu ».

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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20 réponses à “La Chine tire-t-elle les ficelles ?”

  1. Avatar de leduc
    leduc

    Intéressant comme hypothèse. Force est de constater plusieurs choses. Tout d’abord la Chine a sans doute gardé un très mauvais souvenir de l’occupation occidentale fin 19è debut 20è siècle, des traités injustes, de l’occupation de Hong Kong et de tant d’autres sombres moments de l’histoire chinoise. Un empire qui fut aussi grand, puissant, avec une si longue histoire, et qui est asservi et malmené par les puissances occidentales, les Chinois ne l’ont certainement pas oublié, ni l’épisode de l’invasion japonaise pendant la seconde guerre mondiale.

    Que les Chinois se soient réfugiés dans le communisme dans un premier temps pour rejeter en bloc toutes les valeurs occidentales, le capitalisme et sa cupidité qui mène à la domination brutale militaire et coloniale, leur arrogance et suffisance à cette époque, les soi-disant valeurs comme les droits de l’homme et la démocratie, cela pourrait me paraitre une possibilité.

    Ensuite qu’ils aient compris que leur système économique communiste ne permettrait pas de se protéger efficacement contre les puissances capitalistes et que cela les mènerait dans une impasse comme l’URSS, c’est aussi une idée intéressante. Peut-être ont-ils réalisé qu’ils ne pourraient jamais vaincre une puissance comme celle des USA avec leur système économique archaïque, et ainsi adaptant les anciens arts de la guerre, le manuel de guerre de Sun Tzu, ils ont compris que le point faible des USA pourrait être précisément leur économie et ainsi ils ont simplement adapté leur économie afin qu’elle puisse rivaliser et mettre en difficulté celle des USA. Il est certain que la Chine ne veut plus connaître occupation et humiliation comme elle l’a connu depuis le début de l’ère industrielle.

    Ce que les Chinois ont fait en si peu de temps, depuis le début des années 1980 est tout simplement incroyable : ils ont réussi à transformer un pays archaïque, sous développé, ruiné en un pays qui est une puissance économique majeure incontournable. Je ne pense pas qu’une telle réussite soit le fruit du hasard. Certes les Chinois sont travailleurs, méthodiques, intelligents, disciplinés. Mais on ne peut pas expliquer une réussite aussi fulgurante, je pense, sans imaginer une arrière-pensée politique, un plan murement réfléchi pour permettre à la Chine de devenir un pays puissant qui ne sera plus jamais menacé par un pays voisin ou lointain.

    En tout cas, que ce soit une stratégie politique bien déterminée ou alors le hasard du développement économique, je pense que la Chine a fait un noeud coulant, et les puissances occidentales se sont précipités dedans avec empressement, les USA en premier. En voulant produire moins cher, faire plus de bénéfices, faire baisser les prix à la consommation des biens, être plus performant que les entreprises concurrentes, en délocalisant en Chine, les entreprises occidentales ont donné le bâton qui servirait à les battre plus tard. Nous avons aidé ce colosse à s’ériger, nous l’avons aidé à construire toute une infrastructure et toute une économie puissante, un pays puissant.

    Je crois que les Chinois sont conscients que la chute de l’économie américaine, des autres économies par ricochet, de la puissance des USA aura forcément un impact très important et certainement négatif sur la Chine. Mais je pense que la Chine a compris aussi à un certain moment de son développement économique qu’elle deviendrait de facto l’adversaire numéro un des USA en l’absence de superpuissance après la désintégration de l’URSS.

    La Chine a très bien compris que tôt ou tard les USA verraient la Chine comme leur principal adversaire dans la lutte pour conserver leur leadership mondial. Et si affrontement il doit y avoir tôt ou tard, alors je pense que la Chine aurait très bien pu penser que la guerre économique était la meilleure façon de mettre à terre le géant américain, de broyer son économie et ainsi par onde de choc pulvériser la domination américaine dans les autres domaines dont notamment le domaine militaire.

