Hypothéquer l’avenir, mais comment ?, par Guillaume Lapeyre (mis à jour)

Billet invité.

HYPOTHEQUER L’AVENIR, MAIS COMMENT ?

Distinguons deux systèmes monétaires, un primaire et un secondaire :

Le système monétaire primaire serait le suivant :

La monnaie (ou argent) correspond à une production de richesse réelle (« économie physique ») ce qui veut dire que durant la période de temps « T » il est produit une quantité de richesse réelle « QRR » (sueur, soleil + profit dégager par l’opération) ; à cette quantité « QRR » correspond une quantité de monnaie « QM » qui est donc une représentation numéraire des richesses réelles.

Dans ce système primaire (une forme de troc avec monnaie) le capitalisme est viable car il permet, grâce à l’épargne, des opérations de prêts (que je distingue ici des crédits) c’est-à-dire qu’il est possible que le montant d’une épargne soit disponible pour de l’investissement.

Ce système de prêts impose par contre une indisponibilité des capitaux aux épargnants-préteurs jusqu’au terme du prêt (dans la limite du cas où la somme « bloquée » est disponible grâce à d’autres épargnes … un relais du prêt)

Dans ce système :

* à la charge des banques, de la finance de collecter l’épargne, de permettre des déplacements rapides des capitaux disponibles et d’orienter ces capitaux vers les investissements répondant au mieux au ratio potentialité/risque car le volume de prêts disponibles est faible (salaires moins consommation moins épargne « à vue »)

* les phénomènes inflationniste (ou déflationniste) des masses monétaire sont relativement simples à appréhender car ils correspondent à une évolution non proportionnelle des quantités QRR et QM

* Ces phénomènes conduisent le cas échéant à soulever la question de la répartition de la masse QM (risque de paupérisation pour les uns et de concentration des richesses pour les autres)

La limite importante de ce système primaire réside dans la difficulté de se projeter dans l’avenir, car l’argent disponible à l’investissement ne peut provenir que d’une épargne et donc ne peut précéder la création de richesse réelle.

Pour faciliter une projection dans l’avenir nécessaire à une société il faut donc rendre disponible une masse monétaire supérieure à la quantité QM. Un outil rend ceci possible : le crédit.

La base du crédit est la suivante :

« La masse de prêts disponible grâce à l’épargne issue de QM est lié à la masse QRR, mais QRR est limité par « T », pourquoi ne pas envisager qu’au moment T2 (date projetée dans le futur) sera produite une quantité QRR2 (spéculative) à laquelle correspondra une masse monétaire QM2 (spéculative) et de choisir d’employer une partie de QM2 à de l’investissement, non pas en T2 mais actuellement (en T) ? »

De ce point de vue le fonctionnement du crédit est celui d’une machine à voyager dans le temps, un processus qui part du principe que l’avenir produira des richesses réelles et qu’il est possible d’avoir l’usage aujourd’hui de la masse monétaire correspondant à cette production future.

On passe ainsi d’un système monétaire primaire :

1) un projet d’investissement est défini

2) soit on profite d’un prêt – si l’argent est disponible, les quantités sont limitées,
soit, dans le cas contraire, on travaille, on épargne puis on réalise le projet

à un système monétaire secondaire :

1) on va chercher dans le futur une quantité d’argent correspondant à des richesses non encore créées

2) puis on travaille, travail qui permet au fur et à mesure le remboursement du capital –destruction d’une partie de la masse monétaire adossée à ce travail – et des intérêts associés qui correspondent au service « du voyage dans le temps ».

Ce passage d’une économie primaire à une économie secondaire est lourd de conséquences, car s’il y est introduit un outil (le crédit) formidable pour l’investissement et donc pour la projection de la société dans l’avenir, il nous conduit dans le contexte suivant :

Au temps « T » nous avons toujours « QRR » mais, non plus QM mais QM + QM2 (ou du moins une « partie ») que l’on peut appeler QMS (quantité monétaire synthétique) .

