Billet invité.
J’invite chacun et chacune à réécouter la matinale de France Culture d’aujourd’hui mardi, un monument de poujadisme radiophonique qui rendait Brice Couturier euphorique [1] : la « grande jacquerie » contre la fiscalité en France, pour reprendre l’expression fort connotée employée par Nicolas Baverez dans sa chronique du Figaro [2], jacquerie dont la Bretagne « tout entière » (ne nous embarrassons surtout pas de précautions), hostile à l’éco-taxe Borloo, donnerait présentement l’exemple.
Voilà contre quoi se révolterait le visionnaire peuple de France, dans une réédition des combats contre la fiscalité écrasante de l’Ancien Régime (ah, la révolte des Bonnets Rouges en Basse-Bretagne, en 1675, servie ad nauseam dans des comparaisons de circonstance, sans doute parce que Louis XIV était alors en guerre avec la Hollande ). Voilà en quoi les Français se distingueraient des autres peuples, italien, espagnol, portugais ou grec, qui se battent pour la survie de la démocratie, pour le renforcement de l’État compensateur et pour une pacification de l’économie.
Gageons que ces charges sporadiques contre l’impôt vont tourner au matraquage dans les mois qui viennent. Elles devraient être insupportables à tous les signataires du pacte civique que nous sommes. Comparer la fiscalité d’Ancien Régime avec la fiscalité républicaine est déjà en soi une aberration qui eût dû provoquer la jacquerie des historiens contre l’expertise baverezienne. D’un autre côté, l’inaptitude du gouvernement actuel à expliquer la signification de l’impôt en général et à justifier l’introduction d’un nouvel impôt en particulier qui touche à l’avenir de nos sociétés laisse pantois et fait soupçonner une malveillance délibérée plutôt qu’une défaillance de communication.
Certains élus bretons, dans leur jacquerie intéressée (c’est que la Bretagne est un bastion socialiste…), lâchent quelques éléments d’analyse sur les difficultés de la filière agro-alimentaire bretonne : le dumping salarial intra-européen et la baisse de qualité des produits consécutive à la pénétration des marchés lointains (notamment le Brésil). Les patrons du secteur seraient partisans de demander à l’UE d’en finir avec la concurrence déloyale sur la main-d’oeuvre. Ils seraient également prêts à réduire leur zone de chalandise au marché européen – marché conséquent tout de même – tout en améliorant les conditions de production (vers le mieux-disant comme critère productif). Chiche !
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[1] Celui-ci se gargarisait, comme s’il l’avait pondu, de l’aphorisme inepte de Benjamin Franklin : « En ce monde, rien n’est certain, à part la mort et les impôts. »
[2] Chronique du 20/10/2013.
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