    Paul, cet article me surprend un peu, et je sais sans doute qu’on ne pourra pas vous taxer de voir des complots mondiaux, à l’ordre géopolitique comme certains auteurs un peu trop excités mentalement ici ou là sur la toile. Ceci dit certains disent finalement que les actions américaines dans le monde, les positionnements et conflits armés ne serviraient en dernière analyse qu’à encadrer la Chine, la cerner, verrouiller son accès aux zones stratégiques importantes, ressources et routes commerciales. Si les USA ont creusé leur propre tombe, les USA leur ont certainement vendu la pelle « made in China » qui sert à la creuser. Peut-être qu’un jour les USA se rendront compte qu’ils ont été berné par ses rusés Chinois et que les carottes sont cuites. La réaction américaine serait sans doute moins diplomatique à ce moment là.

  2. Avatar de Oufti
    Oufti

    L’image qui me vient est celle d’une partie de poker où l’un des joueurs est bien trop sur de lui.
    On peut imaginer soit qu’il ait mal caché les cartes de son jeu, soit qu’il ait trop bluffé.

  3. Avatar de tigue
    tigue

    1945, ont eu lieu les accords secrets de Yalta. Pourquoi ne pas imaginer qu’après la chute du mur de Berlin, de tels accords aient été passés. Dans ce cas, nous ne connaissons pas les termes du contrat, mais ils pourraient prévoir, un partage des zones d’influence. L’absence de réaction de la Chine face au « containtment énergétique » américain laisserait penser que tout se déroule conformément aux accords pour le moment. Qu’a obtenu la Chine en échange ? Si ce n’est pas sur le plan stratégique, c’est peut-être sur le plan économique : « on vous finance les conquêtes énergétiques, et vous nous laissez des parts de votre domination économique, zavez rien à craindre, vous contrôlerez le robinet énergétique ».

    Si on réfléchit en termes de positionnement dans une partie d’échecs, le pari est gagnant pour les deux, et l’affrontement est reporté.

    Pour ma part je pense que l’Occident s’est fait avoir, car l’animosité anti-occidentale qui va résulter de ces conquêtes énergétiques ne fera que grandir, et la Chine peut attendre… »

  4. Avatar de franck
    franck

    Excellent article, qui pour une fois fait preuve d’originalité et d’une réflexion à mon avis très pertinente de la crise actuelle ! Car ce qui est à l’oeuvre aujourd’hui, n’est-ce pas tout simplement l’effondrement du modèle de développement capitaliste. Les événements nous montrent à mon avis que le marché, invention théorique des économistes, est très performant pour gérer allocation des ressources entre les plus forts mais strictement incapable de gérer le stock (L’épuisement des ressources halieutiques en sont un bon exemple, de même que la crise des subprimes).

    Maintenant que nous sommes confronté à une crise majeure des divers stocks (dettes, pétroles, matières premières …) ce soi-disant modèle supérieur des marchés s’effondre et on en revient au bon vieux schéma de toute cour de récréation : celui qui domine, c’est celui qui pisse le plus loin. Car à mon avis et n’en déplaise à beaucoup les Sciences Economiques (pour plagier Clausewitz) ne sont que la prolongation de la politique par d’autres moyens.

  5. Avatar de all
    all

    Oui c’est cocasse ! Pour faire la guerre à la Chine les USA devraient emprunter de l’argent… À la Chine.

  6. Avatar de Benoit
    Benoit

    Moi, tout cela me laisse sceptique.

    Imaginer des êtres intelligents qui anticipent les crises, passent des « accords » ou non, prévoient des scenarii de rapport de force, comme si il n’y avait qu’une mono-Culture mondiale, une seule façon de penser le monde, et surtout : aucune occultation de la réalité (celle qui ne plait pas), aucune inconscience, aucun ethnocentrisme de la part des dirigeants des grands pays… ne me parait pas vraisemblable.

    En ce qui concerne les USA, il ne me parait pas censé de penser que les Américains y voyaient clair quand ils ont initié ce qui conduit à la catastrophe actuelle. Je ne les porte pas dans mon cœur, ni en haute estime, mais de la à penser qu’ils ont fait ces choix en connaissance de cause me parait invraisemblable. Qu’ils les aient faits « en ignorance de cause » me parait plus vraisemblable. Car s’ils avaient cette lucidité que vous semblez leur prêter, ils auraient fait d’autres choix.

    Je crois plutôt que les dirigeants des pays n’échappent pas au lot commun de leurs citoyens : inconscience, projets à court terme, aliénation à leur propre Culture, « croyances » collectives qui occultent des aspects de la réalité, en privilégient d’autres, et empêchent de prévoir ce qui va effectivement se passer dans l’avenir.

