Je me suis rapidement rendu compte après avoir rédigé ce billet que quelque chose clochait dans l’argumentation qu’on m’opposait. Il reste là comme un témoignage qu’on peut me faire changer d’avis avec des arguments. Mais dans ce cas-ci, je n’aurais pas dû : qu’on lise la suite de mes billets sur ce sujet, qui débouchèrent sur L’argent, mode d’emploi (Fayard 2009).
Mea culpa ! Vous m’avez convaincu que je me suis trompé : si des intérêts sont bien perçus sur de sommes créées de manière ad hoc par les banques commerciales – même si celles–ci sont neutralisées ensuite – il y a bien création d’argent ex nihilo. Comme le dit alors très justement Armand dans son commentaire au billet précédent :
« A partir de la monnaie centrale qu’elles contrôlent (sous forme électronique à son compte à la Banque Centrale, ou en stock via les dépôts de ses clients) ces banques de premier niveau peuvent créer autant de monnaie bancaire que leur permet le « coefficient de réserves obligatoires » fixé par la BC. Ce coefficient dont “on” (= les médias) ne parle jamais est pourtant bien plus important que le taux d’escompte ou que ce fameux « taux monétaire » dont les mêmes “on” nous rebattent les oreilles (sans même préciser qu’il ne s’agit que d’un objectif que la BC va essayer d’imposer sur le marché monétaire de par ses interventions, mais qu’elle ne peut pas fixer !) »
Désolé de vous avoir induit en erreur – et je pense surtout à ceux qui n’auront vu que mon billet précédent, mais on apprend tous les jours – moi y compris ! Ce que je vous propose de faire, c’est de mettre en exergue le commentaire d’Armand puisqu’il est très complet, et qu’on redémarre à partir de là : s’il se trompe, dites-le nous, c’est de cette manière que progresse le savoir. Merci aussi à tous les autres pour leur contribution au débat ! Voici le texte d’Armand in extenso (y compris son appel à voter pour Ron Paul – liberté de la presse avant tout !)
Si, Mr Jorion, les banques créent de la monnaie. C’est la monnaie scripturale (« ce qui est écrit ») qui n’existe que sous forme électronique, celle qui figure sur les relevés de compte de ses clients.
Les banques centrales (BC), premier étage de cette escroquerie pyramidale, créent de la monnaie centrale qui existe sous deux formes :
– la monnaie fiduciaire, seule à avoir cours légal, représentée par les billets et pièces que nous avons en poche ou que nous déposons “à la banque” et que cette dernière garde très précieusement.
– la monnaie centrale électronique qui n’existe que dans la mémoire de l’ordinateur de la BC et est affectée à ses banques de premier niveau (les « primary dealers » de la FED). Cette forme électronique présente l’avantage de pouvoir être créée et détruite instantanément et à peu de frais. Cette création (destruction) de monnaie centrale électronique est essentiellement réalisée en contrepartie des TOMO, que le grand public connait désormais par les expressions urbaines « d’injecter (éponger) des liquidités » ; en gros la banque dépose en garantie un avoir de grande qualité (p.ex. des bons du trésor notés triple-A), qu’elle s’engage à reprendre à l’issue du prêt (de 1 à 14 jours en général, mais parfois jusqu’à 3 mois, comme en cette période troublée) et la BC crédite le compte de cette banque en monnaie centrale ainsi créée ex-nihilo. Le prêt porte sur pourcentage de la garantie offerte, selon sa qualité. A l’issue, la banque rembourse la BC, avec l’intérêt convenu (le fameux taux d’escompte que fixe la BC ou un taux négocié lors « d’appels d’offres »), et la BC lui restitue sa garantie. C’est une classique opération d’escompte.
A partir de la monnaie centrale qu’elles contrôlent (sous forme électronique à son compte à la BC, ou en stock via les dépôts de ses clients) ces banques de premier niveau peuvent créer autant de monnaie bancaire que leur permet le « coefficient de réserves obligatoires » fixé par la BC. Ce coefficient dont “on” (= les médias) ne parle jamais est pourtant bien plus important que le taux d’escompte ou que ce fameux « taux monétaire » dont les mêmes “on” nous rebattent les oreilles (sans même préciser qu’il ne s’agit que d’un objectif que la BC va essayer d’imposer sur le marché monétaire de par ses interventions, mais qu’elle ne peut pas fixer !)
En accordant un prêt, la banque crée à son tour, ex-nihilo, de la monnaie bancaire électronique qui s’appelle euro, dollar ou pesos mais qui n’existe pas. Ou plutôt, elle n’en possède sous forme matérielle (billets) que ce pourcentage.
Prenons un exemple. Mr M vend, pour 100 kE, une maison à Melle Z et tous deux ont un compte à la banque Q. Q accorde 100 kE de prêt à Z. Pour cela il suffit que Q ait encore 8 kE de réserves en monnaie centrale non utilisée … ou qu’elle les emprunte chez ses consoeurs sur le marché monétaire ou, plus cher, à la BC au guichet d’escompte. Alors, toutes choses égales par ailleurs, Z à une maison nantie par Q et un compte à -100 chez Q ; M à un compte à +100 chez Q ; Q est en équilibre *comptable* avec un compte à +100 et un autre à -100. Financièrement et bancairement la situation de Q est fort différente : M peut à tout instant retirer ses 100 tandis que Q ne peut pas les exiger de Z (qui se contentera de rembourser selon l’échéancier prévu). Q a pour seule obligation d’avoir, mettons, 8 en petites coupures usagées ; pas 100 !
C’est le deuxième étage de l’escroquerie pyramidale. Avec un coefficient de 8% (pour reprendre celui de Bâle II qui concerne les fonds propres minimaux qu’une banque doit avoir par rapport à tous ses engagements) une banque peut donc créer 12 fois plus de monnaie bancaire qu’elle n’a de monnaie centrale !
Ca semble fou ? en réalité c’est pire, bien pire ; aux USA que vous semblez bien connaître, on trouve du 2% ! un effet de levier de 50 ; enfoncés les hedge funds avec leur misérable fois-15. Comment est-ce possible ? et bien ce taux de réserve dépend de la nature du dépôt. Il est très important sur les comptes à vue (puisque, par définition, le client peut en demander tout le solde à tout moment). Les banques US ont trouvé la parade : le “sweep”. Elles proposent au client de rémunérer son compte, ce qu’il accepte évidemment. Mais il ne comprend pas que deux choses se passent alors : (1) la banque met cet argent sur un compte miroir et peut alors utiliser presque toute cette monnaie avec un beaucoup plus gros effet de levier et (2) c’est le client qui assume le risque du placement monétaire (et on a vu cet été ce qu’il en était de la sécurité associée). Merci Greenspan, JPM et Clinton, circa 1999 (abolition du « Glass-Steagall Act »).
Conclusion intermédiaire : dans un système bancaire à réserves fractionnaires toute banque est en permanence en faillite potentielle !!!