La différence est notable car si QM a une assise « physique », QM2 a une assise « spéculative » car la réalité « physique » de cette masse monétaire appartient au futur et donc est lié à la réalité à venir de QRR2.

Dans les faits, le système bancaire et le système financier ne se servent plus vraiment de l’épargne pour effectuer des « prêts » mais surtout pour « asseoir les offres de crédit » ; les banques introduisent donc avec QM2 une part d’argent à base spéculative dans la masse monétaire QMS qui est en circulation en « T » (et en somme la titrisation cherche à donner une assise « physique » à de l’argent à assise spéculative).

Si cette lecture est correcte alors plusieurs questions se posent :

* la question des supports monétaires : QMS est donc composé de deux origines monétaires distinctes, mais utilisent in fine les mêmes supports (fiduciaire et scriptural + mêmes devises) la propagation d’une crise du crédit basé en QMS déstabilise de fait QM donc QRR. De plus, s’il semble possible de contrôler la répartition de QM dans le contexte d’une économie primaire, il est plus difficile de le faire avec QMS.

* la question de savoir qui est en mesure de faire ce travail d’aller chercher l’argent dans l’avenir :

Actuellement le système bancaire privé à plus ou moins le monopole du crédit ; chaque banque peut en faire dans les limites du système de réserves fractionnaires (qui en pratique n’impose pas de vraies limites de quantités, il semble plutôt avoir comme rôle de légitimer ce monopole). En effet, comme les banques collectent les épargnes il serait logique qu’elles soient les mieux placées pour effectuer les processus de crédit… A moins de considérer que les développements historiques rendent légitimes dans l’absolu ce choix, on pourrait considérer que les services publics sont de bons candidats pour partager ce rôle. (Le patrimoine de l’Etat étant une alternative aux réserves fractionnaires comme assurance de « reins solides »).

Egalement, la question du cout de ces attributions de crédit… qui implique la charge des intérêts sur le travail en « T2 ».

* la question des quantités d’argent à base spéculative :

Comment se décide la quantité d’argent que nous pouvons aller chercher dans l’avenir ? En sachant que QM2 employé au temps « T » doit être cohérente avec QRR2 à venir.

Seul une base morale et prudentielle permet de limiter les risques entraînés par la possibilité que la partie de QM2 que l’on soit allé chercher en T2 soit incohérente avec QRR2 réellement produit à terme. La gestion pratique de ce choix peut-elle être confiée à des entreprises privés mises en concurrence ? Le volume QM2 maximum utilisé en « T » doit-il être corrélé à la quantité QM épargnée (c’est plus ou moins la logique dans le système de réserves fractionnaires)?

* la question des phénomènes psychologiques humains
car on passe d’un système où le doute (anxiogène) repose sur la pertinence des choix d’investissement, à un système où le doute repose sur la capacité collective à parvenir à réaliser un futur fidèle aux impératifs imposés par les choix présents. De ce fait, ceux qui décident des quantités de crédits proposés définissent en bonne partie les conditions collectives d’existence à venir.

Autant de questions auxquelles il faudrait que des réponses claires soient apportées.

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100 réponses à “Hypothéquer l’avenir, mais comment ?, par Guillaume Lapeyre (mis à jour)”

  1. Avatar de Jérémie
    Jérémie

    @ Marquis de Laplace

    Dans un système libéral je pense au contraire que le monde ne s’en porterait guère mieux, certes une autre utopie humaine plus alléchante, prétendument meilleure remplaçante, mais tout aussi pleine de vices vous laisseriez davantage de gens sans foi ni loi jouer avec le feu au dessus des autres sur les marchés, vous laisseriez aussi davantage de gens crever de faim ou de soif loin des yeux, loin de notre compte en banque en Suisse, nous rechercherions sans doute même plus à se soucier des enfants des autres de l’orphelin ou de la veuve, chacun pour soi au quotidien nous ne rechercherions même plus à les voir, à s’en soucier, à s’en approcher, à essayer de leur parler plutôt différemment non nous passerions le plus clair de notre temps à se soucier d’abord et principalement du seul devenir de notre vocabulaire économique en société sur des forums ou alors dans des partis prétendument de meilleure liberté à voir que d’autres, comme tant d’autres du même genre seul cela nous importe le conditionnement.