    Et puis, je ne les crois pas « désintéressés » à ce point : Penser l’avenir, préparer l’avenir pour le (ou un) collectif).

  7. Avatar de Benoit
    Benoit

    Correction :
    J’ai ecrit : « en ignorance de cause ». Il est peut-etre plus exact d’ecrire… « en ignorance de(s) consequence(s) ». Ou les deux en meme temps…

  8. Avatar de JLS
    JLS

    Les Chinois seront peut-être les gagnants de l’affaissement (au mieux) des Etats-Unis ou de l’effondrement, mais économiquement la Chine sera touchée ainsi que tous les pays qui amassent des dollars sans discernement (Extrême-Orient et Pays du Golfe).

    Le problème ne touche d’ailleurs pas que les Etats-Unis mais aussi la Grande-Bretagne et l’Australie (plus fort endettement privé par habitant). C’est un problème Anglo-Saxon.

    Quand on regarde les taux de croissance d’après tous la plupart des pays avaient de bon taux de croissance (Italie, Japon France, Allemagne, Corée…) sauf les USA et la GB.

    Ces pays ont décidé, inconsciemment probablement, à la fin des années 70, début des années 80, de faire une sorte de hold-up du siècle et pour cela ils ont utilisé la finance. Un domaine dans lequel Londres et New-York avaient une supériorité certaine sur l‘Asie (hors Hong-Kong plus ou moins Anglais d’ailleurs) et l’Europe (hors Suisse). Les Etats-Unis ont parallèlement utilisé leur complexe militaro-industriel (l’ancêtre de l’Internet a été développé pour le ministère de la Défense américain) pour développer la Hi Tech.

    Les pays Anglo-saxons maîtrisant la langue des affaires, les techniques de communication et l’idéologie en un mot le soft power ils ont pu dominer intellectuellement les riches au moins des principales zones de la planète (Amérique Latine, Asie, Europe, Pays du Golfe et plus récemment les Russes). Quand on place son argent on le place aux « States » (ou en Suisse).

    Pour tous ces pigeons investisseurs il est difficile d’imaginer que ces pays sont bâtis à partir du sable, et que la richesse de leur banques (très sous-capitalisées) est très surestimée.

    Je ne crois pas que la Chine tire les ficelles.

    Je pense que les Américains sont aveuglés par leur complexe de supériorité.

    On les entend souvent dire “We are the greatest nation on Earth ».

    J’ai lu sur un blog d’un économiste américain que les Etats-Unis ne pouvaient pas entrer en récession, car l’économie américaine est aujourd’hui “too big”, et que donc elle serait résiliente.

    Les Etats-Unis ont commencé à tricher avec la réalité massivement depuis environ 1985, du fait de la taille de leur économie et du dollar qui est la monnaie de réserve. Les problèmes n’arrivent que maintenant.

    Un économiste Allemand décédé l’année dernière avait prédit tout cela et il l’explique très bien, cet économiste est Kurt Richebacher. Par exemple un lien.

    http://www.gold-eagle.com/editorials_03/willie091503.html

    Je pense par contre qu’une faille des Américains est qu’ils n’ont du fait de leur ethno-centrisme, plus fort chez eux car en position dominante et pour d’autres raisons culturelles, aucune idée de comment pensent les autres peuples, alors qu’à l’inverse les Asiatiques, Européens ou Latino-américains comprennent ou essayent de comprendre les Américains.

    En quelque sort on connaît leur jeu alors qu’ils ne connaissent et ne s’intéressent pas au notre.

  9. Avatar de yann
    yann

    @JLS

    Les Chinois seront peut-être les gagnants de l’affaissement (au mieux) des Etats-Unis ou de l’effondrement, mais économiquement la Chine sera touchée ainsi que tous les pays qui amassent des dollars sans discernement (Extrême-Orient et Pays du Golfe).

    Vous oubliez une chose : ils ont les usines et le savoir-faire, la chose la plus importante.

    Fabriquer des consommateurs, ce n’est pas difficile. Les Américains en savent quelque chose, par contre fabriquer les ingénieurs les ouvriers et les techniciens qu’on ne forme plus depuis des années à cause de la pseudo société post-industrielle et de l’hypertrophie des services en est une autre. Les Américains et les Occidentaux en général, se sont appauvris physiquement, usines, machines-outils, système de production, une fois qu’ils ne pourront plus importer il leur faudra à nouveau tout reconstruire mais la matière grise va manquer. Transformer un ingénieur en vendeur de pizza sous-prolétarisé est plus simple que faire l’inverse.

