Billet invité
« Une stratégie de suicide assisté », c’est ainsi que Wolfgang Münchau qualifie dans le Financial Times la politique suivie par l’Allemagne vis-à-vis de la Grèce. Analysant celle-ci, il en conclut que « nous sommes arrivés à un point où le succès n’est plus compatible avec la démocratie » et que les assurances que les dirigeants européens recherchent sont « extrêmement peu crédibles ».
Si l’on veut y réfléchir, la multiplication de ces assurances, sous la forme de dispositions destinées à assurer le remboursement des prêts – appelées « pilules de poison » par le journaliste – ne fait que refléter le doute grandissant qui s’est emparé des négociateurs européens. Plus elles sont sévères et heurtent l’opinion grecque, plus elles reflètent l’irréalisme des objectifs fixés à la Grèce, dont les Européens sont conscients et cherchent à se prémunir.
La tenue ou non des élections législatives d’avril sera de ce point de vue un test supplémentaire. Comme le fait également remarquer Wolfgang Münchau, l’exigence de leur report, si on était en Allemagne, violerait la constitution, qui accorde au parlement le contrôle absolu sur la souveraineté du pays. C’est sous ses auspices symboliques que les nouvelles dispositions européennes de discipline budgétaire pourraient être ratifiées, si les dirigeants européens en arrivaient là.
Une alternative aurait été de forcer la Grèce au défaut, une option tentante si l’on recense toutes les déclarations en sa faveur ainsi que celles qui mettaient de l’huile sur le feu en Grèce avec ce même objectif en tête. Une autre stratégie semble l’avoir emporté, qui consiste à obtenir un résultat identique, mais à petit feu et plus tard, par étouffement progressif. En débloquant l’aide financière au compte-goutte, tranche par tranche, et en se payant sur la bête au fur et à mesure pour se rembourser, avant de l’abandonner exsangue.
Viviane Reding, désormais commissaire européen à la justice, a déclaré que « la solidarité n’est pas gratuite, la Grèce doit également faire sa part pour gagner cette aide ». Avec cette vision de la justice, elle était toute désignée pour ce poste. Que tous les démunis de la terre se le disent, la solidarité implique désormais des contreparties, elle est payante pour ceux qui en bénéficient. Il suffisait d’être humble, il faut désormais tendre le cou.
126 réponses à “L’actualité de la crise : « LA SOLIDARITÉ N’EST PAS GRATUITE », par François Leclerc”
Cher monsieur Leclerc,
je ne viens plus très souvent sur le site de Paul Jorion car je suis las des commentaires souvent totalement inappropriés auxquels je me soumettais pourtant en toute honnêteté.
Je voudrais vous relater un fait qui m’a été rapporté par une amie et ancienne collègue sévissant comme professeur à UCLA où Paul Jorion a également sévi, plus précisément au VA Hospital, au coin de Wilshire Boulevard et Sepulveda Boulevard, si ma mémoire est bonne.
Depuis plus de deux ans l’Etat de Californie est en virtuelle banqueroute et les fonctionnaires de UC ont vu leur salaire diminué de 40 %, ce qui se traduit dans les faits par trois jours travaillés et rémunérés et deux jours travaillés mais non rémunérés. Mon amie est depuis bien longtemps propriétaire de sa petite maison sur McLellan Drive, à la limite de Santa Monica et elle n’a plus de prêts à rembourser, mais elle me disait il y à quelques jours que la situation est tendue pour ne pas dire à la limite de l’explosion sociale.
Je souligne que la Californie abrite trois des plus grandes capitalisations boursières du monde : Google, Microsoft et bientôt Facebook… A l’échelle du monde, la Californie serait la septième puissance économique mondiale !
Les sacrifices des grecs, c’est des cacahuètes , tous les californiens se serrent la ceinture depuis trois ans. Les grecs ne payent pas d’impôts fonciers ni de taxes d’habitation, les armateurs sont exonérés de taxes, les militaires ne payent pas d’impôts (je rêve) et l’Eglise, le plus gros propriétaire terrien de la Grèce est exonéré d’impôts sur les locations des terrains agricoles.
Enfin la Grèce, qui a poussé la paranoïa à son maximum, continue à acheter des armes …
Des Grecs émigrent en Californie parce que malgré tout, la vie y est un peu meilleure.
Il faut relativiser et que les Allemands comme les Français prennent conscience que nous avons tous contribué au désastre grec que tous les contribuables européens finiront par payer en leur vendant des armes sans scrupule et en acceptant que ce pays fasse partie de la zone euro pour des considérations purement politiques et stratégiques.
Quel gâchis !
Je n’ai pas « sévi » à UCLA. On m’a attribué par amitié de statut de « chercheur associé » du centre « Human Complex Systems », qui a disparu depuis, victime des coupes budgétaires.
Et allez…! À qui aura le plus longtemps la tête sous l’eau ! ‘tain c’est un concours de souffrance ? Lamentable.
Les malheurs des autres sont toujours beaucoup plus supportables, c’est bien connu.