    Malheureusement lorsque vous entendez et lisez de nouveau un libéral que cela soit d’ailleurs Bastiat ou Ludwig Von Mises c’est hélas toujours et encore les mêmes choses qui vous répètent sur les gens de l’Etat ou sur Keynes si si je vous assure mais jamais bien sur d’abord et à l’égard des gens du privé et qui vous avouerez n’ont guère mieux évolué aussi depuis le 19 siècle dans leurs rapports aux autres. Comme ils savent aussi si bien détourner l’attention des hommes en société.

    Enfin le principal c’est de pouvoir toujours mieux se distinguer des autres en société, surtout d’ailleurs dans une même manière de penser ou d’expression sur tant de sujets, très important de se conduire plus longtemps ainsi en société…

  2. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    @ Giullaume

    A) La mise en faillite du partie du secteur financier pourrait être une solution . Elle nécessiterait beaucoup de doigté afin de ne pas aggraver encore plus considérablement les choses.
    Car si des dettes devraient être, non pas éteintes mais détruites juridiquement, il convient que les perdants de cette destruction de valeur, ainsi désignés, soient les ‘bons’ … c’est à dire un composé entre les plus responsables / les plus riches / les moins nocifs

    Ce scénario est difficilement acceptable pour les USA qui auraient beaucoup à y perdre , avec certitude, à court terme . Ce procédé en ferait de plus l’accusé no 1 du reste du monde. Et effectivement ils se sont comportés comme des brigands, via leur système financier dit ‘anglo-saxon’ . A leur décharge ils nous ont fait faire l’économie du système communiste généralisé (opinion purement personnelle) et ont fait la police du monde (opinion subjective) , certes de façon déplorable et en alimentant leurs intérêts , mais personne, à l’exception de l’URSS, n’ accepté de jouer ce rôle du vilain structurateur.

    La destruction de valeur fera donc l’objet, non pas d’une mise à plat raisonnable, mais d’un rapport de force sous toutes ses formes : c’est à dire par exemple que cela peut passer par une proposition d’une super alliance coopérative entre les USA et le reste du monde à développer ou par les chimères hideuses d’une monnaie mondiale, d’institution supra-étatiques et de gouvernement du monde ! Heureusement … les archaïsmes les plus obscurs sont encore là pour nous protéger de ces fausses avancées soft-totalitaire.

    B) Vous dites « nous ne sommes pas dans le cas d’une destruction de valeur … [] … mais plus dans une “indisponibilité des valeurs” bloqués par des outils financiers qui les mènent à la dérive et qui ne peuvent orienter ces capitaux aux bons endroits. »
    Nous sommes bien dans un processus classique de destruction de la « Valeur » , dont l’origine n’est pas une destruction réelle et concrète de biens ou services (C’est probablement ça que vous voulez dire) , mais un ajustement entre la masse monétaire et la réalité à court et moyen terme, donc un dégonflement de Bulles .

    Ce processeur déjà très perturbateur puisque des stratégies de conservations individuelles de ce qui a déjà été ‘illusoirement’ acquis se mettent en place.Mais à cela s’ajoute -je crois- un niveau de complexification supplémentaire par l’entrecroisement des dettes/créances et la dissimulations de la localisation des pertes réelles.

    Cet enchevêtrement déjà mortifère puisque le secteur financier aspire la monnaie pour se désendetter, est définitivement aggravé par l’endettement des états, suite à 30 années de politique budgétaire keynesiano-friedmanienne de déficits se cumulant chaque année, ce qui rend les états occidentaux impuissant à présent (La purge des budgets équilibrés étant préconisée depuis des années aux pays pauvres …) : toute relance plombe les déficits dans des proportions et sur des durées hors de toute raison.
    Le « remède » est poison.