    Une fois que la Chine sera privée de la demande occidentale, il lui suffira de mettre un salaire minimum, de stimuler le crédit et de réduire la propension à épargner pour compenser les baisses des exportations chez nous, les Chinois sont plus d’un milliard : accroitre la demande n’est pas trés difficile. En Occident, en revanche, la pénurie risque de durer, et les écoles de commerces ainsi que les métiers de service n’auront plus trop la cote. Je vois déjà les annonces : « cherche ouvrière textile impérativement lol ». Le jour ou l’Occident perdra sa domination monétaire, le monde verra la réalité économique des pays développés.

  10. Avatar de Carrere
    Carrere

    Vos analyses sont très intéressantes.

    Je me permets juste de signaler que les Chinois ont un problème immédiat d’importation de pétrole et de charbon et que pour le gaz cela sera vers 2020 (voir Laherrère dans ASPO France). Sans même évoquer les défis écologiques, cela risque de compliquer très sérieusement l’avenir économique et social de ce pays.

    De plus, sachant que la production de pétrole baisse aux USA depuis près de 40 ans tandis que la production de gaz va chuter bientôt, les relations de puissance risquent de se corser entre les deux !

  11. Avatar de Driss el Redane
    Driss el Redane

    Tout ce que vous dites est autant pétri de bons sens que de profondeur. Pourtant un certain nombre de choses me chiffonnent si je compare vos propos avec des informations récentes.

    Les USA n’ont pas les moyens d’affronter la Chine soit ! Il ne leur resterait donc qu’à tenter, tant bien que mal, de consolider leurs têtes de pont pétrolifères au Moyen-Orient et en Asie, autour de la zone stratégique de l’Afghanistan.

    A terme, leur économie en voie d’écroulement les verrait immanquablement céder la première place du leadership mondial à une Chine rusée et triomphante, pour mieux se replier sur leur pré carré et échapper au désastre. Toute solution de fuite en avant leur serait interdite, comme le laisserait d’ailleurs supposer la brusque volte-face dans le sens de l’apaisement, manifestée par le président Bush vis-à-vis de l’Iran.

    Mais, au fait, n’y aurait-il pas un sens caché à cette manœuvre-là ? Ne pourrait-on pas y voir au contraire une façon de dégager toute responsabilité historique dans l’initiative fâcheuse -et belliqueuse- prise par un autre pays ?

    Un important gisement pétrolier vient d’être découvert en Iran, et, si les USA mettaient en balance leurs besoins vitaux en énergie et leur soutien « inconditionnel » à certain(s) de leurs alliés dits naturels, quel serait alors leur choix, ou leur non-choix, celui dicté par la saine politique de la chèvre et du chou ?

    M. Barak Obama a, par ailleurs, pris récemment des positions sur la problématique du Moye- Orient qui ont surpris beaucoup de monde, en ce qu’elles ne faisaient rien pour ouvrir la porte à la création d’un réel état palestinien. Il est sans doute pour lui essentiel d’arriver sans encombre à l’élection du mois de novembre, sans heurter l’obstacle que représenterait un accident militaire majeur, fomenté par des acteurs géostratégiques qui se méfient de lui et redoutent son arrivée au pouvoir.

    Il faut certes se garder de la « complotite planétaire » à la Black & Mortimer -damned- mais avouez que l’Histoire est quand même prolixe en coups tordus. Les froissements d’une aile de papillon -ou d’avion- y ont aussi, bien sûr, plus de conséquences visibles qu’en matière de météorologie.

    Nous sommes au début de l’été 1914. Le monde semble figé pour longtemps, en ses empires somptueux.

    Certains bien sûr semblent malades, d’autres éveillent des doutes mais semblent encore solides et, de toute façon, l’époque est encore belle dans le langage du plus grand nombre.
    Pourtant, quelque part au cœur de l’Europe, dans un petit pays accessoirement impliqué dans le jeu des alliances, l’accident imprévu se produit. Tout va alors changer, et dans un sens inimaginable, même par les meilleurs esprits.