Il suffit qu’une partie seulement des M décident de retirer leurs avoirs (en espèces donc, c’est-à-dire en monnaie fiduciaire). Si les M de la LCR ou de la CGT comprenaient, ils pourraient détruire le système, et ce, de façon légale ! C’est ce qui s’appelle un « bank run ». On l’a vu avec Nothern Rock. Les banques comptent sur les statistiques, la loi des grands nombres. Or en cas de crise ces modèles sont inopérants. On se retrouve hors de « l’enveloppe de vol ». C’est ce qui menace aujourd’hui.
La quantité de monnaie bancaire est estimée par l’agrégat M3, à comparer avec M1 qui contient la monnaie fiduciaire…
Le troisième étage de cette escroquerie pyramidale est constitué des autres banques non clientes de la BC et des autres organismes financiers (crédit à la consommation p.ex.).
Question : quelle différence réelle entre un « taux monétaire » inchangé à 4% ou en hausse à 4.25%. Que se passerait-il si, à la place -ou en complément- de cette hausse, la BC remontait le coefficient des réserves obligatoires ? Indice : regarder ce qui se passe en Chine depuis un an. La banque nationale (pas centrale) chinoise augmente ce coefficient qui est à 15.5% maintenant (en fait elle s’en sert pour stériliser les USpesos sur-numéraires de ses importeurs).Question : Si les CDO et autres ABS triple-A que la FED accepte sont dégradés par les agences de notation, comment les banques US pourront-elles se refinancer ? on comprend l’enjeu vital de sauver les monolines.
Quizz : (pour voir si le lecteur a bien compris) quelle différence entre un billet de 100 €, un relevé de compte avec solde de 100 €, un chéquier, une carte bancaire ?
– le billet a cours légal. De part la loi, nul ne peut le refuser, c’est ce qui lui donne sa force. C’est un contrat juridique « au porteur » et qu’on peut donc transmettre librement. C’est une promesse qu’on reçoit en échange d’un bien ou d’un service (son salaire p.ex.) et qu’on pourra plus tard utiliser pour consommer un bien ou un service. Sauf que cette promesse se dévalue du fait de l’inflation. C’est une promesse mensongère.
– le relevé est une promesse bancaire de remettre « à vue » la promesse mensongère précédente. Du fait du coefficent de réserve factionnaire, on peut dire que cette promesse bancaire est elle aussi mensongère et, en plus, intenable.
– le chèque, qui n’a pas cours légal et que chacun peut refuser (sauf exceptions prévues par la loi, seuil des 3 000 €, salaire) est un moyen de transmettre la promesse bancaire mensongère et intenable à autrui. Mais c’est gratuit.
– la carte bancaire est aussi un moyen de refiler la patate chaude à un tiers. Mais c’est payant annuellement, ça trace où et quand a eu lieu la transaction et même en quoi elle consistait.
Pour conclure ce mot de Henry Ford, au début du 20ème siècle, alors que la FED venait d’être créée (1913) : « si le peuple comprennait comment fonctionne la monnaie fiduciaire et le système bancaire à réserves fractionnaires, il y aurait une révolution avant demain matin ».
Votez Ron PAUL.
23 réponses à “Le scandale des banques qui créent – effectivement – de l’argent”
Comme je ne connais rien à l’économie, mais que le feuilleton m’intéresse, je suis bien obligé de réfléchir avec les « moyens du bord », voici où j’en suis, sans trop savoir si ça fait avancer le « shmilblick ».
Je vais développer une apparence de sophisme, c’est-à-dire démontrer une chose et son contraire ; le but est de rappeler que la monnaie est bien autre chose qu’un simple outil au service de l’économie.
Voyons les choses de la façon suivante.
Soit trois banques, respectivement A, B et C, chacune ayant leur client attitré x, y, et z.
La banque A reçoit 200 € en dépôt de x, les banques B et C empruntent à A chacune 100 €, par la suite, ces mêmes banques prêtent chacune 100 € respectivement à y et à z.
Selon ce schéma, il n’y a pas création de valeur, l’épargne de x est simplement déplacée vers y et x lesquels investissent au total pour 200 €.
Par contre, nous avons une suite de dettes dont la somme est
A>x = 200
B>A = 100
C>A = 100
y>B = 100
z>C = 100
Soit un total de dettes de 600 €
En résumé,
Les banques d’affaires ne créent effectivement pas d’argent, « de monnaie » mais elles créent des dettes et comme les dettes sont étiquetées en « valeur monnaie », nous avons l’impression subjective que c’est une seule et même chose, il est donc assez normal que la valeur totale des dettes paraisse supérieure à la valeur « référentielle » attachée aux objets qui auraient pu ou ont été achetés pour un total de 200 €.
La valeur « dette » déborde largement la valeur « argent », et l’enchaînement des dettes traduit un enchevêtrement de relation sociale entièrement rapportées à l’Etat, lequel garantit à chacun l’assurance que « tout se passera bien », qu’il pourra rembourser ou sera un jour remboursé.
Il me semble cependant que nous devons encore avancer d’un cran, c’est-à-dire admette que la valeur référentielle est déjà une dette. En clair : mon billet de 100 € est une dette du système global qui me garantit qu’avec 100 € je pourrai acheter quelque chose.
Dès lors, curieusement, si j’accepte l’idée que la monnaie soit d’entrée de jeu une dette, alors les banques d’affaires créent de la monnaie.
C’est ça, la monnaie bancaire est la contre-partie de dettes ou plutôt d’emprunts.
Le vice du système est que cette monnaie bancaire peut être retirée au guichet sous forme de monnaie centrale fiduciaire, des billets, alors que ceux-ci sont en nombre insuffisant. Et qu’elle utilise la même unité, le même nom.
Cela rappelle un billet du maître de ses lieux sur la différence entre valeur (très difficile à définir et donc à mesurer) et prix. Seule la dernière transaction définit le prix d’une chose, donc besoin marginal de monnaie. Si tous les propriétaires de ces choses voulaient vendre pour obtenir de la monnaie, alors les cours (prix) s’effondreraient : il y aurait assez de monnaie pour faire face. Mais la représentation intellectuelle qu’ils en ont est fausse, « l’effet richesse » ne joue que si peu de personnes cherchent à la concrétiser sous forme fiduciaire ; la mauvaise compréhension vient de l’amalgame entre prix et valeur qui utilisent les mêmes unités et pour lesquels l’esprit humain ne fait plus la différence car en situation statistiquement normale, on peut passer facilement de l’un à l’autre. Mais que survienne un accident et la différence se sent, souvent douloureusement.
Quant à la garantie de l’Etat, ce n’est que le fait qu’un gouvernement (en général non élu directement !) engage … le contribuable, c’est-à-dire socialise la faillite en allant chercher la monnaie dans la poche du contribuable.
(A Paul Jorion)
Mon « votez Ron PAUL » est évidemment un clin d’oeil à ce « congressman », membre des deux commissions bancaire et financière. L’un des trop rares politiciens US à comprendre le système de la FED et les ravages qu’il cause. Il est bien sûr de l’école autrichienne. Ces passes d’armes avec A. Greenspan lors des auditions de celui-ci au congrès valent leur pesant de cacahouètes lorsqu’on sait qu’eux deux seuls comprenaient de quoi ils retournait (et que chacun savait que l’autre savait) ; tout ça sous les yeux des autres sénateurs qui, eux, n’y comprenaient pas grand’chose.