    D’autant plus poison que l’agent économique qu’est le consommateur faisant tourner la machine, est également lui aussi pas mal endetté (Partage des richesses peu dynamique + culture de l’ argent facile) , ou bien objet d’une baisse de niveau de vie.
    Bref , la stratégie qui en découle est plutôt celle d’une épargne en vue de se désendetter ou bien de préparer un avenir un peu sombre, et donc d’une non consommation ou d’une consommation différée , qui ne ‘relance’ pas trop la machine !

    Bref c’est l’endettement qui paralyse tout.

    C) la question des investissements mal orientés est une autre question : certes on préparait mal l’avenir puisque dans cette période d’euphorie monétaire d’argent pas chère , n’importe quoi pouvait être ‘rentable’ du moment qu’il était assis sur la bulle gonflante .
    Donc cet argent était mal ‘orienté’ : mais si vous aviez choisi de bien l’orienter … il n’aurait probablement pas existé … de sorte que la mal-orientation n’a pas de sens.

    Il aurait été plus rationnel , certes que cet argent serve à fabriquer au moins des cochonneries inutiles remplissant au moins la même fonctions que les ateliers nationaux …

    Et il aurait été bien plus souhaitable de faire des investissements réellement porteurs de mieux vivre … oui (bon à condition que ce ne soit pas des puits sans fonds comme on en a parfois l’impression …)
    Mais ce n’est pas parce que nous avons buté sur la finitude des ressources et que nous avons gobé la fable du réchauffement planétaire, que la crise s’est déclenché . Quant bien même ces éléments auraient été absent que nous aurions eu cette crise.

    On est dans la trappe pour un bout de temps.

  3. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    @ Marquis
    « Aide massive du gouvernement aux démunis. »

    Et le financement de l’aide : impôts ou emprunts ?

  4. Avatar de Louise
    Louise

    A Marquis, Oppossùm et Guillaume

    Bon, très bon, on va finir par y arriver.

    Il y a une indisponibilité de valeurs oui, car valeurs bloquées par certains qui font de l’argent avec l’argent, mais aussi destruction car dégonflement de bulles. C’est sûr que certains vont perdre, mais si l’Etat arrive à garantir au moins les 70 000 € et qu’il soutient à fond les plus démunis (à partir de combien on est un « plus démuni » ?) (heu, comment, Marquis svp ?) on peut arriver à limiter les dégâts. Mais il y aura « des larmes et des grincements de dents ».

  5. Avatar de Marquis de Laplace
    Marquis de Laplace

    @opposum
    Encore une fois: nous seront en période de déflation, donc création monétaire pure et simple. Aucun risque d’inflation.

    @louise
    « à partir de combien on est un “plus démuni”
    lorsqu’on a besoin de resource pour survivre, se loger, et s’éduquer pour pouvoir accomplir les emplois pour les besoins à remplir

    « il y aura “des larmes et des grincements de dents”.
    Des créateurs de produits dérivés qui verront leur train vie de 5 millions par ans disparaître instantannément!
    Arrêtez… vous êtes trop dramatique! Que d’empathie de votre part!

    Mais, il y aura aussi des cris de joies et des larmes d’émotions heureuses, en particulier pour la coiffeuse du coin qui avec ses économies dûrement gagnée en 20 ans (et garanties par le gouvernement) peut maintenant se payer AU COMPTANT une demeure (dont les prix sont revenus au niveau de ses moyens), une demeure modeste certes, mais ENTIEREMENT payée, SA demeure à elle SANS hypotheque banquaire. (de facto, 70.000 euros sont presque suffisant dans de nombreux villages de certains pays (comme le Canada) pour se payer *aujourd’hui même* une modeste (mais confortable) maison unifamiliale en entier).

  6. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    Je crois qu’institutionnaliser le vrai ex-nihilo (création sans remboursement) serait la pire des chose : c’ets la porte ouverte à toutes les dérives et toutes les démagogies (même si , au départ l’intention peut se comprendre).