  12. Avatar de Rumbo
    Rumbo

    J’aimerais bien pouvoir répondre individuellement, ici, à chaque intervenant, mais cela semble hors de portée vu l’amplitude du sujet. Voici quelques réflexions.

    C’est peut-être une partie de jeu de Go « mondial » qui se déroule en notre époque.

    Il me vient à l’esprit les rapports Yin-Yang dans le jeu économique et stratégique actuel, conforme à l’histoire à cette échelle.

    Si l’on est un tant soit peu imprégné de logique chinoise, tel que l’est votre serviteur, comment ne pas considérer ce rapport Yin-Yang dans un monde devenu circumplanétaire, après avoir été longtemps dominé par la seule structure Est-Ouest depuis 1917, ou 1945, selon comment on règle la « lunette historique ».

    En effet l’Occident depuis presque toujours (1) fut un conquérant « absolu ». Soumettre le monde à ses normes était, et reste, son attitude, une attitude YANG. Dans les mêmes temps historiques, la Chine, comme étant le centre de gravité de l’Asie orientale ou l’Asie sinisée, la Chine, « centre du monde », donc édifiait ses murailles pour se protéger contre les barbares, ici attitude YIN. L’Occident apparaît clairement comme la partie YANG du monde, tandis que la Chine apparaît non moins clairement comme la partie YIN du monde.

    Aujourd’hui les rapports Est-Ouest ou/et Ouest-Est sont donc circumplénétaires, et c’est l’océan Pacifique qui constitue l’espace structurant du monde contemporain. Méditerranée–> Atlantique–> Pacifique, tel est le « tracé Occidental » et son sens géographique de civilisation. Cet axe des parallèles est croisé, forme une croix, par l’axe méridien Nord-Sud Europe-Afrique et son jumeau américain Amérique du Nord-Amérique du Sud, les Caraïbes étant, en quelque sorte, une réplique « méditerranéenne » du continent américain dans la totalité de son ensemble.

    Le piquant des rapports de l’Occident avec les autres régions et zones non occidentales du monde donc la Chine en particulier, le « bélier » actuel de l’Occident étant les États-Unis, c’est que les occidentaux, étatsuniens en têtes, croient que les autres peuples sont en train d’ « entrer » dans leur histoire d’occidentaux, puisqu’il semble implicite qu’ils « doivent » se mettre au « standard » occidental, s’il le faut, on les y force… C’était l’attitude typique des Européens au dix-neuvième siècle. C’est celle, typique, des Américans du Nord au vingtième siècle. Cette attitude étant en train de se « résoudre » au vingt-et-unième siècle… Et le malentendu ne manquera pas de sel lorsqu’il sera sans doute patent que les occidentaux se rendront enfin compte qu’eux aussi « rentrent » dans l’histoire d’autres peuples, particulièrement de la Chine. La Chine en est sans doute le cas le plus typique.

    Certes il existait déjà séculairement la diaspora chinoise en de nombreux endroits du monde, mais la Chine n’avait pas encore ce présent rôle qui grandit à vue d’œil chaque jour et qui ne fait, sans doute, que commencer.

    (1) « Origines » de l’Occident. Il y eut l’Égypte pharaonnique, la mère des nations, « fécondée » en quelque sorte par Israël, puis la Grèce, puis Rome prit la relève cinq siècles (prolongée de dix siècles avec Bysance), puis l’Europe, formée sur les fragments de l’Empire romain, domina le monde au travers cinq principales nations concurrentes : la France, l’Espagne, le Portugal, l’Angleterre et les Pays-Bas. Ces nations firent l’ »histoire » durant quatre à cinq autres siècles. l’Allemagne, arrivée trop tard, frustrée et privée de l’exutoire colonial, vira et percola comme l’on sait dans la première moitié du vingtième siècle. Aujourd’hui ce sont les USA qui finissent la « tournée » occidentale. À partir de la fin du dix-neuvième siècle, l’Angleterre, peu à peu, laissa la place stratégique aux États-Unis, dernier « dépositaire » en date du « bélier » occidental. Telles sont, dit très rapidement, les principales couches historiques de civilisation du monde occidental.

