Les sondages d’intentions de vote relatifs aux élections présidentielles américaines s’apparentent à l’objet mathématique appelé « tournoi » en théorie des groupes : de A et B, l’un des deux gagne et l’autre perd et chacun se verra opposé à chacun des autres. On s’attendrait à une transitivité de ces relations : si A bat B et que B bat C, alors, il est raisonnable de supposer que A battrait C. Si les choses étaient si simples, les saisons sportives deviendraient rapidement ennuyeuses car trop prévisibles, ce qui n’est bien entendu pas le cas.
Le fait que les élections présidentielles américaines soient à deux tours ajoute du piquant puisqu’une élimination aura lieu dans chaque camp, dont émergera un champion qui affrontera le champion du camp opposé. Comme les champions ne seront connus que dans le courant de l’année prochaine, rien n’empêche les sondeurs de présenter aux électeurs les différents cas de figure éventuels. Voici la situation au jour d’aujourd’hui (d’après RealClearPolitics) et les paradoxes qui résultent du peu d’intérêt que les électeurs inscrits semblent porter à maintenir la transitivité du tournoi.
L’ordre dans le camp démocrate est le suivant (qu’on peut interpréter comme 1 battrait 2 qui battrait 3. etc.)
1. Clinton
2. Obama
3. Edwards
4. Richardson
5. Biden
Et dans le camp républicain :
1. Giulani
2. Huckabee
3. Romney
4. McCain
5. Thompson
6. Paul
La liste démocrate apparaît aujourd’hui plus forte que la liste républicaine : leurs numéros 1. Clinton et 2. Obama battraient tous les deux le numéro 1 républicain, Giulani, Clinton par 4,4 % et Obama par 3 %. Jusqu’ici rien de surprenant. Maintenant pour la transitivité malmenée : McCain est numéro 4 sur la liste républicaine ; il serait donc battu à l’intérieur de son propre camp par 1. Giulani, 2. Huckabee et 3. Romney, mais il fait mieux que Giulani contre Clinton : il ne perdrait que par 1,7 % et par 1 % seulement opposé à Obama. McCain est loin dans la liste républicaine, ce qui ne l’empêche pas d’être le meilleur candidat républicain face aux deux meilleurs candidats démocrates. Plus étonnant encore, Edwards, numéro 3 sur la liste démocrate et qui serait donc battu par Clinton et par Obama à l’intérieur de son propre camp, eh bien, Edwards est le meilleur candidat face à McCain : il l’emporterait bien plus aisément contre lui, avec 5 % d’avance !
C’est la méthode descendante : avec un LLM en arrière-plan de chaque personnage.