LA GRÈCE AUX ARRÊTS DE RIGUEUR, par François Leclerc

Billet invité.

Le sort réservé à la Grèce revient sur le tapis le 5 décembre prochain, date de la prochaine réunion de l’Eurogroupe. Une nouvelle batterie de réformes visant à déréguler le marché du travail fait encore obstacle à un accord qui permettrait d’engager la discussion sur la dette grecque, tant de fois promise et toujours reculée.

Concluant une visite exploratoire à Athènes, le commissaire Pierre Moscovici s’affirme convaincu de la possibilité de conclure d’ici à la fin de l’année un accord qu’il décrit comme « possible, nécessaire et compliqué. » De son côté Alexis Tsipras voudrait obtenir de premières mesures d’allègement de la dette à court terme, ainsi que le démarrage de la discussion sur l’ensemble de celle-ci, afin de justifier ses concessions successives. La dernière en date a été en début de mois un remaniement ministériel dans un sens favorable aux réformes exigées par les créanciers. Mais il reste encore la pomme de discorde de la législation du travail, qui fait obstacle.

Campant sur sa position, le FMI attend toujours pour s’engager qu’une clarification intervienne sur la dette, qu’il considère insoutenable, ainsi que sur la révision d’objectifs d’excédents budgétaires primaires irréalistes dans leur version actuelle, deux questions étroitement liées entre elles. Mais la Commission se refuse à envisager cette dernière révision, tandis que le gouvernement grec n’accepte pas qu’elle soit liée à de nouvelles mesures d’austérité. Et le Mécanisme européen de stabilité (MES) étudie un « reprofilage » de la dette jouant sur son calendrier de remboursement et son taux, ce qui ne rendra pas la dette grecque soutenable pour autant.

Les lignes bougent cependant, mais pas autant qu’il le faudrait. Ainsi, Jeroen Dijsselbloem a déclaré que les objectifs budgétaires fixés à la Grèce pour quand son programme aura pris fin devront être « réalistes ». Pour un peu, il rejoindrait les propos d’Euclide Tsakalotos, le ministre grec des finances. Prenant au mot les propos des autorités allemandes selon lesquelles les entreprises grecques souffraient d’un manque de compétitivité, ce dernier a proposé que la baisse des excédents budgétaires primaires soit consacrée à diminuer les impôts des PME grecques…

La Commission, qui a amorcé un timide virage en préconisant une politique budgétaire expansionniste, s’est fait rappeler à l’ordre par Wolfgang Schäuble sur le thème qu’il n’était pas dans ses prérogatives de définir la politique économique européenne. Cherchant à calmer le jeu un peu partout afin d’éviter le démarrage de nouvelles crises, elle voudrait avancer ses pions en Grèce mais n’a rien à offrir en contrepartie. Car le gouvernement allemand ne veut pas lâcher sur la dette grecque avant que le cap des élections législatives de l’automne prochain soit passé, ou plus tard encore avant la fin du troisième plan de sauvetage du pays, en 2018. Répliquant sans tarder à Barack Obama qui avait appelé depuis Athènes à un « allégement de la dette », Wolfgang Schäuble a été particulièrement expéditif en s’adressant aux Grecs : « Quiconque dit que nous allons alléger votre dette ne vous rend pas service ».

Il aura gagné sa place dans les livres d’Histoire.

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