    Voici donc évoquées en très résumé, les strates occidentales dont la Révolution bourgeoise protestante, marginalisant la monarchie britannique de la fin du dix-septième siècle est le vecteur principal qui aboutit, après la Réforme protestante, puis le siècle des « Lumières », à la Révolution Bolchévique de 1917 dont ses partisans militants au vingtième siècle disaient eux-mêmes qu’elle était la fille de la Révolution française en l’An II. Mais en même temps, car la révolution bourgeoise historiquement d’inspiration protestante se trouve aux deux « extrémités » marxiste ET capitaliste, cette révolution bourgeoise aboutit donc au « triomphe du capitalisme », essentiellement le capitalisme financier qui fourbit historiquement les mouvements révolutionnaires. Ce capitalisme financier, commencé dans la dernière décennie du dix-septième siècle avec la formation de la Banque d’Angleterre, banque devenue modèle mondial du système financier auquel nous payons tous un très lourd tribut, un tribut mortifère. Ainsi l’apogée des États-Unis commença vraiment à partir de 1945 pour aboutir en 1989 à la chute du communisme, le communisme qui fut le prototype de mondialisme alors jeté à la ferraille, et dont le signal fut la chute du mur de Berlin, tandis que l’Europe entrait dans l’ombre du mondialisme en même temps que dans l’ombre de l’islamisme.

  13. Avatar de vladimir
    vladimir

    merci de prendre en consideration:

    L’escroquerie monétaire mondiale

    par Eberhard Hamer, professeur à l’institut des classes moyennes de Hanovre

    La manipulation actuelle des systèmes de la monnaie et des changes constitue le scandale le plus important et aux conséquences les plus marquées de notre époque. Pour la première fois, l’escroquerie monétaire atteint des dimensions mondiales, car elle a lieu sur toute la planète, elle ne peut plus être contrôlée, arrêtée ou empêchée par aucun gouvernement et elle a même lieu de manière formellement légale, conformément à des lois nationales désuètes. Toutefois, il est certain que l’escroquerie monétaire, comme toute autre escroquerie, ne peut pas enrichir à long terme les malfaiteurs par l’appauvrissement de leurs victimes, puisque l’on ne peut abuser d’aucun système monétaire libéral à long terme.

    …………..

    Source : Horizons et débats, numéro 31, juin 2005

    http://etienne.chouard.free.fr/Europe/Escroquerie_Monetaire_Mondiale.htm

  14. Avatar de A-J Holbecq

    Une série de graphiques intéressants sur http://www.babylontoday.com/national_debt_clock.htm
    (ne pas s’arrêter au début, au compteur de la dette …)

  15. Avatar de Benoit
    Benoit

    Extrait d’un billet de Paul datant de plus d’un an (le 13 juin 2007) et qui a pour titre : « Les Etats-Unis otages de la Chine »

    Je cite Paul :

    Avant-hier, Alan Greenspan a déclaré à l’occasion d’un colloque consacré à l’immobilier, que la Chine n’entendait pas liquider son énorme portefeuille d’obligations américaines. Ses auditeurs ont du pousser un soupir de soulagement.

    Mais quand ils l’entendirent préciser que la raison en était qu’il ne trouverait pas preneur, ils ont du s’étouffer.

    Question a tous :
    Sincèrement, pensez-vous que les Chinois les auraient achetées s’ils avaient prévu l’illiquidité ?

    Si vraiment il y a eu au monde quelques dirigeants qui ont vu venir la crise, ils ne doivent pas être bien nombreux… Peut-être se comptent-ils sur les doigts d’une seule main ?

    D’ailleurs… y en a-t-il seulement un ?

  16. Avatar de Paul Jorion

    @ Benoît

    La réponse se trouve dans un autre de mes billets : Hystériques et hypocrites http://www.pauljorion.com/blog/?p=166

    Qui a raison ? C’est difficile à dire : la perspective adoptée par la BNP Paribas et l’AMF, consiste à affirmer que ces instruments financiers sont faits pour être conservés jusqu’à leur maturité de trente ans, pas pour être revendus le lendemain du jour où ils ont été achetés. Il est d’ailleurs à noter que c’est dans ce même esprit flegmatique que les Chinois envisagent ces obligations, la presse révélait en effet hier les chiffres exacts – exprimés en milliards de dollars – des ABS adossées à des prêts immobiliers « subprime » dans les portefeuilles de banques chinoises, information qui laissa de marbre leurs investisseurs. L’agence de notation Moody’s répondait à ceux qui s’interrogeaient sur l’impact financier de ces quantités astronomiques de prêts « subprime » sur la bonne santé des banques chinoises : « Ce sont des banques commerciales de type classique, dont les fonds sont essentiellement constitués des dépôts de leurs clients et disposent d’une bonne liquidité : elles n’ont nul besoin de recourir à des obligations adossées à des actifs ou à des billets de trésorerie. C’est pourquoi la détérioration récente des marchés du crédit n’a eu qu’un impact mineur sur leurs liquidités. Ce qui leur permettra aussi de conserver leurs investissements adossés à des prêts « subprime » jusqu’à maturité, sans être obligées d’encourir des pertes au prix défini par le marché lors d’une vente forcée ».