Ron PAUL a introduit l’année derière une proposition de loi pour abolir la FED, proposition toujours en attente.
Concernant la FED, une chose remarquable pour des juristes : elle a été créée par la loi, possède des actionnaires privés, émet une monnaie (centrale) qui, au début, portait l’inscription « convertible contre une once d’or ». Ayant émis plus de billets que n’ayant d’or en stock, elle a évité toute défaillance en retirant cette mention. Les Américains, et le monde, se retrouvent dans la situation juridique suivante : une monnaie ayant cours légal, mais non convertible en or, l’actuel USdollar, mais … inconstitutionnelle ! En effet la constitution US dispose que seuls ont cours légal le gold-dollar et le silver-dollar (convertibles à vue contre une once de métal fin). La Cour Suprême n’a jamais eu à se prononcer sur ce problème (ou elle a évité d’avoir à se prononcer). C’est la base de l’argument de Ron PAUL.
C’est le mot de Nathan Rothschild : « donnez-moi le contrôle de la monnaie d’un pays et je me fiche bien de qui le gouverne ».
à Armand
je préfère utiliser « dette » plutôt qu ‘ « emprunt », car la charge affective est plus grande et l’obligation de retour y est effectivement inscrite, il faudra payer ! Pour « emprunt », l’obligation n’est encore que potentielle.
Le plus amusant dans cette affaire est que nous nous soumettons de bon gré au simulacre de la valeur des « dettes bancaires », tout en sachant très bien que c’est un jeu. À preuve lorsque les foules se ruent aux guichets pour retirer leur dépôt… nous savons tous, au fond de nous-même, que c’est comme ça, mais nous préférons ne pas y penser…
En matière de finance, il me semble très intéressant de réfléchir sur les retournements d’opinion quasi-instantanés, non pas tellement sur l’effet boule de neige, (j’achète parce que tout le monde achète et inversement, je vends parce que tout le monde liquide…), mais plutôt sur le fait que des mécanismes aussi instables aient justement été choisis comme mode d’organisation de la vie en société. Dans l’idée d’une constitution économique, je pense que c’est important d’examiner ce genre de point.
À titre d’exemple de retournement voici un sketch « You tube » à propos des banquiers et du « subprime »; d’un coup, les banquiers et leur langage deviennent les boucs émissaires, alors que quelques mois auparavant nous avions adoré…
The Long Johns – The Last Laugh – George Parr – Subprime
Jusqu’à un certain degré, l’humour permet de canaliser l’angoisse des foules, mais jusque quel niveau de déglingue ? Tous le monde ne peut pas investir dans l’or pour se désangoisser ! Se préparer à ouvrir le plus largement possible des lieux de refondation de l’économie sur une base constitutionnelle me semble le meilleur moyen de canaliser les peurs et les violences sociales libérées par la perte de croyance dans les institutions. S’il est trop tard pour que le vase ne continue de se briser (cf. Jorion, « le vase brisé sur ce blog« ), alors tentons au moins d’éviter le chacun-pour-soi et le retour régressif d’une socialisation à la machette et la récupération des « dettes » d’honneur, de sang, etc.
PS. Le bruit court que « les quelques banques privées qui sont derrière la Fed » perçoivent un intérêt pour tout dollar émis par la Fed, ce serait amusant : l’État payerait un intérêt à son emprunteur, avez-vous des informations sur ce qui n’est vraisemblablement qu’une légende urbaine de plus…
Le tableau des garanties demandées par la FED pour créer ex-nihilo et temporairement de la monnaie centrale :
http://www.frbdiscountwindow.org/discountmargins.pdf
On comprend bien comment les banques peuvent se retrouver dans l’impossibilité d’obtenir de la monnaie centrale pour assumer le ratio de réserves obligatoires ; c’est un effet ciseau : davantage de besoin à cause des défaillances de leurs créatures à effet de levier (SIV) qu’elles doivent désormais rapatrier dans leurs livres de compte, d’une part, et, d’autre part, perte de notation triple-A des CDO ou autres actifs que la FED est susceptible d’accepter.
Rajouter à cela les problèmes (doux euphémisme) suivants :
– des cartes de crédit et des dérivés qui ont été bâti dessus ;
– du CRE (Commercial Real Estate = immobilier commercial) qui implose à son tour et qui va entrainer les mêmes phénomènes que l’implosion de l’immobilier résidentiel ;
– du « walkin’ away » où même les emprunteurs « prime », c’est-à-dire solvables, se rendent compte qu’ils ont intérêt à « laisser les clefs de la maison dans la boîte à lettre », c’est-à-dire à ne plus rembourser l’emprunt même s’ils en ont les moyens, préférant que la banque prenne la maison dont le prix est désormais inférieur au montant du prêt. Ces emprunteurs ne risquent pas le reste de leur patrimoine, juste 7 ans d’inscription au fichier des faillites et l’impossibilité de contracter de nouveaux prêts pendant cette durée.
Ainsi les banques vont avoir des besoins énormes en monnaie centrale …
A mon avis, ni la FED, ni aucune autre BC, n’ont le pouvoir de sauver le système. La seule solution envisageable est d’imprimer, réellement, de la monnaie (via les POMO), c’est-à-dire dévaluer les dettes par l’inflation, i.e. la dévaluer la monnaie. Mais il s’agira de ne pas mettre en colère les créanciers étrangers (Japon, Chine, Pétro-monarchies), qui réclament du 12 à 14% pour recycler leurs dollars dans ces banques. Et encore, quand elles en acceptent le risque !
Philippe Barbrel de ContreInfo me signale deux documents expliquant la logique présidant à la création d’argent par les banques commerciales : un rapport de la Bank for International Settlements à Bâle et une illustration du mécanisme par la Fed.
Ouf. Je viens de lire les 2 posts et tous les commentaires de ce débat, fort intéressant…
Personnellement, j’enseigne depuis une dizaine d’années l’économie à des jeunes entre 16 et 20 ans et je leur ai toujours montré le partage des tâches entre la Banque Centrale qui émet la monnaie fiduciaire et les banques commerciales qui se chargent de la monnaie scripturale. Ce n’est donc nullement une surprise pour moi.