    Je dis le vrai ex-nihilo, car celui des banques est au moins temporaire dans le sens ou un remboursement le remet à sa place originelle : le néant.

    Si on donne, qu’on prenne la force de dire d’où cela vient.

    Mas le plus sain serait de partager mieux, dès le départ (Voeu pieux ok …) plutôt que de s’appuyer sur le futur pour justifier son endettement comme si tout déficit était nécéssairement un investissement réellement porteur de richesse supplémentaire, ce qui , lorsqu’on regarde réellement les choses non seulement n’est pas la réalité , mais ne peut pas l’être au delà d’un seuil pour des raisons à la fois technique et psychologique.

    Certains économistes ont imaginer supprimer l’impôt et le remplacer par du pur ex-nihilo !
    Théoriquement ça tient.
    En pratique c’ est créer un pouvoir sans limite qui dégénèrera nécessairement au fil de l’histoire , surtout en régime démocratique.

  7. Avatar de guillaume
    guillaume

    @ Oppossùm,

    « Je dis le vrai ex-nihilo, car celui des banques est au moins temporaire dans le sens ou un remboursement le remet à sa place originelle : le néant. »

    Sur cette question du ex-nihilo bancaire (hors banques centrales, vu que l’on est d’accord -me semble t-il- sur ce point) une image me vient en tête:

    Grosso modo l’idée se résumerait par: en prêtant des sommes que le déposant possède sur un compte on se retrouve dans une situation multipliant par deux la masse monétaire. Je ne parle pas ici des intérêts, car on a bien compris que c’est tous les jours en suant au travail qu’on trouve de quoi les rembourser…

    Alors:
    Prenons le cas d’une mère qui place 5E dans un tiroir de la maison. Elle compte sur ce dépot pour pouvoir le cas échéant faire un achat. Son fils, 12 ans, qui sait que sa mère met de l’argent dans le tiroir, rêve de l’achat d’un jouet. Il pense qu’il pourra acheter ce jouet dans quelques jours grace à une entrée d’argent (noël ou autre); mais il n’est qu’un enfant plein de désir non contrôlés et est incapable d’attendre (tout et dessuite – c’est souvent un problème « d’éducation »). Il décide donc de prendre l’argent dans le tiroir pour faire son achat dessuite; il se dit qu’en pratique sa mère n’a pas de course à faire prochainement et qu’il pourra remettre la somme dans le tiroir dés qu’il aura touché son « entrée d’argent ».
    Sa mère ignore qu’à son insu ce dépôt peut être utilisé, avec risque de perte. Il existe alors à ce moment là 10E!
    5E dans les mains de l’enfant (ou du commerçant) et 5E dans « la tête de sa mère ».
    Si tout se passe comme prévu (achat, entrée d’argent dans les délais, pas de course et pas d’ouverture du tiroir par la mère) on pourrait presque croire qu’il y a eu création « ex-nihilo » 😉
    Par contre si un des points cités précédemment fait défaut, la vérité rattrape les songes et quand les pompiers, passant pour le calendrier ce soir d’hiver, pousse la mère à utiliser les 5E du tiroir, elle se rend compte qu’ils n’y sont plus. Le pompier lui permet heureusement de comprendre ce mystère: Il vient de reconnaitre le fils de Madame qui leur avait donné bien des peines en mettant accidentellement le feu à un arbre avec simplement 5E de pétards…

    Question:
    Combien de mère aimante réussiront à se convaincre qu’elles n’avaient pas du mettre l’argent dans le tiroir et que leur fils ont du créer « ex-nihilo » l’argent utilisé pour l’achat ?

    Nous finirons par être d’accord sur la description de l’objet que nous voyons tous de plus en plus clairement…

  8. Avatar de Oppossùm
    Oppossùm

    @ Guillaume
    Oui ça me semble être ça le ‘problème’ ou plutôt l’ambiguïté.

