Billet invité.
UN MOUVEMENT « INTERCLASSISTE »
Avant d’entrer dans le vif du sujet de l’actualité, il parait nécessaire, comme à chaque assemblée, de faire un petit bilan, voire une synthèse de ce qui s’est passé précédemment à Nuit Debout ici et ailleurs.
Nuit Debout est issu principalement de la contestation de la Loi El Khomeri qui est devenue emblématique de la volonté du gouvernement, de tous les gouvernements, de diminuer les droits des salariés, de baisser les coûts du travail, et donc globalement les salaires. Mais le mouvement représente cependant essentiellement la « middle class » comme le montre les thèmes abordés lors des assemblées, par les différentes commissions : violence/non violence, Constitution, consommation/non consommation… Ce sont des sujets d’importance non négligeables mais qui ne mobilisent pas les « quartiers populaires ».
Une des intervenantes, voici deux réunions d’assemblée, ici à Tarbes, faisait remarquer que sa quête n’était pas vraiment les 32 heures par semaine, revendication légitime mise en avant par la CGT, mais la possibilité pour elle de travailler ne serait-ce que quelques heures par semaine. Ce à quoi il fut répondu que la question qui se posait ici plus que le nombre d’heures travaillées, était celui du montant du revenu tiré de son travail. Néanmoins cette intervention était importante car elle montrait le hiatus qu’il pouvait y avoir entre Nuit Debout et les quartiers populaires où le chômage est très important.
Les thèmes proposés à la discussion ont éludé la question du travail, son rôle, son devenir, bien qu’une intervention ait fait remarquer qu’il était en baisse, et quand il existait encore c’était pour être rémunéré le moins cher possible. La base du profit repose toujours sur une économie faite sur les coûts du travail. Et c’est justement ce mécanisme inéluctable à la société capitaliste qui provoque cependant la crise actuelle du système. Le chômage représente une somme de travail inutilisé, car inutile pour le profit. Ce n’est pas foncièrement la satisfaction des besoins qui est recherché mais la quête d’un profit toujours plus difficile à atteindre. Et, malgré les illusions que veulent entretenir certains, aucun réformisme n’est possible ici.
Bientôt un de ces thèmes que certains leaders avaient voulu faire aborder comme celui de la « Constitution de La Vie République » est aujourd’hui, de fait, abandonné à l’échelle nationale au profit du projet de réorganisation de la société par l’autogestion (voir à ce sujet l’intéressant rapport « Nuit Debout et la Constitution » du 09/05/2016 par Paul Alliès sur son blog de Médiapart).
NUIT DEBOUT A REUSSI UNE PERCEE.
Cependant, dans sa démarche, Nuit Debout innove, réussit parfois cette jonction même sporadique avec les quartiers populaires. et représente ainsi, dans la forme, quelque chose de révolutionnaire. A Tarbes une intervention a eu lieu dans une agence bancaire, dénonçant la spéculation, les « Panama Papers ». La pratique d’assemblées, la mise en pratique de la Démocratie directe caractérisée notamment par une égalité dans les prises de paroles, la volonté d’agir par des actions originales, ouvrent des perspectives.
DE LA CRISE GOUVERNEMENTALE AUX PRÉMICES D’UN NOUVEAU PROJET SOCIETAL
Sous la pression sociale, les manifestations dans la rue, les évènements se précipitent. Le gouvernement de gauche qui n’avait jamais vraiment caché, malgré quelques formules démagogiques lors de la campagne présidentielle, sa volonté d’intégrer le pays dans le cadre de la mondialisation libérale, s’enfonce dans les maladresses et les contradictions. La Loi El Khomeri représente, après le recul sur « la déchéance de la nationalité » un énième échec. Il préfère jouer sa crédibilité sur ladite Loi et s’enferre donc dans un affrontement qui, de toutes façons, ne fera que consacrer sa défaite finale à terme. Vu de loin, de l’étranger, son entêtement et son autoritarisme, son mépris de la démocratie même parlementaire, donne de lui une image honteuse et ridicule.
Dans la rue la mobilisation continue et Nuit Debout était toujours… debout !
PROJET ET ACTIONS NÉCESSAIRES FACE AU PIÈGE DE L’ÉLECTORALISME
Cependant il convient d’évaluer les obstacles, les pièges qui seront mis en place contre le mouvement social. En premier lieu l’électoralisme. Car ce miroir aux alouettes, sondages favorables aidant, fait saliver la gauche de la gauche. Chaque fois qu’un mouvement populaire prend de l’importance, mettant en cause globalement le système, le Pouvoir fait appel aux élections. Avec pour objectif la démobilisation. Contrairement à ce qui est souvent cru, on ne lutte pas sur tous les fronts quand on a un bulletin de vote à la main. C’est ce dernier qui prévaut et ensuite tout le monde rentre à la maison. Une telle échéance électorale si elle n’était pas doublée, dépassée par le mouvement social, risque d’être mortifère. C’est ainsi qu’en 1933 les Nazis sont arrivés au pouvoir. Et aujourd’hui ce sont les populistes, le Front National qui ferait un carton.
La seule façon de contrer la montée des populistes et la droite est de faire des propositions concrètes, des projets palpables, de faire comprendre, par l’action, que la vraie solution passe par une autogestion généralisée, une gestion efficace par la démocratie directe, comme Nuit Debout en jette les prémices. Bien sûr, en dernier ressort il faudrait bien voter pour tenter d’arrêter les populistes. Mais il serait alors sans doute trop tard.
C’est pas bien de se moquer ! Mango nous montre qu’elle perception on peut avoir de la gauche quand on…