Au passage, j’en profite pour vous égratigner, sans méchanceté M. Jorion : il est tout de même intéressant de remarquer que vous étiez suffisamment convaincu qu’il s’agissait d’une « légende urbaine » pour l’afficher de manière affirmative sur votre blog. Or, il en est de même de nombreuses autres personnes, y compris de pas mal d’universitaires ayant étudié des sciences économiques et/ou sociales. Il y a là un chantier ouvert d’information démocratique…
Je suis citoyen suisse et j’en profite donc pour donner quelques faits et chiffres de chez moi. La monnaie fiduciaire compte pour 5,5 % de M3 (chiffres 2007, que je fais calculer à mes élèves). La Banque nationale suisse, institut d’émission, est aussi une Société anonyme de droit privé et compte des actionnaires privés, aux côtés de la majorité du capital-actions qui est détenue par les cantons. Il est intéressant de remarquer que ce contrôle par l’échelon inférieur du système fédéral a servi à garantir depuis sa création en 1907 l’indépendance de la banque centrale vis-à-vis du pouvoir fédéral. Il y a une certaine analogie avec les Etats-unis… Par contre, plus étonnant, au prix du marché de fin décembre 2007, la garantie-or du franc suisse fiduciaire atteint 59 % (et atteindrait 118 % si la moitié de la réserve d’or n’avait pas été vendue, notamment sous pression américaine). Le franc fiduciaire est donc fortement garanti par l’or alors que le franc scriptural est lui relativement peu garanti par la monnaie fiduciaire… Mais comme il a déjà été dit, sur le marché il n’y a qu’un seul franc.
Maintenant, j’aimerais apporter encore un petit complément de débat. En effet, une fois que l’on constate que l’émission monétaire est le corollaire de dettes bancaires (pour 94,5 % en Suisse, pour un chiffre également important aux Etats-Unis ou dans l’UE comme cela a été déjà précisé) et que ces dettes bancaires doivent être remboursées avec intérêts, une réflexion doit être amorcée :
– Au fond, la somme totale à rembourser (principal + intérêts) est supérieure à la somme émise, à un moment donné. La monnaie (fiduciaire et scripturale) permettant de rembourser l’ensemble des dettes n’existe donc pas (ou alors, quelque chose m’échappe encore). La somme correspondant aux intérêts n’est pas créée au moment de la création des dettes corollaires de l’émission monétaire scripturale.
– Si je poursuis le raisonnement, seule la croissance économique, permettant un enrichissement permettant lui-même la souscription de nouvelles dettes, et donc la création de monnaie supplémentaire permet au fur et à mesure de rembourser les dettes en cours. J’ai l’impression de voir un système qui tient sur un mouvement infini : il faut de nouvelles dettes pour rembourser les anciennes, du moins si l’on raisonne non pas sur un agent économiques mais sur la totalité des agents économiques (ou alors, il me manque une case… si Armand le constate, merci de rectifier… 😉 )
Le système est fragile, terriblement fragile, la croissance monétaire est nettement supérieure à la croissance économique… Comment faire pour avoir une monnaie solide à la base de notre système économique ?
– Basée sur l’or, comme par le passé ? Mais le problème est que la quantité d’or est limitée… La croissance est-elle possible dans la même mesure ?
– Basée sur la croissance économique ? Mais qui va le contrôler ?
– Basée sur autre chose ? Mais quoi….
Ce débat m’apparaît comme extraordinairement fondamental. Je trouve intéressant d’essayer de jeter un oeil plus loin… Pas vous ? 😉
(A Dani)
Oui, j’étais frustré par les explications qu’on me proposait : incohérentes sur un plan logique ou mathématiquement fausses. J’avais donc le choix : ou bien il s’agissait d’un mythe et il fallait le dénoncer ou bien il y avait vraiment quelque chose et c’étaient simplement ceux qui m’expliquaient le scandale qui s’embrouillaient dans leurs explications et il fallait découvrir l’explication vraie en prêchant le faux … pour savoir le vrai, donc il fallait de toute manière dénoncer.
Je me réservais quand même une issue de secours honorable en écrivant : « Je vois que Maurice Allais pense que cette création ex nihilo joue un rôle important et la dénonce. Je n’ose pas croire que le seul Prix Nobel Français d’économie puisse se tromper et je chercherai donc à m’informer davantage sur ce qu’il a voulu dire » mais j’ai été pris de vitesse par la salve de bonnes explications – dont la vôtre.
Ceci dit, j’ai pris un risque (*) et je me suis retrouvé un peu piégé et j’ai dû faire machine–arrière : j’ai – toute honte bue – extrait mon premier papier de la catégorie « Science–fiction » ! Ceci dit, je ne regrette rien : la qualité du débat me récompense du risque pris ! Autre chose, mon opinion n’est toujours pas faite s’il s’agit ou non d’un « scandale ». Mon troisième papier – il y en aura un troisième, c’est certain – s’appellera peut–être « Le « scandale » des banques qui créent de l’argent ».
A Dani,
pourquoi ne pas avoir une monnaie liée à un panier de marchandises, suivant la volonté de Keynes dans les années 50 (il me semble que c’était pour Bretton Woods, et Hayek l’aurait emporté avec son idée de réference or) ?
Ce panier pourrait être indexé à la somme de denrées, services (…) choisis au sein de la zone monétaire.
Il pourrait être intéressant de se baser sur deux indices:
– un premier lié aux coûts « d’achats » (indice reflétant la valeur de la monnaie à court terme, dépendant des balances commerciales extérieures à la zone monétaire) ;
– un second, lié aux coûts de « production » (indice reflétant la valeur à plus long terme, en prenant en compte le degré d’autonomie potentiel de l’économie de la zone monétaire)
Cette solution ne peut être possible que si le niveau de vie de la zone monétaire est équilibré, ce qui est dans tous les cas indispensable pour lutter contre le dumping social qui a les conséquences qu’on lui connaît.
…. la valeur de la monnaie devrait être plus liée au quotidien, les gens comprendraient mieux les mécanismes de l’inflation… En tout cas ces questions sont centrales et on ne peut faire que mieux…
Pour revenir à la « légende urbaine/conspirationniste » des banques créatrice de monnaie :
qui créé la monnaie ?
– la banque centrale, oui mais que fiduciaire (dans les 5% de la masse monétaire M3, au maximum); la monnaie scripturale, elle joue peut-être dessus avec ses taux mais elle ne peut pas la créer…
– les états, la plupart des états ne créent pas d’argent, ils utilisent celui en circulation; les bons du trésors sont plus des reconnaissances de dettes que des créations monétaires;
– on se retourne alors sur les banques :
l’argent qu’elles créent par le crédit est détruit lors du remboursement, reste que la banque perçoit les intérêts, ces derniers lui permettent de grossir ses actifs et donc le montant de crédit ensuite allouable en respectant les ratios de solvabilité, autant de nouveaux crédits qui lui feront gagner des intérêts… Les banques ont le monopôle de la location d’argent. L’argent est devenu au long du XXème une marchandise et n’est plus la commodité que nous imaginons.
La titrisation à permit de détourner en parti les ratios de solvabilité (des créances sont sorties du bilan, donc de nouveaux prêts sont possibles et certaines réapparaissent même dans les actifs, élargissant les conditions de prêts. L’inflation est un phénomène également systémique.
Le processus d’endettement parait exponentiel et systémique, il reflète une simple réalité : un transfert des richesses du travail (le « peuple ») vers le secteur financier et tout particulièrement vers le haut de la pyramide de la finance, les banquiers internationaux.