    A) A un moment , dans la tête des agents l’argent est à deux endroits. Dans la réalité pratique (Paul à raison) il ne peut l’être : le billet n’ est physiquement qu’à un seul endroit.
    Notez bien que si l’argent pris par l’enfant dans le tiroir est remis avant que la maman ne veuille s’en servir, personne n’y verra quoique ce soit : ça revient dans les fait à un prêt , rien de mystérieux !

    Mais il y a un risque d’incohérence , bien sûr : en fait rien de mystérieux , c’est un vol, un larçin.

    Ce qui est amusant c’est que d’un certain point de vue, psychologiquement , des projets peuvent d’échafauder comme si la masse monétaire était de 10 et pas de 5 ! Mais là aussi rien de mystérieux : c’est la vitesse qui s’est développée .

    Il y a un vieux billet de Paul là dessus avec des histoires de ballons remplacés par des billets représentant le ballons.

    Bref il n’y a pas vraiment DUPLICATION car le support physique du billet , à un moment rompt l’illusion

    B) Toutefois ce problème se complique vraiment lorsqu’on réfléchi en monnaie scripturale et dématérialisée .

    Car à ce moment là , votre argent DEPOSE (donc utilisable dans votre esprit) n’existe plus physiquement : il n’y a plus qu’un grand pot avec une énorme mélasse de monnaie structurée par une comptabilité décrivant les créances et les dettes et la formes des droits de chacun selon des termes précis (Quantité/Dates/Périodes/possibilités de retrait etc …)

    Et la réalité de ce droit là, lors d’un dépot est que la disponibilité de votre monnaie est EXTREMEMENT forte. C’est un quasi-porte-monnaie.

    Paul ou JF pose que lorsque la banque ouvre un crédit , c’est en réalité sur l’ensemble des dépôt (ou plutôt la partie qui statistiquement est quasi fixe car non ‘retirée’ en temps normal) qu’elle ‘pompe’ en réalité et que le ex-nihilo n’existe pas. J’ai écrit ‘pompe’ car on ne sait pas ce qui se passe réellement puisque la somme crédité à l’emprunteur n’est pas débité d’aucun dépôt.

    -On peut donc seulement dire : tout se passe comme si …
    -Même si rien ne le dit vraiment … et que l’on peut également dire ‘l’argent est toujours dans le dépôt et la banque a vraiment crée de nouveaux signes monétaires (‘temporaires et qui seront ‘détruits’ au remboursement)

    Remarque : un crédit disponible est juridiquement un pouvoir total de disposer de l’entièreté immédiate de la somme.

    Si on adopte l’idée que l’argent crédité est ‘correlé’, lié, issu du dépôt, cela suppose qu’à un moment donné deux droits contradictoire peuvent s’exercer sur un même objet (même si cet objet est dématérialisé à ce moment)

    Mais là, la collision ne va pas avoir lieu de la même façon que la découverte par la maman que le billet n’est plus dans le tiroir : admettons que tous les déposants retirent leur argents ou que tous les emprunteur cessent leur remboursements : que se passe t-il ?

    Personne ne va constater qu’il manque de l’argent dans une case , un compte : les droits sont tous ouverts de façon simultanés et les sommes sont toujours inscrites comme disponibles. Mais il est probable que la banque ne pourra plus fonctionner , c’est là la sanction de l’ambiguïté !

    La banque va devenir illiquide , elle ne disposera plus de cette autre monnaie qu’est la monnaie fiduciaire (qu’elle ne maîtrise pas) indispensable pour s’ équilibrer avec le reste du système bancaire et faire face à la demande des clients aux guichets et distributeurs.

    Voilà donc la situation : personne ne dira « Ho! les déposants ont tout pris et donc vous, pauvres emprunteurs vous n’avez plus rien » . Non ! . Car la banque s’est juridiquement engagé à assumer cette contradiction sans même la formuler.

    Mais , il est possible d’imaginer si, soit les déposants, soit les emprunteurs, acceptaient de ne faire leurs opérations de transactions qu’avec d’autres agents ayant leur compte à l’intérieur de cette même banque, et ne demandent aucune monnaie fiduciaire … que le système tienne .

