Seul
Deux arbres nus
Au milieu du vert verger
Chauve solitude
Ceci est un haiku de Herman Van Rompuy, le nouveau premier ministre belge.
Ce haiku a été traduit du néerlandais par mes soins. C’est court, donc ce n’a pas été très compliqué. Vous avez dû voir que j’aime bien traduire des poèmes, des chansons, en général de l’anglais en français. Je suis fasciné par la distance qui existe entre une bonne traduction et une traduction littérale. Ma traduction préférée, la traduction « fidèle », c’est bien sûr celle où rien n’a été traduit littéralement, alors seulement l’esprit des deux langues a été entièrement respecté.
Un de mes grands-oncles, Adolf « Dop » Bles, était poète et dramaturge, mais aussi traducteur, il traduisait de la poésie française en hollandais. Il a ainsi traduit Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand. Son premier succès littéraire, à 22 ans, fut le faux journal d’une jeune fille : Mijn dagboek par Ina de Wilde. Son meilleur ami était le peintre Mondrian, dont sa fille, Lily Bles, fut la compagne.
Il est mort en janvier 1940. Aurait-il vécu plus longtemps, je ne l’aurais pas connu de toute manière : ses frère et sœurs sont morts dans des camps.
J’aime bien penser que j’ai hérité d’un peu de son talent mais on dit de moi dans la famille que je suis le portrait craché, tempérament et tout, de son frère Martinus, un… colonel de l’armée hollandaise. Enfer et damnation !
6 réponses à “Dop Bles (1883 – 1940)”
« Poetry is what gets lost in translation »
Bon réveillon à Paul et aux habitués du blog.
@ Paul Jorion
Je vous suggère de vous intéresser, si vous ne le connaissez déjà, à Claude Esteban. Il défendait les mêmes idées que vous à propos de la traduction (lire « le partage des mots », Gallimard) et les mettait en pratique activement. Borge, Lorca, Guillen et Octavio Paz ont notamment profité de son talent, quand il n’écrivait pas pour son propre compte si je peux dire. Un homme drôle et délicieux disparu en 2006. Voir dans wikipedia sa bio.
Merci et Bonne Année à vous, à tous.
Seuls
Deux investisseurs ruinés
Au milieu du marché fou
Triste cupidité
Bonne année 2009 ! 😉
Bonne année à tous.
« Je suis fasciné par la distance qui existe entre une bonne traduction et une traduction littérale »
Voici ègalement la formule tarte à la crème : « traduttore traditore ».
Elle contient une évidence, un constat, une cruauté nécéssaire ET en même temps une hypocrisie, un contresens , une erreur inévitable et nécéssaire.
Pour qu’une traduction soit la plus fidèle au sens , il faut fatalement qu’elle trahisse dans la forme car les matérieux ne sont pas les mêmes (il n’y a pas équivalence dans les matériaux).
La chose à traduire doit être considérée comme un objet brut externe qui sera la source d’une nouvelle création.
La traitrise est donc nécéssaire.
Bien entendu (sans quoi ce n’est plus une traduction) il y a comparaison perpétuelle entre votre création et la source.
Il y a donc fatalement à la fois une depossession et une réappropriation.
Ca suppose de bien connaître l’ouvrage c’est à dire de l’avoir compris correctement (selon les ‘intentions’ de l’auteur) : sans quoi vous faite une ‘adaptation’ ou même carrément autre chose.
Ca suppose éventuellement de connaître l’oeuvre entière et la vie de l’auteur … et parfois de tout ce qui s’est dit là dessus : encore que ces connaissances puissent être perturbatrices … car vous traduisez UNE chose précise et pas une vie.
Bref la traduction n’est pas une translation , c’est une re-création qui s’inspire d’un objet et qui accepte de se re-comparer, après coup, avec cet objet.
D’ailleurs la traduction existe aussi dans une même langue : lorsqu’ on réactualise des textes anciens, lorsqu’ on théatrâlise un roman, lorsque l’on fait des adaptation, et même en théâtre lorsque les metteurs en scène se permettent de nombreux changements à des oeuvres manifestement trop verbeuses (pour notre présent …)
D’où vient ce haiku et quelle en est la date ?
Son prédécesseur n’avait-il pas écrit:
Pour seul
Refrain
Une marseillaise
En guise de brabançonne