L’argent contrôle le monde, qui contrôle l’argent ? des hommes, des entreprises privées !
Al baradei illustrait cela en décembre dans une interview (contre info ou alterinfo) durant laquelle il rappelait ces chiffres criants de réalité et de mensonge à la fois :
1% de la population se partage 40% des richesses, pendant que 50% de la population se partagent 1% des richesses…
Amicalement à tous
à Dani
Comment faire pour avoir une monnaie solide ?
En voilà une question mal posée, (ceci dit, avec une très grande sympathie et un chaleureux remerciement pour vouloir poser des questions essentielles).
Je poserai la même question de la façon suivante : quel système de croyances pensons-nous pouvoir instaurer afin de garantir la stabilité du système d’échange, au mieux et pour quelques générations à venir…
Je crois que nous disposons, à ce jour, de trois modèles permettant de concevoir un avenir stable :
– la transformation cyclique, le « retour du même », la loi, la prescription d’un futur radieux, etc.
– l’exponentielle, « toujours plus » elle est stable, pour un temps, parce qu’elle s’auto-alimente
– la variété nécessaire, « il faut de tout pour faire un monde » ; cette dernière étant « récursive » sur les deux autres.
En ce moment, l’exponentielle du prêt à intérêt domine et déséquilibre tout le bazar. Avez-vous un autre modèle permettant d’imaginer l’avenir ? Ça fait quarante ans que (de temps en temps) je pose cette question qui n’intéresse pas grand monde.
PS la « monnaie » c’est ce qui nous fait vivre ensemble de l’Adramaout à Nankin, et ça n’à rien à voir avec un étalon, une substance (du moins à mon avis).
Il y cependant un principe de réciprocité, « de dettes croisées » : j’imagine que t’imagines que je t’imagine m’imaginer. À mon avis « la monnaie » ça se tient là dedans, aussi, les philosophes, les anthropologues et les psychanalystes nous éclaireront plus sur ce sujet que les économistes lesquels sont indispensables, car se sont les seuls à avoir tâté du cambouis (le mot est à la mode).
à +
à Paul Jorion,
Vous avez eu raison de prendre un risque. La preuve, la qualité du débat qui a suivi !
à JLM,
Oui, en effet, j’ai été mal inspiré en utilisant l’expression « monnaie solide ». Cette expression rend mal ce que je voulais exprimer.
Au fond, les avantages d’une monnaie sont connus : réserve de valeur, étalon de mesure de la valeur et moyen pratique d’échange. J’imagine qu’il n’est pour personne question d’y renoncer. La question serait donc : « Comment instituer une monnaie à même de garantir ces fonctions sans permettre des dérives dangereuses… »
A mon sens, la monnaie devrait avant tout être considérée comme une « institution », et comme vous le signalez, c’est la croyance, ou la confiance, dans cette institution qui en garantit le bon fonctionnement.
Aujourd’hui, le système monnaie participe d’un système économique général dont aucune des tendances n’est soutenable à long terme (ni l’augmentation rapide des inégalités, ni l’accroissement monétaire, ni la croissance économique infinie, ni la disparition de la biodiversité, ni l’exploitation des ressources naturelles, ni…). Il est même possible qu’il soit un des moteurs de cette évolution dangereuse, en instituant par le mécanisme de la dette des promesses sur l’avenir… De plus, comme signalé plus haut par guillaume, il permet un transfert de la valeur créée par le travail et l’initiative vers un « haut » de la pyramide constituée d’un certain point de vue par des parasites financiers, qui eux ne créent rien en définitive, si ce n’est justement des promesses…
La création monétaire n’est aujourd’hui plus bridée comme par le passé par la masse disponible des métaux précieux. Elle n’est le fait que d’un calcul, d’un pronostic, opéré par les banques centrales et par les banques commerciales sur les possibilités de gain offertes par cette création monétaire. Au fond, elle n’est limitée que par la croyance en le déploiement du système lui-même. Je me demande donc comment faire pour que la monnaie soit une institution humaine reconnue comme telle et comme elle pourrait servir l’intérêt collectif de la société… Il ne suffit donc pas qu’elle soit « solide » (vis-à-vis de l’inflation par ex.) mais aussi « adéquate » vis-à-vis des objectifs que se donnerait la société humaine, en termes sociaux ou environnementaux par ex. Je n’ai pas de réponse à cette question aujourd’hui…
Passionnante file!!!
Autre membre de Hardinvestor (lien déjà donné plus haut, sinon Googlez!) mais m’étant posé bien avant et depuis pas mal de temps les mêmes questions stupides, j’ai commencé à creuser le sujet et à me rendre compte que ces deux thèses s’opposaient :
1) le système bancaire CREE dans son ensemble de la monnaie ex-nihilo de par le système de réserves fractionnaires
2) le système bancaire (et en particulier les banques commerciales) NE CREENT pas de monnaie (par ailleurs garantie par l’Etat pensent sincèrement certains) mais doivent « l’emprunter »…
De manière assez surpenante, ce sont souvent des employés de banques (anciens ou en poste) qui soutiennent mordicus la seconde thèse. Or en prenant le problème dans tous les sens et en creusant un chouia le sujet, il me semble qu’on est bien obligé d’admettre que c’est la thèse 1) qui est valide…
On peut alors effectivement se demander sérieusement comment un tel système de complexification-diversion-écran de fumée peut à ce point en venir à troubler (et même de bonne foi !) les yeux-mêmes de ceux qui le font fonctionner au sein des banques. Mais il peut y avoir aussi un biais psychologique qui explique cet aveuglement (refus d’admettre l’impensable lorsqu’on y collabore, même « à l’insu de son plein gré ») bien aidé par un discours managérial et une division des tâches qui rendent bien difficile pour de nombreux employés la possibilité d’avoir une vision globale…
Sur la remarque de DANI, il est clair qu’il y a un enjeu démocratique CAPITAL à amener cette question FONDAMENTALE dans le débat public. Et à attirer l’attention également sur certaines autres « interprêtations erronées » de termes, concepts et outils qui contribuent eux aussi, couplées à cette question de la création monétaire, à avoir rendu possible cette invraisemblable excroissance que l’on appelle le capitalisme financier.
Je pense en particulier à l’équivalence coupable entre « maîtrise de l’INFLATION » et « stabilité des prix » telle que définie par la BCE/eurostat, en excluant soigneusement le prix des actifs et de l’immo dans les indicateurs de mesure choisis, les IPC (ou CPI aux US). Permettant ainsi la création de bulles par le mécanisme de création ex-nihilo en question tout en faisant croire par les IPC qu’il n’y avait pas « d’inflation » et que donc que la multiplication des pains était possible sans recours à la magie… Il y a les euros et les euriches, deux monnaies presque séparées qui portent cependant le même nom : euros. L’IPC n’augmente que peu donc les EURICHES peuvent (un temps) se multiplier sans perte APPARENTE de leur valeur ! Les banques centrales ne luttent pas contre l’inflation, elles ont pour but d’en créer de manière contrôlée dans certains secteurs tout en ne parlant que de « stabilité des prix » et d’IPC qui excluent ces secteurs…
Voir à ce sujet la page sur mon site.
