Le dernier qui s’en va éteint la lumière, chapitre 11 : « La guerre, encore et toujours seule solution envisagée pour les questions compliquées »

Le chapitre 11 de Le dernier qui s’en va éteint la lumière (à paraître en janvier) : La guerre, encore et toujours seule solution envisagée pour les questions compliquées.

Les hommes se sont toujours montrés incapables de tirer les leçons de l’histoire, nous rappelait Hegel dans son introduction à La philosophie de l’histoire :

On recommande aux rois, aux hommes d’État, aux peuples de s’instruire principalement par l’expérience de l’histoire. Mais l’expérience et l’histoire nous enseignent que les peuples et gouvernements n’ont jamais rien appris de l’histoire, qu’ils n’ont jamais agi suivant les maximes qu’on aurait pu en tirer (Hegel [1822-23] 1965) : 35).

Nous avons été incapables en des dizaines de milliers d’années de nous débarrasser de la guerre. Quand nous échouons à parvenir à la solution d’un problème politique un tant soit peu compliqué, nous retombons toujours sur elle comme la seule manière de résoudre les difficultés rencontrées. Nous sommes au contraire excellents à rebâtir sur les décombres fumants de nos dévastations.

Hegel lui-même, il faut le souligner, considérait que la guerre jouait un rôle positif en tant qu’elle permettait de raviver à l’occasion l’esprit d’un peuple quand celui-ci s’étiolait :

Pour ne pas les laisser s’enraciner et se durcir dans cet isolement, donc pour ne pas laisser se désagréger le tout, et s’évaporer l’esprit, le gouvernement doit de temps en temps les ébranler dans leur intimité par la guerre ; par la guerre, il doit déranger leur ordre qui se fait habituel, violer leur droit à l’indépendance, de même qu’aux individus, qui en s’enfonçant dans cet ordre se détachent de tout et aspirent à l’être-pour-soi inviolable et à la sécurité de la personne, le gouvernement doit, dans ce travail imposé, donner à sentir leur maître, la mort (Hegel [1807] 1941 : 23).

Que ce soit ou non pour donner un coup de fouet à l’esprit des peuples assoupis, la guerre se perpétue, plus vivace que jamais. Le plus navrant sans doute, c’est qu’il semble bien que nous nous enfoncions dans l’horreur. Nous n’avons pas encore atteint semble-t-il le stade de l’écœurement et le XXe siècle a probablement été l’un des plus belliqueux que nous ayons connus et le plus affreux certainement en termes du nombre des victimes : la Première guerre mondiale a fait parmi les militaires près de 10 millions de morts, et 20 millions de blessés, et près de 9 millions de morts parmi les populations civiles.

Nous sommes incapables, comme l’affirme Hegel, de tirer les leçons de l’histoire dans les actes que nous posons. Nous savons pertinemment à quel point il serait impératif de tenir compte de ce que les événements nous enseignent, et le philosophe le fait certainement quant à lui, mais en l’absence de tout chenal de communication menant du philosophe au Prince, les leçons de l’histoire ne trouvent qu’une sourde oreille au niveau des décisions qui sont prises.

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Hegel, G. W. F., La Phénoménologie de l’Esprit, II, [1807] trad. J. Hyppolite, Paris : Aubier Montaigne 1941

Hegel, G. W. F., La raison dans l’histoire [1822-23] (notes compilées par Hoffmeister), trad. Papaioannou, Paris : 10/18 1965

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  1. Mes yeux étaient las, bien plus que là, juste après l’apostrophe : la catastrophe.

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