  17. Avatar de Rumbo
    Rumbo

    Merci Vladimir d’avoir transmi ici ce lien du professeur Eberhard Hamer (je connaisais ce lien depuis environ deux ans, je l’avais découvert aussi sur éconologie).
    Ça fait un peu plaisir de constater que, ici et là, l’on prend conscience de l’escroquerie monétaire et on le répercute, car il y a des solutions.
    Une fois qu’on a bien identifié la cause d’un mal, ne pas le dénoncer et ne pas s’en prendre à lui relèverait alors du masochisme? Ce qui n’est pas du tout mon genre.

  18. Avatar de AUXIETRE Jean-Baptiste

    Je crois que l’on confond toujours l’argent et la réalité. L’argent n’est qu’une image. La réalité est bien de qui dispose des ressources de façon matérielle. En temps de paix c’est le marché qui répartit mais en cas de conflit cela n’aurait plus aucun sens. Il ne faut pas d’argent pour construire des missiles ou des armes de guerre, ni de billets de banque pour nourrir sa population. Que cette guerre économique ait un gagnant et un perdant n’a à mon sens que peu d’intérêt si ce n’est que cela risque de se terminer sur un conflit réel où l’Homme croit qu’en volant les richesses de son voisin, il va s’enrichir alors que l’histoire montre qu’à chaque fois on détruit la richesse plutôt que de la partager.

  19. Avatar de lou
    lou

    J’ai du mal à comprendre en quoi les chinois seraient gagnants, et quant à penser que la Chine produit à tour de bras ingénieurs et matière grise contrairement aux pays occidentaux (yann), c’est vraiment surestimer leurs universités et leurs étudiants, même si depuis qq années l’argent est massivement investi en matière de recherche et développement. Peut etre ai je une vision déformée par la fréquentation d’une partie peu représentative de cette population estudiantine chinoise, mais pour l’instant je ne suis pas convaincue. Et cette nouvelle classe, sortie à bac+4 de l’université connait déjà le déclassement que nous vivons en Occident: une part de plus en plus croissante des jeunes diplômés ne trouve pas d’emplois à la sortie de l’université.L’impression que j’ai, c’est plutot que le « phénomène » Chine relève comme l’immobilier, le pétrole, les céréales…d’une Bulle. Le monde s’est shooté au crédit, faisant prendre la second life pour la real life. On parle d’économie réelle, c’est hallucinant: on s’est tellement perdu dans le virtuel qu’on a du mal à croire à la réalité de l’économie. En Chine c’est quand même des millions de gens qui n’ont pas de quoi manger. Avec l’inflation qui va largement dépasser les 10%, on peut meme dire 15, les salaires ont intérêt à suivre. A ça s’ajoute l’effondrement des exportations: le marché intérieur est très loin d’être en mesure de prendre le relais.

  20. Avatar de Branswyck
    Branswyck

    Joseph Stiglitz, il y a quelques années, avait répondu à une interview au monde. Il expliquait l’économie de « tuyaux » qui se mettait en place et prévoyait son extension: le système mis en place par les états pour les services publics qu’il contrôlait consistait en un système d’abonnements à un fournisseur qui se chargeait d’acheminer les produits vers le consommateur, à l’image de l’eau.
    Les polémiques sur Joe le plombier ou le plombier polonais du TCE sont à cet égard significative. Le système fuit, et la multiplication des « tuyaux » le rend particulièrement difficile à réparer.
    Qui remettra de l’ordre dans les canalisations? Combien de temps durera la coupure? Que se passera t-il si l’on ne fait que remettre du jus dans le cette usine à gaz?
    fBranswyck

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  1. AGI et ses magouilles c’est l’adolescence de l’humanité. Parents: accrochez vous. Ça va secouer.

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