Qu’on songe (quand même !) que dans l’IPC calculé par l’INSEE, le poids des loyers est pondéré à… 6% des dépenses d’un ménage ! (voir les curseurs sur le simulateur d’inflation personnalisée de l’INSEE : http://www.insee.fr/fr/indicateur/indic_cons/sip/sip.htm (cliquer sur « Vos pondérations ») . Soit 60 euros/mois pour 1000 euros de dépenses (je dis dépenses, pas revenus) mensuelles par exemple!!!!!
Y’a là aussi de longs débats sur le pourquoi du comment de cette situation mais le scandale est sur le DECALAGE (que je qualifie de délibéré et de coupable) entre les définitions strictes des experts et leurs interprêtations erronées par les médias, politiques et citoyens (et aussi experts qui savent mais jouent le jeu sur les plateaux TV !)
Ceci est un sujet à COUPLER avec celui de la création monétaire car il est l’outil de maquillage des conséquences de cette création…
Ou comment ce NOUVEAU MUR DE L’ARGENT (pour reprendre le titre du bouquin d’un ancien membre du Conseil de la Banque de France, François MORIN) a pu se construire à notre insu…
Qu’on songe quand même pour reprendre l’ordre de grandeur donné par MORIN pour caractériser cette « téraéconomie financière » ou « Térafinance » (téra dollars = 1000 milliards de dollars par exemple), qu’en 2002 les seules transactions annuelles sur produits dérivés (dont on parle tant actuellement) étaient 21 fois supérieures au PIB mondial, soit (700 Tdollars pour 33 Tdollars de PIB mondial). Ceci s’est encore accentué jusqu’en 2006 d’ailleurs. Si ceci ne s’est pas fait sans découplage entre valeur monétaire et valeur économique stricte, je ne sais pas comment appeler cela. Ensuite que l’on parle de création monétaire ou de création de dettes, cela ne change pas grand chose, sauf que dire dette (ou mieux crédits) semble plus correct que dire création monétaire qui est une expression taboue à laisser hors du champ de vision des citoyens. A défaut on bourre le mou et on agite le martinet de la DETTE PUBLIQUE qui elle semble astronomique… alors qu’elle est une orange comparée à une planète de la nouvelle galaxie financière ! Il est des dettes qui ne se valent pas…
Encore une fois, c’est une veille histoire toujours renouvelée. A l’époque des orfèvres, ceux-ci émettaient plus de reçus qu’ils n’avaient d’or à un moment donné dans leurs coffres (idem Ile des naufragés), tant que les gens « avaient confiance », le système marchait. Puis plouf. Et le scénario s’est raffiné, complexifié, mais aujourd’hui les orfèvres ont été remplacés par d’autres (banques commerciales + banques centrales), la « confiance-ignorance-crédulité » est construite par d’autres outils (comme les IPC, par exemple ; ainsi que la persistance d’autres croyances, comme la monnaie garantie par l’ETAT!!!) …
Sur un même scénario, les variantes ne varient guère qu’en apparence…
GdB
http://linflation.free.fr
http://lenairu.blogspot.com
http://lenairu.free.fr
@JLM ; en effet la FED fait des bénéfices sur ces prêts. Mais elle les reverse presqu’entièrement au Trésor US. Le solde sert à rémunérer ses actionnaires privés (banques US et non US). Je ne retrouve plus le lien vers la FED concernant cette répartition des bénéfices, mais de tête, c’est du 98% / 2%.
A Propos de l’inflation : aux Etats-Unis, pour des raisons historiques les produits alimentaires et l’énergie (tel que l’essence) ne font pas partir du calcul du CPI (Core Price Index).
En effet au début de la création de cet indice les américains considéraient que les produits alimentaires et l’essence étaient bon marché et en abondance aux Etats-Unis. En 1950, les Etats-unis étaient encore le 1er producteur de pétrole.
Ceci est « sorti » sur la place publique il y a quelques mois. Comme disaient de nombreuses personnes sur les blogs : « Pour celui qui ne conduit pas et qui ne mange pas il n’y a pas d’inflation ».
La référence à Hardinvestor de Guillaume m’a réjoui, c’est sur ce site que sont publiés deux articles formidables, le premier sur Greenspan et le second sur la crise en cours et sa présentation par les média dominants.
Deux bijoux d’intelligence et d’humour féroce.
Je trouve ce blog formidable, d’autant plus que le sujet m’intéresse depuis de nombreuses années et que j’ai tellement de mal à alerter l’opinion des citoyens les plus ouverts que je rencontre, que j’en suis arrivée à creuser la question au point de décider de publier un livre. qui maintenant stupéfie ses lecteurs. Sidérés, ils me disent : Quoi, c’est vrai ? C’est possible ? Moi qui pensais que ce sont les États qui décidaient de leurs monnaies ! Mais comment les responsables politiques ont-ils pu se priver eux-mêmes de l’essentiel du pouvoir : celui de choisir les entreprises qui pourront se développer, c’est-à-dire décider des orientations économiques, donc de l’avenir ?
Et puis il se trouve qu’un groupe de réflexion s’est enfin formé, justement sur ce sujet, et bien entendu j’en fais partie. Dans ce groupe, des personnes liées à la banque y sont venues affirmer que non, absolument pas, les banques ne peuvent pas ouvrir des crédits ex nihilo, ce mot ne veut rien dire : si elles n’ont pas en caisse, chaque jour de quoi prêter elles sont obligées d’emprunter elles-mêmes ; et leur profit en l’affaire ne leur vient que de la différence des taux entre ce qu’elles prêtent et ce qu’elles empruntent. Il a fallu, à ce jour, l’intervention d’une “autorité” en la matière, en l’occurence un prof d’université en économie, et de plus, spécialiste de la banque, pour venir à bout de ces affirmations. exactement comme cela s’est produit sur ce blog. Une conclusion : il y a du pain sur la planche pour que le grand public soit enfin conscient de ces faits pourtant essentiels.
Et ce blog est d’autant plus formidable que vous avez abouti à la question de fond qui s’impose. Comme le dit JLM, elle est peut-être mal posée sous la forme : « comment faire pour avoir une monnaie solide ? », mais sous la forme qu’il propose à la place :« quel système de croyance pensons-nous pouvoir instaurer afin de garantir la stabilité du système d’échange… », je vois d’une part qu’il est prêt à adopter un autre système de croyance, et cette formulation ne me satisfait pas, surtout quand je vois que les croyances actuelles en la matière sont plutôt de la crédulité, et d’autre part il fait l’hypothèse que c’est le système des échanges qu’il faut, a priori, sauver.