    C’est à dire que la duplication de l’argent a bien eu lieu !
    C’est à dire qu’il y a à la fois l’argent des dépôts ET l’argent de emprunteurs.

    Mais alors, en fin de compte n’est-il pas plus simple de penser tout cela comme du ex-nihilo ?

    La Banque s’est engagé à assurer le retrait de tout ce qui y a été déposé.
    La Banque s’est engagé à se débrouiller pour fournir tous les moyens de paiement aux emprunteurs : elle a donc fait du ex-nihilo.

    C’est bien mieux de la penser ainsi. Et d’ailleurs cela permet de comprendre et de constater « comptable ment » qu’effectivement un banque peut avoir une somme de crédit ouvert supérieur à la somme de ses dépôts.

    Mais attention, Guillaume, admettre cela n’est pas le cautionner : car c’est un système instable en situation de crise et c’est un système permettant et alimentant la spéculation. Puisqu’une banque peut ainsi créer pour des organismes bidons, pour de courts instants des sommes ubuesques , qui , astucieusement placées en bourse, vont dégager de la valeur, pour disparaître ensuite.
    (Comment Kerviel arrive -t-il à jouer 50 milliards d’euro en bourse ? Peut-on dire qu’il a joué notre argent ? l’argent des déposants ? )

    Les dépôts ne font pas les crédits : et c’est bien là le problème !!!!

    PS/ J’aumerais bien l’avis de NuageBlanc!

  9. Avatar de guillaume
    guillaume

    @ oppossùm,

    Les choses se précisent, car on est d’accord visiblement sur de nombreux points que vous évoquez dans votre dernier message. Cela étant, forcement, il existe encore un point de discorde:

    citation:
    « “Oh! les déposants ont tout pris et donc vous, pauvres emprunteurs vous n’avez plus rien” »

    Selon moi ce serait plutôt:
    Oh! tous le monde veut retirer ses dépôts en même temps? Mais vous ni pensez pas, il faut prévenir! comprenez notre travail : on doit en même temps permettre un investissement le plus grand possible -et donc faire « circuler » votre épargne- et en même temps, on doit se débrouiller pour que vous vous sentiez le plus libre possible de disposer de votre épargne. Et le plus fort c’est que quand on y arrive on attend dire:

    « C’est à dire que la duplication de l’argent a bien eu lieu !
    C’est à dire qu’il y a à la fois l’argent des dépôts ET l’argent de emprunteurs. »

    Je dis cela sans cautionner l’ensemble des actions du système bancaire et j’aimerais également avoir des réponses à ces quelques questions que vous soulevez:

    « lorsque la banque ouvre un crédit , c’est sur l’ensemble des dépôt qu’elle ‘pompe’ et en réalité on ne sait pas ce qui se passe réellement puisque la somme crédité à l’emprunteur n’est pas débité d’aucun dépôt.  »

    « Si on adopte l’idée que l’argent crédité est ‘corrélé’ (lié, issu de) aux dépôts, cela suppose qu’à un moment donné deux droits contradictoire peuvent s’exercer sur un même objet (même si cet objet est dématérialisé à ce moment) »

    Mais dire:

    « Les dépôts ne font pas les crédits, en fin de compte n’est-il pas plus simple de penser tout cela comme du ex-nihilo ?  »
    ça me dérange doublement car:

    1) Cela revient à dire
    « au final elle n’auraient aucun dépôt ça serait la même chose, leur crédit sont fait à partir de rien » Et là on va rigoler, parce que pour me trouver UN exemple d’enseigne bancaire qui fait des crédits sans fonds ou collecte d’épargne…

    2) Cette idée détournent complètement l’attention des problèmes réels en déresponsabilisant les individus, ce n’est pas la même chose de dire « il faut faire gaffe aux banquiers, ils créent de l’argent sans limites » et « il faut faire gaffe aux banquiers, ils ont la responsabilité de la gestion de nos « réserves personnelles, fruits de nos efforts »

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