Alors, première question : peut-on et faut-il sauver l’économie de l’échange ? Si la réalité était que c’est ce système de l’échange qui s’avère aujourd’hui dépassé par les évènements ? Pour faire partie d’une économie de l’échange, il faut avoir quelque chose à offrir. Et, pour tous ceux qui ne naissent pas dans un berceau doré assurant leur avenir, tout ce qu’ils peuvent offrir ne peut-être que le fruit de leur travail. Mais depuis quelques décennies, l’humanité n’a-t-elle pas trouvé les moyens techniques de produire de quoi satisfaire l’essentiel des besoins vitaux humains avec de moins en moins de main d’œuvre ? Alors que peuvent offrir pour échanger tous ceux dont cette production n’a plus besoin ? Certes, on peut imaginer toutes sortes de productions de luxe à l’usage des plus fortunés, mais cela n’a qu’un temps, d’abord parce que ça détruit l’environnement, et cela ne donne pas de quoi vivre à tous les exclus qui aujourd’hui ne possèdent même pas un lopin de terre à cultiver. Et ils sont de plus en plus nombreux. Certes, le système de l’échange perdure, car on invente chaque jour de nouveaux besoins, et la publicité trouve encore des idées pour inciter les clients solvables à acheter et permettre aux grosses entreprises de réaliser des profits. Mais est-ce bien cela qu’il faut faire durer ?
N’est-il pas temps, au contraire, d’imaginer un autre système que celui de l’échange, mais en partant cette fois, a priori, de l’idée que le but n’est pas que des entreprises fassent des profits, mais que les humains aient tous, d’abord, de quoi vivre, et le plus humainement possible ?
Si on part avec cet objectif, à mon avis plus défendable (j’allais écrire soutenable, mais le mot étant à la mode il faut se méfier de ce qu’on y place), alors la question devient : quelle monnaie faut-il pour que les richesses qu’on peut produire aujourd’hui soient mieux partagées ?
Cela peut alors déboucher sur des propositions innovantes. Je suis prête à en avancer une ou deux. Peut-être même trois. Mais y a-t-il sur ce blog une volonté de s’ouvrir à ce genre de propositions qui, forcément, décoiffent ?
A Marie-Louise,
« Mais y a-t–il sur ce blog une volonté de s’ouvrir à ce genre de propositions qui, forcément, décoiffent ? »
Je suis déjà assez décoiffé en temps normal, alors n’hésitez pas !
@Marie-Louise,
Je t’envoie deux ou trois remarques pour te permettre de cadrer mon vocabulaire.
J’entendais « échange » au sens « anthropologique » : le fait que les êtres sont humains ensemble, et pas isolément.
Je ne parlais donc pas du troc, comme dans un Service d’Échange Local dans lequel « je t’échange trois heures de jardinage contre trois heures de conversation anglaise… » comptabilisées par des points de monnaie « SEL »
Les Sels sont déjà une réalité et ont certainement un avenir… la preuve… l’état cherche à y appliquer une tva. Mais il est illusoire de pouvoir troquer le démontage de nos vieilles centrales nucléaires lorsqu’elles sont en bout de course…. « demande 4.000.000 heures de liquidateurs contre…? « . Pourtant, le démontage de centrales nucléaires nous l’avons devant nous comme obligation…
§
J’entendais « croyance » au sens de Castoriadis; je le cite :
» Le fait que les Hébreux vivaient pour adorer Dieu, et que nous vivons pour augmenter le produit national, ça ne découle ni de la nature, ni de l’économie, ni de la sexualité… Ce sont des positions imaginaires premières, fondamentales, qui donnent un sens à la vie. »
Tu écris » quelle monnaie faut-il pour que les richesses qu’on peut produire aujourd’hui soient mieux partagées ? » Je crois que fondamentalement une « monnaie » n’est pas un « chose » mais une étiquette commode permettant de désigner une façon de vivre ensemble à laquelle nous devons obligatoirement nous référer pour être humains.
L’ensemble des liens que l’EAD propose sur son site illustre formidablement l’aspiration, partout présente, à « réimaginer » notre avenir commun. L’intérêt – surprenant – pour l’IDEE de monnaie tel que nous l’expérimentons sur le blog de Paul; mais aussi comme nous le découvrons (avec surprise en ce qui me concerne), ailleurs sur la toile, est sans doute le signe de ce besoin de ré imaginer le lien social.
Par un effort collectif, nous pouvons inventer d’autres façons de vivre ensemble lesquelles conduiront à d’autres monnaies, mais une partie de notre avenir est cependant déjà inscrit, notamment le démontage de nos vieilles centrales nucléaires… Alors, c’est vrai que nous devons imaginer « dare-dare » d’autres monnaies permettant de faire la transition entre la monnaie qui se casse la figure aujourd’hui, et celle(s) que, plus tard, quand nous en partagerons plus encore le sens comme une ascension vers l’universalité, nous pourrions nous donner dans une plus grande liberté (et pourtant, ce soir, je ne me suis servi qu’un whisky ?).
JLM
Puisque vous m’encouragez, je remonte à l’intervention de Dani pour partir de ce qu’il disait à JLM :« les avantages d’une monnaie sont connus : réserve de valeur, étalon de mesure de la valeur et moyen pratique d’échange. J’imagine qu’il n’est pour personne question d’y renoncer.»
Telles sont en effet les trois fonctions qui servent classiquement à définir une monnaie. Avant de décider s’il faut les conserver, remarquons :
1.que la monnaie n’est une réserve de valeur qu’autant qu’elle ne se déprécie pas. Demandez aux Argentins qui ont vu fondre quasi instantanément tous leurs avoirs en 2001 si cette première fonction est aujourd’hui garantie. Imagine-t-on de mesurer des longueurs avec un mètre variant à chaque instant ?
2. est-il justifié d’avoir un étalon universel de valeur ?
À mon avis non, du simple fait que c’est comparer des “valeurs” qui n’ont rien de comparable. Et je pense que nous tenons là un sujet qui demande beaucoup de réflexion. Car dès lors que ce qu’un être humain “vend” de lui-même : son temps, son savoir ou sa force musculaire, qui lui sont payés sous le nom de salaire, il devient lui-même un coût, comme une matière première, et il n’y a plus qu’un pas à franchir quand il faut réduire les coûts, c’est de la “jeter comme un kleenex”, expression bien connue et très claire.
Voila donc une “vertu” de la monnaie à laquelle je suis prête à renoncer, tout simplement afin que l’être et l’avoir cessent d’être confondus. Je verrais donc bien une comptabilité des choses, séparée de la comptabilité (si elle est possible) des interventions humaines.
3. La monnaie est un moyen pratique d’échange. D’accord. La quesion déjà soulevée était de savoir s’il fallait continuer à raisonner dans une économie d’échanges ou bien s’il ne fallait pas s’adapter au fait que nous ne sommes plus au Moyen Age. Quand la production des biens utiles peut être mécanisée et automatisée, elle nécessite évidemment beaucoup moins de travail humain (c’est bien pour cela que des machines ont été mises au point !). Il ne faut pas perdre de vue que le système économique actuel ne prend en compte que les besoins solvables, et qu’il est organisé pour créer toujours plus de besoins, et que le souci du long terme n’est pas prépondérant ! Mais comme il me semble que nous sommes d’accord pour en voir les dangers, il serait bon d’essayer de préciser l’objectif que nous nous proposons : est-ce sauver le système en le dotant d’une monnaie qui l’empêche de s’écrouler, ou bien de définir les bases d’un système différent n’ayant pas les tares de l’actuel et d’autres objectifs ?
Or en n’énonçant que ces trois fonctions, les économistes omettent de parler d’un autre rôle que joue la monnaie aujourd’hui, et que ce blog a pourtant bien mis en évidence : c’est l’effet levier du crédit, c’est le phénomène boule de neige des intérêts composés. C’est le fait que l’argent virtuel, contrairement au métal … fasse de l’argent ! Cette “quatrième fonction”, dont l’effet évident est d’augmenter le fossé entre riches et pauvres, a une autre conséquence non moins désastreuse, c’est qu’elle impose la croissance. Ne sommes-nous pas d’accord pour penser qu’aucun arbre ne peut monter … vous savez la suite ?
Avant d’élaborer des propositions, il me semble qu’il faut d’abord fque nous fassions le point sur l’utilité que nous attribuons à ces diverses fonctions de la monnaie (appelons-les 1. étalon universel de valeur, 2. réserve, 3. intermédiaire d’échange, 4.fructification). Il sera plus facile ensuite de voir clairement quelles fonctions il convient de garder en fonction de ce que nous voulons.
Un des noeuds du problème, à mon sens, comme il est bien expliqué dans la nouvelle de l’ile des naufragés, est la quatrième fonction vis à vis des 3 autres. Si l’ensemble des biens est valorisé 1000 mais qu’on met en place un mécanisme de gestion qui impose de valoriser l’ensemble des biens à 1001, on voit apparaitre l’inflation et la spirale qui est au bord de l’explosion aujourd’hui.
Pourquoi certaines sociétés, dont la juive et la chinoise je crois, obligeaient régulièrement à solder TOUTES les dettes, permettant ainsi à chacun de repartir d’une base « sûre ». N’y a-t-il pas là un chemin a explorer ? Notamment les conséquence de la situation actuelle.
Ceci peut être un élément de la constitution, aucune dette ne doit courir sur plus de x temps. Afin de mieux encadrer la « cavalerie ». Il faut dire que, dès aujourd’hui, celle-ci profite beaucoup de la cécité « volontaire » des prêteurs…
Ceci se heurte malheureusement au risque entrepreneurial qui a parfois besoin de beaucoup de temps pour s’équilibrer et se « rentabiliser », cf la mésaventure Eurotunnel et/ou Eurodisney.
@Marie-Louise :
Si j’aspire généralement aux même type de propositions que vous pour l’avenir (j’ai lu votre dernier livre que j’ai bien apprécié), je trouve toutefois que votre réponse sur les fonctions de la monnaie pose un problème de rigueur.
1. Est-ce parce qu’on connaît des cas où une monnaie n’a pas assuré sa fonction de « réserve de valeur » (cf. Argentine) qu’il faut pour autant renoncer à la définition ? Je ne pense pas qu’il suffise que quelqu’un détruise les fondations d’une maison pour qu’on renonce à estimer que des fondations servent à soutenir la maison…
Si la monnaie s’est incarnée pendant des siècles dans les métaux précieux, c’est tout de même qu’ils étaient inaltérables et qu’ils garantissaient une réserve de valeur.
2. De même, on peut discuter de l’opportunité d’avoir ou non un étalon universel, mais cela n’a rien à voir avec une question de définition. A l’aune de l’histoire de la monnaie, il est difficilement contestable que cette notion fasse partie de la définition. Cela n’empêche en rien de réfléchir à des solutions novatrices….mais il est dommage de confondre définition, analyses et proposition….
3. Je ne suis pas sûr qu’il soit bon de reconnaître une 4ème fonction à la monnaie. A mon sens, ce qui est parfois décrit comme la 4ème fonction (la politique monétaire, qui actuellement permet ce gigantesque effet boule de neige, si ce n’est des chaînes de Ponzi…) est avant tout une nouvelle forme d’utilisation des fonctions de la monnaie. Cette 4ème fonction est une forme de « coup politique » (ou une dérive), un levier de pouvoir. Cela relève probablement plus de la science politique que de l’analyse économique.
En bref, je ne pense pas qu’il soit opportun de trafiquer les définitions dans le cas de la monnaie, surtout si c’est pour se mettre en contradiction avec toute son histoire. C’est une manière idéale de risquer l’incompréhension. Par contre, il est très utile de mettre en évidence la nouveauté des phénomènes monétaires du XXe siècle et des enjeux économiques et financiers qui en découlent. C’est justement en montrant le plus clairement possible les dérives qu’on pourra faire prendre conscience à la fois des problèmes graves plusieurs fois évoqués ici et des solutions novatrices qui pourraient passer par la reconstruction d’un « système monétaire ». D’abord être au clair sur les définitions, ensuite sur les analyses, et ensuite nous arrivons au point final de votre commentaire : reconstruire ou redéfinir en voyant ce qu’il convient de conserver, de supprimer, de transformer, etc.
Je suis désolée d’avoir été mal comprise par Dani. Car mon propos n’était pas de discuter des définitions, mais de nous demander si les fonctions actuelles de la monnaie doivent, ou non, être conservées, et selon, vous, pourquoi.
Ainsi, à propos de “monnaie réserve de valeur” (mais c’était peut-être à placer au paragraphe “étalon”), je soulignais qu’en affirmant qu’une monnaie est une réserve de valeur, on dit quelque chose de faux parce qu’il est inconstestable que les valeurs des monnaies d’aujourd’hui varient sans arrêt, (et même pendant les siècles et les siècles où cette valeur était définie par référence à un poids de métal précieux, la référence, elle, n’était pas inaltérable : elle a beaucoup varié). Mais c’était pour débattre de la nécessité que la “valeur” (à définir) d’une monnaie soit invariable, ou pas, et pour quelles raisons ?
De même si j’ai désigné par « 4éme fonction de la monnaie » le fait qu’elle permet l’effet boule de neige, c’est pour demander si vous pensez que ce qui est un fait actuel doit être conservé. Mais n’étant pas spécialiste je n’ai sans doute pas employé le vocabulaire qui convenait.
Donc loin de prétendre trafiquer des définitions, je voulais sérier les problèmes, faire le point sur nos analyses de la monnaie actuelle (ou disons sur ses usages si vous préférez cette expression). Après quoi je pense qu’il faudrait aussi définir clairement quels objectifs on vise. Alors on pourrait voir ensemble, en fonction de ces objectifs, ce « qu’il convient de conserver, de supprimer, de transformer » comme vous le dites très justement, c’est-à-dire élaborer des propositions pour un autre système monétaire.
J’espère que cette tentative d’éclaircissement va inciter d’autres blogueurs à se prononcer sur les quatre sujets évoqués, et je vous remercie de l’avoir suggérée.
[…] deuxième temps : je poste Le scandale des banques qui créent – effectivement – de l’argent qui est essentiellement une citation d’Armand. J’ajoute : « Ce que je vous propose de […]